Chapitre 18 : Deux Saints pour le prix d'un

— Un problème ? s'inquiéta Alexeï.

— Oh trois fois rien... J'ai seulement deux Saints, maugréa Hono en ne pouvant s'empêcher de grincer des dents.

— Que voulez-vous dire ? le questionna le prêtre, curieux.

— Il dit simplement que tu fais erreur, expliqua calmement Asura. Je suis le Saint du feu.

Sa déclaration laissa de marbre l'homme en tenue religieuse qui se tourna immédiatement vers l'enfant divin du feu.

— Je m'excuse, mais je ne suis pas vraiment un très grand adepte de l'humour, sieur Hono. Alors, si vous pouviez m'indiquer par un geste lorsque vous faîtes ce genre de traits d'esprits, je vous en serai gré.

— Sauf que, pour une fois, même si je raille, je ne me moque pas de toi, et c'est pareil pour Asura, répliqua le garçon aux cheveux roux.

— Je ne saisis pas bien ce que vous dîtes. Mes ancêtres ayant été les anciens Saints du feu, il est inconcevable que qui que ce soit d'autres que moi soit le Saint du feu. De plus, de ce que j'arrive à voir, messire Asura, sans vouloir vous offenser, vous ne semblez pas capable d'utiliser les pouvoirs de mes ancêtres.

— Maintenant que j'y pense, Charlotte nous a montré ses pouvoirs mais quels sont les tiens ? demanda Len, qui ne comprenait pas pourquoi tout le monde semblait à cran.

— Comme mes prédécesseurs, je peux agir sur les émotions des autres en leur parlant.

— Il ne sert à rien que nous nous prenions la tête, intervint Kobura. Une loi reste immuable et elle permettra de savoir lequel de vous deux est le véritable Saint. Dirigeons-nous vers le temple du feu.

— Pour quelle raison ? l'interrompit Fubuki, qui suivait la discussion difficilement à cause de l'énergie dévorante du volcan.

Même si elle essayait de faire bonne figure, il était clairement visible qu'elle luttait de toutes ses forces pour rester consciente. Cela inquiétait d'ailleurs Raiyo qui ne pouvait s'empêcher de remarquer que, contrairement à ce qu'avait l'ancien enfant divin, son amie d'enfance ne semblait pas retrouver ses forces au fur et à mesure que le temps passait. Au contraire, il lui semblait même que son énergie s'amenuisait de plus en plus vite.

— Les enfants divins peuvent tous pénétrer dans les temples mais seul le Saint du bon élément peut les suivre. Il suffira simplement de voir qui d'Asura ou d'Alexeï pourra passer l'entrée du temple et nous serons fixés. Reprenez tous vos forces, nous irons demain matin, dès l'aube. Et, par pitié, ne vous disputez pas pour rien.

Et sur ces mots, il sortit de la demeure du prêtre.

Zoldia lança un regard aux adolescents mais n'ajouta rien, comprenant le point de vue de tous. Charlotte, voyant que la nouvelle ébranlait son ami, le tira en direction de la porte.

— Bon, maintenant que l'ambiance est morte, on l'enterre ? dit Hono en ricanant d'un humour noir.

Sa déclaration lança un tel froid que tous sortirent de leur hébétude.

— Parfois, je dois reconnaître que tes blagues sont mauvaises, mais celle-là, elle était particulièrement nulle, déclara Raiyo en lui tapant dans le dos.

— D'un côté, c'était suffisamment idiot pour me faire reprendre mes esprits, s'exclama Kyoseï. De toute façon, il est inutile de nous prendre la tête avec ces histoires de Saint du feu.

— En effet, nous serons fixés demain, conclut Fubuki. Maintenant, si vous voulez bien m'excuser, j'aimerais aller discuter avec Charlotte.

