Chapitre 14 : Nouvelles du monde
Après avoir repris la mer, j'ai été convoqué dans la salle de contrôle pour rencontrer le prince et son oncle. Je n'avais que peu d'espoir, après ce que j'ai fait, au mieux je devais quitter l'équipage, mais il était plus probable que je sois exécuté. L'idée d'avoir laissé une dernière impression de moi aussi horrible à Sosha me donnait mal au cœur. Mais je refusais d'être le genre d'homme à choisir la fuite, je ne peux plus faire ce choix, après ce qu'il s'est passé.
Le prince me questionna, sa cicatrice agitée par un tic nerveux : "Depuis combien de temps étiez-vous au courant ?"
J'essayais de garder une contenance en ne lui révélant cette fois que la stricte vérité : "Depuis l'évasion de l'Avatar, mon prince."
"Et vous m'avez menti, désobéi à mes ordres et mis en danger des membres d'équipages par vos décisions, délibérément. Pourquoi ?"
"Je voulais protéger la princesse d'elle-même et de ses décisions. En faisant passer son départ pour un enlèvement, j'ai pensé qu'en étant assez réactif je pouvais la ramener à bord sans que son revirement ne s'ébruite et préserver son honneur de princesse."
Le prince sembla réagir au mot "honneur". Il commença à marcher dans la salle, se tenant le visage entre ses mains, réfléchissant : "En temps normal vos actes sont impardonnables. Mais vous avez bien fait de dissimuler ainsi la vérité. Si Zhao avait connaissance de ses informations, je ne donnerais pas cher du sort de ma sœur. Même si elle se comporte comme une idiote elle reste un membre de ma famille, et je ne peux pas l'abandonner. Et nous devons absolument la retrouver avant que Zhao ou n'importe qui d'autre la trouve. Dans le cas contraire, je ne pourrais plus rien faire pour la protéger. Nous capturerons du même coup l'Avatar et mettrons fin à ces inepties."
"Nous ? Vous n'allez pas me renvoyer ?"
Iroh, silencieux jusqu'alors pris la parole : "Non, en effet, tu as la confiance de l'équipage. Tu as prouvé plus d'une fois ton dévouement envers notre nation et notre famille. Tu sembles être le plus en capacité de convaincre Sosha de revenir parmi nous. Et dans ces conditions, je ne pense pas qu'il soit possible de nous séparer de toi. En vérité, c'est pour cela que tu es ici. Je me suis entretenu avec mon neveu. Bien que réfractaire au premier abord à te donner une seconde chance, il se rangea à mon avis après que je lui aie exposé tes intentions."
À ses paroles, il sortit un petit mouchoir. Une fleur de lotus blanc dont une flamme ornait le centre, habillait un fond noir. J'ai reconnu ce symbole du premier coup d'œil. Il s'agissait de l'emblème personnel du prince Iroh et du symbole qui ornait les bannières et les armures de ses soldats lorsqu'il guerroyait autrefois au royaume de la terre.
Il me le tendit : "Je veux que tu prennes ce mouchoir. À partir de maintenant tu seras envoyé autant que possible dans des missions spéciales et parfois dangereuse. Tu devras localiser l'Avatar, mais ta mission principale sera de retrouver Sosha et de la mettre en sécurité. Ce n'est qu'un bout de tissu, mais il représente la confiance que nous plaçons en toi et ton jugement, ne le perds pas. Il te sera utile auprès des représentants de notre nation. Il te suffira de le sortir et d'annoncer que tu parles en mon nom pour que l'on t'accorde un certain nombre de faveurs. D'ordinaire je n'utilise pas mon autorité pour obtenir des privilèges, mais l'avenir de ma petite nièce en dépends peut-être, alors je fais exception pour cette fois."
Je n'en revenais pas, moi qui pensais être puni, me voilà récompenser pour avoir menti et m'être dressé contre des personnes qui me faisaient confiance : "Je ne comprends pas, je ne suis pas digne de cet honneur. Comment pouvez-vous me faire confiance après ce que j'ai fait."
"Oh, tu sais, l'honneur est souvent montré de la plus belle des façons par ceux qui s'en trouvent indignes. Car les personnes qui sont dépourvues de valeurs sont incapables de le reconnaitre."
"Dans ce cas, je ferais mon possible pour vous servir du mieux que je peux. Je ne vous décevrais plus."
