Juliette, Les esprits


Juliette :

C'était l'heure. Les trois jours étaient passé plus lentement qu'une semaine. Norbert s'était vite rendu compte que quelque chose n'allait pas, et j'avais dû tout lui déballer. Bien sûr, il avait essayé de me dissuader d'aller à l'avant du combat, mais sans succès. J'étais prête à tout pour Martin, quitte à me blesser. Je ne savais pas si les sentiments que j'éprouvais pour lui étaient réciproque, mais je m'en fichais. Ce qui comptait avant tout était qu'il soit encore en vie, et à nos côtés.

- J'imagine que c'est l'heure pour toi d'y aller ? s'enquit Norbert quand il fut que je m'apprêtais à ouvrir la porte de ma chambre.

Il avait dû voir mon bras briller. En même temps, il connaissait mon activité, alors ça ne servait à rien de le lui cacher.

- Oui, c'est ça. Mais je reviendrais bientôt.

- Tu me le promet ?

- Je te le promet, lui assurai-je.

Ses épaules s'affaissèrent d'un coup.

- Je n'étais plus habitué à avoir un contact avec de vrais personnes pendant plusieurs années jusqu'à ce que tu arrives, m'avoua-t-il. Mais je ne suis pas prêt à retourner dans ce vide, alors, s'il te plaît, finis ta mission et reviens vivante après !

Il me prit dans ses bras un court instant, ce qu'il n'avait fait avant. Je serai les poings. Non, il ne m'arriverait rien. Je ferai tout mon possible pour que ce soit le cas en tout cas.

- Juliette ! J'ai cru que tu n'allais jamais venir ! s'exclama Michael en me voyant. Eau commence à s'impatienter, on ferait mieux de ne pas tarder.

- Te voilà enfin ! s'écria cette dernière quand elle me vit arriver. On n'a pas toute la soirée devant nous, alors autant faire vite. Attendre trois jours a déjà été frustrant, même si maintenant on connaît tous le plan. Je ne veux plus perdre une seconde de plus.

Eau nous fit faire le même tour qu'elle avait fait avec les autres maîtres élémentaires. Les preuves du passage de Martin avaient été effacés.

Nous avions tous été silencieux durant tout le trajet. Personne n'osait parler, comme si cela pouvait nous faire repérer ou même tout faire foirer. Ou peut-être car tout le monde était concentré sur la mission cruciale que nous avions à réussir. Pour nos amis. Pour la survie de la terre.

- C'est ici, chuchota Eau. Ne faites plus de bruits à partir de maintenant, je ne veux pas que nous nous fassions repéré.

- Ne t'en fais pas pour ça, nous serons discrets, lui promis-je.

Je n'avais aucune envie de rejoindre les autres en prison, je préférai largement jouer les héroïnes. Nous avancions le plus discrètement possible à travers le chemin dans la montagne. Il n'y avait pas un seul bruit, ce qui était très déconcertant.

Comme je m'y attendais, la base de Ténèbrès se trouvait au fond de la faille. Il semblait y avoir personne, ce qui était très étrange. Où était donc le vampire et son acolyte ? Je sentais Eau reculer peu à peu derrière moi. Est-ce qu'elle avait encore un mauvais pressentiment ? Nous ne pouvions pas faire demi-tour, alors j'espérais que non.

Nous entrons dans la grotte. Elle était aménagée avec un peu de mobilier. Il y avait un bureau, deux lits et une table. Rien ne bougeait, ce qui donnait l'impression que le temps ne défilait pas. Michael me tapota doucement l'épaule. En me retournant, je m'aperçus qu'il pointait une sorte de couloir à la droite de la pièce, sachant qu'on était à gauche. Cela voulait dire qu'on allait devoir traverser la salle. Même s'il ne semblait y avoir aucune présence vivante autre que nous trois, ce lieu ne m'inspirait pas confiance. L'apprenti de la terre me regarda longuement avant de ré-indiquer le couloir. Peut-être voulait-il me dire que les prisonniers étaient là-bas. Me rappelant la mission, je pris mon courage à deux mains et me dépêchai de traverser la salle. Je ne pus respirer que lorsque j'eus atteint l'autre côté sans plus de problèmes. Il me suivit, l'esprit sur ses talons. Alors qu'on s'apprêtait à continuer notre chemin dans le couloir et laisser la drôle de salle derrière nous, une voix que j'aurais souhaité ne jamais entendre nous surpris.

