Chapitre 10 : Le temple de Kyoshi

Les heures précédent notre débarquement je m'occupais l'esprit pour ne pas trop penser à ce qui nous attendait. J'ai bien ajusté mon armure et aiguisé mon Wakisashi. J'ai relu mes notes. Et j'ai aussi pris le temps de calmer et préparer les Rhinos-Komodos pour leur sortie, à la demande du prince.

Quand on nous communiqua que les terres de l'île de Kyoshi étaient en vue, je suis monté sur le pont pour voir ce qu'il en était. Nous débarquions dans une petite crique, parfaite pour jeter l'ancre. La présence de l'Unagi gigantesque sembla décourager les hommes. Et il y avait de quoi. Une anguille d'une taille absurde, au dos noir et au ventre gris. Sa tête que décoraient deux grands barbillons crachaient des centaines de litres d'eau de mer, il semblait irrité ou alors en chasse. Il tourna sa gueule béante, remplie de dents acérées vers nous, ses yeux verts inexpressifs et vides venaient amplifier l'atmosphère pesante et poisseuse de ce moment.

Mais cela ne dura pas, dès qu'il vit notre embarcation, il replongea dans les fonds marins d'où il venait. La première défense de l'île de Kyoshi fut donc écartée, dans le plus grand des calmes.

Le prince en personne, avant de choisir les membres pour son expédition, vint s'adresser à moi : "Voccan, je souhaite que vous restiez ici, que vous veillez sur le navire et les hommes qui ne participeront pas à la recherche, en compagnie de mon oncle."

Je suis du genre à ne pas faire de vagues et obéir placidement aux ordres donnés, mais je m'étonnais de ce choix : "Mon prince, je ne comprends pas. Je pense être un soldat avec les compétences requises pour cette mission. Pourquoi m'en écarter ?"

À l'inverse de ce que je m'attendais, il ne se mit pas en colère : "Vous avez en effet prouvez vos compétences, c'est pour ça que je vous confie ce poste."

Lisant entre les lignes, je compris ses véritables intentions : "C'est pour votre sœur ?"

Il se retourna pour que je ne puisse pas discerner les émotions sur son visage, mais sa voix l'a trahi : "Je n'ai besoin de personne pour ramener l'Avatar ainsi que ma sœur à bord de ce navire. Et votre présence durant l'opération serait plus un frein qu'une aide. Tenez votre poste, jusqu'à mon retour."

Il voulait régler cette affaire par lui-même. De plus, il craignait que mon attachement envers la princesse l'emporte sur mon devoir. Une crainte justifiée, car entre les deux, à cet instant, je n'aurais su que choisir.

La rampe de débarquement s'ouvrit, laissant sortir les soldats enfourchés sur les rhinos, le prince à leur tête, donnant ses instructions : "Je tiens à ramener l'Avatar vivant. Et que l'on récupère ma sœur, saine et sauve."

Je les regardais s'en aller, déçu de ne pas pouvoir la sauver comme elle l'avait fait pour moi. Je m'occupais à observer plus en détail le paysage. L'île dispose d'un climat tempéré, mais sa proximité avec le pôle Sud, accompagnée d'un hiver rigoureux maintenaient une température assez basse. Pour preuve, les sapins n'étaient pas encore dévêtus de leurs habits de neige.

Je regardais la destination du prince, un petit village pittoresque, les maisons en bois aux toits de chaume accueillaient encore les vestiges de l'hiver qui se terminait. Un endroit où il doit être agréable de vivre, à mes yeux. Et j'espérais que nos actions demeurent sans conséquences dramatiques pour les habitants et ce qu'ils ont construit.

Iroh s'approcha de moi en triturant sa barde, en général ça annonce qu'il a une idée derrière la tête : "Ainsi, tu me tiens compagnie pendant que mon neveu s'en va débusquer l'Avatar ?"

"Oui, nous verrons bien ce que vont donner les recherches dans ce village, j'imagine."

En mettant ses mains à l'abri dans ses manches, il ajouta : "Zuko est très doué pour voir ce qu'il y a juste sous son nez, mais pas vraiment en ce qui concerne le fait de regarder plus loin. Si tu te souviens de nos parties de Pai Sho, un des conseils que je donne est le suivant : le premier coup n'est pas forcément le meilleur de la partie."

