Chapitre 15
— Ne bouge pas, Nuage de Venin !, s'énerva Moustache de Verdure.
Le novice se retourna une nouvelle fois dans sa litière, laissant échapper sa patte blessée à celles du guérisseur, en protestant.
— Mais ton cataplasme me fait mal ! Et puis je n'en ai même pas besoin pour guérir...!
— Si Moustache de Verdure ne t'applique pas de feuilles de souci, tes plaies vont certainement s'infecter, fit remarquer Nuage de Calme en apportant de nouvelles toiles d'araignées, pour recouvrir la patte du chat doré tigré.
Le guérisseur brun-roux en attrapa quelques unes, et déclara sèchement.
— Si Nuage de Venin croit qu'il n'a pas besoin d'être soigné, très bien !
Il se retourna vers son apprentie et lui ordonna.
— Montre-moi comment est-ce que tu appliques les toiles d'araignées, maintenant. On va procéder à une petite évaluation.
Nuage de Calme attrapa les toiles et essaya de les appliquer sur la blessure de Nuage de Venin, mais le novice retira sa patte.
— Je n'ai pas besoin de ton aide, Nuage de Yeux-Bizarre !, cracha-t-il.
— Laisse-toi faire et arrête de te comporter comme un chaton, le réprimanda Moustache de Verdure en soufflant.
Nuage de Calme remit en place la patte du chat doré tigré, et déposa avec précaution les toiles d'araignées sur les plaies suintant légèrement de pus. Du sang séché formait quelques croûtes ici et là.
— Il ne faudrait pas d'abord la nettoyer ?, interrogea hésitante l'apprentie guérisseuse en désignant les poils dorés qui étaient collés contre le sang.
— Je t'avais demandé de le faire, Nuage de Venin !, s'exaspéra Moustache de Verdure.
— J'ai oublié, et puis de toute façon, je n'ai pas le temps, donna pour excuse le concerné.
Nuage de Calme leva les yeux au ciel. Depuis que Nuage de Venin était arrivé dans la tanière des guérisseurs, il l'agaçait de plus en plus, et elle avait de moins en moins de compassion pour le novice, désagréable et agaçant.
— Tu n'as que ça à faire, remarqua la femelle.
— Non.
— Bien sûr que si !
Moustache de Verdure intervint.
— Si ta blessure cicatrise mal ou s'infecte, miaula le guérisseur, tu devras rester bien plus d'une demi-lune ici, sans pouvoir continuer ton entraînement martial...
Le blessé grogna un peu et souffla avec énervement.
— Alors très bien, je vais nettoyer ma plaie, si ça vous fait plaisir...!
Tandis que le chat s'y exerçait, Nuage de Calme entendit une drôle d'agitation naître dans le camp tournoyant.
— Je peux aller voir ce qu'il se passe ?, demanda la chatte blanche tigrée.
— Vas-y, autorisa son mentor.
Nuage de Calme se dépêcha de se rendre dans le centre du camp tournoyant, où Bourrasque de Jais et Étoile de Lichen discutait avec un chat étranger au clan. En s'approchant de plus près, la novice reconnu le chat blanc au pelage moucheté de noir et aux yeux bleus clairs qui parlaient avec la meneuse: c'était Courant Marin, le guérisseur du Clan Ondoyant.
Il était accompagné d'un autre chat un peu plus petit que lui, un félin roux aux yeux verrons verts et gris, qui s'avérait être Museau de Safran. Les deux chats étaient maigres et portaient tous d'eux les traces d'une grosse fatigue.
— Ah ! Parfait, s'exclama Bourrasque de Jais, te voilà, Nuage de Calme.
— Salutation, miaula timidement l'apprentie guérisseuse aux guerriers du clan adverse.
— Salutation, répondirent-t-ils.
— Une épidémie de mal blanc frappe malheureusement le Clan Ondoyant, annonça Étoile de Lichen, Courant Marin nous demande de l'aide et voudrait que l'on lui donne quelques remèdes...
Le guérisseur blanc moucheté hocha la tête.
— Nous en avons vraiment besoin, s'il vous plaît...
— Oh... heu, bien sûr, bredouilla Nuage de Calme, je vais aller voir avec Moustache de Verdure.
La femelle aux yeux violets trottina jusqu'à son antre, suivit de Courant Marin et de Museau de Safran. Elle avait bien remarqué dans les yeux du chat, toute la sincérité et le désespoir qui en émanait. Moustache de Verdure appliquait les toiles d'araignées sur la blessure de Nuage de Venin, lorsque les trois chats arrivèrent.
Le guérisseur brun-roux leva la tête, et parut étonné quand il aperçut les chats ondoyants.
— Salutation, fit-il.
— Le Clan Ondoyant a besoin de remèdes pour soigner une épidémie de mal blanc, expliqua Nuage de Calme.