- Vous ne me prévenez même pas de votre visite ? Ce n'est pas très sympathique ça.

- Ténèbrès, cracha Michael en se retournant. Ce n'est pas un plaisir de te revoir.

Le vampire se tenait au centre de la pièce, pourtant il n'y était pas quelques secondes plus tôt.

- Si tu n'étais pas prêt à voir ma tête, il ne fallait pas venir, rétorqua ce dernier.

- Rappelez-vous pourquoi on est venu ! chuchota Eau. Ce n'est pas le moment de faire la causette, on a des gens à secourir !

- Pouvez-vous parler plus fort ? demanda Terre en apparaissant du couloir.

On était pris au piège.

- C'est le moment d'appliquer le plan ! m'exclamai-je en me jetant sur Terre. Eau, dépêche-toi d'aller libérer les autres, on s'occupe de ces deux-là Michael et moi !

L'apprenti maître de la terre réagit aussitôt et sauta sur son mentor, lui arrachant la clef qu'il tenait à la main. Ce devait être celle de la prison au passage. Ténèbrès voulu lui foncer dessus pour la récupérer, mais il passa l'objet à Eau qui s'enfuit en courant. Je fis mur pour que le vampire n'attaque pas Michael, mais ne fus pas assez résistante et finis vite au sol. Terre s'empressa de m'écraser de son poids d'esprit, ce qui, je l'avoue, m'étonna. Il semblait peser au moins une centaine de kilogrammes !

Michael était encore debout, seul contre notre ennemi. Il ne pouvait pas appliquer le plan, on devait être plusieurs. Il n'avait aucune chance contre le vampire. D'ailleurs, celui-ci le lui faisait bien comprendre et s'amusant à se téléporter derrière lui pour le faucher.

- Arrête ça tout de suite ! hurlai-je à Ténèbrès, voyant les blessures sur le visage de mon ami se multiplier.

- Je n'ai aucune raison de t'écouter, ricana mon interlocuteur. Vous êtes venu chez moi, vous devez comprendre à quel point c'est une erreur. Je vous avais donné un marché. Vous ne l'avez pas respecté. Maintenant vous en payez les pots cassé. C'est la vie.

Occupé à débiter sa tirade, le vampire ne se rendit pas compte que Michael s'était silencieusement glissé derrière lui. Il avait saisi le bureau et s'apprêtait à l'abattre sur le tête de notre ennemi, mais Terre se leva soudainement et sauta sur son coéquipier.

- Qu'est-ce qu'il t'a pris de faire ça ? s'exclama ce dernier, surpris et énervé.

- Je viens de vous sauver la vie, rétorqua le maître élémentaire.

- Je n'avais pas vu. Merci beaucoup à toi. Peux-tu aller t'occuper de ton ancienne collègue Eau. Je vais en finir avec eux, on se retrouve dans une demi-heure pour le diner, ça te va ?

- C'est parfait, répondit l'ancien mentor de Michael avant de disparaître.

- Ah vous deux, grogna le vampire en se tournant vers nous. On va en finir une bonne fois pour toute, que je puisse prendre le contrôle de la terre sans problème.

Je jetai un coup d'œil à Michael. Il avait compris ce que je voulais dire. Nous nous jetions sur notre ennemi en même temps, qui disparut à la dernière seconde. Je regardai attentivement où ce dernier allait apparaitre. Cela ne rata pas. Il s'était téléporté juste derrière mon ami. Celui-ci vit mon signe de tête et fit une roulade sur le côté de justesse. L'épée passa au même endroit deux secondes plus tard. Je me jetai sur Ténèbrès, qui recula de quelques pas, ne s'attendant pas à cette réaction. Michael en profita pour se glisser derrière lui et lui faire un croche-patte. Le vampire s'étala par terre, mais je n'eus pas le temps de célébrer cette petite victoire que je le vis regarder un endroit derrière moi et il disparut aussitôt. À peine me retournai-je qu'un coup de pied au menton me fit voler à travers la pièce et je me retrouvais allongée au sol, du sang coulant de je ne sais où. En me relevant, je m'aperçus qu'il était arrivé la même chose à Michael, qui se tortillait de douleur quelques mètres plus loin.

- Vous pensez réellement que vous aviez une chance tous les deux contre moi ? Ma foi, vous vous êtes mis le doigt dans l'œil, et ça va vous coûter cher.

