Chapitre 11 : Dévorer pour mieux vaincre
Pendant que les Saintes de la foudre consolaient son amie d'enfance, Raiyo courait à en perdre haleine.
Pourquoi avait-elle peur ? Pourquoi j'ai ressenti cette colère ? Pourquoi mon sabre est apparu ?
Son cerveau ne cessait de l'assommer de questions auxquelles il n'avait aucune réponse. Alors, au lieu d'essayer d'y répondre, il se contentait de se dépenser physiquement, espérant que ses pensées se retrouvent à court d'énergie et arrêtent de le déranger.
Cependant, ce fut son corps qui perdit le premier ce combat et il dut s'arrêter pour reprendre son souffle. Tandis qu'il s'adossait à un pin et qu'il se laissait glisser le long de l'écorce, un craquement le mit sur ses gardes. Vif, il dégaina son arme mais ses muscles ne réussirent pas à le redresser. Aussi, ce fut dans une position assise et légèrement ridicule qu'il fit face à Zoldia.
Étonné de voir la guerrière à cet endroit, Raiyo mit quelque temps avant de comprendre qui il avait devant ses yeux, si bien que lorsqu'il réalisa, il était trop tard pour rattraper son geste déplacé. Mais, au fond de lui, il sentait qu'il n'avait pas à être désolé pour elle.
Après tout, que fait-elle là ?
Alors qu'il gardait son arme levée vers elle, un silence et une tension palpable s'installèrent entre eux. Voyant que l'adolescent continuait à la défier, Zoldia sourit.
— Tu comptes rester longtemps dans cette position ou c'est une nouvelle forme d'entraînement ?
Sa remarque était si décalée par rapport à l'ambiance que le garçon en lâcha son sabre.
— Pardon ? finit par demander l'adolescent après quelques secondes à analyser ce qu'elle venait de dire.
— Je disais : « Tu comptais rester longtemps dans cette position ou c'est une nouvelle forme d'entraînement ? ». Parce que, si c'est le cas, j'aimerais bien que tu m'expliques les bienfaits d'un tel mouvement.
— Euh... Et bien...
— Bon, quand tu auras fini de faire je ne sais quoi, tu te lèveras et tu me suivras, s'il te plaît.
Le ton était si autoritaire que Raiyo se surprit à se relever. Encore un peu sous le choc, il essaya tout de même de réfréner son corps qui s'apprêtait à la suivre.
— Pourquoi devrais-je te suivre ?
— Et bien, tu me dois un combat, non ?
— Il me semble que nous avions convenu de ce duel demain.
— Faux, répliqua Zoldia d'un ton calme. J'ai convenu de la date avec toi mais les modalités ont été vu avec Fubuki. Or, vu votre dispute, j'en viens à me dire que tu n'es pas d'accord. Alors je te propose un duel, maintenant, avec de nouvelles clauses. Qu'en dis-tu ?
Complètement abasourdi, le garçon dut se répéter plusieurs fois les phrases de la guerrière afin d'être sûr d'avoir bien compris.
— Attends, tu nous as espionné ? s'écria-t-il après son moment de réflexion.
— Je n'étais pas loin et, vu vos cris, oui, j'ai entendu une partie de votre dispute infantile. Mais je n'ai pas bien saisi pourquoi vous vous disputiez alors je n'ai fait que supposer que c'était à cause du duel. Je me suis trompée ?
— Non mais...
— Alors, tu acceptes ma proposition ? le coupa-t-elle.
— Oui mais...
— Donc tais-toi et suis-moi.
Je ne sais pas si toutes les filles sont comme ça mais je commence à en avoir ras le bol de me faire diriger à la baguette.
Même si ce fut à contrecœur, il lui emboîta le pas. Ils marchèrent quelques minutes, s'éloignant de la ville, jusqu'à atteindre une clairière si bien encerclée par des pins qu'on ne pouvait y entrer que par un seul passage. Émerveillé par l'exploit naturel, l'adolescent ne put que soupirer d'admiration en notant que l'herbe était basse, comme si quelqu'un avait entretenu chaque brin d'herbe afin qu'il n'excède pas une hauteur de quelques centimètres. Le garçon pouvait sentir que, à chacun de ses pas, le tapis végétal s'affaissait légèrement, offrant un moelleux si parfait qu'il voulut le vérifier de ses doigts.
