Chapitre 9 : Les Huit Créateurs (non corrigé)

Si le chaos de la bataille avait repris et que les flammes ravageaient de nouveau le ciel d'encre, Kaï n'avait pas l'air de se décider à bouger, malgré sa faiblesse apparente.

-Argh...! gémit-t-il, les yeux exorbités et voilés de blanc, comme s'il était possédé. Il... il faut... partir... au plus vite !

Sa patte agrippa la mienne férocement, puis celle de Julie, et nous l'aidâmes à se hisser sur ses frêles pattes arrières. Il nous amena à lui dans un geste brusque, et j'eus à peine le temps de fermer les yeux : la terre trembla, le sol s'évanouit sous mes pattes et les nausées reprirent ; mes tympans hurlaient et le sang y battait avec force.

Brutalement, la lumière vint et je m'écroulai sur une surface dure, pris de vertiges. Le silence hurlait à mes oreilles, et mon pelage était secoué par une douce brise matinale. Hébété, je relevai la truffe, la vision floue, et tentai sans succès de reconnaître l'endroit où nous nous trouvions. Je battis des cils, secoué et perdu, et promenais mon regard tout autour de moi.

J'étais étendu sur un toit bétonné et inondé de débris. Les habitations voisines étaient en ruines, désertes, et les champs s'étendaient de l'autre côté, plaines verdoyantes qui couraient jusqu'à l'horizon.

-Où on est, Kaï ? murmurai-je, une grimace au visage.

Mais je n'obtins aucune réponse.

-Kaï ?! répétai-je, pivotant d'un côté et de l'autre pour chercher la vieille tortue du regard.

Mais elle n'était pas là. J'étais seul, sur ce toit, plus perdu encore que sur les champs de bataille trente ans dans le futur. Et puis soudain, la mémoire me revint.

Le toit ! Dans notre présent ! Là où j'avais tenté de mettre fin à mes jours...

Je déglutis, le cœur battant. La pierre tranchante avait disparu, elle aussi. Je me levai péniblement, les membres endoloris, et m'obligeais à tirer un bilan de tout ce que je venais de voir.

Je savais enfin d'où me venait le Dragon. Esprit d'un des Huit Créateurs des Mondes, Enory, il avait été séparé en deux. L'une d'entre-t-elle s'était logée en moi, et la seconde habitait ce grand Dragon noir. Ensuite, je savais dès à présent que ma mère avait toujours été au courant pour la Prophétie. Mais à présent elle n'était plus, et mes questions resteraient désormais sans réponse.

Je lâchai un long soupir. Tout ceci venait s'ajouter à mes problèmes du présent. Comme si cela n'était déjà pas suffisant. Mais je me sentais comme vidé, déconnecté de la réalité. Le contraste présent-futur m'avait perturbé.

Je dressai soudain les oreilles : il fallait que je demande à Kaï pour les Créateurs des Mondes ! En effet, je connaissais leur nom, mais leur histoire m'était encore inconnue. Elle était peu étudiée à l'école, car le peu d'informations que nous possédions sur les Créateurs étaient archivées et jalousement gardées dans les entrailles de Phoenix.

Je soufflais un bon coup ; il me fallait rentrer au camp, à présent.

Je bondis alors sur le toit d'en face, les pattes jetées vers l'avant pour anticiper la chute. Mais mes réflexes se faisaient maladroits à cause de ma tête bourdonnante, et je roulais au sol, le souffle coupé. Je me relevai péniblement, titubai légèrement avant de m'élancer à nouveau, quoique plus lentement cette fois-ci.

Les toits finirent par se dérober sous mes pattes à la vue des centaines de tentes implantées et amassées au camp des réfugiés. Je dévalai la montagne de débris rapidement ; même si mes coussinets ensanglantés s'écaillaient sur les pierres tranchantes, je n'y prêtai aucune attention. 

Si le chaos de la bataille avait repris et que les flammes ravageaient de nouveau le ciel d'encre, Kaï n'avait pas l'air de se décider à bouger, malgré sa faiblesse apparente.

-Argh...! gémit-t-il, les yeux exorbités et voilés de blanc, comme s'il était possédé. Il... il faut... partir... au plus vite !

Sa patte agrippa la mienne férocement, puis celle de Julie, et nous l'aidâmes à se hisser sur ses frêles pattes arrières. Il nous amena à lui dans un geste brusque, et j'eus à peine le temps de fermer les yeux : la terre trembla, le sol s'évanouit sous mes pattes et les nausées reprirent ; mes tympans hurlaient et le sang y battait avec force.

