5

On se retrouve à la fin pour un petit mot :*

---

Les écritures COLLÈGE PUBLIC gravées sur la façade permettaient peut-être de loger tout le monde à la même enseigne, mais juste à la tête de certains gamins on savait pertinemment qu'ils n'étaient privés de rien. Parmi ce genre de collégiens, France, avec sa moue dédaigneuse, et un brushing parfait. Son regard était aussi pénétrant que celui d'un serpent. Alix n'avait jamais eu l'occasion de la voir en vrai jusqu'alors. Elle avait simplement vue l'une des centaines de photos où elle posait comme un mannequin en devenir, lèvres ridiculement poussées en avant. Alix connaissait seulement France à travers ses vêtements qu'elle éparpillait partout chaque matin, et qu'elle retrouvait miraculeusement rangés à son retour des cours.

Alors qu'Alix l'observait depuis une poignée de minute elle remarqua soudain que France commença à jeter des coups d'œil à sa montre, en montrant des signes d'impatience . Elle cherchait Judith du regard. Deux amies à elle, brunes et déjà habillées comme des lycéennes, commencèrent à lui parler, et chercher du regard avec elle.

Alix était de l'autre côté de la rue, les regardant avec désespoir.

— La violence sur mineur est passible de prison, alors reste calme, se dit-elle à elle-même en s'engageant sur le passage piéton.

Alix se posta juste devant France, alors qu'elle cherchait encore de toutes parts sa nounou, avec une impatiente qu'elle commençait à mal gérer.

— France ?

Elle se tourna vers Alix, l'air incrédule.

— T'es pas trop vieille pour vouloir un autographe ?

— Heu...Pourquoi je voudrais un autographe ?

— Pourquoi tu me parlerais autrement ? demanda-t-elle, les yeux écarquillés. On se connaît ?

— Je viens te chercher. Judith est malade, dit-elle les mains dans les poches.

France la regarda de haut en bas avec un regard empli de pitié.

— Ah, et j'ai un mot de ta mère qui en atteste. Tiens.

France prit le papier avec nonchalance et le déplia.

— Sympa ton T-shirt ! lança la plus grande des deux brunes à Alix tandis que France lisait le bout de papier. C'est quelle marque ?

L'autre brune commença à pouffer comme une idiote.

— Je ne sais plus, sûrement Zara.

La petite brune éclata de rire, tandis qu'un sourire à demi voilé commençait à se dessiner sur le visage de l'autre.

— Judith vient toujours un minimum bien habillée, siffla France en relevant la tête. T'es pas à la hauteur du tout pour une nounou. Tu fais... pauvre.

France avait dit ça en affrontant Alix du regard. Cette dernière restait impassible.

— Tu sais ce qui fait super pauvre ? murmura Alix avec un sourire mauvais.

France ne dévia pas du regard, tandis qu'Alix rapprocha son visage du sien.

— Rentrer à pied.

Les deux potiches brunes laissèrent échapper un hoquet d'effroi. France eut un haussement de sourcil qui trahit sa surprise.

— Si Slade te voit marcher pour rentrer chez toi, il risque de ne même plus te regarder, lança la plus grande des deux brunes.

— Tu penses ?

— Anna-Tess a raison, affirma la petite brune.

 France se mordit la lèvre inférieure avec rage.

— Pas le temps de vous faire la bise, je file !

Elle jeta des regards de toutes parts, et lorsqu'elle aperçut une horde de garçons sortir de l'école elle commença à marcher à une vitesse phénoménale :

— Allez, on y va. Il ne faut pas que les gens me voient avec toi. Et bien sûr tu ne marches pas à moins de trois mètres de moi.

— Moi qui comptais te faire un câlin, ricana Alix.

  France continua à accélérer le pas, essayant dans le même temps de marcher comme un top modèle à un défilé. Alix la regardait se dandiner – parce qu'on ne pouvait plus appeler ça marcher – durant dix bons mètres, sous le regard étonné des passants.

