dark was the night

Au bord de l'apoplexie, il tenta de prendre une inspiration, mais la pointe de souffrance dans sa cage thoracique lui coupa littéralement le souffle ; il était là, plié en deux, les yeux fermés et pendant un instant, pendant un court instant, il pria pour que tout ça ne soit qu'un cauchemar, un cauchemar duquel il se tirerait à un moment. Une amère odeur de sang se frotta à ses narines et il grimaça légèrement, ça se mêlait dans l'air au parfum de chair brûlé ; le son assourdissant d'une explosion résonna à une centaine de mètres de lui et ce simple son lui arracha un sursaut.

Quelques rires mesquins flottaient, des rires qui lui faisaient mal ; le corps tremblant, il tenta de ne pas fondre en larmes et étouffa un sanglot entre ses lèvres. Il prit une inspiration, dans un élan particulièrement douloureux et ouvrit délicatement les yeux ; ses prunelles d'un bel ébène se heurtèrent à cet amas de corps sur le sol, dans cette rivière pourpre. La vision lui arracha plusieurs nausées et il se plia en deux, recrachant le peu de choses qui séjournaient dans son estomac. Ils étaient là, ils étaient tous là et ça le tuait, littéralement.

- « aide-moi » entendit-il, dans un murmure agonisant

Un cri désespéré au bord des lèvres, il se figea au son de la voix ; parce que cette voix, il la connaissait par cœur, parce que cette voix l'avait bercé pendant toute son enfance. Des souvenirs lui revinrent en mémoire et il les éloigna de lui, tant bien que mal, prenant une inspiration ; dans un élan douloureux, il se hissa dans une posture droite et retint les larmes qui menaçaient de prendre la fuite, loin de ses paupières, à l'instant où ses prunelles brunes se retrouvèrent happées par ses deux billes bleutées.

- « aide-moi, Shikamaru » répéta l'homme

Il était là, à quelques mètres de lui ; ses mèches d'un beau blond habituellement si désordonné, s'accrochaient à son front tremblait et humide et il ne souriait pas. Il était là et au fond, ce n'était pas possible, n'est-ce pas ? Parce que Shikamaru avait assisté à la scène, parce qu'il avait assisté à cet instant morbide, à cet instant où cet homme lui avait arraché le cœur, sans une once de regret dans le fond de son regard ; les lèvres tremblantes, il effleura du bout de ses prunelles le trou béant dans la poitrine de son ami d'enfance et réprima la pointe de souffrance dans ses entrailles. Une quantité inquiétante de sang s'échappait de la blessure, Naruto titubait maladroitement, le visage crispé ; le brun fit un pas en arrière, au bord des larmes et secoua la tête de droite à gauche, des battements douloureux dans sa cage thoracique.

- « je ne peux pas » lâcha-t-il, dans un murmure « je suis désolé »

Et il s'empressa de prendre la fuite, au détour d'un arbre, à l'allure centenaire. Le bruit de ses pas s'éleva dans les airs, ça résonnait, se mêlait aux battements de son cœur ; il tenta de ne pas perdre l'équilibre, mais lorsque son épaule se heurta brutalement à une silhouette imposante, il s'écrasa sur le sol, de tout son long. Le gémissement souffrant qui s'échappa de ses lèvres flotta, un instant, dans le silence pesant de la forêt ; un court instant, avant qu'une voix masculine ne le brise.

- « tu ne m'as pas protégé »

Le front contre le sol humide, le brun fondit en larmes ; peut-être parce que le fait était vrai, peut-être parce que cet homme ne mentait pas. Il s'appuya maladroitement sur les paumes de ses mains et se hissa sur ses genoux, son regard se perdit dans la chevelure rousse du garçon ; puis, il s'attarda sur ce trou béant dans sa poitrine, un trou semblable à celui qui s'accrochait au corps de l'Uzumaki.

- « tu ne m'as pas protégé, Shikamaru » répéta-t-il « tu n'as pas tenu ta promesse »

Un sanglot s'échappa de ses lèvres, il n'eut aucun mal à reconnaître le propriétaire de la voix ; bien que les larmes rendaient sa vue légèrement floue. Chôji se tenait là, à quelques mètres de lui et bordel ce que ça lui faisait mal. Dans un élan tremblant, il se hissa sur ses deux pieds et renifla bruyamment, la respiration saccadée ; ses prunelles d'un bel ébène se perdirent un court instant dans les iris brunes de l'homme qui avait été son meilleur ami, pendant si longtemps et quelque chose se brisa en lui, dans sa cage thoracique. Il aurait juré entendre les morceaux de son cœur qui se perdaient lentement dans ses entrailles.

