Chapitre 27

Plume Flamboyante avait expliqué comment est-ce que Cœur de Pétale avait trouvé la cavité du Saule, et comment est-ce qu'il l'avait montré à la rousse et à Pelage d'Averse.
À l'époque, les deux chats n'avaient pas réellement cru leur ami, mais après avoir rencontré Patte de Tige, Plume Flamboyante avait été convaincue de l'innocence de la femelle brune claire.

Nuage de Calme avait récapitulé, pour être sûre d'avoir bien tout compris.

— Alors, je reprends, avait-elle soupiré, "les quatre rivières mènent au cœur de la fleur" ça veut dire que les frontières nous emmènent au Tombeau du Saule, pour qu'on trouve la cavité... "mais si la tige est trop frêle, les quatre pétales s'effondreront sur eux-mêmes" signifie que le fil qui retient l'essence de Feuille de Saule se fragilise, et les quatre pétales sont sûrement les quatre clans. Quant à "seul le Pollen pourra apporter le calme et la Racine qui sauveront le Saule", le Calme et la Racine ne sont pas moi et Nuage de Racine...? C'est ça ?

Patte de Tige avait écouté avec attention, et répondu à l'apprentie guérisseuse.

— Tout à fait.

En observant calmement le squelette en bois, Nuage de Racine avait remarqué.

— Nuage de Calme, si tu as toujours des doutes sur le fait qu'on ait rien à voir avec la prophétie, dis-toi que si la tige de la prophétie ne représente pas Patte de Tige, pourquoi est-ce que le Calme et la Racine nous représenteraient nous ?

— Qui t'as dit que j'avais des doutes sur le fait que ce qu'on m'ait dit soit la vérité ?, avait défié la novice blanche.

Elle avait lancé un regard noir à sa sœur. Peut-être que Nuage de Racine avait deviné plus tôt la vérité sur leur appartenance à la prophétie, et peut-être même que Nuage de Calme avait du mal à se dire qu'elles n'étaient pas les élues, mais ça ne voulait pas dire qu'elle devait passer pour la rabat-joie en publique.

— Je me demande en fait, avait murmuré la guérisseuse, pourquoi est-ce que le Pollen représenterait Pollen Blanc, en fait...?

— Parce que c'est elle qui a reçu la prophétie, avait remarqué Plume Flamboyante.

Durant longtemps encore, les quatre chattes avaient discuté de la prophétie, et de son véritable sens, jusqu'à ce que Patte de Tige déclare que le soleil allait bientôt se coucher, et qu'elles devraient chasser avant de rentrer au camp. Les guerrières n'avaient pu ramener que deux maigres prises, Nuage de Calme n'ayant pas véritablement aidé vu le peu d'entraînement de chasse qu'elle avait fait.
Et puis, ce n'était un secret pour personne que les proies étaient de plus en plus rares dans le Grand Cratère.

À présent, trois levers de soleil plus tard, Nuage de Calme et les autres n'avaient toujours pas retrouvé de moment pour discuter en toute tranquillité.

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— Essaie de marcher, conseilla Nuage de Calme.

Nuage de Venin se releva, et avec un petit sourire, il fit trois pas.

— J'arrive à avancer correctement depuis longtemps !, fanfaronna le novice.

La femelle tigrée leva les yeux au ciel, et lui demanda de faire une série d'exercice pour muscler sa jambe.

— N'oublie pas de te nettoyer la plaie, avertit Moustache de Verdure.

— Je le fais à chaque réveil, et à chaque fois que je vais me coucher, miaula avec une fierté mesquine le blessé brun clair. Et puis, elle cicatrise bien !

Nuage de Calme lui donna une petite tape sur la tête, et le réprimanda légèrement.

— C'est aux guérisseurs de te dire si ça cicatrise correctement ! Et en plus, elle te laissera une cicatrice !

— Je serai fier d'avoir une cicatrice !