Elle fit mine de vouloir se relever mais Genkaï eut tout juste le temps de la rattraper alors qu'elle perdait l'équilibre. Gênée, elle s'excusa mais se laissa faire lorsqu'il entreprit de la soutenir pour rejoindre la forgeronne. Kyoseï emmena son petit frère vers la plage pour que ce dernier, qui n'avait jamais connu la mer, puisse découvrir ce que cela faisait de se baigner et les jumelles restèrent aider Raiyo pour qu'il s'entraîne à nouveau. Hono se mit rapidement à méditer, ne laissant que Asura.

Ce dernier, étonnement silencieux malgré sa corpulence, se leva et sortit à l'extérieur. Utilisant son sens de la vue particulier, il marcha à travers le village, évitant toutes les personnes qu'il pouvait. Il s'éloigna suffisamment des demeures pour que plus personne ne puisse le voir et, une fois assuré qu'il était seul, il soupira. Cela faisait depuis une semaine qu'il n'avait pas pu libérer son pouvoir et il sentait que ce dernier était sur le point d'exploser.

En effet, s'il était capable d'absorber les émotions des autres, il devait, de temps en temps, libérer ces dernières avant qu'il ne perde le contrôle. Afin de limiter un maximum ses crises, il avait adopté une neutralité la plus totale, anéantissant complètement la moindre sensation que son cœur pouvait éprouver.

Alors qu'il était sur le point de se relâcher, une voix s'éleva derrière lui.

— Je sais que tu commences à atteindre tes limites, mais tu devrais attendre demain. Tu risques d'en avoir besoin.

Aussitôt, l'énergie de Kobura se manifesta à ses côtés.

— Il me semblait t'avoir demandé de ne pas cacher ton énergie comme ça, grommela le colosse.

— Et il me semble t'avoir dit que tu n'étais pas en position de me donner des ordres. Après tout, sans moi, tu n'en serais pas là.

— Certes. Mais je suppose que tu n'es pas venu à ma rencontre par simple envie de discuter . Je suppose que tu as besoin de moi pour quelque chose.

L'homme maudit sourit et expliqua quelque chose à Asura. Ce dernier, impassible, écouta attentivement et, lorsque l'ancien enfant divin s'éloigna, il soupira. Ce n'était pas la première fois qu'il recevait ce genre de demande de la part de Kobura. Malgré le fait qu'il pensait que cela était une mauvaise idée, il ne pouvait pas refuser quoique ce soit à l'homme millénaire, sous peine de subir un châtiment peu enviable.

Le soir, ils dînèrent tous ensemble, dégustant les spécialités locales. L'une d'entre elles émerveilla les plus jeunes à tel point qu'ils en redemandèrent jusqu'à être malades. En effet, l'un des plats typiques du village de Shura était un quartier de viande creusé comme un bol dans lequel on venait placer un bouillon et qu'on cuisait directement sur une pierre volcanique encore chaude. Lorsque le liquide se mettait à bouillir, il se mettait alors à éclabousser la chair encore crûe, la rotissant délicatement. Le phénomène semblait presque paranormal et rappelait à s'y méprendre au volcan qui surplombait l'île.

— C'est d'ailleurs pour cela que l'on appelle ce plat la viande de feu, expliqua Alexeï, en véritable hôte de maison.

Malgré les révélations du jour, le prêtre se comportait naturellement, comme si son statut de Saint n'avait jamais été contesté. Il leur parla de chaque plat, leur contant son histoire et ses origines, leur indiquant comment les déguster au mieux et s'amusant même de leur enthousiasme. Alors qu'il débarrassait les assiettes et les couverts, Charlotte se leva et revint vers eux avec les paquets qu'elle avait portés après leur combat contre les bêtes de l'île.

— Bon, ce n'est pas ce que j'ai forgé de mieux mais j'aimerais vous offrir ses armes. Je sais que vous en avez déjà mais je ne peux pas vous laisser partir au temple sans un équipement décent. Servez-vous.

Elle déballa les tissus et tous purent s'émerveiller devant les véritables chefs d'œuvres qu'ils avaient devant eux. Genkaï soupesa une immense hache à double tranchant et la compara avec la sienne.

— Quelle arme sublime, s'exclama-t-il d'un ton émerveillé. Elle semble aussi légère qu'une lame alors que je peux clairement ressentir son poids. De plus, le tranchant est impeccable, comparé à celui de mon ancienne arme. Je ne puis accepter pareil présent, Dame Charlotte.