— Tu m'as foutu la honte ! lança-t-elle à Alix lorsqu'elles furent assez loin des deux potiches.

— Moi aussi je suis ravie de te rencontrer, annonça Alix avec un sourire hypocrite.

— Tu pourras me parler quand tu ne ressembleras plus à une matheuse sur le point de se suicider.

Alix se regarda dans une glace en passant. Elle portait ses vieilles Vans, un jean bleue claire retroussé, un T-shirt à motif. C'était simple, mais ça lui allait parfaitement. Elle était tout sauf dépressive, son regard pétillant en attestait. C'est vrai que ses cheveux châtain auraient eu besoin d'être coupés, mais son coiffeur personnel, c'est-à-dire elle-même n'avait pas été assez libre ces derniers jours.

— Attends, on doit traverser, cria Alix tant France était loin.

France se retourna, faisant mouvoir ses longs cheveux comme une star hollywoodienne, sauf qu'à la place d'un sourire dentifrice, elle fit un rictus affreux. Son visage transpirait la hargne, ça en était hilarant.

Constance était encore au primaire, en dernière année. Son établissement se trouvait à quelques pattés de maison du collège de France. Alix jeta un coup d'œil à sa montre. Elle avait mis trop de temps à aller parler à France sans avoir envie de l'étrangler. La sortie commençait dans une minute. Elle commença à accélérer le pas, esquivant quelques piétons sur son passage. France jeta un regard noir à Alix, lorsqu'elle commença à se rapprocher trop près d'elle. Alix ne releva même pas son front plissé et son regard haineux. Elle avait bien trop peur d'arriver en retard pour récupérer Constance. On ne savait jamais quel taré pouvait l'embarquer si elle restait seule devant son école.

Elles arrivèrent toutes deux essoufflées devant la porte d'entrée du primaire. Elles se frayèrent un chemin parmi la foule de parents.

— Je crois que tu avais déjà compris, mais je ne t'aime pas vraiment, déclara France en sortant un éventail de son sac Longchamp.

— Que me vaut ce nouveau compliment ?

— Tu m'as faite...

Elle regarda autour d'elle et dit doucement :

— ...transpirer.

Alix haussa les sourcils avec un air faussement compatissant.

— Elle est là, dit France.

Constance sortit de l'établissement, portant un sac à dos presque aussi grand qu'elle. Elle avait les cheveux auburn. Elle était mignonne avec son petit sourire en coin. Contrairement à sa sœur elle n'était pas en robe Chanel, mais habillée de manière normale si l'on peut dire. Rien d'extravagant en tout cas, mais ce serait étonnant que sa mère la laisse se promener avec des habits bon marché...

Elle s'avança spontanément vers sa sœur et vit qu'Alix restait à côté d'elle.

— T'es qui toi ? demanda Constance avec gentillesse.

— Alix. Je suis votre nounou de remplacement on va dire.

— Moi c'est Constance.

Elle riva  ses grands yeux verts sur  Alix.

— Et tu vas être notre nounou à temps plein ?

— Non, je suis déjà votre femme de ménage à temps plein.

France devient verte.

— Quoi ? s'égosilla-t-elle.

Elle activa son éventail davantage, de manière si théâtrale que même Constance roula des yeux.

— Bon, on va prendre une glace ou une pâtisserie ?

— Je dois vous ramener à la maison directement, décréta Alix en agitant ses clefs de voiture dans sa main.

— Maman ne voit jamais le temps passer quand elle feuillette ses magasines de mode, assura Constance en s'engageant dans la rue. Alors même si on reste une heure de plus dehors, elle ne remarquera pas.

— Ta mère me paye une heure pour que je vienne vous chercher, donc on rentre.

— Ça ne prendra même pas dix minutes, supplia Constance.

— Juste une glace, rajouta France qui restait toujours à l'écart.

— Pourquoi tu marches à trois kilomètres de nous, toi ? demanda Constance. Dis-le si on pue !

