C'était l'hiver. Je mangeais une glace dans mon salon, avachie dans mon canapé. Il faisait froid, mais j'avais eu envie d'une glace, comme pour me dire que les saisons pouvaient bien faire ce qu'elles voulaient, moi je restais ce que j'étais. J'avais un peu la tête vide, mais je réfléchissais tout de même, avec des pensées en courant d'air. En faite, je pensais à ce monsieur en bas de l'immeuble, qui n'avait nul part ou dormir, ce monsieur que la vie n'avait nullement gâté. Je le connaissais bien, je parlais souvent avec lui, et malgré le fait qu'il ne soit pas vraiment cultivé, il avait un regard beau et juste envers la vie. Non, pas un regard haineux et colérique contrairement à ce qu'on aurait pu penser. J'étais donc là, à le contempler de ma fenêtre. Et j'me suis dis que j'aurais pu être à sa place. Que moi et mes emmerdes aurions pu être à sa place. Que notre existence ne tenait qu'au hasard. Que seul la chance m'avait conduit là où j'étais aujourd'hui.
Qu'il ne s'était fallu de rien pour que je naisse dans une jolie maison de banlieue, qu'il ne s'était fallu de rien pour que ma meilleure amie naisse dans les tours un peu miteuses à l'extérieur de la capitale, qu'il ne s'était fallu de rien pour que ce ne soit pas l'inverse. C'est là que j'ai compris que l'égalité n'existait pas. Qu'on serait regardé différemment si l'on était l'enfant du président ou l'enfant d'un ouvrier. Que notre existence et notre condition ne tenait qu'au hasard, qu'on aurait pu être plus riche ou plus pauvre, mieux vivre ou habiter dans la rue. Parce qu'au fond, on tient à quoi ?
Et notre vie, elle durera jusqu'à quand ? Parce qu'il ne suffit de rien pour que ce soit nous sur ce lit d'hôpital, renversé par une voiture, que ce soit nous les habitants d'un pays déchiré par la guerre civile. Qu'il ne suffit de rien pour vivre, comme il ne suffit de rien pour mourir.
Qu'un infime détail peut renverser notre vie.
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