13 - Keyser Söze
Nokomis poussa un petit cri de surprise qui se fondit dans l'exclamation effrayée de la foule. Soudain, un bruit strident éclata, et un souffle furieux la projeta en arrière.
Elle heurta le sol violemment, et perçut la morsure froide de bris de verre se ficher dans sa peau.
« La coiffe ! hurla-t-elle en se relevant avec douleur. »
La lumière cingla les yeux de Nokomis. Elle perçut le désordre autour d'elle, les gens gisaient au sol sous le coup de la déflagration et elle remarqua la figure de son père se relever difficilement. La Passeuse porta son attention sur la vitrine de la coiffe explosée en mille morceaux, une canne scintillait au milieu des débris.
« Saperlipopette ! s'écria Nokomis.
Elle scruta la salle, et la vit.
Une silhouette dans un costume noir forçait le passage à l'entrée de la salle, poussant les personnes venues porter assistance.
Nokomis démarra au quart de tour. Elle hurla à la foule de se pousser, et déboucha dans le hall.
Elle remarqua le pan du costume noir se faufiler à travers le hall, et disparaître dans l'escalier principal au fond de la pièce. Elle se jeta à sa suite malgré les appels de son père qui résonnaient derrière.
Elle gravit les marches à toute vitesse, maudissant sa robe qui la faisait trébucher par moment. Et elle prit la suite du voleur dans un hall de bois aux murs couverts de portraits, le voleur disparaissait dans une salle à gauche. Soudain, une masse lui percuta les jambes, et elle chuta violemment.
La Passeuse écarquilla les yeux lorsqu'elle frôla un poil doux et court, puis elle heurta le plancher dans un gémissement.
Puis, dans un cri se rage, elle se releva et perçut une forme jaune et basse pénétrer à toute allure dans la même pièce que le voleur. Elle piqua un sprint, et un bruit de fenêtre brisée lui fit redoubler d'ardeur.
Nokomis entra dans une vaste salle élégante où se dressait une longue table de bois cerclée de sièges rembourrés, la lumière de la lune se profilait dans le cadre d'une lucarne brisée. Elle se précipita à la fenêtre et perçut en contrebas dans les lueurs de la villa, une masse sur l'herbe et à côté, la forme identifiable de la coiffe.
L'ojibwée sursauta lorsqu'un bruit parvint de sa droite. La masse du bas semblait avoir poursuivi le voleur, mais ce dernier paraissait toujours présent dans le coin. Elle tâtonna dans son sac à main pour saisir son téléphone et activa la lampe. Sur le mur de droite, une porte de bois discrète était entrouverte.
Elle poussa la porte et scruta l'autre salle. Une enfilade de mannequins prenaient des poses inanimées dans des costumes d'époques variées. Elle se faufila entre les froufrous d'une robe à la Louis XIV et le splendide tissu d'un kimono bleu.
Elle sursauta au bruit de pas précipités qui se fit entendre en fond de la pièce, puis courut vers la source. Un long grincement se fit entendre.
Nokomis repéra la source du son, une porte dérobée à moitié cachée derrière une lourde tapisserie.
La Passeuse inspira un grand, saisit la poignée et ouvrit la porte d'un coup sec.
« Non ! s'écria-t-elle. »
Seuls les yeux livides des mannequins la fixaient dans la remise.
Elle retint un cri de rage et de frustration quand elle perçut ce qui se tenait sur le sol. Un costume trois-pièce, une fausse barbe et une perruque, ainsi qu'un chapeau haut de forme.
« Nokomis !
— Par ici, papa ! »
Lorsque son père entra dans la pièce, elle pointa du doigt les vêtements.
« On vient de se faire avoir par Keyser Söze.
— Flûte, marmonna Edgar en comprenant la référence. Ramassons-les, puis rentrons à l'Atelier.
— Et la coiffe ?
— Néfertari s'en est...occupé. »
Le sourire en coin de son père éveilla la curiosité de Nokomis. Cette dernière saisit les vêtements et actionna sa montre.