— Mais si, mais si, tu peux accepter. Pas de chichis, vous vous servez et je ne veux pas entendre la moindre contestation. En tant que Sainte, il est de mon devoir de vous armer tant que vous ne possédez pas vos armes divines. D'ailleurs, Raiyo, me laisserais-tu observer la tienne ? ajouta-t-elle avec des étoiles dans les yeux.

— Avec joie.

Il lui donna l'arme et sursauta lorsque cette dernière laissa échapper un éclair qui fit lâcher prise à la forgeronne. Elle voulut ramasser le sabre mais il disparut, réapparaissant autour du cou de Raiyo sous sa forme de médaillon.

— Mais qu'est-ce qui te prend ? s'exclama l'enfant divin à l'attention de Camolauss.

— Je ne sais pas, maître. J'ai eu un frisson déplaisant lorsque vous m'avez remis entre ses mains.

Surpris, l'adolescent releva la tête et comprit instantanément. L'expression de la forgeronne avait changé du tout au tout. Une véritable envie se lisait dans son regard et le fait qu'elle se léchait les lèvres du bout de sa langue fit tressaillir à son tour le porteur.

— Allez, n'aies pas peur, petit sabre divin. Je te traiterai avec la plus grande délicatesse. Je veux simplement tester tes capacités et t'admirer sous tous les angles, murmurait Charlotte, les joues rouges et le regard empli de désir, se rapprochant de Raiyo.

— Il suffit, Charlotte, intervint Alexeï en tapant de la tranche de sa main le haut de son crâne. Tu gênes tout le monde avec ton attirance pour les armes. De plus, je te rappelle que les armes divines possèdent un esprit, ce qui rend encore plus gênant ton obsession.

La jeune femme porta ses doigts là où il venait de la frapper et grommela.

— C'est pas juste... Pour une fois que je pouvais voir une telle merveille.

Son visage exprimait une telle peine qu'elle déclencha une véritable crise de rire chez les adolescents et ils purent tous choisir une arme. Ils se couchèrent au milieu des coussins et, la chaleur et leurs ventres remplis aidant, ils s'endormirent tous en quelques instants. Seul Hono mit un peu de temps à tomber dans un sommeil profond. Il lui sembla, pendant une seconde avant de sombrer dans l'inconscience, ressentir une brise glaciale provenant de l'endroit où se trouvait Fubuki. Mais une fatigue terrible s'abattit sur ses paupières et il n'y prêta pas attention, se laissant aller dans le monde des rêves.

Le lendemain matin, il avait complètement oublié ce détail. Ils furent réveillés par Kobura et se préparèrent avant d'aller au temple. Zoldia voulut insister pour que Fubuki reste au village pour se reposer mais cette dernière, en pleine forme, lui coupa l'herbe sous le pied en faisant remarquer à tout le monde que, comme l'avait prédit l'homme maudit, elle s'était déjà habituée à l'environnement hostile du volcan. Voyant qu'elle ne pourrait raisonner l'enfant divin de la glace, la guerrière préféra rester au village en compagnie des jumelles et de Len.

— Après tout, il est inutile de les mettre en danger vu qu'ils ne pourront pas pénétrer dans le temple. De plus, si jamais le village est attaqué, je m'occuperai des assaillants, avait-elle expliqué.

— Je reste aussi, s'exclama Charlotte. J'ai du travail à finir. Et on ne sera pas trop de deux en cas de catastrophe, pas vrai, madame Zoldia ?

La Sainte sourit et adressa un hochement de tête à la forgeronne.

Voyant que plus personne ne voulait prendre la parole, Kobura ouvrit la marche, aiguillé par les conseils d'Alexeï qui connaissait l'entrée du temple.

— Il me semblait que tu étais déjà venu ici, Kobura ? s'étonna Raiyo en le voyant se faire reprendre par leur guide.

