⤞ Chapitre 14 || J'entends les violons chanter
C'était Zoey mais ça aurait pu être quelqu'un d'autre. Elle était amoureuse de l'idée d'aimer elle-même. Caitlin ne se rappela pas trop comment elle se retrouva à embrasser Zoey dans son studio, bien après l'extension des feux. Ça faisait des mois qu'elle n'avait pas ressenti un tel désir, un tel feu dans les veines, au point qu'elle ne parvenait plus à s'arrêter. Il lui fallait plus.
Alors elle a demandé et Zoey a répondu oui. Elle n'avait jamais fait ça mais elle n'avait pas peur pour autant. Sa confiance en Zoey était presque aveugle. Elle fit passer son pull par-dessus ses épaules, et au terme de quelques baisers supplémentaires, le reste de ses vêtements rejoignit le sol.
Le lit était un peu étroit mais cela ferait l'affaire. Bien sûr, elles n'avaient pas le droit d'être ensemble à une heure aussi tardive, et le goût de l'interdit la stimulait encore plus. Ne pas respecter le règlement valait le détour, surtout quand ça impliquait d'entendre le rire de Zoey résonner au creux de son oreille.
En s'accrochant à la chevelure de Zoey, Caitlin entendit distinctement les violons chanter la beauté du monde, pleurer les tourments de l'univers et s'extasier devant la pousse des champignons, les bourgeons des fleurs et la tombée des flocons.
C'était irréel, onirique, mais tellement plus sincère que tout ce que Caitlin avait connu jusqu'alors. Une fois que Zoey s'endormit, enroulée dans les couvertures, Caitlin se leva sur la pointe des pieds et lui prit son pull, qui était imprégné de son odeur. Elle décida d'immortaliser l'instant.
Elle alluma les bougies qu'elle gardait précieusement sur son bureau, et à la lueur des flammes, prit son bloc et ses crayons qu'elle aurait tant aimés avoir plus tôt dans la soirée.
Elle dessina d'abord le moment sur le toit, le grattement des mines de crayons se mêlant au crépitement des flammes. Ce n'était qu'une esquisse rapide pour ne pas oublier de détails. Plus tard, elle reprendra ce dessin sur une feuille plus grande et le colorera à l'aquarelle. Elle l'offrira même à Zoey qui l'accrochera dans sa chambre, chez ses parents.
Elle observa la silhouette de Zoey, avalée par la couette épaisse et apprécia la vulnérabilité émanant de ses traits. Elle prit son temps pour la représenter de la façon la plus réaliste possible, pour lui retranscrire son apparence de poupée de porcelaine le plus fidèlement possible, pour détailler les plis de la couverture et les draps défaits.
Une heure passa comme ça. La nuit avait le parfum de la nouveauté et du passé qu'on laisse derrière soi, une odeur fruitée traduisant la promesse d'un futur meilleur que ce à quoi avait imaginé Caitlin. Zoey s'agita sous les draps.
— Qu'est-ce que tu fais ? questionna-t-elle, d'une voix ensommeillée.
— Je te dessine, répondit Caitlin en se mordillant la lèvre.
— Ah. Sans bave au coin des lèvres, j'espère.
Et sans laisser à Caitlin le temps d'ajouter quoique ce soit, elle retomba dans les bras de Morphée. Elle reprit son dessin là où elle l'avait arrêté. Il lui était impossible de se recoucher sans l'avoir terminé, même si ses paupières brûlaient. Ses doigts bougeaient frénétiquement, il fallait que ça sorte, qu'elle voit la mine de graphite tracer tous les contours, qu'elle l'entende fredonner l'air que les violons lui susurraient.
Doucement, les mouvements de ses mains sur le papier ralentirent et elle eut l'impression d'avoir faire un tour de montagnes russes. Elle signa son dessin, souffla dessus et l'observa de haut en bas, satisfaite. Un jour, elle en ferait une chanson de ces violons.
A ce moment-là, Caitlin ne le sait pas encore, mais elle sera très heureuse, comme elle ne l'a jamais été auparavant.
Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top