Consciente de l'effet produit par le lieu, Zoldia laissa son adversaire prendre ses marques sans rien dire. Même si elle n'avait pas ressenti un tel engouement lors de sa découverte de la clairière, elle pouvait concevoir qu'on soit plus poétique qu'elle.
Quand Raiyo se fut enfin placée en face d'elle, à une distance raisonnable, elle se mit elle-même en position.
— Tout d'abord, nous devons convenir de nouvelles modalités pour ce duel. Je vais te faire une proposition et, si tu n'es pas d'accord, je te laisserai en proposer une autre jusqu'à ce que nous trouvions un terrain d'entente. Qu'en penses-tu ?
— Cela me convient, répondit Raiyo.
— Tout d'abord, fixons les règles du combat. Je souhaite que tu te donnes à fond. Cela veut dire que je veux aussi que tu utilises ton pouvoir durant notre affrontement.
— Comment... commença le garçon, abasourdi.
— Ne me coupe pas s'il te plaît, intervint Zoldia. Je te donnerai la réponse à toutes les questions que tu souhaites si tu me bats. Mais, d'abord, est-ce que cette partie du marché te convient ?
Raiyo prit quelques secondes à réfléchir avant d'acquiescer.
— Très bien, cependant, en échange, je veux que tu ne te retiennes pas non plus.
— Malheureusement, je ne peux pas donner à cent pour cent. Mais, le devança-t-elle en le voyant fulminer, je vais me battre du mieux que je peux tout en gardant mon sabre rengainé. Je t'expliquerai plus tard pourquoi je ne peux pas le dégainer. Tu es d'accord ?
— Très bien, grommela l'adolescent, peu convaincu.
— Pour la récompense, je te propose de répondre à toutes tes questions et de te donner en plus la récompense du Grand Tournoi si tu gagnes. Si jamais je ne venais pas à gagner le Grand Tournoi, alors j'accepterai que tu me donnes un ordre que je serai obligé de réaliser, dans la mesure de mes moyens. Cependant, si c'est moi qui te bats, je veux que tu renonces à voyager en compagnie de Fubuki.
Raiyo, désemparé, se mit à réfléchir. Les modalités ressemblaient à celles établies avec son amie d'enfance mais elle les avait légèrement modifiées. Pourquoi ? Pourquoi vouloir l'éloigner de Fubuki ? Était-ce en rapport avec leur altercation ? Ou cela avait-il un lien avec le fait que Zoldia soit au courant de ses pouvoirs ? De plus, il ne savait pas trop pourquoi, mais il avait l'impression que la guerrière cachait encore quelque chose. Mais quoi ?
Étourdi par toutes ses questions intérieures, le jeune homme secoua la tête avant de répondre.
— Je souhaite changer une clause. Si je gagne, je souhaite que tu répondes à mes questions et que tu m'accordes un ordre. Je me moque de l'argent alors, au pire, je te le demanderai via l'ordre. Sinon, tout le reste me va.
— Très bien, j'accepte les termes de ce duel.
Aussitôt, elle sortit son arme rengainée de sa ceinture et se mit en garde. Suivant son exemple, Raiyo se mit à chasser toutes les pensées superflues de son esprit et se concentra totalement sur son adversaire, son arme se manifestant à nouveau dans ses mains.
Voyant qu'elle ne faisait pas le premier pas, le garçon décida de le faire à sa place. Il fonça et abattit son sabre sur la guerrière. Cette dernière s'écarta légèrement et, parant de son fourreau la lame de l'adolescent, elle dévia le coup en le faisant glisser sur le côté. Vive, elle bondit, créant de la distance, avant de se replacer en garde.
Ce premier échange avait été court mais Raiyo en avait tiré beaucoup d'informations. Tout d'abord, il s'était rendu compte que son adversaire n'avait à aucun moment douté du moindre de ses agissements. Donnant l'impression de répéter une série de mouvements parfaitement orchestrée, elle lui donnait l'impression de détacher les étapes de ses gestes, comme si elle lui donnait un cours. Cela troublait le jeune homme.
Pourquoi fait-elle ça ? Souhaite-t-elle réellement gagner ce duel ?
Deuxièmement, il avait remarqué le mouvement final. En effet, il avait été étonné de voir qu'elle s'était mise en garde de la même manière qu'avant le début de l'affrontement.
Peut-être une habitude ? Dans ce cas, je dois transformer cette habitude en défaut.
