Chapitre 6

Tous les événements qui se déroulent autour de moi, ne semblent pas plus différents de d'habitude. Qu'espérais-je ce matin au juste ? Que mes camarades cessent de me fuir ? Ou que mon père ne m'ait pas porté cette gifle, pour avoir vidé sa bouteille d'alcool ?... Ajouté à cela une gueule de bois qui me martelait la tête, j'avais l'impression à cette allure que mon destin était déjà scellé.

La trace rouge laissée par sa main, était bien visible dans le miroir de mon casier.

- Qu'est ce que tu fais ? me demande un accent féminin.

Je remets rapidement la capuche sur mes cheveux pour cacher la marque sur ma joue.

- Qu'est-ce que tu veux Gina ? me plains-je alors que je refermais d'une force plus que nécessaire la porte en métal.

- Rien, argumente-t-elle en suivant ma forme tentant de s'échapper. Passer du temps avec toi ?

Je me taies et accélère plus la cadence. Avec ces talons elle avait du mal à me suivre. Cependant, elle ne désespère pas pour autant, accentuant par ce geste, le mouvement de ces hanches.

- C'est Nick qui m'a demandé de te parler. J'ai essayé de te joindre sur ton phone hier mais tu n'as pas voulu décrocher.

- Tu ne connais pas les sms ? Les emails ?

- Tu l'aurais supprimé sans le lire.

Je ne réplique pas parce qu'elle n'avait pas tord. Et elle en profite pour continuer :

- Nick demande si t'es libre cet aprèm pour qu'on travaille ensemble après les cours.

Protester était bien plus compliqué qu'accepter.

- Je suis bien obligée d'accepter de toute façon.

Et c'est ainsi que nous nous retrouvons dans la ''salle 204'', à quinze heures, assis de façon éparse. Chacun pas visiblement à l'aise de s'asseoir l'un à côté de l'autre, pour des raisons propres à autrui. Une certaine tension également régnait entre Gina et son frère et je ne savais pas du tout qu'elle en était la raison.

- J'ai pensé à certains arrangements hier, introduit Nick. Par contre, vu qu'on n'a pas de guitares... et que je n'ai apporté que la mienne... je vais devoir jouer tout seul pour que tu vois, s'adresse-t-il à moi.

- Je t'écoute.

Puis il amorce sa tentative musicale, ralentissant le rythme à certains endroits et accélérant à d'autres, et je devais reconnaître qu'il a fait du très bon travail en une nuit.

- Tu en penses quoi ?

- Bien, nous répondons moi et l'inconnu-dont-je-ne-connaissais-pas-toujours-le nom, à l'unisson. Subséquemment je poursuis avec: '' mais je verrai cette partie comme-ça... Quand on arrive au refrain, je suis d'avis d'arrêter la musique et de la remplacer par des tapes dans les mains.''

Puis le reste de la séance se passe en introduisant les idées de chacun. Rien de personnel n'a été évoqué et c'était tant mieux. Le travail était presqu'entièrement bouclé quand je rangeais à pas lents, mes notes et les observations dans mon sac.

- Gina, tu vas devoir fournir plus d'efforts, disait Nick à sa sœur.

- Oui, oui, je sais, ronchonne-t-elle en s'esquivant par la porte.

Il avait été décidé que Gina serait la chanteuse, toutefois après avoir écouté ce dont elle était capable, nous n'étions pas très emballés par cette idée. Mais il fallait obligatoirement que chaque membre participe. Et vu qu'elle ne savait pas jouer d'instruments, elle était bien obligée d'utiliser sa voix.

- On se voit demain ? se renseigne le dernier du groupe.

- Oui, répond Nick à ma place. Si la prof est d'accord nous testerons les instruments pour voir de quoi tu es capable.

- Je ne suis pas très bon, vous savez ?

- Ce n'est pas bien grave. Elle ne nous demande pas un travail titanesque non plus.

Il sourie un peu rassuré et s'échappe en nous disant au-revoir. Faisant de même, je marche vers la porte, mais suis stoppée par Nick adossé à celle-ci nonchalamment. Je lève ma tête pour le fixer et il me répond :

- A demain Aiden, avant de se dégager et me donner le passage.

Je ne m'attarde pas plus et me presse de rentrer chez moi. Je balance mon cartable au pied de mon lit et m'étale dessus. Je me sentais incroyablement détendu. Je pensais qu'après ma dispute de la veille avec Cardin tout me paraîtrait compliqué, mais sans le vouloir, j'étais contente de savoir que je ne l'incluais pas tant que ça dans ma vie. Je n'avais pas besoin de lui.