Moustache de Verdure remarqua, avec un sourire content de sa future remarque.

— Tu en serais fier même si elle a été créée parce que tu faisais le fou sur un rocher ?

Nuage de Venin, haussa les épaules, et affirma.

— Le rocher pourrait bien se transformer par mégarde, au moment où je raconterai mes aventures, en un terrifiant blaireau !

— Si tu le dis, pouffa Nuage de Calme.

Alors que la guérisseuse blanche tigrée de gris allait déclarer qu'ils devraient dormir, la nuit étant déjà bien avancée, une longue plainte aiguë lui fit dresser les poils sur son échine. Moustache de Verdure releva sa tête et ses oreilles.

— Qu'est-ce que c'était ?, interrogea Nuage de Calme.

— Souffle de Cerise, murmura le guérisseur du bout des lèvres.

Il se reprit, comprenant soudainement.

— Ses chatons doivent arriver !

L'apprentie guérisseuse ouvrit la bouche, la laissant former un rond parfait, tandis que son mentor filait retrouver la reine dans la pouponnière. La chatte aux yeux violets se reprit rapidement, et s'élança dans la réserve de remède, sous le regard effaré de Nuage de Venin.

— Alors..., chuchota-t-elle pour elle-même, en balayant la réserve de ses yeux regroupant des plantes ici et là. De l'écorce de saule pour la douleur, des feuilles de bourrache pour la montée du lait, et du miel, récita la novice en attrapant les remèdes correspondant.

Elle sortit précipitamment de sa tanière, Nuage de Venin s'étant levé à sa suite, derrière elle. Souffle de Cerise, dans la pouponnière, était allongée sur le côté, son gros ventre étalé contre la mousse, les yeux larmoyants et la gueule ouverte, haletante. Nuage de Calme retint une grimace, et ferma une demi-seconde les yeux pour contenir son désarroi et se rendre utile.
Ça allait être la première fois qu'elle assisterait à une mise à bas.

— Nuage de Venin, sors, ordonna Moustache de Verdure en s'affairant autour de la reine.

Il attrapa l'écorce de saule, et conseilla à la future mère d'en avaler un morceau, tandis que le novice au pelage brun clair, fils de Truffe Dorée, regardait sa tante d'un œil effaré.
Nuage de Calme lança un regard plein d'interrogation à son mentor. Celui-ci, avec assurance, demanda à Souffle de Cerise d'une voix réconfortante.

— Veux-tu que quelqu'un vienne te tenir compagnie durant ta mise à bas ?

À la grande surprise de tous, la reine ne demanda ni la venue de Plume de Lierre, son compagnon, ni celle idiote qu'elle aurait pu faire dans un accès de douleur et de folie, de celle de son frère défunt, Truffe Dorée.

— Pa... Patte de Tige, gémit la femelle d'une toute petite voix. J'aimerais qu'elle soit là..

Moustache de Verdure ne fut pas surpris longtemps, et d'un signe de la queue, il indiqua à Nuage de Calme d'aller chercher la chatte que demandait Souffle de Cerise.

— Amène-moi des feuilles de framboisier, une branche, et de la mousse remplie d'eau aussi, exigea le chat brun et roux.

L'apprentie guérisseuse acquiesça, et poussa légèrement Nuage de Venin en sortant d'un pas vif de la pouponnière, emmenant avec elle le novice.

— Va me prendre la branche et la mousse, si tu veux être utile, demanda la femelle.

Et elle s'en alla vers la tanière des guerriers.

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Patte de Tige, alors qu'elle dormait d'un sommeil profond, fut réveillée par une petite voix l'appelant. Les yeux à demi ouverts, elle reconnut le pelage tigré et les yeux violets de Nuage de Calme.
Sans qu'elle ne comprenne réellement ce qu'il se passait, elle quitta la réconfortante chaleur qui émanait du pelage de Poussière de l'Aube, pour se retrouver dans le froid désagréable de la saison des feuilles rouges. Les étoiles dans le ciel étaient cachées par les nuages.

