Quelque Chose

De longues minutes continuèrent de passer, et l'état de Trysion se dégradait à vue d'œil. Ses tremblements devenaient violents, ainsi que ses crampes. Sous son masque à oxygène, il était possible de voir ses yeux légèrement jaunis et sa peau pâlir de minute en minute. Je décidai de faire quelques heures de pause afin d'attendre une possible réponse sur l'écran. Chacun s'assit alors, Zadorov continuant d'observer son échantillon de cristal et Kalixi de tenter de comprendre ce qui se passait. Après trois heures régulièrement ponctuées des grognements de douleur de Trysion, le malade se mit à hyper-ventiler tandis qu'une nouvelle crise d'hallucinations le prenait. Il se remit à reculer contre les cristaux derrière lui, criant à nouveau la même chose :

« Les régulateurs ! Les régulateurs ! »

Tandis que d'autres tentaient de l'immobiliser, il les repoussa violemment en hurlant. Ses cris s'étranglèrent soudainement et il se mit à tousser violemment, d'une toux grasse, malsaine. Visiblement plus en pleine possession de ses esprits, il retira son masque afin de prendre une grande inspiration. Son état était encore plus inquiétant maintenant que son visage était visible. Sa peau était d'une blancheur maladive tirant sur le jaune, et de grosses cernes violettes s'étaient creusées sous ses yeux. Son visage luisait d'une sueur abondante provoquée par une violente fièvre et ses cheveux trempés se collaient en de grosses mèches grasses. Une sorte de filet d'une morve jaune coulait de son nez, et le même mucus entourait en partie ses yeux, tout en sortant des commissures de ses lèvres. Pris d'une nouvelle quinte de toux, il cracha au sol un glaire du mucus jaune avant de tomber à genoux, tremblant et s'arrachant des cheveux. Ces derniers semblaient d'ailleurs partir bien trop vite et en bien trop grosses poignées.

J'ordonnais immédiatement :

« Ne touchez pas ce qu'il a craché, et tentez de l'immobiliser sans avoir de contact physique peau contre peau. Faites lui remettre son masque, on ne sait toujours pas ce qu'il y a dans l'air ! »

Alors que les autres l'approchaient, Trysion se calma soudainement. Il afficha une expression d'intense fatigue et d'une douloureuse confusion. Kalixi affirma :

« Quoi qu'il se passe, le cerveau est atteint. Mes tests ne donnent aucune efficacité à un quelconque médicament, je ne sais pas comment intervenir.»

Le soldat resta à genoux avant de dire faiblement :

« Je ne sais pas ce qu'il m'arrive... J'ai des pensées qui me viennent, mais ce ne sont pas les miennes, j'ai l'impression qu'il y a... Quelque chose autour de nous.»

Je jettais un coup d'œil à la pièce, et la même sensation étrange qui m'avais pris alors que nous étions encore dans le hall me percuta soudainement, me faisant descendre un frisson glacé dans la collone vertébrale. Trysion n'était pas seul à le sentir. Quelque chose était là. Autour de nous, en permanence, mais dans le même temps toujours absente. Impossible à décrire, à définir, impossible d'y mettre des mots, fugace mais insistante. Quelque chose qui titillait les sens, cette sensation d'être observé, cette impression que quelque chose respirait dans mon cou. Mais quelque chose était là. Ou quelqu'un ? Plus je laissais mon esprit vagabonder à étudier cette sensation qui, je le réalisai alors, ne m'avait en réalité pas quitté depuis notre arrivée, plus elle devenait insistante. Quelque chose était là. Une présence. Une ombre, attendant en permanence au coin de l'œil, à la limite de notre perception, et disparaissant sitôt que nous y prêtions attention.
Quelque chose
Était

Quelque chose
Était

quelque chose
était

quelque chose était là quelque chose était là quelque chose

« Yun ? »

La brume qui avait envahi mon esprit l'espace d'un instant se dissipa et je tâchai de retrouver le cour de mes pensées en secouant légèrement la tête. Je constatais que Trysion avait remis son masque et était maintenant attaché, sous la garde de Nyalda et Grundak.

« Yun ?  » insista Kalixi.

Je me tournais vers ellui, toujours légèrement confus. Iel me montra l'écran. Dessus, un petit point rouge clignotait, indiquant qu'un message était arrivé. L'excitation me saisit immédiatement, chassant ces pensées obsessives qui m'avaient pris, et je m'approchai alors. Je regardai Zadorov avec une expression interrogative :

« Il vient d'arriver ?

- En tout cas ça ne doit pas faire plus de deux minutes.

- Bien, ouvrez le dans ce cas.»

Zadorov tapota sur l'écran, et un très court message s'afficha : "Survivants Lab 6". Je m'approchai légèrement pour m'assurer que j'avais bien lu avant de reculer.

« Kalixi, plan.»

Kalixi saisit un petit projecteur holographique et le posa sur le sol, tentant de le garder droit malgré les cristaux, et projeta un plan du laboratoire. Le laboratoire 6 était à plusieurs centaines de mètres de nous, et demanderait à traverser plusieurs fois ces couloirs reliant les bâtiments entre eux, dans lesquels il n'y avait aucune issue possible en cas d'attaque. Cependant, avec une préparation efficace et surtout une connaissance de chemins alternatifs en cas de problème, il serait possible de s'y rendre relativement rapidement, possiblement en moins d'une heure. Je hochais légèrement la tête et allais vers l'écran avant de taper et envoyer :

« En chemin »

Il restait cependant une question importante. Que faire de Trysion ? Dans son état, il était incapable de se défendre, et allait de façon plus que probable nous ralentir. Cependant, les survivants du laboratoire disposaient peut-être d'informations utiles sur ce qui l'affligeait, et peut-être même avaient-ils un traitement ? Je soupçonnais de plus en plus sa maladie d'être un processus de transformation en l'une des créatures que nous avions rencontré, et j'avais conscience que le temps nous était compté. Cependant, si un traitement existait, peut-être était-il possible, si administré suffisament tôt, de sauver les personnes infectées ? Cela valait le coup d'être tenté. De plus, peut-être son état d'infecté allait-il dissuader les créatures de l'attaquer, et sa lenteur en cas de poursuite pourrait donc ne pas le condamner immédiatement ? Je me tournais vers l'équipe :

« On va aller au laboratoire 6. Postes normaux, escorte de Trysion par Nyalda et Grundak. S'il commence à crier ou s'agiter, assommez le immédiatement. À l'extérieur, nous n'aurons pas le loisir d'être détectés. Tout le monde est prêt ? »

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