Ainsi, il essaya de donner plusieurs coups, faisant en sorte de vérifier à chaque fois si Zoldia répétait son étrange mouvement. Et, en effet, elle avait la mauvaise habitude de se replacer après chaque échange. Un sourire victorieux naissant sur son visage, l'adolescent réitéra une attaque et, au moment où son adversaire allait se remettre en place, il bondit de nouveau sur elle. Il asséna de toutes ses forces un coup juste avant que l'épéiste ne puisse toucher le sol, l'empêchant ainsi de reprendre appui.
Raiyo cligna des yeux, ahuri. Il était désormais étalé au sol, une douleur lancinante dans le thorax. Il essaya de se relever mais l'air lui manqua et il ne put que se retourner sur le dos afin de pouvoir remplir ses poumons d'oxygène. Au-dessus de lui, dans une position clairement nonchalante, Zoldia le regardait, sans expression.
— Qu... Que s'est-il passé ? balbutia le garçon.
— Tu es tombé dans un piège si évident qu'un nourrisson lui-même l'aurait esquivé, répondit calmement la femme, son ton n'indiquant aucune moquerie. Je t'ai fait croire que j'avais une mauvaise habitude et je t'ai simplement réceptionné au moment où tu as cru pouvoir m'avoir. Si tu as assez récupéré, on s'y remet tout de suite.
Et sans même le regarder, elle retourna se positionner, reprenant sa position initiale. Tandis qu'il se relevait, Raiyo essayait de comprendre ce qu'il lui était arrivé. Aussitôt, sa mémoire se remit à fonctionner et les images défilèrent.
Au moment où il avait voulu placer son coup au niveau de la taille de Zoldia, cette dernière avait planté le fourreau de son arme dans le sol. Profitant de cet appui improvisé, elle avait soulevé son corps, passant juste au-dessus de la lame tranchante. Enfin, dans un geste quasiment instantané, elle avait fait un salto pour lui asséner un violent coup de talon dans le ventre.
Tout cela s'était passé si vite que Raiyo n'avait pas eu le temps de suivre l'action avec ses yeux. Mais Camolauss, lui, avait tout vu. C'était lui qui, depuis l'esprit du jeune homme, lui avait montré la scène en la ralentissant pour que le garçon la décrypte geste après geste. Seulement, il n'osait pas en faire plus, ne voulant pas briser la concentration de son maître.
L'adolescent se repositionna. Il n'eut pas le temps d'esquisser le moindre mouvement supplémentaire que son adversaire était déjà sur lui. Pris au dépourvu, il eut tout juste le réflexe d'opposer son sabre au fourreau de la jeune femme qu'il était catapulté à l'autre bout de la clairière. Il réussit à se rattraper en plantant l'arme divine dans le sol, freinant tout juste assez sa course pour ne pas finir brisé sur un des arbres entourant leur arène.
Le garçon leva les yeux et roula aussitôt, évitant tout juste le nouvel assaut. Zoldia était vive et n'avait pas l'air de connaître le terme de pitié. Mais ce qui choqua surtout Raiyo fut le fait que son sabre, malgré le fait qu'il soit encore dans son fourreau, trancha net le tronc contre lequel il s'était réceptionné. Dans un craquement si tardif qu'on aurait dit que le géant végétal s'était rendu compte après coup qu'il avait été sectionné, il s'abattit, obligeant l'escrimeuse à bondir en arrière.
Ce petit instant permit à l'adolescent de reprendre son souffle et d'aligner plus de deux pensées cohérentes.
Elle est rapide, trop rapide pour que je puisse lui faire quoi que ce soit. Ai-je la moindre chance de gagner ?
Aussitôt, il se sentit basculer dans son for intérieur. Il atterrit dans la grande plaine de fleurs violettes représentant son esprit. Surpris, le garçon fit volte-face et se retrouva face à Camolauss.
— Mais qu'est-ce que... s'emporta le jeune homme, imaginant Zoldia profiter du temps que lui offrait ce passage en son for intérieur.
— N'oublies pas qu'ici, le temps ne passe pas, répondit le loup en grondant légèrement. Maintenant, assieds-toi s'il te plaît.
Surpris par le ton ennuyé de l'animal divin, Raiyo obéit.
— Je peux te proposer un moyen de vaincre cette femme, mais c'est une technique à double tranchants.
— Que veux-tu dire ? demanda le garçon en essayant de cacher l'excitation qui pointait dans sa voix.
— Je peux te prêter mes yeux. C'est un pouvoir qui te permettra de pouvoir réagir bien plus vite que tu ne le fais actuellement mais aussi qui te permettra de suivre ses mouvements.
