Chapitre 6 : Le grand départ

Le soleil se levait sur Orchidia, je suivais sa course avec attention. C'était le jour J, le reste de la journée d'hier, j'avais planifié mon départ. J'avais imaginé toutes les options, tous les problèmes que je pourrais rencontrer une fois dehors. Je n'avais pas dormi de la nuit, j'étais incapable de trouver le sommeil. J'étais à la fois excitée et apeurée, j'angoissais. J'avais peur que les choses ne se passent pas comme je les avais prévues.

J'avais entendu Léo, mon « père », quitter la maison. Je ne pouvais pas le louper, son pas lourd et le fracas de la porte contre le mûr, il fallait le faire exprès. Il était temps, pourtant, j'attendais encore un peu. J'attendais simplement d'entendre le bruit des épées s'entrechoquant. J'avais déjà rassemblé mes affaires, j'avais enfourné quelques vêtements et le strict nécessaire dans un petit sac usé. J'y avais bien-sûr ajouté la photo de maman, soigneusement protégée, c'était ce que j'avais de plus précieux.

Bam. Bam. Bam.

Je souris. Un petit sourire, bien-sûr, et un peu faux aussi. J'empoignais mon sac et déverrouillais la porte avec la tige de métal. J'entrais dans la salle à manger, je devais faire des provisions avant de partir, c'était évident. Je disposais trois pommes enroulées dans un chiffon au dessus des vêtements et croquais dans une autre. Le goût sucré était agréable, j'avais toujours adoré ce fruit. Sans m'arrêter, je fouillais dans les placards à la recherche de quelque chose de comestible. Dans l'un d'eux, je trouvais une miche de pain et même un paquet de biscuit que je m'empressais d'enfourner dans mon sac. Ca y est ? J'avais tout. Je déglutis, je devais y aller, trainer trop longtemps ici était trop risqué.

Dans le couloir, le bois craquait sous mes pieds et je m'imaginais déjà mon père, surgissant de n'importe où, fou furieux. J'ouvris la porte après une profonde inspiration et après avoir chercher le courage qui me manquait. La rue était beaucoup plus calme qu'il y a deux jours. Seuls quelques passants étaient de sortis. Je préférais ça, moins de gens me verraient, mieux c'était. Je m'élançais dans la rue, d'un pas décidé. Je ne savais pas du tout où j'allais, je voulais simplement quitter la ville et ce, le plus vite possible. Je tentais de retenir les maisons, histoire de ne pas tourner en rond. Mais les maisons étaient toutes semblables et, très vite, je décidais de ne pas compter sur ça.

.....................................................................

Les heures avaient passés et j'étais épuisée. Le soleil tapait et la couleur de mes cheveux n'aidait pas. Des mèches noires étaient collées sur mon front et contre mon dos par la sueur. Finalement, je décidais de faire une pose, mon estomac grognait depuis longtemps. Je m'assis à l'ombre dans une petite rue, afin de ne pas attirer l'attention et de profiter de la fraicheur. Je mangeais rapidement une nouvelle pomme et un bout de pain et me remettais en route. J'avais l'impression de tourner en rond et la ville me semblait être, à présent, un labyrinthe géant. J'hésitais à demander de l'aide aux passants, sachant qu'à la base, j'avais l'intention de ne parler à personne.

Je réfléchis longuement à la question et, finalement, je me décidais. Je m'adressais alors à une vieille femme, dont les maigres épaules étaient recouvertes d'un châle usé :

- Excusez-moi madame. Je me suis perdue, pourriez-vous me dire comment je pourrais sortir de la ville ?

Elle s'est tournée lentement vers moi, comme si chaque mouvement la faisait souffrir. Elle était tellement maigre que ça me semblait possible. Elle m'a toisé, me dévisageant de haut en bas, les yeux plissés. Un sentiment se dégageait d'elle, mais je ne saurais le nommer. Elle me répondit après d'interminables secondes :

-Tu ne viens pas d'ici, n'est-ce pas ? Je ne t'ai jamais vu et pourtant, je connais tout le monde ici !