Dans ce silence, je discerne les vibrations de mon portable et vais farfouiller dans mon sac à sa recherche. Et c'est là que je me rends compte que je n'avais plus mon carnet. Au lieu de décrocher mon phone, je jette tout au sol à sa recherche. Désespérée, je m'adosse contre le bois et me rappelle enfin que je l'avais rangé ce matin par inadvertance dans mon casier, à cause de Gina qui était venue m'embêter. Je souffle de soulagement et me couche sur le lit dans l'espoir de le retrouver demain.

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A mon réveil, Je me précipite vers le lycée et me dirige principalement vers mon casier, dans l'espoir de trouver mon cahier. Mais rien malheureusement. Alors je tente de visiter tous les lieux où j'ai bien pu cheminer la veille, à l'heure du déjeuner. J'ai fouillé partout, demandé au concierge, aux professeurs et même fait un tour aux objets trouvés, et toujours rien. L'alarme de mon portable, rappelant le rendez-vous à la salle de musique, m'empêche d'aller plus loin dans mes recherches. J'abandonne mes tentatives et ouvre la porte de celle-ci, mécontente.

Nick et l'autre me jettent un œil rapidement, un peu surpris d'entendre la porte s'ouvrir à la volée, avant de retourner à leurs préoccupations.

- Bonsoir Adeline, m'accueille une voix féminine.

Et je tourne la tête dans un coin de la salle, pour y voir la professeur en train de faire je ne sais quoi sur son ordi. Il ne manquait plus que ça. Je n'étais pas d'humeur à la croiser.

- Salut! réponds-je pour cacher ma colère.

- Je ne vous dérangerai pas, promet-elle en reportant son attention sur l'écran. Faites comme si je n'étais pas là.

Sans demander mon reste, je vais dans la direction de mon groupe. Nick est le premier à m'accueillir:

- Nous t'attendions pour débuter.

Et l'autre va s'asseoir sur le siège en face du piano et positionne ces doigts.

- Je ne suis pas très bon, prévient-il.

- Tu nous l'as déjà dit, débute Nick agacé. Et si tu continues, je t'assure que tu te retrouveras très mal en poing bientôt, menace-t-il.

L'homme se taie immédiatement et positionne ces doigts sur le piano. Il s'en suit, dès la première touche, une note stridente à faire évanouir un corbeau.

- Je m'excuse, s'arrête-t-il immédiatement.

Reprenant, il lâche malheureusement la même note que précédemment. Il n'avait pas tord quand il disait ne pas être bon. Et le stresse causé par la menace de Nick n'arrangeait rien.

- Ça va comme ça! lui somme celui-ci d'arrêter. Je n'ai jamais eu autant mal aux oreilles. Et j'entends la professeur dans le coin soupirer de soulagement.

- On va faire comment à présent? demande Nick dans le vide. On ne peut pas avoir deux chanteurs quand même.

- Oui, vous ne pouvez pas, répond la prof à sa place. A moins qu'un d'eux joue également d'un instrument. Tout comme il est interdit qu'il y ai deux mêmes instruments dans un même groupe.

- Vous ne nous l'aviez pas dit ça, remarque-t-il.

- Oui, je sais. Je le ferai demain. Je suis tombée sur le groupe de Flint la dernière fois et ils jouaient tous de la guitare. Cela n'avait rien d'impressionnant... L'objectif de cet exercice est que chaque étudiant apprenne à faire autre chose. Je n'ai obligé personne à former de groupe de plus de deux membres. Vous pouvez tout aussi bien décider de vous diviser... C'est vous qui l'avez décidé... alors assumez.

- Vous êtes impitoyable Madame Muller.

- On me le dit souvent.

Alors le roux se tourne vers moi.

- Comment allons-nous faire ? Je ne sais rien jouer d'autre à part la guitare.

- Je vais jouer d'un autre instrument, le calmé-je. M'adressant au troisième homme, je poursuis: '' Est-ce que tu sais lire des notes de musiques ?''

- Oui, sans aucun problème.

Sortant un papier de ma poche, j'y gribouille rapidement quelques points après avoir fait des tracés.

- Pousses-toi, lui ordonné-je en m'installant à côté. Tu sais reconnaître chaque touche d'après ce que j'ai remarqué. C'est la rapidité d'exécution qui t'es compliquée. Avec un peu d'entrainement, tu t'amélioreras.

