Chapitre 1 ( 1/2)

Les Héritiers Sommers

Confiteors Town,  Californie USA, 2015

Chapitre 1

Il y a une chose qui a toujours hanté les pensées de Sebastian, une obsession qui, tel un poison, a infiltré chaque fibre de son être. Ce n'était pas une simple curiosité, ni même un désir anodin. C'était un besoin viscéral, une soif inextinguible de vérité qui brûlait dans son âme. Sebastian voulait rencontrer son père. Non, c'était plus que cela. Il avait besoin de rencontrer cet homme qui, bien que n'ayant jamais été présent dans sa vie, exerçait sur lui une influence plus grande que celle de quiconque. Et pourtant, il savait, au plus profond de lui, que tout le mépris, toute la haine que sa mère nourrissait à son égard, prenait racine en lui. Mais cette haine, loin de le détourner de son désir, n'a fait que l'alimenter. Plus sa mère crachait son venin sur lui, plus son besoin de le voir en personne grandissait. Pourquoi ? Parce que Sebastian avait une montagne de questions à lui poser, et seul lui pouvait donner les réponses qu'il cherchait.

Jamais Sebastian n'a connu cet homme censé être son père. Même son nom était un tabou, un mot maudit qui ne franchissait jamais les lèvres de sa mère. Chaque fois qu'il tentait de lui soutirer la moindre information, son regard devenait glacial, ses lèvres se scellaient, et une ombre passait sur son visage. C'était comme si le simple fait de prononcer son nom éveillait en elle des souvenirs trop douloureux, trop amers. La seule chose que Sebastian pensait savoir, c'était que ses parents s'étaient rencontrés en Italie, là où il avait passé les premières années de sa vie avant que sa mère ne l'abandonne, le laissant seul dans ce pays étranger. De ses mots empoisonnés, Sebastian devinait aussi qu'il ressemblait beaucoup à cet homme, tant par le caractère que par l'apparence physique. Mais ces ressemblances, loin de le réconforter, n'étaient qu'une source de douleur supplémentaire. À chaque fois que sa mère le lui rappelait, c'était avec une telle amertume, une telle rage contenue, que Sebastian en venait presque à détester ce reflet dans le miroir qui trahissait ses liens avec lui.

Il ne lui restait de son père qu'un seul objet, une relique sombre et chargée de souvenirs douloureux : une médaille noircie par les ans et par la haine de sa mère. Cette médaille, Sebastian l'avait récupérée dans des circonstances qu'il préférait oublier, mais malgré tout, il ne pouvait s'empêcher de ressentir une pincée de tristesse en y repensant. Cette tristesse, mêlée à une étrange satisfaction, car même si sa mère l'avait souillée de son mépris, elle la lui avait donnée. Peut-être était-ce son ultime concession, un lien ténu mais indéfectible avec cet homme qu'il n'avait jamais connu. La médaille était un triskel, symbole ancien et mystique, en son centre se dessinait un "S", à peine visible sous l'usure du temps. Ce simple "S" était la seule trace tangible de l'homme que Sebastian appelait son père. Parfois, il se demandait si toutes les souffrances qu'il avait endurées au côté de sa mère n'étaient pas de sa faute. Était-ce parce qu'il était ingrat ? Avait-il, au fond de lui, nourri l'espoir insensé que son père viendrait un jour le sauver de cet enfer ? Sa mère ne cessait de lui répéter que si elle était coincée dans ce trou à rat, c'était à cause de lui, et donc à cause de Sebastian. Mais il n'a jamais pu se résoudre à abandonner l'idée de le rencontrer un jour. Même si ce jour devait être celui où il le confronterait, où il le jugerait pour tout ce qu'il lui avait infligé, pour tout ce qu'il avait fait de sa mère.