— Mais la contrepartie est ?
— Tu devras aussi maîtriser le plus possible tes émotions. Lorsque tu utilises la technique des « Yeux du loup », ton corps est parcouru d'électricité constamment. C'est ce qui permet à ton corps de bouger plus vite et à ton cerveau de traiter plus rapidement les informations. Mais cela signifie que la moindre de tes émotions est aussi amplifiée, tout comme ton instinct. Et je ne peux t'aider à te maîtriser. Cela signifie donc que tu vas devoir essayer de combattre tout en gardant sous contrôle tes émotions afin de ne pas perdre la raison. Tu l'as déjà expérimenté accidentellement à plusieurs reprises mais c'était pour un délai plus court.
Le ton de la dernière phrase sonna aux oreilles du jeune homme non pas comme un avertissement mais plutôt comme une supplique de refuser son offre.
— Je suis désolé Camolauss, mais je dois vaincre Zoldia. Donc je dois prendre des risques.
Aussitôt, le monde de son esprit vacilla et se disloqua. Raiyo put discerner la mine triste du loup mais il savait que l'arme divine ne le laisserait pas tomber.
Lorsque Zoldia reporta son attention sur son adversaire, elle fut parcourue d'un frisson. Depuis le début du combat, elle n'avait pas vraiment combattu, se contentant simplement d'instruire cet enfant qu'elle reconnaissait comme très prometteur. Elle s'était jurée de ne pas combattre à son maximum afin qu'il puisse apprendre d'elle. Cependant, lorsque ses yeux noirs se posèrent sur Raiyo, tous ses sens lui hurlèrent de survivre.
L'adolescent dégageait désormais l'aura d'un prédateur, prêt à fondre sur sa proie pour la dévorer. L'escrimeuse cligna des yeux une fraction de secondes et cela suffit au garçon pour rompre la distance qui les séparait. Agissant par purs réflexes, Zoldia repoussa son adversaire avec son arme, l'envoyant culbuter droit sur un arbre. Mais ce dernier se réceptionna en un salto arrière contre le bois et s'en servit d'appui pour se propulser de nouveau sur la jeune femme.
Les échanges s'enchaînèrent de nouveau, obligeant l'épéiste à reculer sous les assauts répétés de l'adolescent. Ce dernier, allant si vite que, hormis deux traits de lumières dorées qui indiquaient son passage, il semblait disparaître, laissait totalement ses instincts dicter sa conduite.
En effet, Raiyo était noyé dans un flot d'émotions et de ressentis si intenses qu'il lui semblait être au cœur d'un cyclone orageux, prisonnier de ses propres impressions, de son propre esprit. Il sentait son corps bouger, voyait que Zoldia reculait sous ses assauts. Mais ce n'était pas ce qu'il avait souhaité. Se maudissant pour ne pas avoir pris plus en compte les avertissements de Camolauss, il essaya d'abord de calmer la panique qui essayait d'éteindre le dernier éclat de lucidité de son esprit. Abandonnant complètement le cours du combat, laissant ses instincts affronter son adversaire, il se concentra sur ce qu'il ressentait.
Dans ce florilège de sensations, il chercha un chemin qui le mènerait au commandement de son corps. Mais plus il essayait de repousser ses émotions, plus le maelström dans lequel il se perdait semblait mugir avec plus d'intensité. Ce fut alors qu'une idée stupide lui traversa le peu de conscience qui lui restait.
Tout comme il avait remarqué que dans la plaine de son esprit il pouvait se mouvoir, il visualisa le typhon comme une immense mer agitée dans laquelle il pouvait se déplacer. Aussitôt, sa lucidité se mit à vaciller, ballottée par le puissant raz-de-marée dans lequel elle se trouvait.
Cependant, Raiyo n'avait pas donné son dernier mot. Résistant tant bien que mal, il décida de nager vers le fond, vers la pointe de la trombe. Il dut réessayer à plusieurs reprises, devant parfois prendre le temps de reconstruire la flamme de lucidité qui le définissait désormais.
Ce fut au bout de nombreux efforts qu'il réussit finalement au plus près de son objectif. Il était si proche de la source du florilège de ses émotions que le moindre contact avec ce dernier lui donnait l'impression de se faire trancher en mille morceaux. Chaque émotion, chaque ressenti, même la moindre pensée faisait vaciller la flammèche de sa conscience.
