R e f l e u r i r

Faire le deuil n'est pas chose simple. Ça, Gaël a fini par le réaliser. Il faut d'abord comprendre qu'on y est : dans cette phase tant redoutée. Pourrons-nous le concéder ?

Lorsque la mort s'abat sur l'un de nos proches, cela nous fait subitement comprendre qu'elle est présente, qu'elle fait partie de la vie qu'on le veuille ou non. Mais surmonter cette épreuve n'est pas impossible, même si l'on pense tomber dans un tunnel sans fin, sans lumière, sans espoir. Je crois que l'Univers place des obstacles sur notre route afin que l'on se surpasse. Que l'on montre et donne la meilleure version de nous-même. La récompense n'est que plus belle : accueillir sa force, célébrer la vie qui danse en nous et qui jaillie autour de nous. On peut tout accomplir. Tout est à portée de mains si l'on s'en donne réellement les moyens.

Alors que Gaël écrit au stylo à plume ces mots, Alice pose sa main sur son épaule, signe d'encouragements. C'est en partie grâce à cette femme qu'il a réussi à avancer. A guérir. C'est le Soleil de ses jours. Elle représente ces fameux rayons transperçant les nuages gris, la pluie, la tempête. Elle sera toujours là. L'amour s'est immiscé entre eux naturellement, telle une évidence, une certitude, une quiétude. Un air pur, une bulle qui ne s'explose pas, qui enveloppe et caresse comme une plume.

Depuis le début nous tenons l'allumette. Refusant parfois de l'admettre. S'envolant dans des extrêmes puis brutalement s'écraser, s'embraser et se faner. Oui. C'est la fin d'une vie. Mais pas de la nôtre. La Vie existera toujours. A travers des rires, des soupirs, mais aussi grâce à la mer qui vient lécher les galets, grâce à un papillon en train de s'envoler, grâce à l'Amour, la Terre, grâce à chacun d'entre nous. Alice a su rallumer la braise. En soufflant délicatement moi-même dessus, la flamme s'élève désormais très haut.

J'ai vu fleurir l'amour dans un champ détruit par les bombes

J'ai trouvé l'amour où il n'était pas supposé être

L'amour d'autrui et l'amour d'Etre

J'ai pleuré et crié

Le décès de ma mère bien-aimé

Les genoux écorchés

Le cœur calciné

La rage de voir la santé de mon père se dégrader

Son absence de réaction

Son refus de guérison

Se soigner soi

Avant tout

Pour mieux rebondir

Réapprendre à s'aimer

Et savoir guérir...