Chapitre 1
Depuis plusieurs heures, les coups d'épées s'enchainèrent à vive allure. Le vent siffla aux grès des coups le faisant pleurer. Au milieu de l'arène se trouvait deux hommes vêtus d'une longue tunique, rouge pour l'un et bleu pour l'autre, et des plastrons ornaient leurs poitrines. Tout d'un coup, l'épée de l'homme en bleu vola et des gouttes de sang volèrent. L'homme en bleu tomba à la renverse tandis que son épée retomba délicatement à côté de lui
- Une autre victoire pour moi messire Amir ! s'exclama l'homme en bleu
- Je vous ai déjà dit de ne plus m'appeler, messire ! réprimanda Amir
Le dénommé Amir se releva avec difficulté, sa main continuait à saigner et l'arène blanche de marbre devenait pourpre.
Le jeune homme n'était nullement inquiet de l'état de sa main, après tout, il en avait l'habitude. Amir s'entraînait avec Maître Faisal depuis qu'il sait tenir une arme. Ce dernier l'avait même élevé avec son fils Adam qui avait le même âge que lui. Pour Amir, Maître Faisal n'était pas qu'un maître d'arme, il le considérait comme son véritable père biologique. Un père dur, mais ayant un bon fond. Les deux jeunes hommes venaient de Glaviem qui est le lieu de vie des Soubi, spécialistes dans les arts de la guerre. Le palais était agité, les domestiques aux tuniques déchirées et aux visages émincés s'agitaient dans les couloirs d'or et d'argent. Des cicatrices recouvraient leurs dos, signe que leurs ailes ont été arrachées à la puberté. Ces personnes-là étaient des Elemith, un peuple ailé contrôlant la magie qui avaient fui Helpheim qui est selon les rares témoignages une prison à ciel ouvert où l'armée menée régulièrement des raides. Les insaf, originaire du royaume de Lavala, le peuple soi-disant élu par les quatre dragons, voulaient depuis la nuit des temps s'approprier la magie des Elemith et nos savoirs-faire. Au nom de cette conviction, il y a un siècle, les Insaf avaient envahi les autres royaumes, dont celui de Glaviem sous-prétexte que nous représentions une menace, brisant ainsi l'alliance d'Elpheim visant à garantir la paix sur le continent. Ils nous ont volé nos terres, notre indépendance. Le glorieux royaume, de Glaviem s'est retrouvé à la merci des Insaf et de son terrible roi Gangrel. Le grand-père d'Amir, le dernier roi de Glaviem, complètement impuissant et il avait accepté un pacte avec les Insaf. À chaque début de printemps, les jeunes femmes et hommes de 18 ans doivent servir les intérêts de Lavala en échange d'un cessez-le-feu. On nomma cela la Sélection. De ce fait, les Soubi formaient le gros de l'armée des Insaf, ils étaient postés un peu partout dans la capitale, Mipheim et dans les autres territoires contrôlés.
Rapidement, le royaume d'Asclépios où vivent les Asfral a également adopté cette convention. Le sort des Elemith représentait une part d'ombre dans l'histoire, car nous ne savions pas si Helpheim était réellement leur royaume. Ainsi se créa une nouvelle alliance, celle des Quatre royaumes. L'agitation du palais le ramena à la réalité, le bruit était représentatif du monde qui était présent. Amir se rappela que le printemps était enfin là. Il avait oublié, mais pour être honnête, le jeune prince avait voulu l'oublier. Ce printemps marqua son dix-huitième printemps, ce printemps marqua son arrivée chez ceux qui colonisent son pays. Amir devra servir sous cette bannière sanglante et tuer ses compatriotes. Il ne voulait pas, mais il n'avait pas le choix. En tant que prince, le jeune homme devait obéir sinon les Insaf allaient raser son royaume sans qu'il puisse rien faire. Alors Amir décida de prendre son destin en main et d'accomplir ce qu'on attendait de lui, d'accomplir de ce qu'on attendait de tout bon Soubi.
Sa chambre n'était que très peu décorée, des rideaux rouges avec les armoiries de Glaviem, une épée traversant un dragon étaient brodées dessus donnant un peu de chaleur à cette chambre froide et austère. Le dragon représenté n'était autre que le protecteur du royaume : Aeri
Son bouclier et son épée étaient soigneusement posés sur ses draps fraichement nettoyés. Son endroit préféré dans sa chambre était clairement la bibliothèque. Quand il fut enfant, Amir y passa toutes ses journées à écouter les histoires de sa défunte mère assassinée par les Insaf. La bibliothèque était garnie de livres de genres différents, des romans d'aventure, des romans historiques, des recueils de poèmes. Une lettre était posée sur le fauteuil. Amir reconnaissait l'écriture de son père, une écriture fine, mais grande.
