15 - Patrocle
— Pourquoi êtes-vous venu ? Vous voulez vous lier à moi ? Vous voulez m'utiliser comme ils ont voulu le faire ?
Il y eut un brusque changement dans la pièce.
Comme si tout mon corps prenait une autre composition parce qu'il sentait le danger.
La puissance d'Ephraim était accablante et elle grignota mes épaules. Les larmes au bord des yeux de Lilianne me rendaient complètement fou.
— Qu'est-ce que tu as dit ? murmurai-je.
Un sifflement se mit à résonner dans mes oreilles. Je luttai contre les souvenirs qui s'accumulaient à l'arrière de mon crâne. Des souvenirs depuis longtemps oubliés.
Ensevelis sous mon traumatisme.
Encerclés par mes ombres.
Enfermés par Zeke.
J'eus à peine le temps de voir Ephraim s'écarter pour essayer de reprendre son souffle.
J'eus à peine le temps de comprendre que Lilianne pleurait et que Zeke tentait de la réconforter.
Je posai ma main sur mon torse pour tenter de calmer la guerre qui avait lieu dans mon corps.
Si Ephraim réagissait comme ça, alors il savait. Il comprenait pourquoi on utilisait un Primordial à un si jeune âge contre sa volonté.
La nausée grimpa vite, mais je réussis à ne pas vomir. Je me contentai de me lever et de contourner la table. Je m'approchai de Lilianne qui me regarda avec de grands yeux. Je tombai à genoux à côté d'elle, mais mes mains ne purent se poser sur elle.
Et si...
— Lili, murmurai-je.
— Pour... pourquoi je pleure ? souffla-t-elle, ses mains sur ses joues humides.
Elle regarda Ephraim, puis moi, à genoux à côté d'elle.
On n'utilisait pas un Primordial.
C'était la loi du Premier Ordre.
On utilisait un Catalyseur.
— Lili, il faut que tu sois honnête avec nous, haletai-je, la gorge serrée, ma voix encore plus rauque que d'ordinaire.
— Pourquoi je pleure ? Je ne veux pas... Je ne veux pas pleurer.
— C'est... C'est notre faute, pardon, tentai-je de m'excuser.
— Ça n'a aucun sens ! s'écria-t-elle. Je veux rentrer. Laissez-moi rentrer. Nous ne sommes pas liés. Vous ne me devez rien et je ne vous dois rien. Nous ne sommes même pas du même Clan. Je ne veux plus vivre parmi les Clans.
Mes mains tremblantes frôlèrent son bras. Elle ne put s'écarter à cause de Zeke, mais ce dernier la tenait fermement en place.
— Que s'est-il passé dans le Clan de Zeus ? chuchotai-je. Il faut que tu sois honnête avec nous. Qu'a-t-il essayé de faire ?
— On n'utilise pas un Primordial, remarqua Zeke. On utilise un Catalyseur.
Lilianne se figea complètement. Elle se leva la seconde suivante et fit tomber sa chaise derrière elle. Elle voulut bouger, mais ma main attrapa la sienne.
Pitié. Pitié qu'elle n'ait pas été utilisée pour ça.
Pitié.
Pas ça. Pas ça. Pas ça. Pas ça. Pas ça. Pas ça. Pas ça. Pas ça.
Pitié.
Pitié.
Pitié.
Pitié.
— Patrocle, souffla Zeke. Tu n'es pas en danger. Calme-toi.
Je clignai des yeux et sentis mes ombres qui s'enroulaient autour de mon torse et de mes jambes. Je pouvais sentir mes autres compagnons se modéliser à côté de moi. Lilianne les vit et voulut s'écarter. Un de mes chiens la frôla et s'assit sur ses pieds entre nous deux. Il leva sa tête vers elle, malheureusement, elle ne fit rien. Elle ne pouvait rien faire. Elle avait trop peur de nous.
— Que se passe-t-il ? chuchota Lilianne à Zeke pour ne pas me bousculer.
— Une petite crise existentielle, rien de grave vraiment, marmonna mon jumeau.
Je fermai les yeux, mais la puissance par vague qui me venait d'Ephraim n'était pas simple à garder sous contrôle. On pouvait autant se donner de la puissance que de l'ingérence.