Ce qui troublait le plus Sebastian, c'était cette étrange fascination qu'il ressentait depuis son enfance. C'était comme si, malgré toutes les preuves du contraire, malgré le fait que son père savait qu'il existait et qu'il ne voulait rien avoir à faire avec lui, Sebastian ne pouvait s'empêcher de le chercher. C'était une obsession, une voix intérieure qui lui murmurait que son père n'était pas celui que sa mère dépeignait. Que, peut-être, derrière le monstre qu'elle voyait en lui se cachait un homme que seul Sebastian pouvait découvrir. Cette obsession l'a consumé, au point où il savait qu'il ne pourrait pas avancer dans sa vie sans répondre à cet appel irrésistible. Il ne suffisait pas de savoir qui il était par les mots de sa mère. Non, Sebastian devait le voir, l'entendre, lui parler, pour enfin comprendre qui il était réellement.

Mais pour cela, il devait d'abord terminer ses études secondaires. Chaque jour passé dans cette prison dorée qu'était l'école n'était qu'un compte à rebours jusqu'au jour où il pourrait enfin partir à sa recherche. Cette quête n'était pas motivée uniquement par la haine qu'il portait à cet homme, mais par le besoin impérieux de comprendre, de démêler ce nœud de colère, de ressentiment et d'espoir qui l'étouffait. Alors oui, Sebastian haïssait cet homme qui l'avait abandonné, qui avait transformé sa mère en ce qu'elle était devenue. Mais au-delà de cette haine, il y avait une quête de vérité, une quête d'identité qui le dévorait chaque jour un peu plus. Et un jour, il le retrouverait. Que ce soit pour lui pardonner ou pour lui faire face, Sebastian n'en savait rien. Mais ce jour viendrait, et il saurait enfin qui est cet homme qu'il appelle son père.

Cela faisait plus de sept heures que Clara conduisait la voiture sur cette route tortueuse en direction de Confiteors. Le temps s'était figé dans une éternité oppressante, chaque minute s'étirant comme un fil tendu prêt à rompre. La route déserte semblait être un gouffre sans fin, et la nuit, telle une ombre silencieuse, les avait enveloppés. Sebastian s'était assoupi, bercé par le mouvement monotone du véhicule et la fatigue accablante du voyage, mais lorsqu'il se réveilla, une lueur pâle perçait à l'horizon. Le jour naissait à peine, mais au lieu d'une promesse de renouveau, l'aube apportait avec elle un malaise sourd, une menace invisible qui planait au-dessus d'eux.

Sebastian se redressa, les muscles engourdis, et saisit ses écouteurs qui pendaient négligemment autour de son cou. La musique jouait encore depuis la veille, une mélodie mélancolique qui, ironiquement, résonnait parfaitement avec l'atmosphère pesante de ce voyage. Il ajusta son casque, laissant les dernières notes de "Stay" de Rihanna inonder ses pensées, chaque mot s'incrustant dans son esprit comme une lame. Son regard se perdit par la fenêtre. Le paysage défilait sous ses yeux comme un cauchemar éveillé : la brume s'élevait des profondeurs de la terre, recouvrant la ville de Confiteors d'un voile fantomatique. Des nuages épais, noirs comme la suie, s'amassaient dans le ciel, étouffant les faibles rayons du soleil et plongeant les bâtiments anciens dans une pénombre inquiétante. Les ruelles sinueuses, à moitié cachées par l'ombre, semblaient murmurer des secrets oubliés, des histoires de vies brisées et de désespoir éternel. Tout en lui criait de faire demi-tour, de fuir cet endroit avant qu'il ne soit trop tard, mais il savait que le destin ne le laisserait pas échapper si facilement à ses griffes.

Sebastian tentait de s'immerger dans la musique, de se perdre dans les rythmes familiers pour échapper à cette angoisse qui montait en lui. Mais rien n'y faisait. La peur, ce serpent venimeux, s'insinuait dans ses pensées, s'enroulait autour de son cœur, serrant de plus en plus fort. Pourquoi étaient-ils ici ? Il y avait tant d'hôpitaux qui auraient pu accepter sa mère, même en Italie, cet endroit où Sebastian pensait passer toute sa vie. Il ne comprenait pas pourquoi elle avait choisi cette ville dont il ignorait complètement l'existence.

