Giacomo
Les gangsters ont des surnoms célèbres. Scarface, Al Capone, le Cigare, l'Anguille, la Pieuvre, le Lion, l'Ombre, le Brouillard...
Et moi, je suis le gentil. Giacomo Gaviera, le gentil, celui qui a le cœur sur la main, toujours prêt à la tendre aux autres, cette maudite main, et avec le sourire.
Il y a une vieille légende dans ma famille. Quand un Gaviera prend la vie, il devient petit à petit fou, jusqu'à ce que cette folie le consume tout entier.
Je n'ai jamais pris une vie. C'est peut-être la raison pour laquelle je suis considéré comme le plus faible de la famille. Mais il y a longtemps, j'ai découvert que, pour que la pathologie se déclenche, il faut tuer de la pire des façons : regarder la personne dans les yeux et l'éviscérer comme un vulgaire poisson.
Je suis la future Pieuvre, mon nom, comme celui de mon père, devrait provoquer la peur.
Quand papa entre dans une pièce, même l'air devient irrespirable. De grands gaillards courbent l'échine, leur respiration devient sifflante, ils transpirent, et quand l'un d'eux a le malheur d'attirer son attention, il devient blême et se pisse dessus.
Quand les gens me voient, ils ne tremblent pas de peur. Ils me trouvent sympa, je suis celui qu'ils viennent voir quand ils ont besoin d'être compris, aidés.
Ils disent que je suis le meilleur, mais quand j'ai le dos tourné, ils se moquent de moi. Je les entends dire que je suis faible, que je suis un lâche qui n'a jamais tué, qui se cache derrière les autres pour faire mes basses besognes.
Que je ne suis pas un Gaviera, que je ne suis pas comme lui, comme eux.
Lui... Mon petit frère.
Imprévisible, antipathique, fourbe, puissant.
Lui...
Différent mais tellement similaire à père. Un monstre qui porte en lui la malédiction qui vient avec le sang, plus qu'avec le nom.
Si Don Gieuse meurt, j'espère que c'est Riccardo qui deviendra la Pieuvre. Disent ses adeptes, ceux qui pourraient mourir pour lui.
Il est craint...
Il est craint seulement parce qu'il est fou. Ces gens pensent qu'il suffit d'être un tueur pour gérer une organisation comme la Cosa Nostra ?
Et la diplomatie ?
Je suis un homme intelligent, le cerveau qui va redorer le blason, mais ça, personne ne le voit.
Ils ne voient que ma gentillesse, qu'ils qualifient de faiblesse. Ils disent que je serai la ruine de la maison Gaviera.
Je tire sur ma cravate. En face de moi, il y a mon frère en compagnie de sa femme. Elle est sur la pointe des pieds, les mains autour de son cou, lui racontant Dieu sait quoi. Et il l'écoute avec attention, il semble aimer ça, si j'en crois son petit sourire en coin.
Pourquoi ? Je n'ai jamais rien fait de répréhensible, excepté défigurer ma mère. Même ça, je ne l'ai pas fait pour être méchant. Je voulais juste déclencher la malédiction.
Mais les choses ont tourné au désastre. J'ai perdu mon courage.
Elle n'est pas morte, donc je n'ai rien fait de mal, pourtant le type devant moi, qui semble si heureux, a ruiné tellement de vies.
Et tout va bien ?
Les fins heureuses sont pour les gentils, ceux qui ont dédié leur vie à faire le bien, ou du moins à éviter de faire trop de mal. Pas pour les sociopathes à tendance schizophrénique.
L'image du couple parfait. Mais ce n'est qu'une image. Qui sait combien de douleur se cache derrière la photo d'une famille dont tous les membres sourient ? Combien de mensonges et de souffrances se cachent derrière un sourire ?
Mes erreurs à moi ne sont plus qu'une misérable tache sombre sur le rétroviseur de ma vie. Mais ses erreurs à lui n'ont même pas le temps de devenir une tache, il les accumule constamment ; il y a tellement de cadavres sous le tapis de Riccardo Gaviera qu'on se prend les pieds dedans. Pourtant, il est heureux.
Riccardo est considéré comme un vrai Gaviera. Je sais ce que je dois faire pour moi aussi être considéré comme tel, mais je suis constamment déchiré entre mon désir de prouver ma valeur et mon refus de devenir un monstre qui va peu à peu sombrer dans la folie.
Gayle empoigne ses cheveux au niveau de la nuque, le regardant comme s'il était la réincarnation de l'une des merveilles du monde.
Qu'est-ce qu'elle lui trouve ? Elle doit sûrement faire semblant. Après tout, une femme a fait semblant devant le monde entier. Elle m'a fait passer pour un homme bon. Et elle a fait tout ça parce qu'elle avait peur...