— Qu'est-ce qu'ils t'ont fait ? murmurai-je.
Je tirai brusquement sur la main de Lilianne et elle tomba à genoux devant moi. Zeke s'enroula autour de mes épaules.
— Doucement, ordonna-t-il.
— Rien, mentit Lilianne.
J'approchai mon nez du sien et son regard s'écarquilla.
— Dis-le, insistai-je.
— Ne dit rien, contra Ephraim.
Il me contourna et récupéra Lilianne. Il la remit sur ses pieds et l'écarta de moi. Ses doigts s'enroulèrent sur mes cheveux et il s'accroupit pour que son regard soit à la hauteur du mien.
— Ne fais pas ça, murmura-t-il. Concentre-toi sur la suite. Pas sur ce qu'il s'est déjà passé.
Il me relâcha et je mis plusieurs secondes à me redresser.
— Tu veux un câlin toi aussi ? me demanda Zeke.
Je voulus le taper, mais il était plus rapide que moi.
— Je veux rentrer, sifflai-je à Ephraim.
— Je sais, répondit-il, curieusement maître de ses émotions.
Lilianne n'avait dû rien comprendre ce qu'il venait de se passer.
— Maintenant, insistai-je.
Ephraim soupira.
— Lilianne, va chercher tes affaires. Nous bougeons.
Curieusement, elle obéit. Je réunis nos propres affaires et rangeai mes deux ordinateurs, ainsi que mon portable. Je tentai de ne pas réfléchir à tout ce que cette conversation impliquait.
— Ades risque de nous repérer si nous allons trop vite, remarqua Ephraim.
— Je n'en ai rien à foutre d'Ades, de ses manipulations ou de ses envies. Si ça se trouve, à cause de lui, Lilianne s'est fait violer !
Ephraim posa sa main sur mes lèvres pour m'arrêter. Je déglutis derrière ses doigts froids.
— Nous n'en savons rien, murmura Raim. S'il te plaît, ne te fais pas du mal autour de cette idée.
— Je te jure que je le trouverais et je le tuerais, soufflai-je. Je tuerais Zeus de mes propres mains même si je dois détruire l'équilibre des Clans.
Sa main tapota ma joue et il pressa son front le mien. Il me força à m'ancrer de nouveau avant de me laisser reculer. Je soupirai et pris le pas de rejoindre l'équipe de sécurité. Je marmonnai à Zeke de rester avec Lilianne et il accepta sans broncher. Alors qu'il ne faisait jamais rien de ce que je lui disais. Lèche-bottes.
L'équipe était prête pour bouger, même à quatre heures du matin. Tout le monde était sur le pied de guerre. Nous avions pratiquement cinq heures de vol devant nous et un peu de décalage horaire. Ça nous ferait arriver vers six heures du matin à Los Angeles. Rien d'insurmontable, mais il allait falloir que j'occupe mon cerveau dégradé.
Une fois les voitures prêtes en bas, je remontai pour chopper Ephraim et Lilianne. Ils se fusillaient du regard quand j'entrais dans la suite. Rien de nouveau. Ces deux-là allaient mettre du temps à s'accepter.
— Rends-moi mes photos.
— Non.
Je levai les yeux au ciel.
— Les voitures sont prêtes. Allons-y.
Mon équipe s'occupa de récupérer nos affaires et bientôt, nous fûmes de nouveau dans la voiture. Zeke à côté de Lilianne sur une banquette et Ephraim et moi sur l'autre. Personne ne parlait, même si j'avais envie de poser un milliard de questions à Lilianne. Elle n'était plus dans notre Clan depuis ses douze ans.
Sept années que je la cherchais, encore et encore.
Et maintenant qu'elle était avec nous, mon bonheur se disputait à ma vengeance.
Qu'est-ce que Zeus lui avait fait subir ?
Je voulais le savoir.
Je voulais en être sûr pour aller le voir et le tuer.
Le tuer de mes propres mains.
**
Dans ce Céracle, chacun porte ses traumatismes. Patrocle en fait partie. 😔
D'après vous, pourquoi Zeke est-il présent ? Dans quelles conditions est-il arrivé ? 😳
Rendez vous demain pour la suite ❤️
Taki et Ada'
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