Pour appuyer ses paroles, il porta son regard ailleurs que sur le village. En le suivant, je me rendis compte qu'il pointait vers une grande statue de l'Avatar Kyoshi nichée dans les grands pins à l'écart des habitations. Essayant de comprendre, je répliquais : "Un sanctuaire ?"

Mystérieux, il répondit par énigme : "Un Avatar peu très bien en cacher un autre."

"Vous souhaitez que j'aille voir de quoi il en retourne ?"

"Je pense en effet que ce serait une bonne idée."

"Mais le prince m'a fait comprendre que je devais rester sur le navire, jusqu'à son retour."

"Il ne t'en voudra pas si c'est moi qui t'en donne l'autorisation. Je suis bien capable d'assurer la sécurité de l'équipage moi-même, malgré mon grand âge."

La perspective de revoir Sosha m'empli d'un enthousiasme nouveau : "Je vous remercie Iroh. Puis-je prendre des hommes avec moi ?"

"Bien entendu."

Je ne perdis pas de temps et j'appelais Fuo et Paran, eux aussi restés sur le bateau, à me suivre à terre, avec la bénédiction d'Iroh. Je pouvais encore avoir un rôle à jouer dans cette histoire.

...

Après une dizaine de minutes de marches, nous arrivions tous les trois aux abords du temple ; une simple bâtisse, la statue de l'Avatar constituait le seul aspect grandiose du lieu.

En la remarquant, Fuo fit une remarque très pertinente : "On dirait qu'elle vient juste d'être repeint."

Mon deuxième ami ne comprit pas tout de suite la signification de ce détail : "Je vois pas en quoi ça nous concerne ?"

Je me suis mis en tête de l'éclairer : "Si cette peinture est fraiche, ça peut vouloir dire deux choses. Ou les habitants de l'île vouent toujours un culte sans borne à leur Avatar après plusieurs siècles. Ou ils l'ont rénovée en l'honneur du nouvel Avatar."

Alors que je contemplais le visage dur de Kyoshi, surplombant ce bâtiment érigé en son nom, quelque chose vint perturber le calme de la nature. Des bruits d'explosions et des cris de douleurs et de détresses, provenant du village.

De toute évidence, les villageois ont opposé résistance aux forces du prince. Je devais accomplir ce pourquoi j'étais venu, alors j'ai demandé à mes amis d'opéré de manière efficace : "Messieurs, je pense que nous ne sommes plus les bienvenus sur cette île. Nous devons faire un rapide état des lieux avant de revenir au bateau. Je vais m'aventurer dans le temple pour voir s'y quelqu'un s'y cache. Vous deux restés ensembles et sécurisés la zone, méfiez-vous des assauts des guerrières Kyoshi."

Paran ne parut pas prendre en compte ma mise en garde : "Ça devrait aller, c'est juste des femmes avec des éventails. En plus la plupart d'entre elles sont des non-maitres."

"Elles sont reconnues pour être les meilleures gardes du corps de tout le royaume de la terre, voire du monde. Tu aurais tort de les sous-estimé. Et puis, je suis moi aussi un non-maitre, et ça ne m'empêche pas de te botter le cul quand je veux."

"C'est bien vrai. On prendra bien garde aux gonzesses, t'en fait pas, va prier."

Paran ne semblait toujours pas mesurer la délicatesse de la situation, mais il se trouvait avec Fuo, qui lui avait la tête sur les épaules. Si ses deux-là restaient ensemble, il ne pouvait pas leur arriver grand-chose.

En entrant dans le temple, je vis plus de similitudes avec un dojo qu'un véritable sanctuaire. Les murs ne comprenaient aucun motif coloré. Le sol se constituait de tatamis. En revanche une grande fresque représentant la vie de l'Avatar Kyoshi resplendissait à l'opposé de l'entrée. Les côtés étaient décorés d'armes blanches, en particulier des éventails de guerre : l'arme signature de Kyoshi et de ses guerrières.

J'aurais bien voulu allumer une torche pour y voir plus clair et admirer les détails de la pièce, mais j'aurai craint trop d'abimer les œuvres entreposées ici. Surtout que certaines seraient des reliques ayant appartenu à l'Avatar en personne.