J'inclinais respectueusement la tête devant le vieux général avant de prendre le bout de tissu et de le ranger dans un des plis de mon armure.
Je m'apprêtais à sortir quand le prince, ayant sans doute senti que je n'avais pas tout dévoiler, me demanda : "Il y a autre chose que tu voudrais nous dire ?"
J'ai jugé préférable de taire mon voyage dans le monde des esprits et les multiples choses que j'y aie apprises pour l'instant. Je doute que le prince ait été ravi d'apprendre que sa sœur aurait pu devenir l'Avatar.
Mais j'ai tout de même trouvé une autre information que je pouvais donner sans risque : "Quand j'ai retrouvé la princesse elle m'a proposée de rejoindre l'Avatar et son groupe. J'ai refusé sans hésitation."
Honnêtement surpris, le prince répondit : "Dans ce cas, ta loyauté envers la nation du feu t'honore, Voccan. Tu peux disposer."
Je repris mes fonctions de cartographe et de documentaliste après cela. Nous avons passé quinze jours en mer, ne faisant escale que deux fois pour le ravitaillement de vivres. En quittant l'île de Kyoshi en direction du Nord, j'ai pu fouler le sol du royaume de la terre pour la première fois depuis au moins six mois. Nous avons aperçu sur notre route le village côtier de Quinchao, il faisait directement face à l'île de Kyoshi. Mais nous restions sans nouvelles de l'Avatar et de son groupe.
...
Mes missions pour le compte du prince ne se sont pas faites attendre. Il a été décidé que nos forces se diviseraient plus à l'avenir pour couvrir davantage de terrain. Le plus gros des troupes commandées par Zuko en personne se dirigeait vers le village d'Hégémon dont l'embouchure d'un fleuve nous séparait de notre position actuelle.
On m'a déposé dans un petit village minier du nom de Coron, sur la côte du royaume de la terre. Je devais trouver des indices sur les agissements de l'Avatar sans attirer l'attention. J'ai eu le droit de choisir les hommes m'accompagnant pour cette mission, et je me suis à nouveau entouré de Fuo et Paran. Ils étaient tous deux partis enquêter auprès des civils du royaume de la terre et de la garnison de soldats du feu en occupation dans la ville.
Avant le départ du vaisseau, j'ai pris l'initiative d'acheter un faucon messager pour mon usage personnel. Je l'ai appelé Sennu ; une noble bête d'une envergure d'un mètre, des plumes brunes sur le dos et les ailes ainsi qu'un duvetage beige sur le ventre. De longues plumes partant de son bec lui faisaient comme une longue moustache, alors que d'autres remontaient sur les côtés de son crâne, lui donnant un air menaçant. Mais son apparence est trompeuse, il est d'une nature craintive et très câline. Il adore par exemple qu'on lui caresse le ventre, enfin seulement dans mon cas. Il est très affectueux envers moi, mais rejette le contact de toute autre personne, même mes plus proches amis.
Je l'ai acclimaté au navire pour qu'il puisse le retrouver où qu'il soit dans le monde, une créature très intelligente. De cette façon, il me suffirait d'envoyer Sennu avec un message coloré d'un ruban noir pour avertir le prince de l'avancement de mes recherches.
Le village avait un aspect pittoresque, les gens y vivent de manière modeste. Les maisons en pierre correspondent à l'architecture typique du royaume de la terre. En particulier la mairie, offrant une toiture de tuiles vertes et une façade aux fioritures de couleur or. Les étals des magasins, loin de proposer de tout, ne suggéraient toutefois pas une situation de manque ou de famine.
J'ai passé ma matinée à arpenter les rues, à la recherche des nouvelles croustillantes en tendant l'oreille sur la place publique. Bien souvent je ne tombais que sur des ragots de voisinage m'étant tout à fait étranger, mais j'aimais voir cette petite bourgade s'animer au gré des passages.
Une conversation de la matinée à tout de même retenue mon attention, attisant mon indignation envers les soldats de ma propre nation.
Un officier d'un grade intermédiaire, suivi de certains de ses hommes, toqua à une porte : "Ouvrez !"
Il pénétra dès qu'on lui ouvrit la porte sans prendre la peine de se faire inviter. Une ménagère aux cheveux poivre et sel l'interpella dans un mélange de crainte et de véhémence : "Qu'est-ce que vous voulez ? Je vous aie déjà payé cette semaine !"