Je ne pus rien répondre qu'une masse s'abattit sur ma tête et m'assomma.

Les esprits :

Eau courait à travers les multiples tunnels dans la montagne. Elle avait l'impression de se trouver dans un labyrinthe. Le dédale semblait sans fin. À chaque fois qu'elle avait l'impression d'entendre la voix d'un des apprentis, elle tombait sur un cul-de-sac. « Mais où sont-ils donc ? » se lamenta-t-elle, totalement perdue. Elle n'était même plus capable de retrouver la sortie maintenant. Dire que tout le monde comptait sur elle !

- Bonjour Eau, ça commençait à faire un bout de temps, murmura une voix qu'elle ne connaissait que trop bien.

- Qu'est-ce-que tu me veux Terre ?

- Tu es chez moi, fit l'esprit. Ce serait plutôt à moi de te le demander.

- Je viens sauver mes amis, répliqua la maîtresse de l'eau.

- Et je suis là pour t'en empêcher, rétorqua son ancien allié.

Il se jeta aussitôt sur elle, lui faisant pousser un cri de stupeur. Eau se reprit rapidement et s'écarta au dernier moment, laissant Terre s'écraser lamentablement au sol. Ce dernier grogna de frustration que son ennemi est paré son coup, puis se releva et chargea de nouveau. Eau se préparait esquiver de nouveau, mais son adversaire changea de trajectoire au dernier moment pour se décaler un peu à sa droite, exactement là où Eau comptait aller. Il lui rentra dedans et la repoussa violemment.

- Donne-moi la clé maintenant. Si tu ne veux pas être encore plus blessée, je te conseil de m'écouter.

- Tu peux toujours rêver ! cracha la mentor de Juliette.

- Je t'aurais laissé une chance. Je n'aurais pas de scrupule envers toi maintenant que tu sais à quoi tu t'expose.

L'ex-mentor de Michael sauta sur Eau qui ne s'était pas encore relevée pour reprendre le clé. Cette dernière se débattit tant bien que mal, repoussant de peu son adversaire. Elle se releva aussitôt et lui envoya un crochet du droite bien placé. Terre recula de plusieurs pas, abasourdi par le choc. Voyant que son coup avait fait mouche, elle lui en remit un deuxième, puis un troisième.

- Stop ! hurla Terre, un rictus de douleur couvrant son visage.

La mentore de Juliette ne s'arrêta pas. Au contraire, elle y mit d'autant plus de force. Toute sa haine envers son ennemi était contenue dans ses attaques, qui semblaient de plus en plus intenses et répétitives.

Tout d'un coup, Terre sauta au-dessus de son ennemie, atterri derrière elle, lui prit un bras et la jeta à l'autre bout du tunnel, cinq mètres plus loin. Cette dernière percuta la roche, lui coupant le souffle.

- Tu pensais vraiment être plus forte que moi ? ricana l'esprit traitre. Finis de jouer maintenant. Donne-moi la clé ou je serais obligé de te faire du mal.

- Je ne te donnerai jamais la clé de mon plein gré. Je ne trahirai jamais les autres, mieux vaut mourir plutôt que de vivre sans honneur.

- Si on doit en arriver jusqu'à là pour un pauvre petit objet... soupira le mentor de Michael avec une moue exagérée.

Il agita les mains, et des piques de pierre sortirent du sol, enfermant Eau entre eux et la paroi de la montagne derrière elle.

- Que fais-tu ? s'indigna cette dernière.

- Je fais ce que je dois faire pour que tu ne détruises pas notre plan, fit son interlocuteur d'un ton neutre.

- Libère-moi !

- Et puis quoi encore ? Si c'est pour que tu me frappes encore et encore, tu es très bien là où tu es.

Il s'approcha d'elle et lui donna un grand coup de poing sur la tête, ce qui l'étourdie un peu. Il profita de ce court instant pour lui prendre la clé et la replacer à son endroit initiale.

- Merci de ton aide, nous nous reverrons peut-être bientôt, la nargua-t-il.

Puis il agita les mains, et de gros rochers dégringolèrent tout autour de la mentor, bouchant totalement la galerie.

Terre, lui, observa un court instant ce qu'il venait de faire puis repartit d'un pas tranquille, satisfait de son travail. Ténèbrès allait être content.

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