À ses côtés, Clara Montana, sa mère adoptive, observait le paysage défiler avec une sérénité apparente, ses longs cheveux roux encadrant son visage avec une élégance naturelle. Malgré ses nombreuses années, elle dégageait une jeunesse et une vitalité qui faisaient penser à une jeune femme de vingt-huit ans, bien qu'elle en ait en réalité bien plus. Son regard perçant, ses traits délicats, et son attitude posée trahissaient une expérience et une sagesse bien au-delà de son apparence. Clara était une femme énigmatique, une présence réconfortante pour Sebastian, bien qu'il ait parfois du mal à percer les mystères qu'elle semblait dissimuler derrière ses sourires discrets.

Sebastian jeta un coup d'œil à Clara, cherchant peut-être une réponse silencieuse dans son expression paisible, mais tout ce qu'il y vit était une force tranquille, une sorte de calme inébranlable qui contrastait vivement avec le tourment qui l'habitait.

La route vers Confiteors semblait interminable, une épreuve silencieuse, marquant le début d'un chapitre inconnu et effrayant de sa vie. Sebastian ne pouvait s'empêcher de se sentir prisonnier, emporté malgré lui dans une direction qu'il n'avait jamais choisie. Les lumières de la ville à l'horizon approchaient lentement, et avec elles, un sentiment de résignation commençait à se mêler à son angoisse.

Il se tourna vers Clara, hésitant un moment avant de parler.

— « Dìa... Je suis désolé. » Sa voix était basse, presque un murmure, comme s'il avait peur que ses paroles disparaissent dans le vacarme de ses pensées.

Clara le regarda, un léger froncement de sourcils marquant son visage.

— « Désolé ? Pourquoi, champion ? »

Il haussa les épaules, évitant son regard.

— « Pour mon comportement... Pourri, gâté, tout ça. Je sais que j'ai été un vrai cauchemar depuis qu'on a décidé de venir ici. C'est juste que... » Il s'interrompit, cherchant les mots pour exprimer ce qu'il ressentait. « C'est tellement soudain. Quitter Portland, notre vie là-bas, et venir ici... dans cette ville dont je ne savais même pas qu'elle existait avant. »

Clara hocha la tête, son regard se radoucissant.

— « C'est compréhensible, tu sais. Qui ne serait pas déstabilisé par un changement aussi brutal ? Quitter tout ce que tu connais, tes amis, tes repères... Ce n'est jamais facile, surtout à ton âge. »

Elle posa une main réconfortante sur son épaule.

— « Mais Confiteors est une ville sûre, Sebastian. Je sais que tout ça est nouveau pour toi, mais il n'y a rien à craindre ici. Quand j'étais petite, mes parents et moi sommes déjà venus dans cette ville. Je me souviens que tout semblait paisible. Et une fois que tu seras ici, que tu auras trouvé tes marques, je suis sûre que tu t'y sentiras bien. »

Sebastian la regarda, un peu surpris par ses paroles.

— « Vous avez déjà été ici, vraiment? »

Clara sourit légèrement.

— « Oui, c'était il y a longtemps, mais je m'en souviens bien. Mes parents avaient des amis ici, alors on venait les voir parfois. C'est une petite ville, mais elle a son charme, tu verras. »

Il hocha la tête, se sentant un peu apaisé par ses mots. Mais malgré tout, l'inquiétude continuait de ronger son esprit. Il regarda de nouveau par la fenêtre, la silhouette sombre de Confiteors se découpant maintenant clairement dans la lumière naissante.

Peut-être avait-elle raison. Peut-être que tout irait bien ici. Mais une part de lui ne pouvait s'empêcher de se demander si cette ville, malgré son apparente tranquillité, ne cachait pas quelque chose de plus sombre. Une part de lui restait sur ses gardes, comme si son instinct lui soufflait que le danger était plus proche qu'il ne le pensait.