France fit un mouvement de tête vers Alix, qui ne releva même pas la désignation. Pour la faire rager Constance prit la main d'Alix, s'approcha furtivement de France et lui passa la même main sur le visage.

— Tiens, tu toucheras quelqu'un qui porte moins de mille dollars de vêtements sur soi.

France se tétanisa et laissa échapper un cri strident en pleine rue. Des gens se retournèrent sur elle, effrayés et consternés. Constance s'en alla reprendre la main d'Alix en riant. Elle avait une toute petite main, et douce avec ça. Alix ne s'attendait pas à ce qu'elle la prenne plus de cinq secondes.

France, quant à elle, cherchait des lingettes dans son sac. Elle s'essuya vivement le visage, entraînant une couche de fond de teint sur la lingette. Sa couleur de peau passa du légèrement bronzé au blanc porcelaine.

— Je vais te tuer Constance ! s'écria France. Tu sais que c'est notre femme de ménage ?

— Et alors ? Elle est cool, ça se voit. T'es juste une geignarde !

— Constance, arrête d'embêter ta sœur, ordonna Alix. Et France, arrête de croire que j'ai ébola, OK ?

— Je suis sûre que tu viens d'un de ces quartiers de pouilleux où il n'y a même pas l'eau courante, asséna-t-elle.

— Comment t'as deviné ? feignit Alix.

France était au bord de la crise de nerf. Elle prit une autre lingette et se frotta vivement le visage.

Après cinq minutes de pour parler, Alix s'arrêta devant un marchant de glace. Constance sautillait sur place à la vue de tous les parfums, tandis que France restait les bras croisés.

Alix sacrifia une partie de son salaire journalier pour leur acheter des pots de glace, mais leur mine égayée en valait la peine.

— Et toi tu n'en prends pas ? demanda Constance qui s'était déjà barbouillée de crème glacée.

— Non ma chérie. J'ai pas très faim, dit-elle en regardant à nouveau le prix du pot.

— Maman te les remboursera. Je lui en parlerai, promit Constance avec un large sourire.

— Pff, ça ne coûte rien du tout, à peine dix dollars chacun. Est-ce que tu savais que la glace la plus chère valait sept-cents dollars environ ? expliqua France avec un vrai sourire qui surprit Alix.

— À Manhattan ? demanda Constance.

— Non à Dubaï. La Black Diamant. Vingt-trois carats d'or saupoudrés sur ta glace à la vanille de Madagascar. J'en rêve la nuit.

— On ne fait pas du tout le même genre de rêve, murmura Alix.

— Elle rêve de Slade aussi, ricana Constance.

— C'est ton copain ?

France rougit, et continua à manger sa glace, le nez pointé vers le fond du pot.

— C'est le seul garçon qui ne veuille pas d'elle dans tout l'école, et du coup, c'est son amoureux, chantonna Constance en prenant la main d'Alix.

— La ferme la naine !

Constance lui tira la langue. France voulut lui jeter son pot de glace à la figure, mais Alix intervint. Elle menaça France de rentrer à pied, si bien que la collégienne se calma, et continua à marcher encore plus loin des deux autres.

Elles allèrent toutes trois se poser au Bruyant Park, à côté de la grande fontaine à eau. Constance prit une chaise et regarda les jets d'eau sortir avec admiration. France s'assit quelques mètres plus loin, en croisant les jambes comme une diva. Au moins, pendant qu'elle mangeait sa glace, France ne se plaignait. C'était toujours ça de pris.

Alix s'installa sur une chaise peinte en vert, à équidistance des filles. Elle regardait les joggeurs et les gens marcher d'un pas tranquille. Puis elle attarda son regard sur les filles qui n'avaient pas prononcé un mot depuis qu'elles avaient franchi les grilles du parc. Alix se demandait comment deux personnes habitants sous le même toit pouvait au final devenir si différentes. Elle n'avait jamais eu de frère, ni de sœur, mais si elle en avait eu, c'est elle qui les aurait élevé, montré la voie, pas l'inverse.

