16 mai 2024 vingt heure, paris.

Les noms sont lentement égrainés par le sélectionneur national dans son micro ce jeudi midi là. Il sait que la France a pour partie les yeux rivés sur lui, mais particulièrement la cinquantaine de joueurs qui pensent avoir le niveau pour intégrer le fleuron du football national. 

Didier Deschamps prononce alors sept mots qui feront certainement débat, comme tous ceux qu'il dira dans les prochaines minutes. Il s'y est habitué avec le temps. 

— Gardiens : Alphonse Areola, Mike Maignan, Brice Samba.

Il marque une légère pause avant de reprendre sur le même ton que celui qu'il utilise pour chacune de ses listes depuis ce mondial deux-mille quatorze où il a dû donner sa première liste pour une compétition internationale de taille. Il reprend de la même voix remontant lentement le terrain. 

— Défenseurs : Jonathan Clauss, Théo Hernandez, Ibrahima Konaté, Jules Koundé, Ferland Mendy, Benjamin Pavard, 

16 mai 2024 vingt heure dix, milan.

Un soupir de soulagement échappe à Benjamin quand son nom s'élève des lèvres de son sélectionneur. Après ses difficultés lors du mondial précédant, la crainte de ne pas être sélectionné pour l'euro l'avait suivi jour après jour. Alors l'entendre dire son nom un peu moins de deux ans plus tard, c'était tout ce qu'il désirait. Cela signifiait que Didier avait compris que son coup de mou à Doha n'était pas lié à la durée du mondial, mais à un problème extérieur. Et après s'être retrouvé auprès des siens et s'être fait aidé, Benjamin allait mieux. Il était prêt à tout affronter.

Il écoute à peine les autres noms prononcés. Si on lui demandait en cet instant qui sont les autres sélectionnés à l'euro qui va se dérouler, Benjamin ne pourrait citer que les autres défenseurs dont les noms étaient sortis avant le sien. Il n'a aucune idée des milieux et attaquants, même s'il serait très étonné s'il n'y lisait pas les noms d'Antoine ou Kylian, entre autres.

Benjamin s'endort comme une masse ce soir-là, lui qui ne dormait plus correctement depuis trois semaines, et de pire en pire à l'approche de cette date fatidique. Il rêve alors de trophée et de célébrations jusqu'au bout de la nuit. Il rêve de paillettes dorées tombant sur son corps trempé par la pluie un soir de juillet deux-mille-dix-huit. Il rêve de victoires et de joie, d'amitié et de festivités. Et quand il rêve, la déception et la douleur de deux-mille-vingt-deux semble enfin enterrée.

— William Saliba, Dayot Upamecano.

Alors qu'il termine de prononcer le nom du dernier défenseur. Didier fait glisser ses doigts sur la fiche où tous les joueurs sont listés par ordre alphabétique des rôles. Il attend quelques secondes même s'il sait qu'il n'aura pas de questions tout de suite, laissant une légère pause aux journalistes avant de reprendre avec son milieu de terrain.

— Milieux de terrain : Eduardo Camavinga,

16 mai 2024 vingt heure douze, madrid.

Eduardo est particulièrement stressé alors que les noms de l'intégralité des défenseurs ont été annoncés. Certes, il n'est pas un défenseur, mais c'est là que le sélectionneur de l'Équipe de France l'a fait jouer à plusieurs reprises. Alors, quand son nom n'est pas prononcé à la fin des défenseurs, il a peur que cette fois-ci, il ne soit pas de la partie. Il tente déjà de se consoler en se disant qu'il a tout à fait l'âge pour jouer lors des Jeux olympiques à domicile. Mais, lui, ce qu'il veut, c'est l'équipe senior, la A, la meilleure, pas celle des jeunes, même si la compétition sportive par excellence à domicile reste très tentante. Il se fait également peu d'espoirs sur celle-là, le Real n'ayant pas l'air particulièrement coopératif pour la libération des joueurs.

D'ordinaire, ils sont toujours prévenus en avance, ça a d'ailleurs été le cas d'Aurélien qui était arrivé tout fier à un entrainement et Eduardo n'avait pas tardé à en comprendre la raison. Mais il avait de son côté perdu son téléphone, le troisième depuis le début de l'année. Cette fois-ci, il pensait l'avoir oublié dans les vestiaires de l'équipe adverse mais elle n'avait rien retrouvé. Il n'avait pas eu l'occasion de récupérer une nouvelle carte sim. Eduardo appartenait en effet à cette génération effectuant tout sur son téléphone. Il n'avait donc ni fixe, ni ordinateur pour signaler sa perte et plus non plus de téléphone pour le faire. Cela avait pris un peu de temps avant qu'il arrive à le faire avec un de ses coéquipiers. La conséquence de cette énième perte était qu'il était donc injoignable depuis quelques jours, ces jours où ils avaient tous été mis au courant. Le stress était donc décuplé. 

