Chapitre VI

C'est ainsi que le samedi suivant, à vingt-et-une heure, Anaïs arriva dans la cabane où l'attendait son amie.

– Anxieuse ? demanda celle-ci.

– Et comment, répondit la jeune fille, à deux doigts de la crise de nerfs.

– Ça va aller, assura la rouquine. Tu as toutes tes affaires ?

– Oui, confirma-t-elle.

Lucia sortit de sa poche deux talkie-walkie et en tendit un à Anaïs.

– Comme ça tu y vas seule mais on reste en contact, fit-elle avec un clin d'œil.

– Ça marche, souffla la brune.

– Ça va le faire, ne stresse pas trop ! l'encouragea la rouquine avec un grand sourire.

Les deux jeunes filles descendirent de leur cabane et Anaïs enfourcha son vélo. Elle accrocha le talkie-walkie au guidon et bu une gorgée d'eau dans sa gourde puis Lucia lui donna une claque amicale dans le dos et elle démarra.

Elle roula jusqu'à la lisière de la forêt et se retourna pour adresser un signe de main à la rouquine. Celle-ci le lui rendit et la regarda disparaître à l'angle d'une rue. Elle savait, au fond de son cœur, qu'elles ne se reverraient pas avant un long, un très long moment.

✰✰✰

Anaïs pédalait depuis plus d'une demie-heure sur des routes de campagne tandis que la nuit tombait progressivement. Elle avait mis ses écouteurs et l'air entraînant de Titanium l'encourageait et l'aidait à ne pas abandonner.

La jeune fille arriva en vue de la forêt de Bartville quand les aiguilles phosphorescentes de sa montre indiquaient 22h43. Elle mit pied à terre, passa son sac sur ses épaules et se saisit du talkie-walkie.

– J'y suis, dit-elle à l'adresse de Lucia. J'entre dans la forêt.

Super, lui répondit la voix grésillante de son amie. Vois-tu de l'eau quelque part ? Une rivière ou quelque chose comme ça ?

La jeune fille, après quelques minutes, finit par trouver un minuscule ruisseau qui se faufilait discrètement entre les troncs des grands arbres.

– Je l'ai ! s'exclama-t-elle.

Ok, continue de me tenir au courant surtout.

Anaïs acquiesça et suivit le petit ruisseau, prenant garde à ne pas le perdre de vue. La lampe qu'elle tenait à la main faisait naître des ombres inquiétantes autour d'elle. La forêt, d'abord constituée d'arbres gigantesques et espacés, se transforma bientôt en un bois, de plus en plus sombre. Les arbres se rapprochaient et de nombreux buissons et arbustes couvraient le sol, l'empêchant parfois d'avancer le long du ruisseau. Ce dernier s'était petit à petit mué en rivière et bondissait joyeusement sur son lit de sable gris.

Au bout de quelques minutes, la jeune fille distingua quelque chose entre les troncs noueux des feuillus.

Elle s'arrêta, le cœur battant et chuchota précipitamment dans le talkie-walkie :

– Lucia, Lucia, je vois quelque chose devant moi j'ai peur j'ai... j'ai peur Lucia !

Calme toi, lui intima son amie. Je ne comprends rien quand tu parles comme ça.

– Il y a... quelque chose, devant, articula Anaïs en faisant tout son possible pour ne pas s'enfuir en courant. Quelque chose de... de grand.

Ok..., réfléchit Lucia. Est-ce que tu peux t'approcher pour voir ?

– Tu es folle ! couina la jeune fille. Je suis morte de peur !

Anaïs, sois raisonnable. Premièrement, est-ce que ça bouge, ton truc ?

– Heu... Je... Non.

Bon, c'est déjà un bon début. Maintenant avance un peu et dis-moi ce que c'est.

Tremblante, Anaïs obéit. Mais ce qui était dissimulé derrière les arbres n'étaient pas du tout ce à quoi elle s'attendait.

– Une maison, lâcha-t-elle.

Pardon ?

– C'est une maison. Une vieille maison pourrie qui tombe en ruine.

C'est sûrement le lieu de rendez-vous ! exulta Lucia. Vas-y Anaïs, n'aie pas peur !

– Mais je... Bon d'accord, je peux essayer.

Elle avança lentement entre les troncs, sa lampe tendue devant elle comme un bouclier.

Lorsqu'elle arriva devant la porte branlante de la bâtisse, elle crût sentir comme une énergie invisible la traverser. Elle poussa un petit cri quand sa lampe s'éteignit dans un grésillement.

– Lucia ! paniqua-t-elle tandis que le talkie-walkie subissait le même sort.

Privée de lumière et de contact humain, une frayeur totale envahit l'adolescente. Les ombres autour d'elle semblaient se resserrer, les bruits inquiétants de la forêt lui parvinrent et les fenêtres vides de la maison devant elle s'ouvraient comme deux puits obscurs dans le mur croupi. Un frisson lui dévala la colonne vertébrale et tous ses poils se hérissèrent en même temps que ses yeux se dilataient.