- « pardonne-moi, Chôji » lâcha-t-il dans un murmure douloureux « je-.. »

Les mots qui s'échappaient de ses lèvres moururent au fond de sa gorge, à l'instant où une main effleura tendrement sa joue ; en une demi-seconde, la silhouette enveloppée du rouquin cédait à la silhouette féminine d'une jolie brune. Les larmes sur les joues du stratège redoublèrent d'intensité et il se noya dans ses prunelles d'un magnifique bleu. Bordel, elle était là, si près de lui ; lentement, il approcha sa main du visage de la jeune femme et déposa le bout de ses doigts sur sa joue, teintée de quelques nuances de rose. Un frisson le prit, lorsque la douceur de sa peau se fit sentir sous ses doigts et un sourire naquit au coin de ses lèvres, malgré lui, malgré les larmes ; il prit une inspiration douloureuse.

- « je.. » commença-t-il, à bout de souffle « je ne sais pas si je suis terriblement heureux ou horriblement triste »

Un rire nerveux s'échappa de ses lèvres et la brune enfonça doucement sa joue dans la paume de la main de l'homme, sûrement qu'elle cherchait un peu plus de contact entre eux. Shikamaru n'osait pas baisser les yeux, parce qu'au fond de lui, il le savait ; il savait qu'à l'instant où il le ferait, la vision lui glacerait le sang et qu'elle disparaîtrait. S'en était si étrange, une partie de lui avait besoin d'elle ; il avait besoin de son sourire, de ses prunelles bleutées, de sa voix, d'elle tout simplement.

- « tu me manques » avoua-t-il, dans une inspiration

Pendant une minute, le bout des doigts de la jeune femme glissa sur sa joue rugueuse, un fin sourire au coin des lèvres et cette fichue lueur au fond de ses prunelles ; elle était là et elle était si belle, ça lui coupait le souffle. Elle effleura du pouce ses lèvres tremblantes et se hissa sur la pointe des pieds, il ne dit rien et se pencha légèrement en avant, les yeux presque clos ; mais les lèvres de la brune ne vinrent jamais.

- « regardes ce que tu m'as fait » souffla-t-elle, froidement

Les mains de Fune s'accrochèrent brutalement à ses joues et elle le força à contempler la plaie béante, au-dessus de son bassin, ce sang qui s'en échappait à flots ; sans attendre une seconde de plus, il fit quelques pas maladroits en arrière, en tentant tant bien que mal de ne pas perdre l'équilibre, et plaqua une main sur ses lèvres. La nausée qui le prit eut raison de lui, l'instant d'après, il recrachait ses tripes sur le sol ; pourtant, c'était son œuvre. De ses mains, cette plaie avait naquit.

Un bruit métallique flotta un court instant ; à bout de souffle, les pleurs du nourrisson qui accompagnèrent ce bruit lui coupèrent le souffle. Ses prunelles brunes se confrontèrent au corps inerte, qui se noyait dans une rivière pourpre, au pied d'un arbre à l'allure centenaire ; elles se confrontèrent aux larmes qui coulaient sur les joues de la douce Mitsuha, à ce bébé, émmitouflé tant bien que mal dans un vieux pull.

- « non, pas ça » murmura-t-il, à lui-même « pas encore »

Cet arrière-goût de déjà vu dans sa gorge lui fit terriblement mal.

Les ombres s'accrochèrent à lui, à son corps tremblant, une nouvelle fois ; l'obscurité le prenait, le nourrissait au sein et faisait de lui, l'homme qu'il allait être dans quelques minutes. Malgré lui, comme si son corps ne lui répondait plus, sa main s'accrocha au manche du katana, sagement installé contre le bois de l'arbre.

Dans un élan agile, il s'élança avec rage ; la lame se planta dans le cœur de son ennemi, avec une précision surprenante et dans un bruit épouvantable. Le bruit étouffé du corps qui tombe sur le sol, dans l'herbe humide, lui arracha un frisson ; son humanité s'échappait de lui, lentement. Les quelques souvenirs d'une existence heureuse s'effaçaient et cédaient à ce liquide pourpre, à cette fichue sensation dans ses entrailles ; le stratège n'existait plus, à cet instant, il devenait un assassin.

Le dos du deuxième ennemi heurta brutalement le sol et il le roua de coups, sans prendre une inspiration ; son poing s'écrasait toujours un peu plus fortement dans le visage du blond. Il était là et bordel, tout son être voulait lui faire mal, prendre sa vie de la pire façon possible.
Un craquement d'os désagréable.

