Chapitre 19
- Je vous rejoins. Allez-y.
Ils quittent les lieux comme si rien ne s'était passé tandis que j'hésite à lever les yeux vers Mack.
Quand finalement je le fais, il ne réagit pas comme je le pensais. Il m'attire à lui et m'embrasse doucement. Il pose ensuite son front contre le mien et caresse mes cheveux.
- Je me doutais que tu ne pouvais pas être comme nous pour dégager autant de puissance. Je l'ai su quand je t'ai vu traverser la cour au collège en 6ième. Tu n'as rien remarqué, concentré sur un papier entre tes mains mais la cour s'est retournée entièrement vers toi. C'était comme si tu brillais.
Sa main dans la main dans la mienne, je la serre avec émotion.
- Je pense que ton équipe t'attends. Reviens vite. Reviens-moi.
Il m'embrasse une dernière fois avant de me relâcher et de me regarder partir.
Avant de refermer derrière moi, je m'arrête.
- Tu ne dis rien à personne ?
- Qui me croirait ?
- Fais attention à toi Mack. Et compte sur moi. Pour revenir.
Je lui souris et m'enfonce dans la foule pour y disparaitre presque immédiatement sous son regard amoureux.
Quand, je traverse le hall de l'hôtel, le réceptionniste m'observe un peu trop à mon goût.
- Oui ?
- Vos amis sont rentrés.
- Et ?
- Des clients se sont pleins du bruit.
Pas étonnant vu le groupe que l'on est et que l'on doit former. C'est assez explosif.
- Je leur parlerai.
Je monte deux à deux les marches et m'apprête à entrer dans ma chambre lorsque Peter sort subitement de l'ombre. Mon coeur fait un bond et je soupire de soulagement.
- Tout va bien ?
Il approuve de la tête et me sert contre lui. Son étreinte est chaude et réconfortante. Je me rends alors compte qu'un cocon bleu nous entoure et que mes brûlures et coupures des dernières heures disparaissent et laissent mon corps détendu. Il murmure sans cesse et la douleur que j'ignorais jusque là s'envole.
Il me relâche au bout de quelques minutes et me regarde de haut en bas en s'attardant sur mon décolleté.
- Plus rien à déclarer ?
- Non. Je crois bien que tu as tout fait comme d'habitude. Je suis toute neuve !
- Cela me démangeait depuis un moment...
- De quoi ?
- De pouvoir te toucher.
Il rougit violemment et c'est assez adorable. Il se reprend.
- Pour te soigner. J'ai noté que seul ce moyen empêcher ton pouvoir de se déclencher contre moi et de tout détruire.
- C'est vrai que je n'ai rien ressenti cette fois...
Son visage prend une expression bizarre que je ne reconnais pas. On dirait qu'il tente de sourire mais cela ressemble plus à une grimace.
- Comment se porte ton ami, sinon ?
- Il va... ça va aller pour lui.
Je regarde mes pieds et fais bouger mes orteils dans mes chaussures pour éviter qu'il ne remarque mon visage à mon tour cramoisi au souvenir de nos baisers.
- Pourquoi ne pas lui avoir effacé la mémoire ?
- Je ne pouvais pas ! C'est mon ami et je l'aime ! Je ne pouvais pas lui faire ça. Pas une seconde fois.
- Excuse-moi. Je ne voulais pas te juger.
- Laisse tomber. Tu ne peux pas comprendre. Vous ne pouvez pas comprendre ce que je ressens.
Il me relève le menton d'un doigt et m'oblige à le regarder dans les yeux.
- Nous ne sommes pas moins des êtres vivants avec des sentiments que toi, Jade. Rappelle-t-en avant de blesser l'un d'entre nous une nouvelle fois.
Je les ai blessé ? Quand ? Comment ? En disant quoi ? Et eux ?
Il m'embrasse tendrement sur le front en murmurant une excuse. Il part ensuite vers sa chambre. Poignet en main, il ne me regarde pas quant il prend la parole.
- Et Jade... Ne porte plus ce genre de tenues. Cela peut perturber.
- Je te perturbe ?
Je joue avec le feu. Comme j'aime le faire pour l'embêter.
- Non.
Mensonge. Quel menteur ! C'est écrit sur son visage et ça clignote.
- Alors tu dis me trouver laide ?
- Quoi ?! Bien sûr que non ! Tu es... C'est juste que... Les hommes te regardent... Et... Ce n'est pas approprié pour ton âge.
Il claque la porte derrière lui, frustré au plus haut point du fait que je fasse des mimiques pour me moquer de lui. J'arrête quand il prononce sa dernière phrase.
Mon âge ? Je pensais qu'il était enfin passé au-dessus. Apparemment non et ça me dérange qu'on me voit encore comme une gamine. Je ne peux plus l'être depuis 3 mois maintenant.
