Au matin, c'est comme si le temps s'était arrêté.

Tout est silencieux, tout est calme, et le ciel touche presque le sol. Les nuages pourraient caresser la peau fine de Louis, et le Soleil levant pourrait réchauffer le corps endormi d'Harry. Mais... le monde lui aussi s'est arrêté. Plus rien ne bouge, il n'y a que deux corps, allongés l'un contre l'autre, perdus dans leurs âmes, perdus l'un en l'autre. 

Tout est lumineux. La chambre des deux garçons n'a jamais été aussi claire, et les draps scintillent d'un éclat nouveau. Louis est de retour dans les bras d'Harry. Est-ce une raison pour que le monde se remette à tourner, ou qu'il s'arrête ? Le coeur du bouclé bat si lentement, et le souffle du faux blond est si léger. 

Tout est merveille. Le sourire de Louis tandis que ses doigts effleurent les lèvres roses de son amant ; ses yeux attendris alors qu'il admire Harry, encore endormi. Et s'il caresse la peau du bouclé, c'est pourtant la sienne qui frissonne. 

- Je t'aime.

Si un jour il a été brisé, et s'il l'est encore, pour toujours, Harry est celui qui comble le vide, celui qui se faufile dans les fissures de son âme abîmée, celui qui réanime son corps meurtri et abandonné. Harry est tout.

- Le reste est sans chaleur, sans essence... souffle Louis, son visage amoureusement proche de celui d'Harry. Et c'est toi, mon foutu garagiste, qui me permet de tenir debout, de relever la tête après des années. Tu es dans ma chair, tu es dans mes os. Magnétique, et électrique. Tu es mon paradoxe, l'encre et le sang sous ma peau, le tatouage que je n'aurai pourtant jamais et pour toujours.

Et tout s'éveille. Dans sa poitrine, le coeur de Louis bat terriblement fort, ses yeux voient mille couleurs de plus, et ses lèvres embrassent délicatement le cou du brun. De nombreuses fois. Et Harry sourit, échappe un rire tendre et encore lendore de sa nuit. 

- Tu me parlais ? murmure-t-il en déposant un baiser dans le cheveux de Louis.

Blotti contre son torse puissant, Louis sourit tendrement.

- Non... Je réfléchissais.

- A quoi ?

- Mon dernier tatouage, souffle le blond, rêveur.

- Lequel ? Tu l'aimes pas ?

- Si... avoue Louis en fermant les yeux. Plus que tout.

_____

- Et vous n'aimez pas cette histoire ? 

Liam reste ahuri, mâchant son morceau de pomme, les yeux grands ouverts rivés sur Alfred qui se fait son café. 

- Non. C'est d'un tragique trop grandiose pour moi et mon coeur ne tiendrait plus longtemps si je venais à regarder ces films à nouveau. Je me fais vieux, tu sais ? plaisante-t-il.

- Malgré le tragique, ça reste une superbe histoire de famille, insiste Liam.

- Une famille qui étend son drame à travers la galaxie et crée le pire régime totalitaire possible, avec à sa tête un être robotisé et condamné à vivre sans l'amour de sa vie, sa culpabilité le rongeant éternellement. Je ne toucherai plus jamais à Star Wars, Liam. Jamais. 

Le jeune explose de rire, faisant sourire le plus vieux qui vient s'installer à ses côtés. Mais Alfred se souvient qu'il est condamné à vivre sans l'amour de sa vie, sa culpabilité le rongeant pour l'éternité. Et si son sourire reste sur son visage, tout s'effondre une énième fois en lui. Il tend la main pour attraper la plaquette de comprimés recommandés pour sa tension, mais il n'arrive pas à en sortir un comprimé. Ses mains tremblent comme des feuilles, et sa vision se moque de lui, créant des tâches floues devant ses yeux. 

- Hey. Hey, Alfred, regardez-moi, requiert Liam en cherchant le regard de l'homme aux yeux clairs. Tout va bien, respirez. C'est ça. Donnez-moi ça.

Il prend les comprimés et en sort un, rapprochant le verre d'eau qu'Alfred avait posé plus tôt sur la table. L'homme aux cheveux plus blancs que la neige hoche doucement la tête, le remerciant, incapable de parler. Ses tremblements passent, son corps se calme, et Alfred reprend ses moyens. Il avale le cachet, sous le regard bienveillant de Liam, puis Harry et Louis arrivent, se chamaillant à propos d'une connerie.

Alfred les observe avec un bonheur évident qui repousse ses regrets et sa culpabilité ; et Liam se promet de savoir les tourments de l'homme en pourpre. Ce sera leur secret, car il parait indéniable qu'Alfred n'en ait jamais parlé à Harry.