Feu, le bûcher.



Je les voyais danser sur mon corps. Je les sentais lécher ma peau. Je les voyais atteindre mes longs cheveux. Les enflammer. Je sentais leur chaleur, leur brûlure. Ces flammes m'enveloppaient dans un brasier infernal, et je les voyais glisser le long de mon corps. La fumée formait un épais nuage acre, formant un tourbillon noir et cendré.

Ils m'avaient finalement accusée. Accusée de sorcellerie, parce que je suis différente. Ma peau est trop sombre, ma chevelure ne l'est pas moins. Ils disent qu'elle est de la couleur d'une nuit sans lune, de celle des ailes d'un corbeaux. Ils disent que je fais des potions et des poisons.

Je passe mes journées dehors à la recherche d'herbes médicinales, pour soigner les fièvres, peu rares en cette raison. Il est alors normal que ma peau fonce, qu'elle brunisse et perde sa blancheur laiteuse. Normal aussi qu'ils me haïssent. Je suis trop grande, trop différente, trop sombre. Mon père était un voyageur, grand et sombre lui aussi. Il venait du sud, du désert des frémissent. Il parait que je lui ressemble. Ma mère et lui se sont aimés, mais à sa mort il est parti. Sans moi.

Orpheline. Peu aimable. Différente. Sorcière. Mise au centre d'un bûcher. Puis ils y avaient mis le feu.

Je me tenais au centre des flammes, quand le bucher s'était enflammée. Froide et fière. Mais j'étais terrifiée. Cependant, je ne pleurerais pas. De toute façon, mes larmes n'auraient jamais pu éteindre les flammes et bientôt je sentis le bas de ma jupe s'embraser. Avant que la fumée ne me cache le monde, je regarda les étoiles. La constellation Sirius, la lune, la grande ourse.. les étoiles. Alors, je fixa mon regard sur la lune, et attendis que la fumée repende ses volutes autour de celle-ci et me prive de ses rayons froids. Je sentais le feu lécher le lin de ma robe, danser sur mes mollets, auréoler mon corps, grignoter mes jambes, lécher mes cheveux et frôler mon ventre. Je sentais mon corps se couvrir de cloque, ma chair cuire. J'aurais voulu mourir vite, sans souffrir davantage. Je ne pouvais qu'attendre la mort, alors que la douleur déferlait par vagues, me faisant convulser. Je n'inhalait plus que la fumée. Elle avait la saveur de mon corps brulé. Je ne tenais plus que par les liens qui maintenaient mes bras dans mon dos.

Puis, je sentis les flammes atteindre ma gorge, noircir mes seins, lécher mes mâchoires et chatouiller mon nez.

Je fermai les yeux. Je souffris. Longtemps. Après une éternité de souffrance, ma tête retomba sur on corps en proie aux flammes. J'étais un pantin fondu dont on aurait brûlé les fils.

J'étais enfin morte, c'était fini. Plus de feu, plus de flammes, plus de cette fumée noire et lourde.

Mais quand je rouvris les yeux, les flammes dansaient toujours autour de moi. Je ne sentais juste plus. Baissant le regard, je vis que ma peau était désormais constituée d'un genre d'écailles. Écailles sur lesquelles gisaient quelques bribes éparses de ma robe, déchirées, enflammées, détruite. Levant ma gueule vers le ciel, je secoua mon échine. Mes bras et jambes étaient devenus des pattes griffues et quelque chose pendait dans mon dos. Je me secoua une nouvelle fois, tentant de déloger ce tissus épais. Sans résultat. Dans une gerbe de flammes, le tronc auquel j'avais été attachée tomba au sol. Me redressant sur mes pattes arrières, je rugis. De rage envers ceux qui auraient du être a famille. De douleur pour mon corps meurtri et désormais transformé. Une gerbe de feu jaillit de ma gueule, ne me brulant guère plus qu'un bâillement. Détruisit leur monde, ce village où j'étais née, où j'avais grandis, où j'avais tant souffert. Puis, me redressant au maximum, je parvins à mouvoir ce tissus lourd qui ornait mon dos, écartant alors mes ailes parcheminées, je les toisa les rares survivants. Les regarda fuir.

Puis, dans la fumée noire filtrant la lumière rouge du soleil levant, faisant tourbillonner les dernières braises, je m'envolai.

Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top