Chapitre XXVIII

Le Duc de Dyyr sortit la clé de sa cachette avec toutes les précautions possibles, comme s'il s'agissait de l'objet le plus précieux au monde – ce qui était sans doute le cas – et la tendit aux jumelles. Léna la saisit du bout des doigts et la fit rouler dans sa paume. Elle était en tous points identique à la première, du saphir incrusté dans sa poignée jusqu'aux motifs de vagues tracés dans l'argent, en passant par la taille et la forme même de son manche.

– Gardez-la précieusement, conseilla le Duc. Vous savez ce qu'il arriverait si jamais elle venait à tomber entre de mauvaises mains.

Les jumelles acquiescèrent d'un hochement de tête et Léna la glissa dans sa poche. Anaïs porta instinctivement la main à son cou, où sa propre clé produisait une douce chaleur contre sa peau. L'autre clé de Feu, si ses souvenirs étaient bons, se trouvait en la possession de Leira. Elle réalisa à cet instant qu'elle en était la propriétaire légitime et qu'un de ces jours, il faudrait qu'elle pense à demander à la jeune fille de la lui rendre.

Une fois la clé d'Eau en sécurité dans la poche de Léna, le Duc parut se détendre et il invita les trois amies à le suivre hors de son bureau.

– Je vais vous loger ici le temps que vous voudrez, j'aimerai que nous organisions votre voyage en détail de sorte à ce que votre périple puisse prendre fin au plus vite. De plus, je mets à votre disposition tout ce qui peut vous être utile dans ce château, n'hésitez pas non plus à faire appel à moi ou à mon fils au moindre problème.

Anaïs tiqua en entendant cette dernière phrase. Le Duc avait un fils ? Voilà qui était surprenant, elle ne se souvenait pas d'en avoir déjà entendu parler.

À nouveau, la petite troupe déambula dans les couloirs de pierre avant de se retrouver devant une série de portes que le Duc leur désigna comme étant les chambres d'invités. Elles furent introduites dans une pièce à vivre qui donnait sur trois chambres distinctes et une petite salle d'eau. Ce n'était pas d'un luxe particulier, mais Anaïs fut comblée et elle poussa une petite exclamation de joie en découvrant le grand lit à baldaquins qui l'attendait. Dès qu'elles furent entrées, Atlas alla renifler tous les coins de la pièce et Crizée s'envola de l'épaule d'Anaïs sur laquelle elle était restée perchée depuis que Gilfar les avait présentées au Duc. La jeune fille massa ses muscles endoloris par le poids de l'animal, qui avait toutefois pris soin de se poser sur son bras intact. Après leur avoir donné quelques indications, le Duc allait se retirer mais Leira le retint.

– Dites-moi, Monseigneur, nous serait-il possible d'utiliser votre salle d'arme, qui, dit-on, est très bien équipée ?

– Mais très certainement ! s'exclama le Duc.

– Oh non, elle recommence avec ça, soupirèrent les sœurs en même temps.

L'homme leur lança un regard amusé et leur indiqua le chemin à suivre pour trouver ladite salle, tandis que Leira foudroyait les jumelles du regard.

Le Duc parti, les jeunes filles décidèrent de se laver et de se reposer avant d'aller s'entraîner au combat. La salle d'eau était relativement sommaire mais les jumelles, qui ne s'étaient lavées que dans des ruisseaux depuis leur arrivée à Engamella, en furent enchantées. Quant à Leira, elle avait tant l'habitude de passer des jours sans se laver sérieusement qu'elle n'y entra même pas.

Une petite heure plus tard, les trois adolescentes sortirent de leur suite et prirent le chemin de la salle d'armes. Après de nombreux détours dans les couloirs de château – qui aurait plus mérité le nom de labyrinthe –, elles arrivèrent dans ladite salle. C'était une pièce immense, le sol était fait d'un parquet brun clair, les hauts murs de pierre étaient couverts d'écussons et de drapeaux divers, ainsi que d'épées, de lances et toute une batterie d'autres armes de toutes les formes possibles et imaginables et des ouvertures carrées dans les murs laissaient entrer la lumière dans tout l'espace. À cette heure prandiale, la salle était vide, à l'exception d'un homme qui astiquait une armure dans un coin et de deux soldats en bras de chemise qui s'exerçaient, un bras dans le dos et une épée d'escrime à la main.

Leira toussota pour manifester leur présence mais personne ne l'entendit et elle s'avança vers les bretteurs. L'un deux la remarqua, fronça les sourcils et lança d'une voix forte, à l'intention de l'homme qui huilait maintenant les articulations de son armure :

– Sire ! Vous avez de la visite !

L'homme se leva et un large sourire illumina son visage aux traits fins lorsqu'il aperçut les jeunes filles.

– Soyez les bienvenues, mesdemoiselles, les salua-t-il une fois qu'il les eut rejointes. On m'avait prévenu de votre visite, mais je ne m'attendais pas à vous recevoir si tôt ! Je suis le maître d'armes de ce château, vous pouvez m'appeler Sire de Franchefort, à votre service !

Il fit une légère courbette et Anaïs dut se retenir de pouffer. L'homme était grand, bien bâti, et ses traits harmonieux inspiraient la confiance. Il devait avoir une cinquantaine d'années, comme le témoignaient les petites rides aux coins de ses yeux, et sa chevelure blond foncé était retenue en arrière en une sorte de catogan serré. Ses yeux d'un bleu pur pétillaient, achevant de rendre son visage sympathique aux yeux des jumelles.