Je te prie de me rejoindre à la salle du trône au plus vite. C'est urgent
Ton père
Amir rigola devant la lettre de son père. L'urgent de ce dernier ne l'était pas forcément, mais au vu du contexte, le jeune homme était obligé de le rejoindre au plus vite. Une tunique de rechange se trouva sur sa chaise de bureau et comme quasiment toutes les tuniques de cérémonie, elle était rouge bordeaux profond. Amir attacha ses chevaux noirs en une demi-queue de cheval, il effectua ce geste lentement, car bientôt le prince se les verra coupés. On toqua à sa porte et un Elemith aux longs cheveux dorées entra :
- Messire, votre père vous attend dans la salle du trône, murmura-t-il
- Très bien, j'arrive ! affirma Amir
Les murs des couloirs du palais étaient aussi blancs que du marbre, comme si le temps s'était figée à une époque. Il faisait froid, le corps d'Amir frissonna.
Les armoiries dorées de Glaviem étaient gravées dessus tandis que les rideaux rouge pourpre assombrissaient les couloirs. Ils représentaient le présent et le futur d'Amir. Les fenêtres donnaient sur les jardins vides, sans âme et unicolore du château, quand il était enfant, Amir les trouvait effrayant, ils étaient trop uniformes, trop parfaits.
Le couloir menant à la salle du trône était ridiculement trop grand, plus personne ne se rendait là-bas, la population avait perdu espoir en la famille royale. Les tableaux accrochaient sur les murs représentaient les ancêtres d'Amir, sûr au moins cinq générations.
La porte d'entrée faisait la taille de la largeur du couloir, quand Amir la poussa un courant d'air souleva sa tunique et il vit son père le roi Ismaël vêtu d'une tunique blanche. De part et d'autre du trône se trouvait deux statues du dragon Aeri. Son père et lui étaient radicalement différents. Tandis qu'Amir avait les cheveux foncés et la peau mate, son père possédait des cheveux châtains et un visage clair. Amir était grand, son père était petit. Le seul point commun étant leurs yeux noisette. Il était avachi sur son trône, son regard retransmettait une certaine mélancolie indescriptible pour Amir.
- Eh bien te voilà mon fils ! s'exclama le roi en prenant son visage entre ses mains
Le roi examina le visage de son fils pendant quelques secondes, mais ces secondes parurent une éternité pour Amir
- Tu ressembles tellement à ta mère, elle me manque tant, murmura son père
Depuis le décès de sa regrettée mère assassinée par les Insaf, le roi avait coupé tout contact avec Amir, car il voyait en ce dernier sa reine.
- Père, je ne veux pas vous voir dans cet état, dit le prince en écartant violemment les mains de son père de son visage
- Amir..., commença à pleurer, Ismaël
- Arrêtez ce cirque qui est indigne d'un roi ! Vous allez envoyer votre seul fils, votre seul enfant servir une armée qui tyrannise votre peuple et qui a tué votre femme ? Nous devons nous battre pour retrouver notre liberté ! cria Amir, le poing levé
- Mon enfant, nous ne pouvons pas, si nous le faisons, nous irons tout droit vers l'extermination, dit le roi d'un ton effrayé
- Je vois que vous ne vous souciez guère du sort de votre peuple, chuchota Amir sur le ton du désespoir - Au revoir Père, notre derrière rencontre s'effectuera demain, affirma le jeune prince en sortant de la salle du trône
Amir était allongé sur le canapé de sa bibliothèque, il profita de ses derniers instants de paix avant son départ vers Mipheim. La Sélection était prévue pour demain. Le prince était stressé à un point qu'il n'arrivait pas à manger le repas qui lui a été servi. Il repensa à sa discussion avec son père et une colère furieuse monta en lui. Le Soubi était en colère contre lui-même, contre son père, contre le roi des Insaf, contre ce monde injuste et contre Aeri qui avait abandonné son peuple. La nuit passa au gré des rafales annonçant qu'un malheur allait venir. Amir resta éveillé, ses pensées étaient bien trop bruyantes pour qu'il puisse s'endormir. Les heures passèrent ainsi sans qu'Amir ne les sentirent passées, sa notion du temps se troubla à mesure que la nuit avança. Ainsi, la chaleur du soleil le ramena dans le monde réel.
Encore une fois, une tenue était posée sur sa chaise de bureau, mais cette fois-ci, elle était bleue avec des bordures dorées, c'était une tenue de cérémonie. Une couronne dorée était posée sur son bureau. Dans les minutes qui suivaient, des servants Élemiths rentraient dans sa chambre afin de l'aider à se préparer. Amir se prépara comme à l'accoutumée, après son bain, le Soubi recouvra son corps d'une huile aromatisée à la rose tandis qu'un servant au trait fin lui attacha pour la dernière fois les cheveux en une demi-queue de cheval. Par la suite, Amir, avec l'aide des servants, enfila sa tenue et ses bottes et il déposa lui-même la couronne sur sa tête. Le jeune prince attacha à sa ceinture son arme de cérémonie, une épée à la manche dorée
- Êtes-vous prêts ? demanda un Elemith
- Bien sûr que oui ! dit Amir à haut voix
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