— France ? l'appela Alix tandis qu'elle finissait de manger sa glace.

Elle tourna la tête lentement avec un air un peu moins dédaigneux.

— Quand je suis venue te chercher devant le collège, tu m'as parlé d'autographe. Pourquoi je t'aurais demandé un autographe ?

— Tout le monde me demande un autographe, dit-elle comme si c'était une évidence.

— Heu... Ça ne m'explique toujours pas pourquoi.

— Parce que mon père est actuellement l'homme le plus riche de Manhattan. Il a également été élu l'homme le plus influent de l'année par Vanity Fair, le célèbre magazine. Étant sa première héritière, dit-elle en lançant un regard à Constance, je suis une star, et comme tous les gens célèbres, je signe des autographes, j'ai une page Facebook avec des milliers d'abonnés, et les gens me suivent sur Twitter, Instagram, et tous les réseaux sociaux à la mode. D'ailleurs tu me fais penser que ça fait plus de cinq heures que je n'ai rien posté sur Snap.

Alix ne sut pas si le plus choquant était son discours affligeant ou le portable que France sortit de sa poche. Il était d'une finesse incroyable.

— Papa a un ami qui fabrique des portables, expliqua France en voyant le regard éberlué d'Alix. C'est un des cinq premiers prototypes.

— J'espère que comme tous les prototypes il t'exposera à la figure, comme ça tu pourras twitter : mon portable vient d'attenter à ma vie avec un smiley mécontent, lança Constance.

France serra les dents, s'apprêtant à répondre à sa petite sœur, mais elle croisa le regard sévère d'Alix. Elle se rappela alors de la menace de tantôt.

France finit par snober sa sœur. Elle appuya plusieurs fois sur l'écran de son portable tactile du futur, et prit une photo d'elle avec son pot de glace terminé. Elle eut alors un énorme sourire de poupée Barbie, le même que sa mère. Il fallait croire que le fruit n'était pas tombé bien loin de l'arbre...

Alix la gifla dans ses pensées, oui dans ses pensées seulement, et se concentra sur Constance qui finissait sa glace.

— Et toi aussi tu signes des autographes ? demanda Alix.

— Nan, mugit-elle. Moi je ne me la pète pas comme France, et encore moins depuis que papa lui a dit que c'est elle qui reprendrait les rênes de son entreprise.

— Et pourquoi pas vous deux ?

— Parce que c'est la première de la famille, c'est elle qui reprend les affaires. Moi je devrais me débrouiller par moi-même. C'est même maman qui me l' a dit.

Ils avaient quel âge déjà ces enfants ? Enfin, pas besoin de se demander leur âge, c'étaient des enfants bon dieu ! Ils n'étaient pas censés penser à ce genre de choses. Les seules choses dont ils devaient se préoccuper c'étaient des niaiseries de leur âge du genre quel dessin animé passe à quelle heure ? Mais bon, il faut croire que riches ou pauvres, les gosses de nos jours grandissaient bien trop vite. Il n'y avait qu'à voir Yuliana.Ils se rendaient compte des choses de plus en plus vite.

— Et toi t'as ton entreprise ? demanda Constance.

— Si j'avais une entreprise, je serais en train de la gérer ma belle.

— Ah..., répondit-elle d'un air pensif.

Bon, ils ne se rendaient peut-être pas compte de tout...

----

Hey hey ! Alors, qu'en avez-vous pensé ? Il y a des nouveaux persos, que vous connaissiez seulement de nom jusqu'ici. J'espère que ça vous plait de les découvrir ! En tout cas, moi j'ai adoré leur donner vie !

Une spéciale dédicace à ma chère cogallais qui appréciera d'autant plus le personnage de Constance à présent haha :*

Je tiens à remercier tous ceux qui me lisent, nouveaux comme anciens, ça me fait tellement plaisir ! :')

Maintenant vous connaissez la chanson : EXPRESS YOURSELF !

Je vous adore my little sugars !

--

Apolite Élueau

Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top