Le militaire moustachu au visage ingrat commença à former une flamme dans ses mains : "L'impôt vient de doubler. Et vous ne voulez pas qu'il arrive un accident, n'est-ce pas ? Le feu est une chose si difficile à maitriser."
Se résignant, la tenancière comprit qu'elle risquait gros à lui résister. Elle lui tendit une maigre poignée de piécettes provenant d'une cassette qui ne devait plus contenir grand-chose.
Le garde repartit en laissant tomber certaines d'entre elles après les avoir inspectés : "Vous pouvez garder les pièces en cuivre."
Durant toute la scène ma main était restée crispée sur la poignée de ma lame. Je n'arrivais pas à croire que mon peuple pouvait se montrer aussi ignoble et mesquin avec des civils. Mais j'étais pieds et poings liés. Je ne pouvais pas me permettre d'intervenir, j'ai peut-être la faveur d'un prince de la nation du feu, mais en compromettant l'autorité mise en place ici pour contredire la parole d'un officier, je ferais acte de trahison. Et la trahison n'est pas facilement pardonnée dans la nation du feu.
...
En fin de matinée, j'ai retrouvé mes amis et nous nous sommes attablés à un restaurant avec des plats abordables pour leur qualité afin de partager nos trouvailles. Je suis passé rapidement sur ma partie puisque je n'ai pas recueilli d'informations notables. Je ne leur aie pas partagé mon point de vue sur la conversation que j'ai surpris le matin même, cela n'avait pas de rapport avec la mission.
Paran ayant échangé autour d'un verre avec les soldats de la caserne, nous donna des nouvelles du front. La garnison de Zhao partie du port de Ketu a anéanti une flotte de dix navires pirates près de l'île de Natsuo, à mi-chemin entre les côtes du royaume de la terre et l'île du Croissant de lune, une des plus excentrées de la nation du feu.
L'annonce de cette nouvelle m'a partagé. J'étais heureux d'apprendre la disparition d'une vulgaire bande de pirate après ma mésaventure avec un de leurs navires. Mais d'un autre côté, la victoire de Zhao n'allait que l'enorgueillir davantage, bien que ça le détournais tout de même de la quête de l'Avatar.
Mais Paran nous partagea aussi qu'un des capitaines les plus fidèles de Zhao, du nom de Masaru mena le siège de la ville de Shen Guan, plus au Sud.
Il conclut son récit en nous disant : "Il parait que Masaru connu une farouche résistance des assiégés. L'Avatar et son groupe aurait même participé à la bataille. Mais la victoire fut de notre camp. L'Avatar a juste eu l'opportunité d'évacuer les civils et ce qui restait des fils de la terre."
Fuo répliqua : "Dans ce cas, on a aucun moyen de savoir s'ils ont appris au sujet des véritables intentions de la princesse."
Mon camarade s'adressa à moi par la suite : "Ouais, c'est vrai. Mais je suis pas peu fier de vous avoir déniché cette information. La porte d'entrée d'Omashu est tombée. La fin de la guerre se rapproche à grand pas. On devrait envoyer ton faucon au prince. Après tout il est plus près de Shen Guan que nous."
Mais Fuo le coupa dans son enthousiasme en communiquant les informations qu'il a glanées auprès des citoyens, en lien direct avec la fin du récit de Paran : "Crois-moi, rien n'est encore gagné. De mon côté j'ai entendu dire que l'Avatar s'est retranché à Omashu et qu'il a conclu une alliance avec son roi : Bumi. Et il se trouve qu'âgé de cent douze ans ce papi était son ami d'enfance."
J'ai voulu alors clarifier la situation : "Tu es sûr de la validité de tes informations ?"
"Certain, aucun doute."
"Dans ce cas, on ne peut rien faire, sinon envoyé un message. Omashu est la deuxième ville la plus fortifiée du royaume de la terre après Ba Sin Se, et son roi est un des plus grands maitres de notre temps d'après les rumeurs. Même si le prince voulait lancer une attaque, avec notre nombre d'hommes actuel, ce serait du suicide. Nous ne pouvons qu'attendre d'autres nouvelles et espérer que l'Avatar sorte de cette forteresse."