Cependant, endurant la souffrance, il se saisit de l'origine de la tempête d'une main et, de son autre poing fermé, il frappa de toutes ses forces. Aussitôt, la tornade de sentiments s'arrêta. Toutes les émotions du jeune homme tombèrent comme un château de cartes, manquant ensevelir l'esprit de leur maître. Ce dernier prit alors le soin de les organiser et bientôt, la plaine de Camolauss se reforma, comme si elle n'avait jamais disparu.
À l'extérieur, Zoldia fut de nouveau prise au dépourvue. Raiyo venait de se figer en pleine attaque et, lâchant son arme, se prit la tête. Il tituba légèrement avant de relever les yeux.
Intéressant... Il a réussi à maîtriser son nouveau pouvoir.
Cette pensée fit fleurir un sourire sur le visage de la guerrière. En effet, en face d'elle se tenait désormais un garçon possédant l'aura d'un chasseur analysant paisiblement son adversaire. Ses yeux dorés n'exprimaient plus la férocité, seulement la quiétude du guerrier qui s'apprêtait à combattre. Il leva la main et sa lame réapparut à l'intérieur.
— Désolé de t'avoir fait attendre, Zoldia. Désormais, le combat peut commencer.
— Je n'attendais que ça, Raiyo.
Se jetant mutuellement l'un sur l'autre, les deux escrimeurs croisèrent le fer en une multitudes d'attaques, créant des étincelles à chacun de leurs échanges. La jeune femme était stupéfaite. De son avis, la première fois que l'enfant divin lui avait adressé la parole, il n'était qu'un débutant. Ensuite, lorsqu'il avait éveillé son pouvoir, elle ne l'avait considéré que comme une bête sauvage. Désormais, il n'était pas devenu puissant par miracle mais là où il singeait des mouvements auparavant, il calculait minutieusement chacune de ses attaques, la forçant à prendre garde à ses mouvements pour toujours éviter la lame effilée du sabre. Au bout de quelques minutes, remarquant que Raiyo ne semblait pas faiblir, la sabreuse se décida à finir le combat. Le repoussant lors d'un nouvel échange, elle bondit en arrière et prit une position que reconnut immédiatement l'adolescent.
Zoldia était sur le point de réaliser la même attaque que celle ayant vaincu les voleurs venus détrousser le marchand, lors de leur arrivée à Asterlia.
— Raiyo, je tiens tout d'abord à te féliciter. Lorsque je t'ai dit que j'allais t'affronter, je n'avais pas pensé une seule fois à devoir utiliser une technique de mon école. Mais je souhaite avant tout que ce duel te serve de leçon. Alors, fais en sorte de survivre à ce mouvement.
L'enfant divin hocha la tête, se focalisant de toutes ses forces sur les gestes de l'escrimeuse. Comme la première fois qu'il l'avait vu, il vit Zoldia abaissait son arme mais, cette fois-ci, les « Yeux du loup » lui montrèrent l'entièreté de l'attaque. Au moment où la pointe de son fourreau semblait atteindre la fin de sa course, la jeune femme redressa immédiatement sa lame et réitéra deux fois le mouvement.
Premier mouvement de l'école Eldrick : Pluie d'étoiles filantes
Les trois lames d'air foncèrent alors sur Raiyo mais ce dernier était prêt. Ramenant la garde de son sabre au niveau de son visage, sa lame en direction du ciel, il se focalisa sur son pouvoir. Aussitôt, le temps parut se figer pour lui. La foudre s'échappa de son arme et vint parcourir son corps, renforçant ses muscles et développant à son paroxysme la vitesse de réponse de son corps.
Nimbé d'une aura électrique, il bondit sur l'attaque de la jeune femme et, la pointe de son sabre en avant, il psalmodia.
Alpha cherchant à protéger sa meute, dévoile tes crocs et dévore ton adversaire. Morsure orageuse !
L'énergie élémentaire se changea en une tête de loup qui percuta violemment la technique de la sabreuse. Le choc de l'assaut souleva un violent nuage de poussière et Zoldia fut complètement prise au dépourvu lorsqu'elle vit son adversaire sortir de la fumée, sa course tout juste freinée par l'explosion. Mais elle fut complètement désarçonnée lorsqu'elle vit le jeune homme effectuer la même position qu'elle quelques instants plus tôt.
Premier mouvement de l'école Eldrick revisitée : Pluie d'éclairs !
Troisième mouvement de l'école Eldrick : Cyclone purificateur !