Brutalement, la lumière vint et je m'écroulai sur une surface dure, pris de vertiges. Le silence hurlait à mes oreilles, et mon pelage était secoué par une douce brise matinale. Hébété, je relevai la truffe, la vision floue, et tentai sans succès de reconnaître l'endroit où nous nous trouvions. Je battis des cils, secoué et perdu, et promenais mon regard tout autour de moi.

J'étais étendu sur un toit bétonné et inondé de débris. Les habitations voisines étaient en ruines, désertes, et les champs s'étendaient de l'autre côté, plaines verdoyantes qui couraient jusqu'à l'horizon.

-Où on est, Kaï ? murmurai-je, une grimace au visage.

Mais je n'obtins aucune réponse.

-Kaï ?! répétai-je, pivotant d'un côté et de l'autre pour chercher la vieille tortue du regard.

Mais elle n'était pas là. J'étais seul, sur ce toit, plus perdu encore que sur les champs de bataille vingt ans dans le futur. Et puis soudain, la mémoire me revint.

Le toit ! Dans notre présent ! Là où j'avais tenté de mettre fin à mes jours...

Je déglutis, le cœur battant. La pierre tranchante avait disparu, elle aussi. Je me levai péniblement, les membres endoloris, et m'obligeais à tirer un bilan de tout ce que je venais de voir.

Je savais enfin d'où me venait le Dragon. Esprit d'un des Huit Créateurs des Mondes, Enory, il avait été séparé en deux. L'une d'entre-t-elle s'était logée en moi, et la seconde habitait ce grand Dragon noir. Ensuite, je savais dès à présent que ma mère avait toujours été au courant pour la Prophétie. Mais à présent elle n'était plus, et mes questions resteraient désormais sans réponse.

Je lâchai un long soupir. Tout ceci venait s'ajouter à mes problèmes du présent. Comme si cela n'était déjà pas suffisant. Mais je me sentais comme vidé, déconnecté de la réalité. Le contraste présent-futur m'avait perturbé.

Je dressai soudain les oreilles : il fallait que je demande à Kaï pour les Créateurs des Mondes ! En effet, je connaissais leur nom, mais leur histoire m'était encore inconnue. Elle était peu étudiée à l'école, car le peu d'informations que nous possédions sur les Créateurs étaient archivées et jalousement gardées dans les entrailles de Phoenix.

Je soufflais un bon coup ; il me fallait rentrer au camp, à présent.

Je bondis alors sur le toit d'en face, les pattes jetées vers l'avant pour anticiper la chute. Mais mes réflexes se faisaient maladroits à cause de ma tête bourdonnante, et je roulais au sol, le souffle coupé. Je me relevai péniblement, titubai légèrement avant de m'élancer à nouveau, quoique plus lentement cette fois-ci.

Les toits finirent par se dérober sous mes pattes à la vue des centaines de tentes implantées et amassées au camp des réfugiés. Je dévalai la montagne de débris rapidement ; même si mes coussinets ensanglantés s'écaillaient sur les pierres tranchantes, je n'y prêtai aucune attention.

Je cherchai alors du regard la grande tente principale qui couvrait le lit du Roi : doublée de taille à cotée des autres, elle était facilement repérable.
Je m'elançai dans sa direction et derapai à son seuil. Là, je poussais doucement le rideau de toile beige et pénétrai dans la hutte.

Kaï était penché sur quelques paperasses, la mine concentrée : ses pattes frôlaient le papier froissé, étudiant le moindre petit détail minuscieusement.

-Alors, tu sais enfin ? déclara-t-il sans lever les yeux de ses cartes.

Je hochai la tête en silence et m'assit sur une chaise qui bordait la table de réunion, à laquelle je m'étais assis quelques heures plus tôt.

-Qui est Enory ? finis-je par demander, la queue battant nerveusement l'air.

-L'esprit Gardien d'Enohr ?

-Ben oui, y en a pas cinq mille des Enory ! feulai-je, les oreilles rabattues.

Ne pouvait-il donc pas faire un effort et lever les yeux de sa paperasse ?!

-Je précisais simplement pour voir si tu savais au moins cela, s'amusa Kaï, et il attrapa une plume pour signer d'un geste vif ses documents.