Installé sur le bassin de cet homme, ses prunelles brunes se heurtèrent à ce pourpre sur ses mains ; un sang qui n'était pas le sien, un sang qui ne serait jamais le sien. L'air lui manqua soudainement, qui était-il ? Qu'était-il ? Un monstre ? Un homme ? Un soldat ? Il détourna son regard du liquide écarlate qui tâchait ses vêtements et le posa sur l'immensité du ciel, la fraîcheur des gouttes de pluie lui arracha un frisson et un sanglot s'échappa de ses lèvres. Qu'était-il censé faire ? Prendre la fuite, emmené ses enfants au village caché du Sable ? Ou prendre ce fichu katana à quelques mètres de lui et se trancher la gorge ? Dans un élan lent, il se hissa sur ses deux pieds et s'approcha de l'arme, qui scintillait près d'un arbre ; il se pencha douloureusement et-.

Une main claqua brutalement contre sa joue, l'arrachant à son mauvais rêve ; il tenta de prendre une inspiration, mais se heurta à la pointe de souffrance dans sa cage thoracique. La forêt noyée sous la pluie se superposa étrangement aux murs de la chambre et le visage d'une tignasse blonde se glissa sous ses yeux, là, où normalement, il aurait dû avoir le katana dans les mains ; dans un élan agile, le dos de l'inconnu se heurta brutalement au sol, un peu trop moelleux et il se plaça au-dessus de lui, ses mains se refermant autour de sa gorge frêle.

Personne ne s'en prendrait à ses enfants, il s'en assurerait personnellement. Sûrement, qu'il était prêt à tout pour qu'ils soient en sécurité, pour qu'ils se sentent bien.

- « Shika-..maru »

La voix de son épouse se glissa à ses oreilles, mais ce son, habituellement si doux, si apaisant, ne suffit pas à reconnecter le brun à la réalité ; il resserra sa prise autour de sa gorge, une grimace au bord des lèvres. Il se haïssait pour faire ça, pour prendre la vie de quelqu'un, mais n'était-ce pas son rôle ? Quoi qu'il arrive, il s'assurerait que ses enfants et que son épouse aillent bien ; il serait un homme, pour une fois, un homme fort.

- « Shi-..ka » bégaya-t-elle, à bout de souffle

Elle n'eut aucun mal à reconnaître ce quelque chose dans le fond des prunelles d'un bel ébène du brun, il ne se rendait pas compte de ce qu'il se passait, comment était-elle censée lui en vouloir ? D'un geste maladroit, elle tenta de se défaire de son emprise, mais abandonna bien vite, face à la force de son époux ; l'air lui manquait toujours un peu plus au fil des secondes. Pourtant, elle refusait de perdre la vie, là, dans ce lit, à cause de ça ; à cause de ce que ce massacre avait fait aux hommes de son village, à l'homme dont elle était follement amoureuse, des années après leur hasardeuse rencontre. Elle le connaissait assez, pour savoir à l'avance qu'il se haïrait pour ça, qu'il se laisserait mourir lentement et douloureusement ; parce que bien que les mots lui manquaient et qu'elle en doutait parfois, il l'aimait.

Le bout de ses doigts entra en contact avec la joue rugueuse du stratège et elle claqua doucement sa main sur sa peau, au bord de l'apoplexie ; mais rien n'y faisait, il se sentait encore sur le terrain, dans cette fichue forêt, seul.

- « Shi-.. ka.. » répéta-t-elle, douloureusement, d'un ton suppliant

Le claquement de la porte de la chambre résonna un instant dans la pièce, se répercutant aux murs et la seconde d'après, un vase s'éclata en une centaine de morceaux contre le dos du brun. Sous la surprise, il relâcha sa prise et une tignasse brune en profita pour se faufiler entre les deux adultes, poussant l'homme en arrière ; il s'écrasa sur le sol dans un brouhaha désagréable.

Temari reprit son souffle, doucement, une main sur le côté gauche de sa cage thoracique et jeta un coup d'œil inquiet à la silhouette essoufflée de son fils ; ses mèches brunes traînaient sur ses épaules, dans un ton bordélique et il fixait son père, cette lueur de rage dans les prunelles.