Alors qu'ils s'approchaient du centre-ville, les rues devenaient de plus en plus familières. Un panneau indiquait qu'ils étaient désormais à Confiteors Town. Sebastian soupira, baissant encore un peu son bonnet pour dissimuler ses doigts peints de noir, un contraste saisissant avec ses cheveux. Il fixa le panneau, lisant les mots inscrits en latin : « Confiteors Town : Lux in Tenebris Revelata ». Cette devise éveilla en lui une réflexion sombre. Le paysage gothique et mystérieux de la ville, avec ses bâtiments anciens et ses ruelles sinueuses, semblait l'envelopper dans une étreinte glaciale et menaçante. La ville semblait déjà pressentir les secrets qui allaient bouleverser sa vie. À ses côtés, Clara murmura doucement, comme pour elle-même :

— « Bienvenue, Sebastian, à Confiteors. »

Les mots résonnèrent dans l'esprit de Sebastian comme un écho lointain, en tout cas pour lui s'était Clara qui lui à souhaité la bienvenue ou peut-être pas!

Tandis qu'il observait la ville s'éveiller lentement à la lumière du matin. Un sentiment étrange l'envahit, mélange d'appréhension et de curiosité. Ce n'était que le début, et il avait la sensation que cette nouvelle vie serait tout sauf ordinaire.

Non loin de la route vers Le quartier chic de Confiteors était encore endormi, les rues désertes, illuminées seulement par les faibles lueurs des réverbères. La maison des Sommers, l'une des résidences les plus imposantes de la ville, se dressait majestueusement, ses murs anciens abritant des secrets et des histoires qui se transmettaient de génération en génération. C'était l'une des demeures fondatrices de la ville, un monument à la fois à l'histoire et au pouvoir de la famille Sommers.

Damian Sommers, l'héritier de cette illustre famille, se trouvait dans une situation pour le moins délicate. Échevelé, les vêtements froissés, il s'efforçait de grimper la façade en pierre de la maison, tentant désespérément de rejoindre sa fenêtre du premier étage. À ses côtés, Kyle Landon, son fidèle ami, le soutenait littéralement et figurativement—tout en jetant des coups d'œil nerveux vers la rue.

Kyle était l'ami que l'on pouvait toujours compter, celui qui ne reculait jamais devant l'absurdité d'une situation. De taille moyenne, les cheveux bruns ébouriffés, il avait un air constamment espiègle, comme s'il était toujours prêt pour une nouvelle aventure. Ses yeux bruns clair étaient vifs et intelligents, hérités de son père, un officier de police respecté de Confiteors. Il avait une sœur, Sheila, qui faisait également partie du cercle rapproché de Damian, un trio inséparable depuis leur arrivé de l'Angleterre.

Ils revenaient tous deux d'une fête, et l'alcool, bien que modérément consommé, ajoutait une dose supplémentaire de chaos à leur plan déjà bancal.

— « Tu es sûr que c'est une bonne idée, Damian ? » chuchota Kyle en jetant un énième coup d'œil inquiet autour de lui.

— « Écoute, je ne vais pas te mentir, c'est sûrement la pire idée que j'ai jamais eue, » répliqua Damian en peinant à trouver une prise sur la façade lisse. « Mais si ma mère me trouve en train de rentrer à cette heure-là, c'en est fini de moi. »

Kyle soupira. Damian avait toujours eu ce flair pour se retrouver dans des situations inextricables.

— « On aurait dû rester dehors, » murmura Kyle. « On aurait attendu que le jour se lève complètement, et là, personne n'aurait rien remarqué. Pourquoi faut-il toujours que tu complique tout ? »

— « Parce que je suis Damian Sommers, et que les choses simples ne sont pas mon genre, » répondit Damian avec un sourire en coin, tentant de minimiser la gravité de la situation.

— « Ça, c'est sûr, » grogna Kyle en tentant de le soutenir du mieux qu'il pouvait.

À l'intérieur de la maison, une ombre passa près de l'une des fenêtres du rez-de-chaussée, et Kyle retint son souffle.

— « Hé, on se dépêche, ou on va vraiment se faire prendre ! » insista Kyle en jetant un regard anxieux vers la maison. « Je ne tiens pas à expliquer à ta mère ce qu'on faisait dehors à cette heure-ci. »

— « C'est bon, j'y suis presque, » répondit Damian, grimaçant alors qu'il essayait de se hisser jusqu'au rebord de la fenêtre. « Je jure que ces pierres étaient plus faciles à grimper quand j'étais plus jeune. »

— « Ou peut-être que tu as juste vieilli, tu va avoir quoi dix-huit ans comme le temps passe vite » répliqua Kyle avec un sourire sarcastique.

