Chapitre 8 : la Vérité avec un V majuscule (non corrigé)

-Quoi ?! m'étranglai-je, pris de vertiges. Une troisième Voyageuse ?!

-Pas exactement, sourit-elle en fermant les yeux.

Mais cela ne fit que me perdre davantage.

-Je ne comprends pas...

-Il n'y a qu'une seule chose à comprendre. La Roue doit être brisée.

-Une Roue ? répétai-je, perdu.

Ses traits se durcirent dans une expression de profonde fatigue :

-La Roue, oui. C'est une métaphore, Grand Sauveur.

J'eus une grimace : d'abord parce que je n'aimais pas ce nom, et ensuite parce que les propos de cette vieille femme n'avaient aucun sens à mes yeux.

-Une métaphore de quoi ? demandai-je tout de même, bien que je fus certain qu'elle ne veuille m'apporter de réponses claires.

-Ça, sourit-elle, énigmatique, je ne peux y répondre. C'est un secret dont je serais la seule Gardienne. Je l'ai toujours été, je le suis et je le serais à jamais. Bien que dans ce cas là, présent et futur ne soient plus qu'un.

Mes neurones n'activèrent subitement, et les mots s'assemblèrent d'eux mêmes. Une roue, un passé et un futur identiques ? De la part d'une Voyageuse, il ne pouvait s'agir que d'une seule chose :

-Vous parlez des Boucles Temporelles ?

-Exactement. Les Boucles sont des phénomènes étranges, que même nous, Voyageurs, peinont à comprendre. Tu dois savoir de quoi je parle. Tu as eu l'expérience d'une Boucle lors de ton Voyage Cognitif.

Je plissai les yeux et hochai le menton :

-Dans huit ans, je verrais mon double jeune dans mon esprit, n'est-ce pas ? Et à son tour dans huit ans, il se reproduira la même chose... Sans que ça ne s'arrête jamais.

-Oui, voilà, c'est une Boucle, acquiesça-t-elle. Une Boucle est créée à chaque fois que l'on voyage dans le Temps.

J'avais au moins compris ça. Mais maintenant que les choses étaient claires pour moi, les questions prenaient place dans mon esprit embrouillé :

-Donc... On ne peut pas savoir exactement quand elles ont commencé ?

Elle croisa ses bras tremblants de fatigue sur sa poitrine :

-Non, Grand Sauveur. Nul ne sait quand les Boucles commencent, ni quand elles se terminent.

Je réfléchis quelques secondes à ses paroles avant de relever la tête à nouveau :

-Mais... Ça veut dire que les Boucles sont forcément magiques et qu'elles ne peuvent pas exister sans la Magie ?

-Les Boucles sont magiques, c'est vrai. Mais comme tout dans ces Mondes.

-La Magie ne peut donc pas être éradiquée ?

Elle changea de position sur son siège de bois rouillé, qui grinça sous son poids :

-C'est là que le trouble s'installe. Kaï est certain que l’on peut en effet détruire la Magie, tandis ce que moi j'affirme le contraire.

Elle replaça ses châles et avala sa salive, non sans difficulté. Sa respiration tonnait de pair avec les battements de mon cœur anxieux, résonnaient à travers la pièce dans un lourd silence. J'éternisai mon regard sur la poussière qui dansait dans la lumière, pensif, et songeais à ses paroles. Voilà que je venais de recevoir l'opinion d'une troisième Voyageuse. Chose que je n'aurais jamais cru possible. Celle-ci paraissait d'ailleurs si vieille, si recroquevillée sur elle même, que je lui donnerais bien trois cents ans de plus que Kaï. Lui ne semblait être qu'un pauvre apprenti à ses côtés. Ses paroles mystérieuses, son air amusé et ses secrets étaient bien ridicules à côté des siennes.

-Comment pouvez-vous... commençai-je, hésitant, avant de me raviser. Qu'est-ce qui vous fait dire qu'on ne peut pas exterminer la Magie ?

-Je le sais, c'est tout, sourit-elle, et son visage couvert de rides se creusa à ses paroles.

Mais sa réponse ne fit qu'accentuer ma frustration. Je m'agitai sur mon siège et me passai la main sur le visage. Mon cerveau en ébullition tentait avec grande peine de trouver un sens à tout ceci. Elle avait forcément plus d'expérience que Kaï, ce qui voulait obligatoirement dire qu'elle l'avait précédé. Mais dans ce cas là, que faisait-elle ici ? N'était-elle pas censée être morte pour laisser sa place à un nouveau Voyageur ? Pourquoi la femme enceinte nous avait-elle conduit à elle ? S'était-elle éternisée ici simplement pour attendre ma venue ?

-Depuis combien de temps êtes vous ici ? l'interrogeai-je au bout d'un moment.

Son sourire sans dents béat ne la quittait pas :

-Très, très, très longtemps.

-Vous... Vous m'attendiez ?

-En effet.

Je la dévisageai, et j'eus l'étrange sentiment qu'elle faisait de même, bien qu'elle fut aveugle.

-Pourquoi avoir attendu ? Vous auriez pu voyager dans le Temps.

Elle pencha la tête sur le côté, soudain nostalgique, et haussa les épaules d'un air sage :

-Kaï a prit la relève, Grand Sauveur. Je ne peut plus voyager depuis le jour où je lui ai transmis mon Don.

-Les Dons de Voyageurs se transmettent ? repétai-je, surpris.

Cela voulait-il dire que Kaï connaissait l'identité de la prochaine Voyageuse ?

-Oui, oui. Le Don du Temps est le seul de tous qui se transmet.

-Vous savez à qui Kaï a transmis son Don ? enchaînai-je, penché sur ma chaise.

Il s'agissait de la Dernière Voyageuse. Celle-là même qui était venue à ma rencontre pour me parler du Voyage Cognitif. Si la vieille femme avait un visage à me donner, un nom... Eh bien cela me donnerait un avantage conséquent. En effet, il était primordial pour moi de...

-C'est à moi qu'il a transmit son Don, sourit-elle en se levant soudainement.

Mon sang ne fit qu'un tour :

-Quoi ?!

-Tu as bien entendu, rit-elle tout en époussetant son châle. J'ai donné mon Don à Kaï, puis il me l'a rendu.

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