Elle laissa tomber au sol le talkie-walkie et la lampe torche, fit un pas en arrière, puis deux, hésita, se retourna et partit en courant dans la forêt. Paniquée, elle avançait au hasard, trébuchant sur les racines et maculant ses vêtements de boue. Des branches mortes se tendaient devant elle comme autant de griffes effilées, se prenaient dans ses cheveux, lui griffaient le visage. Les cris des oiseaux nocturnes qui la frôlaient en passant la terrifiaient et elle croyait voir entre les feuilles des arbustes les yeux de prédateurs affamés prêts à lui sauter à la gorge.

– À l'aide ! pleura Anaïs. Maman !

Son pied se prit dans un trou et elle tomba la tête la première dans un buisson de ronces. La vue brouillée par les larmes et par la douleur, la jeune fille tenta en vain de se relever.

Elle était sur le point d'abandonner quand une main douce se saisit de la sienne et la releva. À demie consciente, Anaïs se laissa faire sans résister, trop épuisée pour esquisser le moindre geste par elle-même. Elle ne voyait pas à qui appartenait cette main rassurante mais elle lui faisait entièrement confiance.

Elle se laissa guider par la main invisible jusqu'à ce que celle-ci la ramène devant la maison.

Quand elle aperçut la porte qui pendait sur ses gonds, Anaïs eut un nouvel accès de terreur et se débattit pour se libérer, allant jusqu'à griffer l'air autour d'elle en hurlant. La main se fit plus ferme et maintint la jeune fille sur place jusqu'à ce qu'elle se calme. Alors, elle la lâcha et disparut.

– Attendez ! appela désespérément Anaïs, des larmes plein les yeux. Ne partez pas !

Mais aucune réponse ne lui parvint. À défaut d'avoir une autre solution, la jeune fille se faufila dans la maison, le cœur battant à tout rompre.

Et ce qu'elle découvrit la stupéfia.

La maison qui de l'extérieur avait des airs de cabane hantée, était à l'intérieur un modèle de propreté.

Une douce moquette couleur kaki couvrait le sol, étouffant le bruit des pas d'Anaïs. Un petit buffet se tenait dans un coin et une lampe couverte d'un abat-jour orange diffusait une douce lumière, invisible de l'extérieur. Des tableaux représentant des paysages étaient accrochés aux murs de bois lambrissés et un grand miroir orné était appuyé contre un mur. Enfin, une table de bois verni se dressait au milieu de la pièce, solitaire. Une petite boîte bleue nuit y était posée, accompagnée d'une enveloppe faite du même papier que celle que la jeune fille avait reçue.

Celle-ci s'en approcha et tendit les doigts mais se ravisa, elle n'était pas sûre de ce qui s'y trouvait.

Avisant un escalier qui montait à l'étage dans un coin de la pièce, elle décida d'y monter. Les marches craquaient sous ses pas et une légère odeur de moisi parvint à ses narines.

La pièce à l'étage était une chambre, la plus modeste que la jeune fille ait jamais vue. Un lit contre un mur, une petite commode et un pot de chambre, c'était tout. Une fenêtre s'ouvrait dans un mur, donnant sur la forêt et, plus loin, sur une montagne.

Anaïs resta un instant à admirer le paysage puis elle redescendit doucement dans la première pièce. Là, elle resta les bras ballants, ne sachant que faire. La petite boîte sur la table attira son attention. Elle s'en approcha à nouveau et la saisit délicatement afin de l'observer sous tous ses angles.

C'était un petit objet, probablement en pierre, bleu nuit et une fleur avait été peinte en dessous avec une peinture dorée. La jeune fille la reposa sur la table et prit l'enveloppe. Comme elle l'avait remarqué, c'était le même papier que la première lettre, mais à la différence de celle-ci, aucune écriture n'était visible sur le papier.

Elle laissa tomber l'enveloppe sur la table, à côté de la boîte et leva les yeux vers le miroir en face d'elle.

Elle s'observa avec dégoût, ses cheveux pleins de feuilles et ses vêtements crottés détonants sur la propreté de la pièce.

Puis, alors qu'elle baissait les yeux, quelqu'un apparut derrière elle.

Quelqu'un qui n'était autre qu'elle-même.

···✷☬۝☬✷···

Je viens de remarquer un truc qui m'embête un peu (et c'est seulement en écrivant le 15e chapitre que je m'en rends compte T-T), c'est que mes chapitres sont très petits. En général c'est entre 1200 et 1800 mots (très approximativement) mais c'est super court... Là sur le chapitre 15 j'ai déjà plus de 1400 mots et je le lis en deux minutes... Après c'est peut-être juste parce que je suis l'auteur mais je suis pas sûre. Est-ce que vous, en tant que lecteurs, vous pensez que je dois faire plus long ??


🌟 Merci de voter si l'histoire vous plaît ! 🌟

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