— Le temple du feu n'arrête pas de changer d'entrée à cause des éruptions volcaniques, expliqua l'ancien enfant divin. Je ne suis pas venu ici depuis deux cents ans.

— Depuis ma naissance, il me semble que l'entrée a changé plus de cinq fois déjà, ajouta Alexeï. Bien, normalement, elle devrait se trouver vers le nord.

Ils traversèrent les terres rocailleuses bordant la montagne de feu et durent, à deux reprises, sauter au-dessus de rivières de lave se déversant dans l'eau de mer en contrebas. Enfin, au bout d'une heure de marche, ils finirent devant une caverne creusée dans le volcan. L'entrée, parfaitement circulaire, était encadrée par deux flambeaux crépitants.

— Bien, voilà l'heure de vérité. Alexeï, Asura, avancez-vous en même temps, dit simplement Kobura.

S'exécutant, les deux hommes se mirent côte à côte et commencèrent à avancer. Ils firent quelques pas lorsque, au moment de passer sous le portique naturel, Alexeï sembla percuter un mur invisible. Surpris, il essaya d'avancer les mains mais, de nouveau, il rencontra la surface qui l'empêchait de progresser. De son côté, Asura, lui, avait réussi à atteindre l'intérieur de la caverne et semblait, à son expression, éprouver de la peine pour le prêtre.

— Je... Je ne comprends pas, murmurait ce dernier. Je suis déjà venu ici des dizaines de fois, j'ai déjà passé ce portique. C'est impossible...

— Il semblerait que tu te sois fourvoyé et que tu aies confondu tes rêves et la réalité, s'exclama Kobura.

Raiyo sursauta. Au moment où l'homme maudit avait prononcé ces mots, il lui avait semblé entendre une pointe de satisfaction. Pourquoi l'ancien enfant divin éprouvait-il de la joie de savoir que leur nouvel allié ne soit pas le Saint du feu ? Il n'eut pas le temps de poursuivre son interrogation plus longtemps que leur aîné reprenait la parole.

— Après, si cela peut au moins te consoler, les humains normaux peuvent pénétrer les temples, même si je leur déconseille. Vu que tu es bloqué, cela signifie que tu es bien un Saint.

— C'est une maigre consolation, continua Hono, ennuyé de voir la sincère tristesse sur le visage de Alexeï. Mais je suis heureux de savoir que, même si tu n'es pas mon Saint, tu vas pouvoir voyager à nos côtés.

Il posa une main compatissante sur l'épaule du prêtre qui lui adressa un maigre sourire.

— Merci, Hono. C'est juste que je suis peiné de me dire que je ne pourrais pas affronter le regard de mes ancêtres lorsque je les rejoindrai. Mais bon, tu as raison. Je pourrais au moins rencontrer la personne avec qui je suis lié et je pourrais lui prodiguer mes conseils. Je vais rentrer au village.

— Je vais t'accompagner, déclara Kyoseï. Mais d'abord, j'aimerais vérifier quelque chose.

Il avança la main et se figea en sentant une surface rigide au bout de ses doigts.

— Un souci ? s'inquiéta Genkaï.

— Non, je voulais juste vérifier que j'étais bien un Saint. Et maintenant, je peux l'affirmer, vu que je ne peux pas avancer plus loin à cause de la protection du temple. Bien, entre Saints sans enfants divins, serrons-nous les coudes ! ajouta-t-il en tenant son poing devant Alexeï.

Peu familier avec ce genre de geste, le jeune homme en tenue blanche mit quelques instants à comprendre ce qu'on attendait de lui mais, une fois que Raiyo lui eut mimé le mouvement, il compléta le salut de l'adolescent. Ils repartirent tous les deux en silence, laissant les enfants divins en compagnie de Kobura et d'Asura.

— Bon, qu'attendons-nous pour nous jeter dans un four géant ? ironisa Hono afin de détendre l'atmosphère.

Malheureusement, son trait d'humour n'eut pas l'effet escompté. Seul Raiyo lui adressa un sourire gêné. Grommelant intérieurement contre le fait que ses camarades n'avaient pas un sens de la blague très poussée, ses yeux se portèrent sur Fubuki.