Moustache de Verdure acquiesça, et partit dans la réserve de remèdes. La novice aux yeux violets s'occupa de terminer les bandages de Nuage de Venin, tandis que celui-ci saluait les deux félins venant de l'autre côté de la frontière. Le guérisseur brun-roux arriva bientôt, apportant avec lui différents remèdes.
— Je t'emmène des graines de pavot, de la genièvre et de la menthe aquatique, miaula le félin en déposant le tout par terre.
Il ajouta en poussant les feuilles vers Courant Marin.
— La menthe est un peu défraîchi, mais elle tiendra encore quelques levers de soleil.
— Merci beaucoup, Moustache de Verdure, remercia le guérisseur ondoyant.
Il récupéra les différents remèdes, aidé de Museau de Safran.
— Si jamais vous avez besoin d'aide, n'hésitez pas à solliciter le Clan Tournoyant.
— De même pour vous, répliqua Courant Marin en s'en allant.
Nuage de Venin grinça une fois les chats sortis.
— Oui, enfin on ne les aidera pas trop, ces sacs à puce du Clan Ondoyant.
Nuage de Calme leva les yeux au ciel, et Moustache de Verdure miaula.
— Occupe-toi d'apprendre à faire ta toilette sans que l'on ait à te le demander, et laisse-nous aider qui nous voulons.
L'apprentie blanche tigrée de noir se dépêcha de rejoindre les deux félins ondoyants, pour les raccompagner jusqu'à la sortie.
— Encore merci pour tout, sourit Courant Marin arrivé à l'entrée du camp tournoyant.
— J'espère que vos camarades se rétabliront vite, conclut l'apprentie guérisseuse.
Les queues rousses et blanche des deux félins venus réclamer de l'aide disparurent bientôt dans les hautes herbes de la prairie, le craquement des pas des chats s'évanouissant dans le murmure du vent, et le bruissement des feuilles mortes.
— Que voulaient-ils ?, s'enquit Plume Flamboyante en surgissant derrière Nuage de Calme.
— Des remèdes pour leur malade, ils n'en ont presque plus.
La guerrière rousse aux yeux verts hocha la tête, en miaulant.
— J'espère qu'ils ne prendront pas l'habitude de venir prendre nos remèdes...
— Ils sont en situation de crise, remarqua Nuage de Calme pour défendre les deux chats.
— Oui, sûrement.
La femelle désigna un coin sombre du camp tournoyant de la queue, abrité par des fougères et des buissons.
— Allons discuter, proposa-t-elle. Je dois absolument te faire part d'une chose.
La guérisseuse suivit la chatte aux yeux verts et s'assit à côté d'elle.
— Tu veux me dire quelque chose ?, demanda la novice.
Plume Flamboyante baissa la tête, gênée, et hésita un moment.
— C'est au sujet de Tige..., soupira la guerrière. Je sais que tu es "l'élue" de la prophétie, avec Nuage de Racine, et...
La chatte s'arrêta.
— Et...?, appuya Nuage de Calme.
— Il faut que tu saches, continua Plume Flamboyante. Tige n'est pas... contrairement à ce que tout le monde dit ou pense, elle n'est pas...
— Elle n'est pas coupable, termina la femelle aux yeux violets.
L'autre la fixa, effarée.
— Tu... tu le savais ?
— Patte de Tige n'a pas tué Souffle d'Or, affirma Nuage de Calme, mais ça n'empêche pas qu'elle est un danger pour le Grand Cratère. Tu ne devrais pas trop t'attacher à elle. On l'accuse d'avoir assassiné un chat, mais elle est juste désignée comme un danger par une prophétie...
Plume Flamboyante plissa les yeux, et fronça les sourcils un petit rictus au coin de la bouche.
— Ce... n'était pas de cette culpabilité là que je parlais. En fait... c'était même plutôt l'inverse, murmura-t'elle.
— Comment ça ?
— Oublie, soupira la guerrière en se levant.
Elle fit quelques pas, et se retourna.
— Et si jamais un jour tu t'ennuies, va faire un tour à l'intérieur du Saule avec Nuage de Racine, c'est très joli là-bas... Et puis il y aura sûrement une gentille prophètesse avec qui discuter...
Nuage de Calme cligna des yeux.
— Quoi ?
— Non... laisse... Tu n'as qu'à oublier ça aussi, fit Plume de Flamboyante en se retournant définitivement.
Lors de sa visite à la Cascade de Nuit, Plume Silencieuse avait dit à Nuage de Calme:
« Il faut que tu aies confiance en cette âme, qui comme la braise après le feu, flamboie telle un incendie bienfaiteur »
Peut-être que faire un détour à l'intérieur du Grand Saule n'était pas une si mauvaise idée...
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Chapitre de 1385 mots...
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