Chapitre 45


Nous commandons nos plats au serveur qui revient puis gardons le silence. Nous ne nous regardons pas. C’est trop dur pour moi de lever les yeux vers son visage. Puis je décide de prendre les devants.

- Raphaël, je dois te parler.

- Moi aussi.

Mon courage s’envole en entendant sa voix, et j’hésite. C’est dur de prendre cette décision. Et s’il regrettait d’avoir eu un enfant avec moi ? J’en serai malade. Tout est si contradictoire, dans ma tête ! Je voudrais que Julia ait un père qui l’aime. Je voudrais que Raphaël, en apprenant que Julia est sa fille, l’aime de tout son cœur. Je voudrais que nous formions une famille, tous les trois. Si seulement c’était possible... Quand j’imagine du positif, tout se passe toujours de travers. Toujours. J’ai peur que Raphaël me rejette, qu’il rejette sa fille. Qu’il rejette notre fille.

- Ophélia... Que t’as dit Nathaël ? L’enfant...était-il le sien, ou le mien ?

Je suis au pied du mur. Je dois lui dire la vérité.

- C’était ton enfant. Notre enfant.

- Notre enfant..., murmure Raphaël, sous le choc.

Ses yeux fixent la table sans vraiment la voir, avant de se remplir de larmes. Lorsqu’il relève ses yeux vers sur mon visage, je le sens bouleversé.

- Si seulement j’avais compris avant... J’aurai pu... Nous aurions pu... Notre enfant serait sûrement vivant. Nous aurions pu le voir grandir et...

Sa voix se brise.

- Je m’en veux, Ophélia. Terriblement.

Mon cœur se tord douloureusement dans ma poitrine.

- Raphaël, je dois t’avouer quelque chose. Je t’ai menti. Je suis désolée. Cela me semblait être la meilleure solution pour le moment, mais... Tu as le droit de savoir. Je... Notre enfant n’est pas mort, comme je te l’ai fait croire.

Je n’ose pas le regarder. Pourtant, presque malgré moi, je lève les yeux. Les siens se sont agrandis sous l’effet de la surprise.

- Quoi ?

- Notre enfant...est encore en vie, je répète péniblement.

Je dois lui dire. Je dois lui dire. JE DOIS LUI DIRE.

- Alors, quoi ? Tu l’as envoyé dans un orphelinat ?

Je sens l’impatience dans sa voix. Et là, je comprends que Raphaël ne voudra jamais se séparer de sa fille après l’avoir retrouvée. Il voudra la connaître. Il me...l’enlèvera. Mais il a le droit de savoir, tout comme Julia aura le droit de savoir qui est son père.

- Non, Raphaël. Notre enfant, c’est Julia.

Le silence tombe sur notre table. Raphaël s’est figé comme une statue. Je le laisse digérer quelques secondes l’information, puis ajoute en me tordant les mains sous la table :

- Je comprends si tu regrettes tout ce qui s’est passé entre nous. Et je comprendrai que tu veuilles connaître ta fille. Je suis désolée de te l’avoir cachée. J’avais peur... J’ai peur que...

- Tu as peur de quoi ?

Ses yeux verts sont embués par l’émotion.

- J’ai peur que tu demandes sa garde, avoué-je. Tu as une bien meilleure situation financière, et...

Il lève une main et me coupe d’une voix enrouée par l’émotion :

- Ophélia, jamais je ne t’enlèverai ta fille - notre fille -de cette façon. Je ne suis pas un monstre... Ça me fait mal que tu puisses penser cela de moi !

Les barrières tombent, et je fonds en larmes.

- Oh, Raphaël ! Je suis désolée, tellement tellement désolée !

Il sort un mouchoir de sa poche et, d’un geste doux et maladroit, il se penche vers moi et essuie mes larmes.

- Quel âge a-t-elle ?

- Six ans.

- Et comment est-elle ? s’enquit-il, les yeux brillants de larmes.

Raphaël ne pleure jamais. Et ça me touche qu’il pleure pour sa fille, lui qui reste d’ordinaire stoïque en toutes situations. Il l’aime déjà, même sans la connaître, je le lis dans ses yeux.

Je passe alors de longues minutes à lui parler de Julia, même lorsque les plats sont servis. Je lui parle de tout, en remontant jusqu’à sa naissance.

- J’ai eu vraiment peur de la perdre, avoué-je. Je ne voulais pas encore accoucher d’un...

Je m’interromps, horrifiée. Les mots sont sortis tout seuls. Je n’ai pas fait attention, et...

- Encore accoucher ? relève Raphaël, sa fourchette suspendue au-dessus de son assiette. Peux-tu m’expliquer ?