Depuis qu'il l'avait rattrapé dans la cale du navire lors de leur départ du port de Glar, il ne comprenait pas pourquoi son coeur se serrait à la simple vue de la jeune femme. Il ne la connaissait pas depuis longtemps mais, au fond de lui, il sentait une sorte de tristesse ancienne, comme si une part de lui reconnaissait en elle une vieille amie perdue depuis longtemps. Il avait essayé d'en discuter avec Raiyo mais l'adolescent aux cheveux roux avait rapidement remarqué que l'enfant divin de la foudre éprouvait plus que de l'amitié pour son homologue de la glace. Il avait donc décidé de ne pas révéler ses sentiments à son ami et rival.

— Je ne veux pas me disputer avec lui, il est le seul à pouvoir me comprendre, du moins, en partie, pensa-t-il.

En effet, si Raiyo se reconnaissait en lui, Hono trouvait qu'aucun autre élu de la prophétie ne lui ressemblait. Sa mémoire était clairement manquante, son premier souvenir était le moment où il avait ouvert les yeux aux côtés de Kobura. Ce dernier lui avait dit qu'ils avaient été compagnons de voyage un an auparavant mais qu'il avait été absorbé par un monstre du nom de Pandore. Depuis, l'homme maudit avait essayé de trouver un moyen de le libérer mais cela avait été Raiyo et ses amis qui l'avaient libéré. Cela avait drôlement surpris le jeune homme qui avait alors demandé pourquoi ils ne voyageaient pas avec ses bienfaiteurs plutôt que tous les deux.

— Malheureusement, tu n'as pas encore récupéré tes pleins pouvoirs, avait répondu Kobura alors qu'ils bivouaquaient tranquillement dans un bois à la frontière sud de Foresto. Je souhaite donc que tu t'entraînes un peu à mes côtés avant de les rejoindre.

Les deux hommes avaient entrepris ensuite un voyage qui les avait amené sur les traces du "groupe principal", comme l'appelait l'ancien enfant divin. Malgré les tentatives du plus jeune, l'aîné du duo avait refusé de lui parler de leurs souvenirs communs, disant qu'ils reviendraient en temps et en heure.

Tout à ses pensées, Hono ne prêta pas tout de suite attention au décor qui s'offrait à lui et ses camarades. Il avança, observant tout juste les dessins ouvragés sur les parois de la caverne qu'ils arpentaient. Soudain, une vive lueur le força à retrouver ses esprits.

Le tunnel qu'ils empruntaient venait de déboucher sur une vaste caverne. Ils se tenaient sur une sorte de pont de roche naturel. Ce dernier surplombait un immense lac de lave bouillonnant, faisant déglutir les quatre enfants divins. En se penchant au-dessus du vide, le garçon aux cheveux roux remarqua que, en contrebas, l'une des parois de la grotte avait été creusée pour former un nouveau boyau rocheux. Curieux, le jeune homme allait le faire remarquer à ses camarades lorsque Fubuki, en tête de leur groupe, eut un vertige. Elle voulut s'appuyer contre quelque chose mais sa main ne rencontra rien et elle commença à chuter en direction du lac mortel. Surpris, Hono voulut tendre la main pour la rattraper mais Asura fut plus rapide. D'un bond, il la rattrapa avant que son corps ne dépasse la bordure sécurisée du pont.

Les yeux papillonnants, l'enfant divin de la glace voulut dire quelque chose mais un craquement retentit. Le sol sous eux se brisa d'un coup et tous virent les deux corps chuter vers une mort inévitable.

— Non ! hurla Raiyo en cherchant des yeux un moyen pour les secourir.

De leurs côtés, Kobura et Genkaï utilisèrent leurs pouvoirs pour modifier la structure du pont mais ils ne furent pas assez rapides. Les prises qu'ils avaient créées arrivèrent une seconde après le passage du corps de Asura qui tenait fermement contre lui Fubuki.

— Camolauss, j'ai besoin de toi ! hurla le propriétaire du sabre divin.