-Non, je ne suis d'ici. Je suis de ... Passage. Mentis-je, la bouche sèche.

Ma voix sonnait faux et j'étais presque certaine que la vieille femme l'avait remarqué. Elle devait se douter de quelque chose puisqu'elle répéta, avec méfiance :

-De passage ...

Je n'étais pas crédible. Je repris, un peu trop rapidement :

-Oui. Mon oncle fait du commerce ici et il m'a laissé champ libre pour la matinée. Le problème, c'est que vu que je ne connais pas le coin, je me suis perdue.

Je soupirais, c'était déjà mieux. Elle semblait plus convaincue, cette fois-ci. Elle réfléchie quelques instants et moi je me tortillais devant elle, pressée de pouvoir m'éclipser. Elle lança :

-Vas par là ! Tu devrais arriver à sortir de la ville assez facilement.

D'une main tremblante, elle me montrait un pont qui traversait un cours d'eau. J'hochais la tête et dis :

-Merci madame.

Je la laissais en plan, trop heureuse de pouvoir m'éloigner de cette femme qui me faisait froid dans le dos. Dans le ciel, une bestiole immense passa devant le soleil brûlant. Je sursautais et levais les yeux. La bête ressemblait à un insecte avec de longues ailes vertes, sur son dos, un homme était assis, je ne distinguais pas ses traits, mais il portait l'uniforme. C'était un garde. Et il montait un Carapax, je m'en souvenais maintenant. J'en avais vu un depuis ma chambre, à l'époque où ma maman vivait encore.

Une fois qu'ils eurent disparu, je continuais mon chemin. Traversais le pont et les rues devinrent plus larges et plus animés. Les gens discutaient et riaient, des Orchidiens menant une vie aisée et sans encombre. Quelle chance ils avaient ! Je continuais de marcher, mais je ne quittais toujours pas la ville. Je grognais, cette vieille folle m'avait-elle mentit ? J'étais fatiguée, j'avais mal aux pieds, j'avais faim et je commençais à devenir paranoïaque. Dans chaque regard, je voyais du soupçon, dans n'importe qui, je voyais un garde de mon père.

Le soleil commençait à décliner et il n'allait pas tarder à se coucher. Avec ça naissait un nouveau problème : trouver où dormir. Moi qui pensais sortir de cette fichue ville avant la tombée de la nuit ... Je n'avais pas du tout prévu de devoir dormir ici, c'était bien trop dangereux. Pensive, je m'asseyais contre le mûr d'un grand bâtiment gris et croquais dans une pomme. J'avais l'impression d'être prisonnière de cet endroit. Je regardais au dessus de moi, l'arbre de Gaméra paraissait immense. Il semblait nous protéger et c'était ce que je pensais quand j'étais petite. Il veillait sur nous, sur moi. Mais j'allais partir, plus d'Arbre protecteur, plus de cette ville et surtout, la liberté !

Soudain, alors que j'allais me décider à me lever et à poursuivre ma route, des soldats firent leur apparition. Je sursautais, prête à bondir. L'un d'eux me demandit, l'air grave :

-Mademoiselle Shirley ?

Mon cœur rata un battement. M**** ! Comment savait-il ? Je tentais une nouvelle fois le mensonge :

-Vous faites erreur.

D'un mouvement vif, il sortit une affiche. Un avis de recherche, avec mon visage dessus. Je compris rapidement que je ne pourrais pas les duper. Il ne me restait plus qu'une option. Une option pour ne pas me retrouver enfermé à nouveau, s'il ne me tuait pas, cette fois-ci. Il devait être fou de rage, je n'osais même pas imaginer sa réaction s'il m'attrapait. J'inspirais profondément, prête à mettre ma dernière option à exécution : courir !


Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top