Mes amis semblaient résignés comme moi. Le prince devait revenir dans une semaine, nous allions donc l'attendre ici en continuant de surveiller les rumeurs, c'était ce qu'on avait de mieux à faire. Contrairement à mes deux compères qui ont dégustés des ramens, j'ai opté pour des rouleaux d'algues comme plat principal. Et c'est en attaquant le dessert, une délicieuse tarte à la crème aux œufs, qu'un sentiment de soulagement immense m'envahit.
Sosha n'était plus avec nous, mais elle se trouvait en ce moment en sécurité derrière les murailles d'Omashu. Je n'avais plus à m'inquiéter pour elle pour la première fois depuis des semaines. À ma sortie de table, j'ai pris la résolution d'aider à la vie du village à mon niveau pour le reste de mon séjour. Et j'ai commencé par acheter quelques articles de peu de valeur à la dame qui s'était faite aborder par le garde en début de matinée, pour renflouer sa caisse.
...
Le lendemain matin, j'étais à nouveau sur la place du village lorsque je vis Fuo suivi de Paran courir vers moi à travers la foule.
Légèrement essoufflé il commença : "J'ai des nouvelles qui vont t'intéresser. Un convoi de maitres de la terre part ce matin vers une prison maritime par bateau."
Tandis qu'il reprenait son souffle, je m'intéressais : "Très bien, et quel rapport avec la mission ?"
"L'une d'entre elles est une jeune fille vêtue de bleu avec deux liens de cristaux d'eau dans ses cheveux. Et un collier portant l'emblème de la tribu de l'eau. Ça correspond bien à la description de la fille qui voyage avec l'Avatar, non ?"
Cette nouvelle est venue rebattre les cartes : "Si c'est vrai, c'est fort possible. Dis-m'en plus."
"Ils l'ont arrêté ce matin, elle se disputait aux abords des mines avec un garçon lui aussi habillé à la mode des tribus de l'eau, doté d'une queue de cheval. Elle n'arrêtait pas de se plaindre de la taille de ses oreilles gigantesques. Et lors du passage d'un groupe de garde elle a criée : Gare au maitre de la terre ! Et à ce moment-là, un énorme rocher s'est élevé du sol. L'instant d'après, elle fut livrée aux autorités."
"Alors, il n'y a pas eu de combat ?"
"Non, d'après les témoins, le rocher s'est juste soulevé. Et un vent frais s'est levé en même temps."
À partir de là, j'ai reconstitué assez facilement le puzzle dans ma tête : "La jeune fille n'est pas une maitresse de la terre, mais de l'eau. Et aucun membre de leur groupe n'en est un à ma connaissance, alors j'imagine que l'Avatar a utilisé sa maitrise de l'air pour faire léviter le rocher, créant ainsi une simulation convaincante. Les gardes ont cru à cette comédie ?"
"L'un d'entre eux a d'abord cru qu'un lémurien caché derrière la pierre était un maitre de la terre avant de soupçonner la jeune fille. On a pas affaire à des fins limiers."
"En effet. Quand doit partir le convoi ?"
Paran s'était renseigné à ce sujet : "Dans une heure."
"Très bien, pas de temps à perdre. Je vais au lieu de l'embarquement pour vérifier si nous avons affaire à la bonne personne. Si c'est le cas, je vais louer un bateau pour suivre le convoi à la trace. Une fois qu'il sera arrivé je découvrirais la raison de cette manigance et j'enverrai un message au prince. Vous resterez sur place au cas où la princesse ou l'Avatar restent ici, de plus je serais plus discret en faisant cavalier seul sur place."
Ils me répondirent d'une seule voix : "Entendu."
"Messieurs, la chance est avec nous" Une chance de réparer mes erreurs auprès de la princesse.
Sur le port, je n'eus aucun mal à reconnaitre la jeune fille sans me faire voir, elle ne se douterait pas un instant de ma filature. Grâce au mouchoir donné par maitre Iroh, je trouvais sans encombre une embarcation fonctionnant au moteur à charbon pour les suivre, auprès de la garde. Je n'eus même rien à payer.
Une fois sur mon bateau, je me suis dissimulé en ne quittant pas la fille des yeux. Lorsque leur convoi quitta le port, je les aient suivis à distance respectable pour ne pas me faire repérer. Cette fille était le fil d'espoir qui pourrait me conduire à l'Avatar et à la princesse. J'espérais tant me faire pardonner et lui faire entendre raison.
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