- Wow, commente Nick. Il y a une façon spéciale de jouer au piano ? Je n'ai entendu qu'un vacarme assourdissant quand il s'y est mis.

Personne ne répond à son humour et je me remets au boulot. Je place mes doigts au-dessus du piano et en un tour de main simple et rapide, mes doigts glissent de même, jusqu'à finir la partition en face. Dès que je conclus, je vois le mec à mes côtés baver hébété.

- C'est à ton tour,le coupé-je.

Puis il se met à jouer quelques notes.

- Comme ça ? demande-t-il un peu perdu.

- Oui lentement comme ça. Dès que tu seras habitué, nous augmenterons la vitesse.

Les leçons finies, nous rangeons nos affaires et il me dit :

- A la prochaine, tu m'as impressionné ce soir. Je ne te croyais pas ainsi.

Je le fixe un instant et il répond désolé. Oui, je comprenais ce qu'il voulait dire vu les rumeurs qui couraient à mon sujet.

- A la prochaine, agréé-je ses salutations.

- Mike... Mon nom c'est Mike, s'empresse-t-il de m'avouer, les mains sur les genoux.

- O-kay ?!

Il me parait bien plus bizarre que les jumeaux Alberigo.

Je sors et longe le couloir quand j'auditionne des voix familières, dans le silence qu'était devenu le lycée, à cette heure. J'étais prête à rebrousser chemin, quand une curiosité soudaine me surprend, lorsque j'ouïs mon nom :

- Tu ne pourras pas tout résoudre Gina. Pas avec Aiden, disait Nick

- Cela ne te regarde en rien. Tout ce que je te demande c'est de ne pas lui mettre les bâtons dans les roues. Le reste, je m'en occuperai.

- Tu te rends bien compte qu'elle ne t'accepte même pas comme un amico*. Encore moins comme un compagno*, vocifère-t-il

- Sì. Io so*. Mais je ferai le tout pour le tout.

- Combien de fois va-t-on se disputer sull'argumento* ?, crie-t-il, sa voix à peine perceptible. Plus le ton montait, plus l'accent italien était présent. J'étais obligée de me pencher plus en avant, pour en connaître d'avantage, quand le bruit de mon sac me trahie, en les incitant à pivoter dans ma direction.

Visiblement gênée, je ne savais pas s'il fallait me sauver ou avancer vers eux. Et malheureusement Nick me demande : Tu nous écoutais?

- Non... Non... Non, répété-je peu convaincante.

- Je ne sais pas si tu me racontes des bobards, mais ce n'est pas grave. Tu as fait du très bon boulot ce soir, me félicite-t-il.

- Euh... Merci?

- J'ai des trucs à faire, intervient Gina. ''Ciao Aiden'', s'esbigne-t-elle par la sortie.

J'en profite pour en faire de même quand une idée me traverse l'esprit, et je me retourne un instant pour demander à Nick qui n'avait pas bouger de sa place.

- Y'a un blèm ? s'intéresse-t-il

- Hier... tu n'aurais pas vu...dans la salle ?

- Quoi?, fronce-t-il les sourcils devant mon manque d'assurance. Espionner les autres n'était pas vraiment une de mes habitudes.

- Laisse tomber, me résigné-je.

Savoir qu'il était le dernier à sortir de la salle où nous étions hier, ne prouvait rien. Il ne fallait pas que je me fasse d'illusion, non plus. S'il l'avait trouvé, il me l'aurait tout de suite rendu. Ou l'aurait placardé sur tous les murs de l'école pour se moquer de moi. D'une façon ou d'une autre, il me l'aurait fait savoir.

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Le dimanche tant redouté est arrivé. Je pensais être prête et avoir tout oublié de cet incident. Du moins laissé couler. Mais plus ce jour approchait, et plus mon angoisse grandissait. Ainsi que ma colère. Et le mensonge dont je me voilais pour croire le contraire. Il était indéniable que je n'étais visiblement pas ravi de débarquer chez lui.

- Salut !, s'exclame-t-il à l'entrée.

Je réponds par un : « hmm hmm » et m'infiltre dans sa maison.

Nous allons nous installer dans l'atmosphère pesante qu'était devenue cette séance. Il ne prononce aucun mot et j'en fais de même. Puis il se tourne vers moi et envoie brusquement, assis à mes côtés dans le canapé :

- Comment était ta semaine ?

- Bien.

- La journée ?

- Bien.

Il a ainsi enchaîné des questions usuelles, qui n'avaient aucun lien avec sa thérapie. S'il voulait comme il le pensait, me guérir de cette maladie, il était mal parti..