- « comment oses-tu ? » s'exclama l'adolescent, les poings serrés

Le visage enfoncé dans ses mains, un grognement s'extirpa des lèvres du stratège ; il ne comprenait rien. Les sourcils froncés, une pointe d'incompréhension dans ses prunelles, il jeta quelques regards près de lui, cherchant une réponse à sa question ; que se passait-il ? Ses prunelles d'un bel ébène se posèrent une demi-seconde sur le visage anormalement rougi de son épouse, effleurèrent la colère dans les traits de son fils ; puis, tout lui revint en mémoire. Soudainement, il se sentit happé par le dégoût ; sûrement que quelques minutes plus tard, son fils aurait retrouvé le cadavre de sa mère sur le matelas, s'il n'était pas intervenu. Des larmes perlant au coin de ses paupières, il entrouvrit les lèvres, dans le but de dire quelque chose, mais aucun son ne s'en échappa ; ce soir, il avait tenté de prendre la vie de la femme qu'il aimait, ce soir, le monstre avait repris le contrôle.

- « comment oses-tu, putain ? » répéta le jeune garçon, tremblant de rage
- « Shikadai » tenta sa mère, d'une voix douce
- « non, ne me dis pas de me taire » grogna-t-il « si je n'étais pas intervenu, il t'aurait tué »

Dans un geste doux, plein de maladresse, elle déposa une main sur l'épaule de l'adolescent ; bien sûr qu'il ne comprenait pas, bien sûr qu'à ses yeux, à cet instant, son père était sûrement l'homme le plus horrible de l'univers, mais ce n'était pas la réalité. Un soupir s'échappa de ses lèvres, lorsqu'il repoussa sa main brutalement ; il ne détachait pas son regard vert de la silhouette presque recroquevillé de son paternel.

- « ton père a-.. » commença-t-elle, incertaine
- « tenté de te tuer » la coupa-t-il, une pointe de colère dans la voix « je sais, merci »

Qu'était-elle censée dire ? Comprendrait-il si elle lui avouait la vérité ? Si elle lui avouait que son père était piégé dans les méandres de ses souvenirs atroces ? Ses prunelles d'un bel émeraude se posèrent délicatement sur son époux.

Recroquevillé dans un coin de la pièce, une telle souffrance émanait de lui, à cet instant ; il tenta de prendre une inspiration, mais se sentit fondre sous le poids de la culpabilité. Son regard effleura ses mains tremblantes ; sa peau légèrement hâlée, mais couverte du sang d'un tas d'innocents, un sang invisible au premier regard.

- « Shikamaru » l'appela-t-elle, dans un souffle doux
- « maman, arr-.. » commença rageusement son fils
- « Shikamaru, regarde-moi » le coupa-t-elle, d'une voix un peu plus forte

Le son de sa voix arracha un léger sursaut au brun, mais ses prunelles brunes restèrent fixées sur ses mains ; il lui semblait presque qu'il était sur le point de se faire du mal, de se punir pour ce qu'il venait de faire, sans s'en rendre compte. Un soupir s'échappa des lèvres de la blonde et elle prit une inspiration, doucement.

- « Shikamaru, ce n'est pas de ta faute » souffla-t-elle, les sourcils froncés « ce n'était pas toi »

Aucune réaction.

- « je sais ce qu'il s'est passé » avoua-t-elle « tu t'es crû là-bas, n'est-ce pas ? tu t'es revu pendant la guerre ? je le sais, je l'ai vu dans ton regard ; tu ne voulais pas me faire du mal, mais tu n'avais pas le contrôle de toi-même, tu as crû que j'étais un ennemi » un soupir s'échappa de ses lèvres tremblantes « ça va, je vais bien ; regarde-moi, je t'en supplie »

Les mots qui s'échappaient des lèvres de son épouse flottaient dans la pièce, mais ne parvenaient pas à lui ; si son fils n'était pas intervenu, il l'aurait tué, avec ses mains. Les mains qui avaient tenu les siennes, pendant la cérémonie de leur mariage, les mains qui avaient porté maladroitement leur petit garçon à sa naissance, les mains qui avaient caressés tant de fois son corps, sa peau ; il l'aurait tué, avec ses mains-là.

- « je t'aime » lâcha-t-elle, au bout de quelques secondes « je t'aime tellement que j'en aie mal, regarde-moi, je t'en supplie »

Son regard se perdit un court instant dans les prunelles du brun, et ce qu'elle vit lui coupa le souffle ; toutes ces émotions, toute cette culpabilité, toute cette tristesse. Elle tenta un pas vers lui, mais un éclat effrayé se glissa dans ses traits, il était là et il mourrait douloureusement de peur de lui faire du mal ; dans un bond agile, il se hissa sur ses deux pieds et disparut au détour d'un couloir.
Le claquement de la porte d'entrée se mêla aux sanglots de la blonde.

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