Survol
Finalement, le vortex bleu se dissipa et devant le vaisseau apparut Aghadol, planète grisâtre aux nuances d'un bleu terne, peu éclairée par sa distante étoile blanche, et dont d'immenses orages balayaient la surface. L'endroit semblait particulièrement inhospitalier, et donc parfait pour y installer un laboratoire expérimental secret. J'observais l'astre tandis que le pilote automatique nous positionnait sans difficulté en orbite, et un frisson me parcouru. J'avais beau connaître bien des lieux dangereux, l'idée que des mondes à ce point terrifiants soient légions dans la galaxie me faisait frémir. Zadorov vint observer la planète à mes côtés et fit remarquer d'un ton sarcastique :
« Avec des horreurs pareilles, on se demande bien pourquoi il y aurait besoin d'explorer d'autres dimensions. Y a déjà bien assez à faire chez nous en terme de mochetés qui veulent notre peau pour pas qu'on aille en chercher autre part.»
Je m'autorisais un sourire devant cette remarque avant de répondre :
« Nos mochetés à nous ne doivent pas être assez excitantes pour les scientifiques, il leur en fait toujours plus !
- J'imagine à peine le travail des dimensionautes. Aller comme ça dans une autre dimension pour l'étudier alors qu'on en sait presque rien...
- Je dois avouer que notre dimension me plaît bien trop pour que je décide d'entrer dans un de leurs portails spatio-dimensionnels-trou de vers je-ne-sais-quoi.»
La technicienne approuva, continuant d'observer la planète. Nyalda fit observer, tout en se préparant :
« Je sais que c'est pour préserver le secret, mais je me plaindrai pas s'ils construisaient leurs labos sur Zegema Beach. On combattrait des bestioles dimensionnelles tout en se chauffant les écailles à la plage, parfaite alliance de l'utile et de l'agréable. »
Grundak, toujours la première à renchérir lorsque Nyalda affirmait quoi que ce soit, le taquina :
« Évidemment que toi tu voudrais te la couler douce, t'es déjà le premier à te faire porter pâle dès qu'il y a des corvées.
- Eh !
- Et la plage, quel manque de goût ! Les gens cultivés vont dans la jungle, il fait chaud, humide, et au moins les plantes sont pas ennuyantes à mourir. »
Trysion saisit alors les deux par le col alors même que Nyalda faisait près de trente centimètres de plus que lui, et les amena près de sa tête avant de chuchoter à leur oreille :
« C'est la montagne ou rien.»
J'observai leurs chamailleries bon enfant en souriant, sans intervenir, tout en gardant un œil sur les instruments de navigation. Malgré notre mise en orbite et approche progressive du laboratoire, aucun signal ne provenait de la planète. Le laboratoire y était la seule installation connue, et avait bel et bien cessé d'émettre. Tandis que la conversation sur le meilleur lieu où partir en vacances continuait, un consensus semblant s'établir autour du fait que les Fjords étaient "très jolis", je haussais légèrement la voix :
« On est en orbite de Aghadol et on va entamer la descente dans l'atmosphère. Asseyez vous.»
Suivant immédiatement les ordres, les soldats se mirent à baisser leurs sièges et à attacher leurs harnais. Kalixi, en sa qualité de second'e informel'le, me rejoignit tandis que je m'asseyais dans le siège du pilote, et prit le siège de copilote. Ils poursuivirent cependant leurs discussions. 'Kan, un Epmacoppih rougeâtre dont les écailles étaient toujours légèrement humides et Holoq, humanoïde couvert d'une fourrure blanche, se mirent à conjointement défendre les mérites des bases lunaires sans gravité artificiellement renforcée.
Le vaisseau se mit alors à descendre doucement dans l'épaisse atmosphère. Tandis que l'air se densifiait, les grondement de tonnerre devenaient de plus en plus audibles, jusqu'à faire vibrer la coque. Des éclairs immenses illuminaient régulièrement l'habitacle, et j'augmentais légèrement les boucliers afin de ne courir aucun risque. Un vent violent sifflait au passage du vaisseau, tandis qu'une forte pluie s'écrasait contre la vitre avant de rebondir immédiatement grâce au revêtement hydrophobe. Les discussions sur les vacances s'étaient tues, remplacées par des commentaires sarcastiques sur la météo.
La surface apparut enfin sous les nuages, et malgré l'épaisse pluie, il nous était possible de distinguer les grandes étendues rocheuses vides qui semblaient constituer l'essentiel du paysage de cette planète. Aucune rivière ne courrait à sa surface, et toute l'eau semblait couler dans les nombreuses crevasses qui scarifiaient le paysage. Seuls signes de vie sur Aghadol, des surfaces de quelques centaines de mètres carrés étaient recouvertes de lichens et mousses noires ainsi que de quelques petites plantes sphériques tout aussi sombres. Aucun animal ne semblait parcourir ce paysage hostile, et la quasi absence de lumière en raison de l'éloignement de l'étoile et de l'épaisseur des nuages n'aidaient pas à distinguer d'éventuelles créatures. Peut-être existaient-ils des systèmes de grottes cachés sous la surface, mais j'avais le sentiment que quoi qu'il s'y cacherait, cela hanterait les rêves de n'importe qui durant des années.
Le pilote automatique indiqua que nous nous rapprochions du laboratoire, qui n'était plus qu'à quelques dizaines de kilomètres de nous. La sensation de froid et de crainte qui me parcourait devant la désolation que nous survolions ne semblait cependant pas avoir particulièrement atteint l'escouade, qui continuait à plaisanter ou à se préparer, et Kalixi surveillait les équipements avec assiduité. Il me semblait que la pluie me glaçait les os alors même que je me trouvais dans un habitacle hermétique et chauffé. Les sarcasmes de Nyalda sur l'envie d'effectuer une mission à la plage me revinrent en tête et m'arrachèrent un sourire, tandis que j'annonçai :
« Encore trois minutes avant notre arrivée au laboratoire. Est-ce que tout le monde est prêt ? »
Une réponse positive générale me vint de l'arrière du vaisseau.
« Commencez à enfiler vos masques à oxygène, on est bientôt arrivés.»
La majorité d'entre eux se mit à mettre son masque, sans le déclencher, et à régler les différentes sangles entourant le crâne afin de l'ajuster. Zadorov affirma :
« Si vous avez besoin, il y a des piles d'oxygène concentré dans la caisse juste là. Faites attention à en avoir assez.»
Quelques uns se penchèrent en avant et en sortirent quelques petits disques métalliques, de deux ou trois centimètres de diamètre, avant de les mettre dans leurs poches. Une seule pile pouvait tenir près de six heures, autant en avoir sur soi par sécurité. Finalement, je distinguait la forme d'un bâtiment à l'horizon.
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