Je préférais garder le silence, les yeux plissés. Je n'appréciais pas la manière dont Kaï se servait de moi. Le Voyageur qui m'avait transporté en 2030 m'avait semblé bien plus ouvert sensible à mes ressentis.

Il releva alors la tête et s'assit patiemment sur sa chaise, un rictus amusé aux lèvres.

-Je suppose que tu dois avoir de nombreuses questions, devina-t-il.

-Sans blague ! J'ai voyagé trente ans en avant et je n'aurais aucune question à te poser ?!

Sa tête vacilla sur le côté, une moue désolée remplaçant son sourire :

-Malheureusement, je ne pourrais pas répondre à toutes tes questions. Pour la plupart, tu...

-... Connaîtra toutes les réponses le moment venu, je sais ! m'exasperai-je en levant les yeux au ciel.

Je ne saurais dire le nombre de fois où il m'avait répeté cette phrase.

-Je voudrais savoir qui sont les Huit Créateurs et leur histoire.

La vieille tortue plissa les yeux, pensive. Un instant il posa le menton sur sa canne, et le silence s'imposa sous la tente. Il doit réfléchir à ce qu'il peut ou pas me dire, devinai-je, pourtant agacé. Puis, enfin, il se lança :

-Comme tu dois déjà le savoir, ceux qu'on appelle les Huit Créateurs sont les créateurs des Mondes. C'est grâce à eux qu'aujourd'hui, les Erkaïns et toutes les autres créatures de Phoenix ont pu vivre. Il y a donc Huit Mondes, dont Enohr. Ce dernier Monde est celui qui a toujours existé. Les Hommes l'appellent aussi la Terre. Elle est l'origine de toute vie. Mais les peuples etaient si nombreux, la guerre était si présente que les Dieux décidèrent de créer la Première Prophétie. Comme tu peux le deviner, c'est la toute première Prophétie qu'il n'eut jamais existé. Celle-ci disait que Huit Élus mettraient fin à la guerre en séparant les peuples, leur permettant de s'établir dans des contrées bien à eux où personne ne pourrait les embêter. Ces Élus faisaient tous partis d'un peuple différent, et pourtant ils étaient les meilleurs amis au monde.

Kaï se râcla la gorge, guettant ma réaction. Voyant que j'attendais la suite, il attrapa un livre poussiéreux sur son bureau.

-J'ai réussi à le sauver des explosions, m'expliqua-t-il, malicieux.

Il feuilletta rapidement les pages et s'arrêta sur une présentation détaillée de huit figures finement dessinées sur le papier jauni.
Il les pointa de la patte une à une, concentré :

-Cara, une jeune Pirate qui n'aimait pas l'alcool. Maggie, une Mage sans aucune magie, ni même suffisamment pour devenir une Mage Noire. Diven, un jeune Homme mort et maudit, condamné à errer jusqu'à la fin des temps en tant qu'esprit. Fesia, une pauvre Elfe qui était tombée amoureuse d'un Nain. Acien, un robot né d'une expérience scientifique. Cryss, une jeune humaine albinos rejetée par son peuple. Geeler, un Explorateur qui avait peur de l'inconnu. Et pour finir, Enory, un jeune homme humain simple qui vivait de la plus simple des manières. Ils avaient chacun en leur possession une Pierre magique qui renfermait un immense pouvoir, originaire de leur terre natale. Grâce à cette magie, Sept des Huit Élus purent créer un Monde, au prix de leur vie. Mais un Élu n'avait pu rien faire. Enory, Élu d'Enohr, n'avait pas de Monde à créer, ainsi pas de vie à laisser. Ses seuls et meilleurs amis étaient morts, et lui était à présent seul. Il sombra alors dans le désespoir et la douleur, à un tel point qu'il en mourut. Mais son esprit, lui, n'était pas guérit de la douleur. Il était si puissant et si dangereux que les Dieux décidèrent de le briser en deux parties et de les enterrer le plus loin possible l'une de l'autre. Mais viendrait le jour où les esprits se réveilleraient. En revanche, ce qui n'était pas prévu par les Dieux était qu'une de ces parties s'accrochent à un être vivant et se développe à l'intérieur de son être...

Kaï coula un regard dans ma direction, laissant le silence s'abattre sous la tente. La gorge serrée, je n'osais dire quelque chose. Enory. Son esprit sommeillait en moi sous forme de monstre. J'eus un frisson : cela me faisait drôle d'avoir une telle pensée.

Inquiet et de plus en plus perdu, j'en vins à me demander qui est ce que j'étais vraiment.

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