Je déglutis, puis acquiesce.

- Quand j’avais dix-sept ans, je suis tombée enceinte. Mais j’ai perdu mon bébé.

Je n’ai jamais raconté à Raphaël le traitement que ma mère me réservait.

- Je préfère éviter d’en parler pour le moment, d’accord ?

Il acquiesce, et ne me pose pas de questions.

- Tu es courageuse, Ophélia. Tellement courageuse. Tu as élevé seule notre fille et tu as fait face à tellement de choses...

Il se tait un instant, puis reprend :

- J’ai eu tellement peur que tu aies refait ta vie, Ophélia. Je...

- Tu ?

- Je t’aime encore. Et je sais que je t’aimerais pour la vie. Si tu me le permets, j’aimerais...recommencer. Avec toi. Avec Julia. Je voudrais que nous formions une famille.

Je pleure, mais je souris à travers mes larmes. Tout mon stress retombe. Je lui ai tout dit, et il me propose de former une famille. Dans ma tête, une petite voix qui se répercute à l’infini me dit que j’ai le droit au bonheur, que j’ai assez souffert.

- Je n’ai jamais cessé de t’aimer, Raphaël.

Il m’a dit tout ce que j’espérais entendre. C’est presque trop beau pour être vrai !

- Tu me jures que c’est vrai ? Je ne supporterai pas d’être brisée une seconde fois.

- Je te le jure, Ophélia. Je t’aime.

Ma gorge est trop nouée par l’émotion pour que je lui réponde.

En quelques minutes, nous avons terminé nos plats.

En quelques secondes, nous avons payé et nous sommes sortis du restaurant. Raphaël me serre contre lui avant de m’embrasser. C’est comme revivre notre premier baiser. C’est comme se découvrir, à nouveau.

En quelques minutes, nous regagnons sa voiture.

En quelques secondes, nous montons un escalier dans un immeuble. Nos yeux brillent de bonheur. Nous ne sommes que jeunesse et amour.

En quelques secondes, je suis chez lui. Il ne me lâche plus. J’aperçois soudain le grand piano dans un coin du salon. Raphaël surprend mon regard.

- Je n’y ai pas touché depuis que tu es partie. J’en étais incapable. Mais maintenant, je crois que je vais pouvoir y arriver de nouveau.

Mon regard tombe sur une housse. Je connais par cœur la forme de cette housse. Je l’ai touchée tellement de fois...

- Serait-ce...

- ...ton violon ? Oui, c’est lui.

- Tu ne t’en es pas séparé ?

- Non. Jamais je n’aurai pu. Ça aurait été comme un dernier bout de toi qui s’en allait. Tu vas pouvoir en rejouer.

Raphaël m’avait appris à jouer du violon, lorsque nous étions ensemble. Je savais déjà lire mes notes. Le temps passé à jouer des morceaux avec mon violon était magique. J’étais transportée ailleurs, dans un autre univers.

Raphaël m’embrasse soudain, et ce geste me rappelle doucement à la réalité. Il m’emmène dans sa chambre. Il caresse mes épaules, m’ôte doucement ma robe, redessine mes courbes.

En quelques heures, nous redécouvrons nos corps, nous redécouvrons ce qu’est l’amour entre un homme et une femme. En quelques heures, nous nous aimons à nouveau, même si cet amour ne s’est jamais éteint.


Hello ! Comment allez-vous ?

Je vais vous avouer avoir versé deux-trois larmes pour ce chapitre. Oui, il n'y a rien de triste mais pour moi, ce chapitre signe la fin entre Ophélia et moi (rassurez-vous, il y a encore quelques chapitres de prévu !). En effet, Ophélia a tout dit à Raphaël dans ce chapitre. Raphaël accepte Julia. Ils décident de former une famille. Ophélia n'a donc plus "besoin" que j'écrive ses aventures, parce qu'elle aura à nouveau une vie stable en compagnie de Raphaël et de Julia. Le but d'Ophélia était de savoir qui était le père de sa fille (lorsqu'elle a appris qu'il y avait un problème) et elle le sait. J'ai presque fait le tour de ce qu'il y avait à écrire dans ce roman, donc c'est bientôt terminé. Il y a encore quelques intrigues très secondaires à résoudre, donc rendez-vous demain !

J'espère que ce chapitre vous a plu, que l'histoire vous plaît toujours. Pour moi, ça n'a pas été simple d'écrire ce livre, mais j'arrive presque au bout. Je vous remercie de me suivre, de suivre Ophélia et tous les personnages de cette histoire !!! ❤️❤️❤️

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