Oui, elle sait, elle, que je ne suis pas le gentil Giacomo.
Gayle joue au même jeu que l'autre. Après tout, elles sont amies. Qui se ressemble s'assemble, non ?
Des sourires, des mots doux, des caresses en public, mais dès que les portes sont fermées, son visage également se ferme, son corps tremble. Elle a peur !
Mais personne n'est là. Je suis bien à l'abri dans un coin du mur qui forme un L. Gayle n'a aucune raison d'être aussi à l'aise, pourtant elle l'est.
Qu'est-ce qu'il lui raconte d'aussi drôle ? Comment fait-il pour qu'elle ne soit pas effrayée ? Surtout, comment peut-il accepter qu'elle ne soit pas effrayée par lui ? C'est insensé.
Dès que j'ai appris que ces deux-là se sont mariés, j'ai jeté les dés pariant qu'ils ne tiendraient pas un mois. Pourtant, ils sont toujours là. J'ai aussi parié qu'ils se feraient tuer au cours d'une mission parce que mon frère va baisser sa garde à cause d'elle. Mais ils sont toujours là, s'accrochant à leur vie idyllique comme une sangsue s'accroche à une personne qui lui fournit du sang.
Une main se pose sur mon épaule, me poussant à me détourner du couple. J'étais sur le point d'aller parler à Riccardo, lui proposer de faire table rase du passé pour que tout devienne comme avant.
Mais avant, il n'avait pas tué ma mère. Et je ne peux pardonner ça. Qu'est-ce que je pourrais faire ? Je ne sais pas quoi faire de toute cette haine qui me ronge.
Je l'utilisais pour extérioriser ma frustration, maintenant elle appartient à un autre.
Merci papa...
Je me tourne vers Adela. Elle est tellement petite, même avec ses talons aiguilles, elle m'arrive à peine au buste. Elle a un visage enfantin, de gros yeux innocents. Elle n'est pas belle, mais elle est mignonne. Le genre de personne qui déclenche en nous un élan de tendresse, qui nous donne envie de nous surpasser.
J'ai envie de la briser parce qu'elle est la cause de mes problèmes. Malheureusement, la tuer ne me servirait à rien ; s'il elle n'est plus là, ils vont me coller sa sœur sur le dos.
La future Pieuvre, l'homme le plus puissant... Mon œil. Je ne suis qu'un pantin désarticulé à leurs yeux.
- B-bonjour. Je voulais m'entretenir avec toi avant la cérémonie.
Derrière elle, à bonne distance, son garde du corps : une femme plus grande qu'un yéti, portant un costume dont les coutures risquent de craquer à cause de son corps malmené par des entraînements répétitifs.
- Bien sûr.
Je lance un dernier regard à Riccardo et Gayle ; je donnerais tout pour entendre ce qu'ils se disent, ce qui les fait autant rire.
- Ils ont l'air heureux, marmonne Adela, qui a remarqué mon attention.
Je l'aurais été aussi si ta famille n'existait pas.
Je m'éloigne, la forçant à me suivre. Nous sommes dans l'hôtel particulier où se déroulera le mariage dans une heure ; on a loué tout le dernier étage pour la cérémonie, les chambres sont occupées par nos invités de marque.
Si ça ne tenait qu'à moi, ça n'aurait pas été aussi extravagant. Mais rien n'est assez bien pour la petite princesse de la Camorra, pas vrai ?
Je pousse au hasard une porte et je disparais à l'intérieur.
- J'en ai pour quelques minutes, Black, dit Adela à l'intention de sa garde du corps.
- Une femme très originale, je marmonne.
- Black n'est pas n'importe qui. Elle a servi pendant plus de 10 ans dans les US Marshals, jusqu'à ce qu'ils la trahissent en lui mettant un crime sur le dos. Depuis, elle est de l'autre côté.
C'est bien la première fois qu'elle parle autant en ma présence. J'aimerais qu'elle la ferme.
- Tu voulais me parler.
Adela porte un peignoir en satin rouge qui lui arrive aux chevilles. Ses cheveux blonds sont retenus en un chignon négligé.
Elle est quelconque, insipide, sans aucune saveur. Quand je la regarde, je m'ennuie.
- Oui. Je voulais, enfin comment dire... Je sais que notre mariage n'est pas idéal. Mais je voulais juste te dire que je ferai de mon mieux pour que les choses se passent bien.
- C'est gentil. Si c'est tout, je dois te laisser, il faut que je me prépare pour la cérémonie.
Me rendre heureux ? Comment va-t-elle faire ? À moins que la Camorra m'ait attribué une femme aux pouvoirs magiques. C'est impossible.
***
Je me regarde dans le miroir. