Eau, la planche



« Saute ! »

Non je vous en prie... je pleure doucement. Ils vont me jeter du haut de la planche du pearl, leur navire. Je vais mourir. Je sais nager, mais je vais mourir. Ils m'ont attachée à de lourdes chaines, qui relient mes poignets à mes chevilles. Je ne marche qu'avec peine. Je sais que je vais mourir. Mais je le fais avec joie. Tout plutôt que me faire violer par ces pirates. De toute façon ils me tueront juste après. Ce qui ne m'empêche pas de pleurer. Je ne veux pas mourir non plus.

Mais ils me jettent à l'eau. Je sens la planche trembler, je me sens glisser. Et je crève la surface bleutée. Mes fers m'empêchent de nager. Je ne peux que couler. Je vois le bleu de la mer se refermer sur moi. Je vois la surface s'éloigner. Je vois des poissons évoluer a mes cotés. Je vois les algues qui frôlent la surface des navires anciens, perdus en mer et abîmés sous l'océan. Je vois des points sombre danser devant mes yeux. Je vois des coraux, l'eau qui s'assombrit, et puis le mât des épaves. Puis, alors que j'effleure une épave moussue, je cesse de voir. A jamais.

Je meurs.

Quand je rouvre les yeux, une femme est devant moi. Elle me sourit. Je suis toujours au fond de l'eau, mais mes fers ont disparu. Ils gisent à mes cotés. Et je ne sens plus mes jambes. Enfin si, mais c'est étrange, elles sont.. je ne sais pas, moins mobiles. Alors je baisse les yeux, m'attendant à ce qu'elles soient brisées. Au même instant, la femme se lève. Enfin, elle nage vers le haut, en agitant sa... sa queue ? Sous la surprise je hoquette. Sous l'eau. Instantanément, je plaque mes mains sur ma bouche, mais m'arrête à mi chemin, choquée. Il me semble que je peux respirer sous l'eau. Du moins je ne me noie pas.

Elle me regarde, amusée. Alors, j'écarte doucement le lourd tissus de ma robe et dévoile un large membre écailleux, luisant de doux reflets émeraude. Je sursaute et m'en écarte. Bien sur ma queue suit le mouvement.

D'un coup, j'éclate de rire. C'est nerveux. Un rire joyeux qui cascade sur le bois vermoulu. Un rire qui coule le long des coraux, qui glisse autour des poissons, qui éclabousse les profondeurs marines. Libre. Je suis enfin libre. Je suis libérée de tout ce monde, je suis une de ces créatures qui effraie les hommes, ceux qui nous malmènent.

Alors, je me redresse et lui demande ce que je suis désormais. Ce qui m'attend.

« La liberté. Tu peux aller ou tu veux, comme tu veux, quand tu veux. Mais tu peux aussi me suivre, et venir vivre avec nos sœurs. Toutes celle qui furent jetées et malmenée par des hommes, toutes celles qu'ils ont condamnée à la noyade. Celles qu'ils craignent. Les Sirènes »

Les marins nous croient diabolique, infernales, monstrueuses et perverses. Mais nous sommes simplement les femmes qu'ils ont jetées par-dessus bord, celles qu'ils ont condamnées à une noyade certaine. Leurs victimes.

Avant je n'avais aucun pouvoir, je devais obéir aux hommes, aux marins, au pirates. J'étais leur jouet. Maintenant, ils me craignent.

Parfait.

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