Lorsqu'elle apparut dans l'Atelier, César et la femme aux yeux verts les attendaient, et sur la table centrale, trônait la coiffe de Tlaloc.
« Vous l'avez ! s'écria Nokomis.
— Évidemment, répliqua Néfertari avec un sourire sibyllin.
— Mais comment ?
— Je suis pleine de ressources, dit-elle en tapotant son poignet. »
Nokomis plissa les yeux et scruta le bracelet d'or de la femme.
« Vous voulez dire que... ?
— Bon coupa César. À quoi ressemblait le voleur, Nokomis ?
— À quelqu'un qui regarde trop de films d'époque, ironisa la jeune fille en montrant le tas de vêtements.
— Des détails ?
— Il était rigide comme un automate lorsqu'il m'a bousculée. Mais vu le sprint qu'il a fait... Il était rapide, très rapide.
— Il n'est pas humain, asséna Néfertari. »
Un silence accueillit ses propos.
« Comment ça ? reprit Edgar.
— Il n'avait aucune odeur et aucun humain ne court aussi vite qu'Ânkhti.
— Ânkhti ? questionna Nokomis. »
Néfertari lui offrit un sourire et tendit son bras droit. Nokomis écarquilla lorsqu'elle vit le bracelet tomber sur le sol, et le guépard d'or onduler. Le métal fourmilla un instant, et en quelques secondes il grossit, puis se dissipa en un poil jaune et noir.
La Passeuse regarda abasourdie le guépard bailler de tous ses crocs, pour ensuite se frotter avec grâce au mollet de sa maîtresse.
« C'était donc ça... marmonna la jeune fille.
— S'il n'était pas humain, qu'était-il ? reprit Edgar. Un esprit ?
— Non, ce n'était pas un esprit ni un dieu, il ne dégageait aucune magie. »
Le groupe resta un instant silencieux, réfléchissant à l'identité du voleur.
« Quoi qu'il en soit, reprit César, je vais mettre la coiffe en lieu sûr, dans le sous-sol. Cela va me demander une forte dose de magie, alors Edgar, Nokomis, je vous laisse aux soins de Néfertari. »
Edgar hocha la tête.
« Bon ! s'exclama Nokomis. Vous avez dit avoir des informations quant... »
La jeune fille sursauta lorsque le bruit de la sonnette retentit. Elle fixa son père, aussi surpris qu'elle.
« Je vais voir, décida-t-elle.»
Elle quitta l'Atelier et entra dans le vestibule. En ouvrant la porte d'entrée, une figure rousse se dessina.
« Bonsoir ! s'écria Moira. Comment vas-tu ?
— Bonsoir, je... je vais bien. Et vous ? »
Nokomis déglutit en voyant le regard de sa voisine s'appesantir sur sa robe.
« Très bien, merci, reprit-elle l'air de rien. Navrée de te déranger, mais je pensais à ton idée de site web, et je dois dire je suis assez emballée par le projet. Donc, si jamais tu as besoin d'aide, je suis là !
— Oh ! Merci beaucoup !
— Tu veux en discuter maintenant ? questionna Moira en soulevant un plat enrobé dans un torchon. J'ai fait un brownie.
— Euh.... Et bien c'est-à-dire que... »
La voix de Nokomis mourut brusquement devant la mine de Moira qui venait de se décomposer en un instant. Le regard gris de sa voisine fixait d'une manière effrayante l'arrière de la jeune fille. La Passeuse se retourna lentement, et sursauta en voyant la figure de Néfertiti. Elle ne l'avait pas entendue.
« Tu sais quoi Nokomis, le moment est peut-être mal choisi, reprit Moira en un petit rire nerveux. Pourquoi ne pas se voir demain ? Ou après-demain ? Sinon, tu peux venir à la maison quand cela te chante, elle t'est toujours ouverte.