Quand son nom s'échappe de la bouche de Didier Deschamps, un cri de joie retentit dans son salon. Il allait pouvoir découvrir l'euro, cette compétition que la France n'avait pas gagné depuis vingt-quatre ans. Il est infiniment heureux et encore plus quand il découvre les noms des jeunes de l'équipe de la capitale française qui seraient normalement du voyage. Avec l'arrivée Warren, il ne serait pas le plus jeune. Et ne pas être le plus jeune, ça allait certainement complétement changer sa vie, parce qu'alors, il ne serait plus surprotégé comme il pouvait l'être par ses coéquipiers alors qu'il avait quand même vingt-et-un ans !

— Youssouf Fofana, Antoine Griezmann, 

16 mai 2024 vingt heure treize, madrid.

Antoine n'est pas devant sa télévision en ce jeudi soir. Tout d'abord parce qu'il est en train de se faire cuire des pâtes dans lesquelles il compte bien mettre la bolognaise qu'il finit de préparer. Une deuxième raison est que Didier lui a annoncé quelques jours plus tôt que, bien sûr, il était pris et qu'il ne se fait pas de souci car il n'y a strictement aucune raison que son sélectionneur qui compte toujours sur lui change subitement d'avis. La troisième est qu'en parallèle, il est en train de lire un article sur les derniers sélectionnés du pays hôte. 

Pendant plusieurs jours, Antoine s'est amusé à suivre les diverses annonces de la fédération allemande et il veut savoir si le nom d'Hummels annoncé la veille au soir dans une émission de télévision est réelle ou le pire canular qui ait pu être fait. D'après ce qu'il a lu, la chaine de télévision a l'air plutôt tournée sur l'humour, et tout laissait à penser avant cette annonce en début de soirée que le défenseur de l'équipe les ayant sortis de la Ligue des champions ne serait pas pris. Si ce n'était pas le cas et qu'il figure réellement dans l'équipe, cela aurait été un secret particulièrement bien gardé. Il avait tenté d'obtenir des informations auprès d'Axel qui parlait très bien allemand après plusieurs années passées là-bas. Il lui avait juste répondu que les habitants outre-Rhin semblaient perdus entre réalité ou farce, même s'ils rappelaient souvent le peu de sérieux de la chaine. Mais l'absence de démenti ou de validation en parallèle mettait malgré tout le doute. 

Le blond quitte sa viande hachée quelques secondes et parcourt le récapitulatif des différentes annonces dans l'ordre d'apparition en souriant. La même chanson résonne sur chaque vidéo alors que le joueur est annoncé. Il ne comprend aucunement les paroles mais comprend qu'il s'agit de celles d'un certain Peter Schilling quand il arrive à l'annonce de Maximilian Mittelstädt faite par le chanteur en personne. 

Il lance les dernières courtes vidéos qu'il n'a pas vues au cours des derniers jours puis se retrouve sur la liste attendue par les locaux du tournoi. Il la parcourt rapidement pour arriver à la conclusion que, parfois, certains font des blagues pas forcément drôles. Il peut malgré tout comprendre l'envie. Il se demande s'il aurait fait de son côté la même chose que celui portant le numéro treize chez leurs potentiels futurs adversaires : faire sa propre annonce pour qu'elle soit démentie par l'équipe communication de la fédération en catastrophe. Antoine se dit que l'idée aurait été diablement tentante et puis s'il l'avait fait, Didier ne lui en aurait certainement pas voulu d'avoir essayé d'un peu s'amuser.

— N'golo Kanté, Adrien Rabiot, Aurélien Tchouameni, Warren Zaïre-Emery.

Didier finit d'énoncer son milieu. Si on lui demande ses joueurs préférés sur un terrain, évidemment qu'ils appartiennent à cette strate. Après tout, c'est là qu'il a joué pendant des années. C'est aussi là qu'est son joueur préféré tout court, mais il ne peut évidemment pas le dire, sinon il en aurait vingt-quatre jaloux.

Il finit par l'attaque où il est fier de la petite surprise qu'il a prévue, même s'il sait très bien qu'une fois de plus, cela sera certainement la partie la plus débattue. Après des années à se faire embêter à chaque conférence sur le cas Benzema, il avait fallu qu'Alexandre Lacazette fasse une bonne saison et que tout le monde le veuille à nouveau. Par tout le monde, il entend bien entendu surtout les supporters de l'Olympique Lyonnais, le moins bon des deux olympiques. 

Il se retient de faire une remarque avant d'annoncer sa liste, car il a sur le bout de la langue qu'il ne veut pas de remplaçants incapables de poser leur cul sur le banc en se taisant. Aujourd'hui, comme à chaque fois depuis dix ans, Didier choisit de se taire et de rester diplomate quand il termine de donner ses noms.

— Attaquants : Bradley Barcola, Kingsley Coman, Ousmane Dembélé, Olivier Giroud, Randal Kolo Muani, Kylian Mbappé et enfin Marcus Thuram.

voilà, vous avez le trio de choc autour de qui ça va tourner :) 

un c'est parce que c'est (de très loin) mon joueur pref chez les bleus. un pour le lien à l'allemagne qui va me permettre des trucs cools. un parce qu'il fallait du sang neuf dans l'affaire pour toucher une autre partie de l'équipe.