Damian grogna en réponse, se concentrant sur l'effort de ne pas glisser. Damian se hissa avec difficulté, ses muscles protestant contre l'effort soudain. Kyle, en bas, continuait de le soutenir tout en lançant quelques commentaires sarcastiques.

— « T'es sûr de ne pas vouloir utiliser une échelle la prochaine fois ? Ça me semble être une meilleure option. »

— « Tu sais très bien que si je m'aventure à chercher une échelle, je risque de croiser Bob, et là, je suis vraiment foutu. »

Kyle ricana.

— « Bob est probablement en train de dormir, comme toutes les personnes normales à cette heure. »

Damian marmonna quelque chose d'inaudible en réponse, concentré sur son ascension. Il était à mi-chemin de la fenêtre lorsque, soudain, sa main glissa sur le rebord humide, et il perdit l'équilibre.

— « Kyle ! » cria-t-il, paniqué.

Kyle, avec des réflexes rapides, le retint de justesse.

— « Wow, wow, wow ! Fais gaffe, Damian ! T'as failli te casser la gueule ! »

Damian, le cœur battant à tout rompre, essaya de calmer sa respiration.

— « Je sais, je sais ! Ne me lâche pas ! » dit-il en reprenant le chemin de la fenêtre.

Kyle leva les yeux au ciel, exaspéré. « Je ne te lâcherai pas, promis. Mais sérieusement, est-ce qu'on doit vraiment continuer ça ? »

— « Je suis presque là, » insista Damian en se hissant de nouveau, cette fois plus prudemment. « Juste un petit effort... »

Il parvint finalement à agripper la fenêtre et, avec un dernier sursaut d'effort, réussit à s'y hisser. Alors qu'il était à deux doigts de basculer à l'intérieur, un bruit sourd retentit derrière lui.

— « Hmmm, hmmm, » fit une voix grave.

Il tourna lentement la tête, ses yeux s'écarquillant d'horreur en découvrant Bob, le chauffeur de la famille Sommers, debout sur le gravier, les bras croisés, observant la scène avec un mélange de patience et d'amusement.

Bob était un homme imposant, toujours impeccable dans son uniforme noir, son visage durci par des années de service fidèle à la famille. Ses yeux perçants ne manquaient jamais rien, et ce matin-là ne faisait pas exception. Il gratta sa gorge pour signaler sa présence, et Damian faillit perdre l'équilibre. Kyle, en bas, écarquilla les yeux en voyant la figure massive de Bob apparaître dans leur champ de vision.

— « Euh... bon matin, Bob, » bafouilla Damian, essayant de feindre l'innocence tout en se redressant maladroitement sur le rebord de la fenêtre. « Quelle belle journée, n'est-ce pas ? »

— « Monsieur Sommers, » répondit Bob d'une voix grave, presque solennelle. « Je suppose que c'est une nouvelle méthode d'exercice matinal. »

Kyle, toujours sur le sol, éclata de rire nerveusement, puis se reprit en voyant le regard sévère de Bob.

— « On... on voulait juste prendre un peu d'air frais, » ajouta Kyle en essayant de soutenir la version de Damian, mais son ton manquait cruellement de conviction.

Bob haussa un sourcil, son expression impassible ne trahissant aucune émotion.

— « Bien sûr, » dit-il en inclinant légèrement la tête. « Et ce serait l'air frais qui vous aurait attiré à cette heure-ci, juste après une soirée, si je ne me trompe pas. »

Damian sentit le rouge lui monter aux joues, conscient que toute tentative d'expliquer la situation serait futile. Bob savait exactement ce qui se passait, et il était certain que la nouvelle de leur escapade nocturne ne tarderait pas à atteindre les oreilles de sa mère.