— D'accord, merci. »
Sa voisine lui adressa un geste de la main, puis s'en retourna d'un pas lent chez elle.
« Vous la connaissez ? questionna Nokomis en refermant la porte.
— Non. »
Nokomis hocha la tête peu convaincue et suivit la femme jusqu'à l'Atelier.
Edgar les attendait, du thé et des gâteaux posés sur la table.
« Alors ? C'était qui ?
— La voisine Moira, elle me proposait son aide pour mon site web.
— Super !
— Oui, oui, marmonna l'ojibwée en fixant Néfertari.
— Bon, reprit Edgar en même temps que son sérieux, il est l'heure des révélations. Dites-nous ce que vous savez, et ce que vous voulez.
— Je sais où se trouvent tous les objets que vous recherchez. »
Edgar haussa un sourcil tout en sirotant son thé.
« Comment ?
— J'ai beaucoup d'amis, dans bien des dimensions, s'amusa Néfertari en croquant dans un biscuit.
— Je vois... Qu'est-ce que les Passeurs peuvent donc vous offrir ?
— Une aide pour localiser certains objets qui échappent à mes amis. Et une aide pour les récupérer, éventuellement.
— Quels objets ?
— Deux médaillons d'obsidienne. »
Edgar claqua la langue.
« De l'obsidienne ?
— C'est tout ce que vous avez besoin de savoir. Vous avez besoin de moi pour empêcher la fin du monde, donc deux petits médaillons en échange, c'est peu cher payé, non ?
— En effet, grinça le Passeur. Allez-y, nous vous écoutons. »
Néfertari but une gorgée et se cala confortablement dans son siège.
« Si je vous disais que l'un de mes amis était en possession, il y a encore peu de temps, de la Balle de Xolotl et du Colibri de Hutzilopotchi ?
— Un ami... ? fit Edgar en se redressant.
— Oui, un esprit qui préfère rester discret pour l'instant. »
La femme se pencha pour saisir de quoi écrire et griffonna des coordonnées.
« Vous le trouverez ici. »
Edgar regarda le papier.
« Amérique de Nord, près de la frontière canadienne, à l'Est
— Touché, sourit Néfertari. Attendez-le là-bas, il viendra à vous. »
Edgar inspira profondément. Cette femme était étrange, pour sûr. Il n'arrivait pas à déterminer s'il s'agissait d'une mage très puissante, ou bien d'autre chose. Son petit tour de passe-passe avec son bracelet n'était pas à la portée de beaucoup de magiciens, ni même de sorbiers. Pourtant, elle ne ressemblait en rien à un esprit.
Edgar se frotta le nez et fit signe à sa fille de se préparer.
César faisait confiance à Néfertari, ce qui était assez rare pour le noter. Mais sa recherche de médaillons d'obsidienne ne le rassurait pas. Seuls les sorciers et sorcières traitaient avec l'enchaînement d'esprits ou d'âmes.
Néanmoins, le scarabée de son collier évoquait plutôt une magie positive et protectrice, surtout lié à l'origine de la femme, indubitablement égyptienne. De plus, le lapiz lazuli qui composait le scarabée, appelait à un souci de la santé d'autrui et des personnes seules, sans oublier sa forte protection des mauvais sorts et malédictions.
La Passeur reposa son attention sur le bracelet d', puis sur les yeux verts de la femme. Elle était très féline dans son attitude et sa silhouette.
Edgar esquissa un sourire, une idée venait de germer dans son esprit.
Mais pour l'heure, il devait retrouver les objets des dieux aztèques.
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Hey !!
J'espère que le chapitre vous a plu !
Pour ceux qui se demandent qui est Keyser Söze, regardez Usual Suspects de Bryan Singer. Un incroyable film policier ! ;)
Néfertari est bien mystérieuse. A votre avis, qui est-elle ?
N'hésitez pas à laisser un petit commentaire et/ou une petite étoile, si le chapitre vous a plu, c'est toujours encourageant !
Merci de votre lecture jusqu'ici !!! :D
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