Il les entraîna à sa suite, leur fournit des épées légères et leur fournit les explications de base. Les heures qui suivirent passèrent très lentement pour Anaïs. Elle ne pouvait pas tenir son épée à deux mains car son épaule l'élançait encore et ce déséquilibre la fatigua rapidement. De plus, elle était incapable de retenir la moitié de ce que lui disait le maître d'armes et tout ce qu'elle retira de la leçon fut un bras engourdi et un petit orteil tordu après avoir trébuché. Maussade et en colère contre elle-même, la jeune fille quitta la salle d'armes avant ses amies et se dirigea vers sa chambre.

Ce ne fut que vingt minutes plus tard qu'elle fut obligée de se rendre à l'évidence : elle s'était égarée. Elle erra encore dans les couloirs, sentant la panique monter lentement et sa respiration accélérer. Ce qui l'affolait le plus était qu'elle ne croisait absolument personne. Pas une servante, pas un noble, ni même l'horrible Gilfar, qu'elle aurait pourtant été ravie de voir au détour d'un escalier ! Elle monta des marches, en descendit d'autres, longea des couloirs, essayant de réprimer la sensation horrible qui s'emparait d'elle, la sensation d'être prise au piège dans ce château comme un vulgaire lapin. Et pourquoi diable n'y avait-il personne ?

La réponse lui fut donnée quelques escaliers plus loin, lorsqu'elle se retrouva dans un large couloir vitré d'où elle pouvait apercevoir la ville en contrebas. Comment avait-elle fait pour se retrouver si haut, elle n'aurait su le dire, mais toujours était-il qu'elle se tenait dans l'une des plus hautes tours du château et que la ville en contrebas était ridiculement minuscule. Elle continua de marcher dans le couloir, intimidée, jusqu'à se rendre compte que c'était un cul de sac. En effet, au bout de celui-ci, quatre portes richement décorées bloquaient toute possibilité d'avancer plus loin.

Curieuse, Anaïs vérifia que personne ne pouvait la voir – le contraire aurait été un comble – et s'approcha de la porte de droite avant de coller son œil contre la serrure... et de n'y découvrir que du noir. Sans perdre espoir, elle répéta l'opération avec la deuxième porte, mais pour le même résultat. La troisième porte ne lui donna pas plus de satisfaction. En revanche, devant la dernière, tout à gauche, elle écarquilla les yeux. À travers la mince ouverture de la serrure, la jeune fille put apercevoir une pièce gigantesque, richement meublée, aux fauteuils tendus de velours et aux murs couverts d'un papier-peint bleu ciel. Soudain, une silhouette apparut et Anaïs fit un bond en arrière. Entendant des pas se rapprocher de la porte, elle détala à toutes jambes, traversa le couloir vitré à toute allure, dévala les escaliers qui y menaient et courut à travers le château, sans chercher à s'orienter, sa seule préoccupation étant de s'assurer que personne ne la suivait. Par un miracle inexplicable, elle se retrouva devant ses appartements au bout de quelques minutes, essoufflée mais vivante.

Elle s'empressa d'entrer et de refermer la porte à double tour. En se retournant elle vit sa sœur et Leira, assises sur un canapé, la dévisager comme si elle arrivait tout droit d'une autre planète.

– Anaïs ? finit par demander Léna. On peut savoir où tu étais ?

L'intéressée se tritura les mains, mal à l'aise.

– J'étais perdue, avoua-t-elle avec une grimace. Complètement paumée. Je ne serais même pas étonnée si j'avais fait le tour du château en entier.

La pique eut l'effet escompté et l'atmosphère se détendit radicalement. Anaïs se changea, constatant avec bonheur que sa garde robe avait été complétée de tout un tas de nouvelles tenues, sans doute offertes par le Duc lui-même, et alla s'installer avec les autres dans la pièce principale. Lorsque le soir tomba, un domestique en livrée leur apporta un plateau couvert de victuailles et les trois amies mangèrent copieusement pour la première fois depuis trop longtemps.

Ce soir là, en fermant les yeux, Anaïs se retrouva dans un endroit qu'elle ne connaissait que trop bien, un endroit qu'elle n'avait pas revu depuis qu'elle avait frôlé la mort...

🌟 Merci de voter si l'histoire vous plaît ! 🌟

Et bonne année 2025 !

Allez, petit racontage de vie parce que ça fait longtemps :

Aujourd'hui 24 décembre (oui, mes chapitres sont programmés 😅), je suis contente parce que j'ai repris l'écriture alors que je n'avais pas écrit sérieusement depuis fin octobre. Oui, ça fait un bail 😐
J'ai écrit les chapitres 27 et 28 en trois jours, je suis contente de moi ✨

Sinon j'ai pas été gâtée cette année. J'ai pas vu de famille pendant les vacances, mes parents ont préféré nous emmener à Pétaouschnok visiter des sites archéologiques dans le froid. Youpi. Dites-vous que j'avais pas de sapin de Noël. Parce que "c'est pas pratique". Mes parents les hérétiques. Et niveau cadeaux, bah je les ais pas encore mais je sais qu'on va pas en avoir beaucoup 😕
Et que des livres. Je dis pas, les livres c'est super ! Mais que quelques livres pour Noël, c'est pas le top du top.
Après je sais que y'a des enfants qui ont rien à Noël et je suis déjà contente de ce que j'ai...

Bref (déso pour le cassage d'ambiance)

Je vous dirai dans le chapitre prochain ce que j'ai eu ! (Le truc qui sortira le 7 janvier 😂)

Et vous, c'était bien Noël ? Et le nouvel an?

Aussi, petit conseil de lecture, parce que j'adore ce bouquin :
Coup de tête, de RenesmeeEaton4
Allez lire, c'est super !

Bisous bisous !
(Le mot de fin de chapitre plus long que le chapitre lui-même 😂😭)

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