- Oh ! C'est quoi cette tête ? Cela ne s'est pas terminé en happy end ?
Alice m'observe un magazine dans les mains tandis que je rentre en claquant la porte.
Je ne sais pas de qui elle parle alors je ne préfère pas répondre.
- Apparemment non.
Elle lâche son magazine et s'assoit en tailleur.
- Tu veux me raconter ?
- On n'est pas dans un film américain. Et on n'est même pas amie, je te signale. Pourquoi je te raconterais ce que je ressens ?
- Donc tu ressens des choses pour cet humain ?
- Tu as entendu ce que je viens de te dire ?
- Je touche un point sensible, on dirait.
- Arrête.
Je retire ce qui reste de mes vêtements après leur découpage par Alice et enfile mon jogging préféré avec un T-shirt large. Je m'installe au côté d'Alice sur le lit et me glisse sous la couette.
Elle me rejoint et me regarde.
- Tu vas me fixer longtemps ? Car c'est assez flippant quand ça vient de toi.
- Mais pas quand c'est ce Mack ? Ou même Adesh ? Ou encore Peter !
Je l'étouffe avec un coussin tandis qu'elle explose de rire.
- Ah, Jade, Jade, Jade, Jade. Quel prince ragoutant choisiras-tu ?
- Mack est juste un ami. Peter me prend pour sa petite soeur et Adesh... je ne le connais même pas.
- Tu diras ça à d'autre. Tu n'as pas embrassé ton ami, si ? Et Peter, vous êtes déjà bien proches et vu les regards qu'il te lance quand tu ne le regardes pas, je me pose des questions s'il ne pense pas à aller plus loin avec sa "soeur". Et pour finir. Adesh. Je pense que vous ne vous laissez pas indifférents.
- Est-ce que tu dors parfois ?
- Je crois que ça m'arrive.
- Tant mieux, je pourrais en profiter pour te faire dormir à jamais alors.
- Tu es adorable !
- Et toi, horrible !
- Merci mon chou.
- Merci à toi. Je me suis fait agressée par ta faute.
- Non, chérie, la tienne seulement. Tu es canon et tu le caches sous tes sacs de patates. Mais il suffit que tu les retires pour que les gens le remarquent. Puis après, c'est pas ma faute si les humains sont pervers !
- Et si mes "sacs de patates" me conviennent ?
- Ce n'est pas mon cas. Désolée, mais si je dois trainer avec toi, tu devras respecter un minimum de style.
- Merci mais non merci. Je n'ai pas envie de finir en micro-short ni en T-shirt brassière tous les jours.
- Cette tenue était pour voir jusqu'où je pouvais aller.
- Attends ?!! Tu me dis que tu as fait exprès ?
- C'est ça. Franchement, j'ai cru que tu allais m'arrêter.
Elle est morte de rire. J'ai envie de l'étrangler.
- Puis j'ai compris plus tard pourquoi tu ne l'as pas fait. Tu le souhaitais en quelque sorte. Te révéler enfin.
- Me révéler à moitié nu ? Je ne rêvais pas de ça non.
- Non, te révéler mentalement. T'affirmer au lieu de te cacher derrière ces tenues difformes. Tu es devenue Papillon aujourd'hui !
- Pitié, sauvez-moi.
Je me reçois un oreiller pleine face de sa part.
- Je suis sérieuse. Du coup, on ira faire du shopping ce soir.
- La nuit, les magasins sont fermés. Car les gens normaux dorment.
- Et tu crois qu'on y va ce soir pour quoi ?
Je m'étouffe avec la clémentine que je suis en train de manger.
- Tu es en train de dire qu'on va voler ? Je ne suis pas une voleuse !
- Il y a un commencement à tout.
- Non !
- Les humains nous doivent bien ça vu qu'on les protège.
- Ce n'est pas censé être une action altruiste ?
- Altruiste ? Tu m'as bien regardé ?
Ouais, bon c'est vrai que je me voile un peu la face là. Alice est plutôt nombriliste.
- Je t'entends, tu sais.
- Et je pense faux ?
- Non.
Bien que je m'attende à cette réponse, la pensant moi-même, je remarque que cela sonne faux. Il y a donc quelque chose qui la touche et qui lui importe. Je mets cette information de côté pour plus tard.
Elle me coupe dans mes pensées par une question que je n'aurais jamais cru entendre de sa bouche.
- Tu veux bien regarder avec moi "L'incroyable famille Kardashian" ?
- Tu n'es pas sérieuse, là ?
Je n'arrive pas à y croire quand elle me lance un regard noir.
- Je ne comprends pas ces humains. Et leur stupidité m'intrigue.
