Chapitre 55 : Une dernière chose
Emilie se leva à son tour, toutes deux allaient sortir de la pièce, mais Jack n'avait pas l'air de le remarquer, il buvait calmement son verre de whisky dans son beau siège en cuir. Il posa même ses pieds sur son bureau en marbre. Alors que les jeunes filles allaient ouvrir la porte, Emilie se retourna vers Jack et lui posa une question qui hantait son cerveau et celui de son amie depuis le début de l'histoire :
— Pourquoi nous ?
Jack posa son verre sur son bureau, il se leva et souffla un coup pour une courte explication :
— Je ne sais pas vraiment. Ce que je sais est peu. Il voulait quelque chose de vous, quelque chose qui est EN vous, avait-il dit précisément. On aurait pu en enlever qu'une sur vous deux, mais il avait insisté qu'il fallait que vous soyez toutes les deux, ensemble.
— C'est tout ? Vous ne savez rien d'autre ?!
— C'est déjà bien, Thaïs. Vous savez que vous êtes exceptionnelles maintenant, dit-il d'un ton sarcastique.
Une nouvelle fois quelqu'un frappa à la porte.
— Patron, ils sont là.
— Bien, j'arrive. Emmenez-les dans la salle de réunion.
L'homme referma la porte, ses pas résonnaient dans le couloir jusqu'à ce qu'il soit trop loin pour que les jeunes filles puissent l'entendre encore.
— Vous allez nous tuer ? demanda Emilie, timide tout à coup.
— Non, partez, j'ai affaire, répondit-il d'un ton autoritaire en revêtant sa veste accrochée au porte-manteau près de la porte.
Elles se dirigèrent vers la sortie sans attendre, avant qu'Emilie ne questionne une dernière fois son tuteur :
— Où est le tigre ?
— Comment ça ? dit Jack, ne comprenant pas sa question.
La jeune fille s'éclaircit la gorge puis répéta :
— Le tigre que nous avons rencontré il y a des années lorsque nous étions enfermées ici, nous l'avions revu dans notre cabane quelques jours après notre évasion, puis plus rien, où est-il ?
— Ah d'accord, eh bien il n'est plus là.
— Où est-il maintenant ?
— Nous l'avons retrouvé et ensuite nous l'avons vendu, donc je ne sais pas où est ce tigre aujourd'hui.
— Vendu ? dit Emilie, un brin de colère se décelant dans sa voix.
— Oui, ce tigre faisait partie d'un trafic comme tous les autres animaux qui étaient prisonniers dans cette salle.
— Comment avez-vous pu faire ça ? Samara nous a sauvé ! s'énervait Emilie.
— Nous sommes des mafieux, ne l'oublie pas, dit Jack.
En pensant à son tigre trop tôt disparu, Emilie laissa couler une petite larme de son œil bleu. Elle se tourna ensuite vers son amie puis se retourna vers la porte sans bouger. Dos à Jack, elle s'exprima, le dégoût dans sa voix :
— C'est quoi cette affaire pour que tu nous presses à partir ?
— Je ne te le dirais pas, répondit Jack surpris de la question.
Emilie insista :
— C'est quoi comme affaire ? Un assassinat ?! Un enlèvement ?! Un trafic d'organes ?! Un blanchiment d'argent ?!
— Je n'ai pas à te le dire, je ne te dois absolument rien. Que ce soit un trafic d'animaux, d'organes ou quoi que ce soit, je ne te dois rien ! sans moi, vous seriez mortes à l'heure qu'il est, et depuis longtemps ! sois-en heureuse et tais-toi !
Il avait élevé la voix. Elles ne l'avaient pas encore entendu sur ce ton. Il avait l'air effrayant, glacial.
— Dégagez vite maintenant ! termina-t-il. J'ai affaire.
Les fillettes, sans un mot, sortirent précipitamment de la pièce, la tête baissée vers le sol. Elles étaient trop terrifiées pour oser relever leurs yeux vers ceux de leur tuteur.