De la même manière qu'il avait utilisé inconsciemment cette technique lors de son combat dans le Colisée, deux lames de foudres apparurent aux côtés de sa propre lame. Cependant, la cible des armes élémentaires effectua un nouveau mouvement qui fit souffler un puissant vent autour d'elle, déviant leur trajectoire. Les deux éclairs se perdirent sur la muraille d'arbres entourant la clairière tandis que le métal venait fendre le sol, sur la droite de l'escrimeuse. Cette dernière, le bout de son fourreau sous la gorge de son adversaire, regardait Raiyo. L'intensité dorée dans ses pupilles diminuait rapidement tandis qu'il tombait à genoux. Épuisé, il lutta néanmoins pour ne pas perdre conscience. Zoldia l'aida à s'asseoir confortablement avant de l'imiter.
— Encore une fois, je te félicite Raiyo. Tu as, en plus d'avoir maîtrisé le premier mouvement de l'école Eldrick, réussi à m'obliger à utiliser le troisième mouvement.
— Certes, mais ce n'est clairement pas suffisant pour te battre, répondit le garçon en reprenant son souffle.
— Navrée de devoir le dire mais saches que tu n'avais aucune chance de me vaincre. Cependant, je reconnais ma défaite face à toi. Je me suis montrée bien orgueilleuse en voulant t'instruire pendant notre affrontement. Désormais, je vais répondre à chacune de tes questions puis j'accepterais l'ordre que tu me donneras, comme convenu.
L'adolescent voulut contester la décision de la jeune femme mais il savait parfaitement que cette dernière était imbattable, du moins à son niveau actuel. Il se contenta alors de cette petite victoire et se repositionna.
— Qui es tu réellement, Zoldia ?
— Comme je te l'ai déjà dit, je me nomme Zoldia Eldrick. Les membres de mon clan sont, depuis la nuit des temps, les gardiens de la relique de Corindon, le dieu de la guerre et bienfaiteur des Saints de la glace.
— Attends, tu veux dire que tu es...
— Oui, je suis l'actuelle Sainte de la glace. Mon devoir est de voyager aux côtés de ton amie Fubuki et de l'aider. Mais, après m'être entretenue avec elle quant aux modalités de notre affrontement, je dois reconnaître que j'ai été particulièrement déçue. J'espérais que, comme dans les légendes de mes ancêtres, l'enfant divin de la glace serait une personne sage et à l'esprit vive. Mais, je n'ai vu qu'une enfant gâtée se reposant sur ses lauriers.
— Voilà pourquoi tu désirais voyager avec elle si jamais je perdais notre affrontement. Donc, si j'ai tout compris, ce sabre que tu portes est une arme divine ?
— Ce n'est pas au sens où tu l'entends. Mon sabre ne vaut pas le tien. S'ils ont tous les deux étaient forgés par Anbiru, le dieu de la création matérielle, le mien n'est pas habité par un gardien comme le tien. En échange, il possède une puissance dévastatrice qui me force à le garder rengainé continuellement afin de ne pas détruire tout ce qui m'entoure. D'autres questions ?
— Que vas-tu faire désormais ?
— Tout d'abord, je vais gagner ce tournoi puis je voyagerai avec vous pour remplir mon rôle de Sainte.
— Dans ce cas, voici mon ordre. Deviens notre entraîneuse à tous, pas seulement à Fubuki !
La déclaration du jeune homme amusa la guerrière qui approuva d'un geste de la tête. Ils convinrent de se séparer et de rentrer chacun de leur côté. Au moment où ils durent se quitter, Zoldia tendit sa main au jeune homme.
— Raiyo, j'ai été ravi de t'affronter. J'espère pouvoir t'enseigner tout ce que je pourrais.
Le jeune homme sourit et répondit au geste de sa nouvelle compagne de voyage.
— Ce plaisir est réciproque. Je ne te souhaite pas bonne chance pour le tournoi car je sais que tu n'en as pas besoin. Retrouvons-nous après la finale ici pour poursuivre notre voyage, si cela te convient.
L'escrimeuse acquiesça et s'éloigna, laissant l'enfant divin seul avec ses pensées. Ce dernier regarda en direction d'Asterlia et soupira, l'esprit tranquille. Il se dirigea paisiblement vers la capitale, ne remarquant pas les trois ombres qui le surveillaient de loin. L'une d'entre elles murmura :
— Je vois que tu prends de l'avance, Raiyo. Mais ne ralentis pas, je serai toujours juste derrière toi jusqu'à notre prochain combat où, là, je te surpasserai.
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