- Vas-y si tu veux.
Elle allume la télé et met la chaîne où est diffusée l'émission. Loin d'être fan, proche d'anti-fan et de "l'enfer existe" quand l'émission se lance, je regarde pourtant avec elle. Le truc avec ce genre d'émission, c'est que même si tu n'aimes pas, tu as dû mal à t'arrêter de regarder tellement ton cerveau se ramollit (sûrement à cause du niveau) et devient une addict.
C'est alors qu'on frappe à notre porte. Enfin trois ou quatre heures après.
- QUOI ?
Notre cri est commun. On nous dérange en pleine émission tout de même !
Adesh rentre et nous observe avant d'exploser de rire en nous voyant, blotties sous la couette et hypnotisées par l'écran et les âneries qui en sortent. Les autres suivent et nous observent étonnés.
- Pourquoi tu rigoles ? Et qu'est-ce que vous faites tous là ?
- On pensait aller manger vu l'heure.
- Et vu le bruit que fait ton estomac Liam.
Alice déclare ça d'un ton tranchant en ne quittant pas l'écran des yeux.
- Vous n'avez pas faim les filles ?
La question de Lysie est pertinente. Mais on ne se l'était même pas posée.
- On verra plus tard.
J'approuve de la tête. Mais soudainement la télé se coupe.
Je regarde Alice qui me regarde également puis on se tourne vers le détenteur de la télécommande.
- Maintenant, on va manger. Vous vous êtes assez abrutis devant la télévision et avec cette émission pour des mois.
- Passe moi la télécommande !
La rage d'Alice ne change rien.
- S'il te plait...
Je lui fais les yeux doux mais rien.
- Habillez-vous, on sort. Vous avez cinq minutes à compter de maintenant et pas une de plus.
Le ton est donné. Même Alice se plie aux ordres de Peter le commandant en chef.
Cinq minutes plus tard, on est sur le trottoir.
- Pizza ?
Je le propose car j'en rêve depuis que je suis sortie de ce sommeil de 3 mois.
On me regarde bizarrement.
- Ne me dites pas qu'aucun de vous n'aime la pizza !
- On ne connait pas en fait, Jade. On ne mange pas vraiment ça d'habitude.
- Je vais donc vous apprendre la vie ce soir.
Accrochée au bras d'Adesh et de Lysie, on avance sûrement dans les rues.
- C'est ces choses là que tu veux nous faire manger ?
Je tape Adesh sur le bras quand il désigne l'art culinaire ultime dans une assiette d'un client du restaurant devant lequel on s'est arrêté.
- Ceci est un plat offert par les Dieux. Un peu de respect.
- Désolé alors. Allons goûter ça !
Il m'attrape par l'épaule et on entre dans le restaurant italien.
Tout contre lui, je me sens mal à l'aise. Son geste n'est pas celui d'un ami mais d'un possesseur. Comme le ferait un petit ami. Peut-être avec plus de classe et moins de brusquerie mais cela ne change rien aux petites étincelles qui semblent crépiter en moi.
Quand enfin, on s'assoit, tous ces sentiments s'envolent et je respire à nouveau normalement. Alice me lance un regard entendu et je lui donne un coup de pied qu'elle reçoit avec une grimace élégante. Je lui souris avec ironie.
Quand on reçoit nos pizzas, je suis la seule à me jeter dessus, affamée.
Je les pousse à faire de même. L'appel du ventre est finalement trop fort et ils se lancent.
Leur réaction est risible. Mais je me retiens. J'ai toujours vécu comme ça, pas eux. Je ne peux pas leur demander plus.
Tandis que Peter utilise ses couverts et que Lysie mange la du bout des doigts pour rester propre ; Alice, Liam et Adesh ne se formalisent plus et font comme moi. A bat les couverts et merci les mains !
Un sentiment fugace me traverse. Mais je l'ai reconnu. C'était le sentiment d'être heureuse d'être là. Tandis que je profite de la vue par la fenêtre en dégustant ma pizza, j'avale soudainement de travers.
Un homme dans la rue, d'une quarantaine d'années mais qui en parait soixante, se déplace lentement et difficilement à cause de la maladie. Beaucoup de gens sont malades, vous me direz. Sauf que cette fois, je sais pourquoi. Un de ces monstres jaunes, en taille rétrécis, se trouve sur son épaule gauche et a sa bouche contre son cou. Je vois comme un fluide blanc se déverser du corps de l'homme vers cette chose.
Toute l'innocence et le plaisir du moment me quitte. Ma pizza s'écrase mollement sur la table et je me lève brusquement. Ma chaise s'écrase au sol et je sors du restaurant en courant à la recherche de l'homme que je viens de voir. Quand je le repère, je ne réfléchis pas et je le suis.
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