— « Allez, descends de là, Damian, » continua Bob, adoucissant à peine son ton. « Je vais faire comme si je n'avais rien vu cette fois-ci, mais tu devrais vraiment rentrer par la porte d'entrée. Monsieur Landon, » ajouta-t-il en se tournant vers Kyle, « je vous conseille de rentrer chez vous avant que quelqu'un d'autre ne vous voie. »

Kyle hocha la tête avec empressement. Il n'avait pas besoin qu'on lui dise deux fois.

— « Oui, monsieur. Merci, Bob, » dit-il rapidement.

Damian descendit prudemment, tentant de ne pas paraître trop penaud devant Bob. Lorsqu'il posa enfin le pied sur le sol, Bob fit un signe de tête vers la maison.

— « Je vous ouvre la porte, » déclara Bob avant de se tourner et de marcher d'un pas mesuré vers l'entrée principale.

Damian se tourna vers Kyle, un mélange de soulagement et de frustration dans le regard.

— « Bon, ben... c'était quoi déjà ton plan, hein ? » chuchota Kyle en souriant, bien conscient que la situation aurait pu tourner bien plus mal.

— « Pas un mot, Kyle, » répondit Damian en secouant la tête. « Pas. Un. Mot. »

Les deux amis se rapprochèrent de l'entrée de la maison, mais Kyle s'arrêta sur le pas de la porte, jetant un coup d'œil rapide autour de lui. Damian, qui allait entrer, s'arrêta à son tour et se tourna vers son ami.

— « Tu viens pas ? » demanda Damian avec un sourire complice.

— « Non, je vais rentrer chez moi. Mon père est sûrement déjà parti chercher Sheila à l'aéroport, et on se voit au premier jour des cours, en autre demain » répondit Kyle en hochant la tête, un sourire en coin.

Damian haussa les épaules, amusé. « D'accord, t'as raison. De toute façon, on va passer assez de temps ensemble bientôt ! »

— « Exactement ! Et puis, t'inquiète pas, on a réussi à ne pas se faire choper cette fois, » ajouta Kyle avec un clin d'œil. « Bon, à plus tard, vieux. »

— « Ouais, à plus. Fais gaffe en rentrant, » répliqua Damian en levant la main pour lui dire au revoir.

Alors que Kyle s'éloignait dans la brume matinale, Damian remarqua une voiture passer lentement dans la rue. C'était un véhicule qu'il ne reconnaissait pas, mais il ne s'y attarda pas davantage. Rien de particulièrement suspect, juste une voiture inconnue qui roulait tranquillement.

— « Allé passe un bonne journée, Sheila vas être trop jalouse en apprenant cette aventure ! » lança Kyle en souriant tout en levant la main avant de disparaître au coin de la rue.

— « À plus, » répondit Damian avec un sourire au coin, le regardant partir jusqu'à ce qu'il disparaisse complètement de sa vue.

Damian franchit ensuite le seuil de la maison, suivi par Bob, qui referma la porte avec un petit claquement sec. Le grand hall était plongé dans le silence, seulement interrompu par le crissement des semelles de Damian sur le plancher de bois poli.

— « Monsieur Sommers, je vous conseille de monter dans votre chambre immédiatement. Votre mère est encore endormie, mais elle risque de se réveiller bientôt, » dit Bob d'un ton ferme mais bienveillant.

Damian hocha la tête, son estomac se nouant à l'idée que sa mère puisse découvrir son escapade.

— « Merci, Bob. Je te revaudrai ça. »

— « Je ne vous demanderai rien en retour, monsieur, » répondit Bob avec son expression sérieuse habituelle. « Mais prenez cela comme un avertissement amical. La prochaine fois, je ne serai peut-être pas là pour couvrir vos arrières. »

Damian gravit les marches en silence, ses pas résonnant faiblement dans la maison endormie. Lorsqu'il atteignit l'étage, il poussa la porte de sa chambre et s'arrêta un instant sur le seuil, contemplant la pièce sombre et familière. Contrairement à l'effervescence et aux éclats de rire qu'il montrait au monde, ici, dans cette chambre, Damian était une autre personne. Les murs renfermaient ses pensées les plus secrètes, ses doutes, et ce sentiment d'être seul, même entouré des siens.