Alors que je fouillais à la recherche de quelque chose, je suis tombé sur quelqu'un. Un tout petit quelqu'un. Un enfant, paralysé par la peur, qui tremblait de tous ses membres en me voyant. J'ai essayé de le rassurer comme je le pouvais : "Bonjour petit, tu n'aurais pas vu rentrer une personne ici ? De préférence une avec une flèche bleue sur le crâne, ou une fille avec un chignon et des vêtements amples ?"

Sa réaction m'a surpris, puis attristée : "Arrière monstre, vous n'aurez pas ce que vous êtes venu chercher ! Vous pouvez me bruler, je ne vous dirais rien !"

"Je ne veux pas te bruler voyons. Je cherche juste des personnes importantes."

"Laissez-moi partir, je veux pas finir comme papa qui est allé à la guerre."

Pauvre petit, pour lui nous sommes des envahisseurs. Malgré les tendances isolationnistes de l'île, ça n'a pas empêché certaines personnes de partir et de prendre part aux combats. Il me fixait avec détermination, cachant à peine sa crainte envers moi.

Je me suis écarté du passage pour lui laisser une porte de sortie, de toute façon, je ne pourrais rien obtenir de lui et s'il prenait la fuite ça ne changerait rien à la situation : "Tu peux partir si tu veux, je ne te retiens pas. Désolé pour ce qui t'est arrivé et pour ce qu'il se passe."

Je lui avais offert une échappatoire, mais il restait prostré dans le noir : "Non, si je sors vos hommes vont me capturer et m'emmener loin d'ici. Je bouge pas."

Ça n'aurait servi à rien de le démentir sur ce point. Je l'ai donc laissé, c'est la meilleure chose que je pouvais faire : "Dans ce cas tu peux rester dans ton coin, si ça peut te faire plaisir."

...

En parcourant le temple, je suis tombé sur une petite alcôve, la dernière partie que je devais fouiller. En y entrant, j'ai trouvé une femme qui selon toute vraisemblance était une guerrière Kyoshi.

En tout cas, elle en avait tout l'attirail, un long kimono vert armuré, des insignes jaunes sur les bras, une coiffe métallique portant l'emblème du royaume de la terre. Mais j'ai pu voir au premier coup d'œil que ce n'était pas l'une d'entre elle, car elle portait aussi la coiffe royale de la nation du feu. C'était elle, c'était Sosha, je l'avais retrouvé !

Elle était assise en tailleur, me tournant le dos, faisant face à une enluminure de Kyoshi. En constatant cette bonne nouvelle, j'ai ôté la main de mon Wakisashi, que j'avais positionné par réflexe. Malgré tout le bruit que j'ai pu faire en fouillant la pièce, elle semblait ne pas m'avoir entendu. Elle était paisible, silencieuse, comme endormie.

Débordant de joie de la revoir, même dans ses circonstances étranges, je me suis mis à son niveau pour lui parler : "Sosha, je suis trop heureux de te retrouver ! Quelle folie t'a pris de partir comme ça ? Bon, l'important, c'est que tu ailles bien et que tu reviennes avec moi au bateau."

En prononçant cette dernière phrase, je pouvais enfin voir son visage. Il était maquillé à la manière des guerrières de cette île, la plus grande partie en blanc, des lignes partant du nez jusqu'aux yeux faits d'orange et noir, et les lèvres d'un rouge carmin.

Cette situation m'ayant simplement paru étrange au début, me sembla d'un coup inexplicable. Comment s'était-elle retrouvée dans un temple de l'Avatar, à porter les habits de l'ennemi, en toute tranquillité ? Et pourquoi ne me répondait-elle pas ? Il était impossible qu'elle ne m'ait pas entendue cette fois, cependant elle restait de marbre, ne laissant peser dans l'air que le souffle de sa respiration. Ses yeux fermés dans une expression de quiétude.

Un autre détail me frappa et pas des moindres, je pouvais voir mon propre corps, allonger sur le sol, à l'autre bout de la pièce, comme vidé de toute vie. Pris de panique, je m'écriais : "Non, c'est pas possible ! Je suis, mort !?"

Une voix féminine et autoritaire me répondit dans mon dos : "Non, tu ne l'es pas. Tu te trouves en ce moment dans le monde des esprits. Je me nomme Rangi, et nous ne devons pas perdre de temps, car nous avons beaucoup de choses à nous dire." 

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