Chapitre 15 : Oublier ? Un jeu d'enfant... (Corrigé)

Perchés sur un muret de la cours, coincée entre les grilles qui délimitent les frontières du campus, le bâtiment des cours et celui des dortoirs, nous observons l'agitation des élèves d'un œil médusé. George et Jeane ne semblaient pas non plus aimer le foules, tout comme moi, et cela m'amusai. Voilà les trois aigris de l'école !, pourrait-on nous appeler. Le pire serait que cela nous correspondrait à merveille.

George, assis au pied du muret, arrachait les pétales d'une petite fleur trouvée dans les recoins de la roche. Je me contentai d'observer calmement le ciel tandis que Jeane plissait les yeux, concentrée, pour repérer la moindre petite chose qui attiserait sa curiosité.

-R'gardez là bas ! fit-elle, alors qu'un sourire malicieux lui montait aux lèvres. C'est l'plus gros bg d'l'école, à c'qu'on dit.

Je suivis son regard, jusqu'à apercevoir un grand jeune homme à l'élégante silhouette. Ses cheveux noisettes bouclés soyeux virevoltaient doucement au vent, tandis que ses grands et charmants yeux noirs papillonnaient vers une silhouette féminine accoudée à un arbre non loin.

J'écarquillai les yeux et manquai de basculer vers l'arrière, sous le choc. Voilà qui m'étonnait d'elle, surtout après son intervention auprès des femelles du réfectoire. 

George esquissa un sourire à ma vue :

-Eh ben, changé en Homme, tu perds tout ton équilibre, le chat !

Jeane éclata de rire et m'attrapa le bras pour m'aider à me stabiliser, secouée de petits spasmes.

-C'est parc'qu'il a vu la belle Sinna, roucoula-t-elle en secouant exagérément ses boucles blondes et battant des cils en feignant une mignonnerie ridicule.

Je lui jetai un regard noir :

-Bien sûr, ça doit être ça.

-D'ailleurs, fit George d'une voix lointaine, tu ne nous as toujours pas dit ce qu'il s'est passé hier.

-C'est peut être parce que je n'en ai pas envie, sifflai-je entre mes dents, agacé.

Ne pouvaient-ils pas me laisser en paix avec ça ? J'étais parvenu jusqu'ici à oublier cet épisode, et voilà que le nœud au creux de mon estomac se resserrait.

-Allez, s'te plaît, gémit Jeane. Le cours d'Histoire des Peuples va commencer dans dix minutes, gâche pas la fin de notre pause midi juste parc'que tu veux pas dire comment a été ton rendez-vous avec ton paternel !

Je lâchai un soupir, sautai du muret et attrapai mon sac pour le jeter par dessus mon épaule :

-Ok, alors je m'en vais ! annonçai-je d'une voix tremblante de colère.

-On se voit en cours ! me lança George tandis que je m'éloignai à grands pas.

Je me renfrognai, les dents serrées ; pourquoi ne pouvaient-ils pas comprendre mon silence ? Ou bien était-ce trop demandé d'avoir un minimum de respect envers moi et mes secrets ? Je les connaissais à peine. Je n'allais pas leur annoncer que j'étais capable de... Non, je n'étais capable de rien. Parce qu'il ne s'était rien passé.

Je lâchai un grognement frustré tout en jetant un coup d'œil par dessus mon épaule. Ils ne m'aidaient pas du tout, bien au contraire. Ils ne faisaient que de me...

Je percutai violemment une épaule et, les yeux écarquillés, titubai légèrement vers l'arrière.

-Fais gaffe où tu marches ! crachai-je tout en reprenant mes appuis, les poings serrés.

Je relevai les yeux vers l'individu, prêt à ajouter une nouvelle réplique cinglante, quand je vis qu'il s'agissait là du jeune homme aux cheveux noisettes qui roucoulait devant Sinna. Je fronçai les sourcils et cherchai la jeune femme du regard ; en effet, elle était là, à seulement deux mètres, toujours accoudée à son arbre. Elle me fixait de son regard inexpressif, tandis que le reste de la cours s'était soudainement figé. J'aperçus même un groupe de filles non loin qui observaient le jeune homme face à moi d'un œil admiratif.

-J'espère pour toi que tu n'as pas marché sur mes chaussures, souffla-t-il, en étirant un sourire méprisant sur ses lèvres.

Il demeurait pétrifié, comme épouvanté qu'un être tel que moi ait osé le toucher.

-J'ai dis, regarde où tu marches, sifflai-je entre mes dents, approchant mon visage du sien, haineux. Parce que t'es sourd en plus d'être un sale petit riche à la con, maintenant ?

Je vis une veine de son cou tressaillir, et les muscles sous ses épaules rouler :

-Va falloir répéter, je comprends pas la langue des vermines dans ton genre.

Aussitôt, je me penchai vers l'avant et lui fauchai les jambes ; il pirouetta dans les airs, stupéfait, avant de vivement reprendre ses appuis pour prendre son élan et me frapper le nez de plein fouet de son épais poing serré. Je roulai au sol, sonné, et mes veines gonflèrent ; je sentis l'odeur de la magie à nouveau se diffuser dans l'air, celle là même que j'avais sentie dans le bureau d'Aïru. Pris de panique, je le vis se pencher dans ma direction pour m'assener un nouveau coup ; sans réfléchir, je me relevai en prenant appui sur mes épaules et envoyant mon corps vers l'avant ; mon rythme cardiaque s'accéléra alors que je lui attrapai brusquement le poing pour le stopper dans sa course. Il écarquilla les yeux, stupéfait, mais je ne lui laissai pas le temps de réaliser : je tordis son bras pour le forcer à plier le genoux et, une fois chose faite, me préparai à maintenir son visage au sol. Je remarquai alors son visage moqueur :

-Tu n'es qu'un pauvre Erkaïn minable, tu sais, ça ? railla-t-il d'une voix rauque, sous la douleur de la pression que j'exerçai sur son bras. Alors tu pourras me frapper, ça ne changera rien à ce que tu es. Rien au fait que tu es le fils ingrat d'une pu...

J'abattis violement mon poing sur sa figure, et le sang gicla ; une force explosa en moi et je le frappai encore et encore, les yeux fous.

-COMMENT OSES-TU ?! hurlai-je alors qu'il encaissait un nouveau coup brutal. COMMENT OSES-TU INSULTER MA MERE ?!

J'envoyai à nouveau mon poing sur son visage ensanglanté, et les larmes ruisselèrent sur mes joues. Je ne le connaissais pas. Il ne me connaissait pas. Il ne savait rien. Il n'avait aucune idée... Je frappai plus fort, enragé, quand une voix lointaine me parvins.

Elle se fit bientôt nette et l'on m'attrapa le bras. Deux yeux bleus brillants de larmes se posèrent dans les miens et Sinna me força à reculer :

-Arrête, je t'en supplie... Arrête, tu vas le tuer...

Je fis quelques pas en arrière, hors d'haleine, pris de vertiges, le poing toujours levé. Je ne baissai pas les yeux vers eux. Ni vers ceux qui me fixaient, effarés, éparpillés dans la cours. Alors, perdu, je redressai mon sac sur mon épaule et filai vers les bâtiments sous un silence de terreur. 



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