Il ferma doucement la porte derrière lui, se coupant du reste de la maison, et s'approcha de la fenêtre. La nuit s'effaçait lentement, laissant place à une aube timide, mais la lumière dorée qui baignait la ville n'arrivait pas à chasser l'ombre qui planait sur ses pensées. Ici, dans cette chambre, Damian se sentait incompris, même par ceux qui prétendaient le connaître. Kyle, bien qu'un ami fidèle, ne saisissait pas cette part de lui qui se sentait constamment en décalage avec le monde.

Il referma lentement la fenêtre, comme pour se protéger de l'extérieur, de cette réalité qui lui semblait parfois si lointaine. Il se demanda si cette tranquillité apparente, cette normalité qu'il s'efforçait de maintenir, n'était pas sur le point de voler en éclats. Quelque chose d'indéfinissable pesait sur son cœur, comme une prémonition d'événements à venir, qui mettraient à l'épreuve non seulement son courage, mais aussi cette façade qu'il présentait au monde.

Damian se glissa sous les couvertures, tentant de se réchauffer, mais le froid intérieur persistait. Il ferma les yeux, espérant que le sommeil viendrait rapidement, et que le jour qui se levait serait plus clément. Pourtant, au fond de lui, il savait que l'aube n'apporterait pas la paix qu'il recherchait. Dans cette solitude qu'il s'infligeait, Damian se sentait plus que jamais en proie à ses propres démons, attendant que la tempête éclate.

Depuis l'ombre d'un arbre massif, une silhouette discrète observait Damian avec un sourire amusé. À chaque tentative maladroite de grimper jusqu'à sa fenêtre, la personne cachée derrière les branches ne pouvait s'empêcher de sourire un peu plus. Damian, avec son obstination presque comique, essayait désespérément de ne pas se faire prendre, ignorant qu'il était déjà sous une autre forme de surveillance, bien plus subtile et malveillante, peut-être.

Elle suivait ses gestes avec une attention particulière, notant chaque détail : la frustration qui se peignait sur son visage, les chuchotements précipités échangés avec Kyle, et la manière dont il lançait des regards inquiets autour de lui. C'était presque comme regarder un enfant s'amuser à un jeu qu'il ne pouvait pas gagner. Pourtant, il continuait, persistant à croire qu'il pouvait échapper aux conséquences de ses actes.

Lorsque Damian, enfin vaincu par la situation, dut renoncer à sa tentative de rentrer par la fenêtre, la silhouette se recula légèrement, se fondant davantage dans l'obscurité. Ses yeux glissèrent alors vers la rue, où une voiture sombre roulait lentement, presque imperceptiblement. Ses phares découpaient la brume du petit matin, projetant des ombres allongées sur les façades des maisons endormies.

Elle se déplaça silencieusement, changeant de position pour obtenir une meilleure vue. À travers la vitre teintée, elle aperçut le visage de Sebastian, observant la ville qui se déployait devant lui. Il semblait pensif, peut-être même un peu inquiet, comme s'il sentait déjà que quelque chose n'allait pas dans cette ville où il venait d'arriver.

Un sourire satisfait s'étira sur les lèvres de l'observatrice. Elle attendait ce moment depuis longtemps, et maintenant qu'il était là, un sentiment d'excitation mêlé d'appréhension l'envahit. Cette nuit marquait le début de quelque chose d'important, et elle était prête à jouer son rôle, cachée dans l'ombre.

Alors que la voiture de Sebastian continuait sa route, s'éloignant dans la brume, elle murmura doucement, ses mots se perdant dans le silence du matin :

— « Bienvenue, Sebastian, à Confiteors. »






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Salut à tous les Confiteors addicts ! Je suis ravi de vous partager le premier chapitre des Héritiers Sommers. J'espère que ça vous a plu ! Je sais que c'est un peu long, mais les débuts de chapitre sont souvent un peu plus détaillés. Ne vous inquiétez pas, tous ne seront pas aussi longs. Si vous avez aimé, n'hésitez pas à me le dire en commentaire et à voter.

On se retrouve très vite pour la suite !

XOXO 💋 Confiteors addicts

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