En quelques instants, Patte de Tige se tint dans la pouponnière, et elle comprit ce qu'il arrivait et pourquoi on l'avait tiré de sa nuit de sommeil.
Accroupie aux côtés de Souffle de Cerise, la femelle au poitrail de neige lui donnait des coups de langue rassurant sur la tête, tandis que la reine gémissait et souffrait. La guerrière avait l'impression d'être retournée à l'époque où Poil de Lumière et Souffle d'Or s'en allaient pour d'interminables balades, et demandaient à Patte de Tige de s'occuper de Petite Truffe et de Petite Cerise, tandis que celle-ci se faisait mal à la patte alors qu'elle s'amusait à attaquer son frère.

Sauf que Souffle d'Or et Truffe Dorée étaient morts, que Poil de Lumière avait perdu tout ce qui le définissait et n'était plus qu'un corps dénué de vie, et que Patte de Tige n'avait plus parlé à Souffle de Cerise depuis qu'elle avait réintégré le Clan.

La chatte brune claire resta toute la nuit aux côtés de son amie, à la câliner, l'encourager, et observer Moustache de Verdure et Nuage de Calme lui donner remèdes sur remèdes, l'aidant à pousser et la conseillant pour sa mise à bas. Alors que l'aube ne tardait pas à se lever, une première boule de poil apparut, bientôt suivie de deux autres.

Nuage de Calme entreprit de réchauffer l'une d'entre elle en la léchant rapidement à coup de langue, et Patte de Tige l'imita avec un autre chaton, tandis que Souffle de Cerise s'occupait de la dernière.

— Pourquoi est-ce qu'elle ne bouge pas ?, balbutia la reine avec une voix tremblotante, en arrêtant ses mouvements, poussant de la patte son enfant.

— Elle doit sûrement avoir faim, déclara Moustache de Verdure. Prends des feuilles de bourrache pour aider à la montée du lait.

Mais malgré le remède, les suppliques de Souffle de Cerise, ainsi que l'angoisse de Patte de Tige et les espoirs de Nuage de Calme, le lait n'arrivait pas.

— Quand est-ce la dernière fois que tu as mangé ?, interrogea le guérisseur, le son de la voix soudain moins confiant.

— Il y a... un... un ou deux levers de soleil, lâcha la femelle en retenant un sanglot.

Nuage de Calme secoua la tête, refusant la vérité, et prit les choses en main.

— Je vais aller chercher de la nourriture, et je la pré-mâcherai pour les petits !, annonça l'apprentie.

Moustache de Verdure retint sa novice.

— Je crois... qu'il est déjà trop tard.

Patte de Tige toucha le corps humide et tout chaud du chaton mort-né de Souffle de Cerise, en retenant un hoquet d'horreur. La mère poussa un long gémissant déchirant, qui incita son compagnon, Plume de Lierre, à rentrer dans la pouponnière, peu importe l'interdiction qui lui avait été donnée.

Nuage de Calme prépara maladroitement de la nourriture aux deux autres chatons de Souffle de Cerise. Patte de Tige, elle, exténuée et remplie de désespoir, sortit de la pouponnière d'un pas lent.
Poussière de l'Aube l'attendait au pied de la tanière, le soleil levant faisant briller le pelage brun du guerrier.

La femelle brune claire enfonça son museau contre les poils de son compagnon, laissant échapper quelques larmes, causées par les malheurs de Souffle de Cerise.
Poussière de l'Aube lui murmura à l'oreille, tandis qu'elle sanglotait, sûrement bien conscient que Patte de Tige ne relèverait pas forcément son intervention.

— Tu sais, lorsque tu t'es enfuie du Grand Cratère... Je ne t'ai pas répondue, mais... moi aussi, je t'aime.

Les larmes redoublèrent d'ardeur.



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Chapitre de 1799 mots...

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