- On ira pas bien loin comme-ça, se désespère-t-il en se frottant la nuque.

Ah bon? Et moi qui croyait le contraire?

- Plus que quarante cinq minutes et je pourrais rentrer chez moi, lui noté-je.

Il me fixe hébété. 

Mais soyons sérieux ? Pouvait-il être encore surpris? Il savait plus que quiconque que je n'étais aucunement ravie de le revoir. Il devait apprendre à encaisser, accepter et me laisser partir. J'avais vécu sans lui durant toutes ces années. Et je pourrais bien continuer sur cette voie sans son aide.

- Je suis désolé... J'avais tord sur ce coup, admet-il enfin.

- Il était temps.

S'il pensait que j'allais le pardonner avec d'aussi plates excuses, il se trompe lourdement.

- Je suis sincèrement désolé Aiden et je voudrais que notre relation revienne comme au début.

- Tu en es sûr ? demandé-je sceptique en levant un sourcil.

- Non... enfin... Pas comme au début-début. Enfin, tu vois, tâtonne t-il.

- Oui je vois, ris-je malgré moi à ces bégaiements.

Il avait l'air moins sûr d'un coup.

- Par contre j'ai une chose à exiger.

Le sourire s'évanouit, substitué par l'énervement. Il arrivait rapidement à me faire passer du rire à la colère en un rien de temps.

- Tu n'apprends jamais rien hein Cardin.

- Laisse-moi finir Aiden... Après tu pourras m'insulter comme bon te semble. Tu pourras même décider d'arrêter avec nos séances... si tu veux.

Dans le sérieux de sa voix, je devine ce qu'il voulait me demander. Une chose me disait que ce qu'il s'apprêtait à m'annoncer, ne me serait pas agréable. Mais mon cerveau s'accrochait à toutes les possibilités pouvant lui épargner, ces séances de fin de semaine de tortures mentales.

- Vas-y, m'adossé-je au canapé.

- C'est mon boulot qui fait que je m'exprime ainsi. Appelons cela une déformation professionnelle. Et sans le vouloir, je réagis de cette façon avec toi parce que je ne sais pas comment agir en ta présence... Tu ne me laisses pas te connaitre et m'approcher. Et chaque-fois que j'essaie, tu me rejettes. Malgré moi, j'ai fini par être conditionnée ainsi... Mais cela ne veut pas dire que je n'ai pas envie de t'aider.

Son discours me laisse perplexe et je sonde ses yeux pour voir s'il me disait la vérité ou me tendait un autre piège.Un degré de compassion s'était mêlé à ces mots doucement, baissant ma garde de moitié. Le genre qui paraissait trop réel pour être vrai.

- Pourquoi ? lui demandé-je dubitative.

- Y a-t-il besoin d'une raison pour vouloir aider quelqu'un ? A mes yeux toutes les vies se valent. Je te promets de fournir des efforts et de tenter de rester moi-même en ta compagnie. J'ai juste une question à te poser et j'aimerais que tu sois sincère et honnête dans ta réponse.

- Est-ce nécessaire ?

- Oui, pour moi ça l'est, se lève-t-il pour faire quelques pas. Puis se tournant vers moi, il continue: cela décidera du rapport entre nous.

- Vas-y, soupiré-je à la fois épuisée et inquiète.

- Ce n'est pas une question facile, mais... as-tu déjà pensé au suicide ?, insiste-t-il sur les dernières syllabes en passant la main derrière la nuque.

Un éclair me foudroie. C'est la première fois que j'étais confrontée verbalement à ce mot. Il était si facile de le penser. Néanmoins l'entendre prononcer était tout autre chose. N'empêche que sans détourner mon regard du sien, je lui ai fermement menti.

- Non.

Il souffle soulagé les mains sur les hanches et me sourit franchement, révélant des fossettes qui laissaient échapper un charme fou. En un instant, tout a dérapé dans ma poitrine. Mon cœur s'est mis à battre à cent à l'heure, sonnant une alarme dans ma tête qui me criait de m'éloigner très loin de lui.

C'était la culpabilité

... 

N'est-ce pas?

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Un amico: une amie

Un compagno: une camarade

Si, Io so: oui, je sais

Sull'argumento: à ce sujet

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AN: Est-ce que comme moi, quand vous commencez un nouveau projet, vous avez juste envie d'en finir au plus vite pour passer à autre chose? Je reconnais que je ne suis pas patiente. ^^


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