Mais il n'eut pas le temps de recevoir l'énergie de son arme. Hono venait de sauter à son tour et, utilisant son pouvoir au niveau de ses pieds, il produisit une série d'explosions qui le firent accélérer, dépassant rapidement ses amis en danger de mort.

Alors que les trois adolescents allaient toucher la lave, l'enfant divin du feu exécuta un salto et, se plaçant dos à dos avec son Saint, il incanta.

Colonne de feu

Un brasier s'échappa de ses mains tendues et le propulsa à pleine vitesse contre Asura qui raffermit sa prise sur Fubuki. Ils s'envolèrent en formant une ligne droite, les amenant directement à la petite corniche qu'avait aperçu plus tôt Hono. Cependant, l'atterrissage fut brutal pour les deux garçons. L'enfant divin se tordit une cheville en se réceptionnant tandis que son Saint, protégeant la jeune femme de son corps, s'était ouvert l'arcade et déboité une épaule dans sa chute.

Heureusement pour eux, ils étaient tous les deux dans le temple de leur élément et leurs pouvoirs étaient à leur paroxysme. La blessure du rouquin guérit immédiatement et il put cautériser l'arcade de son allié afin qu'il ne se vide pas de son sang en quelques minutes. Enfin, d'un violent mouvement, il lui remit l'épaule en place, faisant grogner de douleur le colosse. Lorsqu'ils eurent fini de se soigner, ils adressèrent un geste pour rassurer leurs amis. Ces derniers, à une bonne cinquantaine de mètres, reprirent leurs souffles.

— Vous allez bien ? cria Raiyo qui avait assisté à la scène en se rongeant les ongles.

Il était tellement inquiet qu'il avait failli attaquer ses phalanges tandis qu'ils se remettaient de leur chute.

— Nous, ça va. Mais on dirait que Fubuki s'est évanouie. Elle a l'air d'aller encore plus mal qu'hier, lui répondit Hono en s'inquiétant pour celle qui faisait battre secrètement son cœur.

— Le temple a dû avoir raison de ses dernières forces, répliqua Kobura. Il me semble trop dangereux d'essayer de vous rejoindre. Continuez par le chemin qui s'offre à vous et nous allons faire de même pour celui-ci, ajouta-t-il en indiquant le tunnel qui s'offrait à lui et ses deux compagnons de fortune.

— On finira bien par les retrouver, indiqua Asura afin de rassurer le rouquin.

— Je me doute. Mais j'aurais aimé ramener Fubuki au village pour qu'elle se repose.

— Ne t'en fais pas, je vais m'assurer de sa protection.

Hono lança un regard vers le visage de l'enfant divin de la glace. Son visage semblait tourmenté et elle était couverte de sueur. D'un geste tendre, il essuya les gouttes qui ruisselaient sur son front et soupira.

— De toute façon, nous n'avons pas le choix. Dépêchons-nous de récupérer mon arme !

Et sur ces mots, il prit la tête de leur trio, s'enfonçant dans le boyau rocheux qui s'offrait à eux.

De son côté, Raiyo vit disparaître son ami ainsi que celle qu'il aimait d'un mauvais œil. Cependant, il ne pouvait rien faire, ce qui l'agaçait encore plus.

— Raiyo, il nous faut progresser, dit gentiment Genkaï. Si nous nous hâtons suffisamment, nous aurons achevé notre quête assez rapidement afin que Fubuki ne soit pas trop épuisée.

— Je sais bien mais je reste inquiet pour elle, lui répondit le jeune homme.

— Elle est entre de bonnes mains, le rassura Kobura. Allez, avançons si nous ne voulons pas nous faire distancer. Après tout, nous devons sécuriser le chemin du retour pour les autres, surtout si Fubuki est dans le mal, ajouta-t-il.

L'idée d'être utile mais surtout de permettre à son amie d'enfance de revenir saine et sauve emplit le cerveau de l'enfant divin de la foudre qui se hâta en direction de l'autre côté du pont. Genkaï lui emboîta le pas et Kobura ferma la marche, un petit sourire amusé au coin de la commissure de la bouche.

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