Sur le chemin du retour, les deux amies n'osaient pas rompre le silence. Thaïs réfléchissait sur l'affaire de Jack. Quelle était cette affaire si urgente ? Elle voulait savoir, mais elle ne retourna pas vers le bâtiment. Elle ne voulait pas vraiment y retourner. Cet endroit si angoissant et terrifiant n'avait rien d'une destination paradisiaque.
Le cerveau d'Emilie pensait également à Jack et son dernier regard qui lui avait inspiré la peur. Ceci la fit songer à Marc, l'homme qui les avait enlevées. Jack lui ressemblait, tout aussi méchant. Et se replongeant dans ses lointains souvenirs, une question n'avait pas été encore vraiment élucidée : « Pourquoi ? ».
En effet, cette question ne trouvait toujours pas de réponse satisfaisante. Exceptionnelles. Elles étaient exceptionnelles et c'est pour ça que quelqu'un avait voulu les kidnapper. Exceptionnelles... Dans quel sens ? Pourquoi elles l'étaient ? Comment ne pouvaient-elles même pas le savoir ? Si elles étaient si exceptionnelles, elles devaient bien avoir une idée sur ce fait... mais non. Aucune idée. Quel genre d'exception vivait en elles ?
Elles arrivèrent enfin à leur cabane, mais s'arrêtèrent nettes.
— Thaïs, tu penses que cette cabane est une prison ou notre paradis ?
— J'aimerais le savoir...
Sur ce, elles se fixèrent un moment, les yeux dans les yeux, puis se rendirent un sourire. Elles voulaient croire que cette maison leur avait permis la liberté depuis tout ce temps et que cela continuerait jusqu'à la fin. C'était plus beau de cette manière. Elles entrèrent alors dans leur refuge au cœur de la forêt, puis s'assirent sur le lit de Thaïs côte à côte.
Thaïs pencha la tête sur le côté, vers le bureau. Un papier rempli de notes y était posé. Elle tendit son bras pour l'attraper.
— Une autre chanson ?
Emilie ne répondit pas, une petite larme s'écoulait de son œil bleu. D'avoir revu Jack, d'avoir parlé de Marc et de toute cette histoire, lui faisait repenser une nouvelle fois à ses parents. Alors, Thaïs lu dans sa tête le texte écrit par son amie. Elle le trouva si beau et si touchant qu'elle voulut lui rendre hommage en le chantant. Les paroles firent entonner d'une voix douce. Ce qu'avait écrit Emilie était aussi vrai pour Thaïs. Chacune d'elle pouvait entendre son histoire à travers ce texte. La façon dont elles arrivaient à vivre après cette vie détruite. Cette vie vécue dans la peur et la tristesse. Ces souvenirs dont personne n'aimerait s'en rappeler. Ce linceul qui avait entouré leurs parents, à l'aube de leur vie. Cette douleur, comme décrite dans la chanson d'Emilie, ne quitterait jamais leur esprit et leur corps. Cette vie plus précieuse que l'or leur avait été prise et ne pouvait leur être rendu.
A la fin de la chanson les yeux des deux amies, d'eau s'étaient remplis. Thaïs reposa la feuille sur le bureau. Son amie la regardait, souriante. Elle entoura Thaïs de ses bras.
Leur embrassade fut longue. Chacune des deux avaient pu supporter ces quatre années grâce à l'autre. Et à présent, elles savaient qu'elles pouvaient compter sur une nouvelle famille, bien que celle-ci n'était pas la plus parfaite et respectueuse des lois. Non, mais cette famille était dorénavant la leur.
Et leur étreinte fut si forte que plus aucune des jeunes filles ne reposait sur les draps du lit. Elles flottaient quelques centimètres au-dessus du matelas. Leur esprit ne faisait plus qu'un.
FIN ! J'espère que ça vous a plu ;)
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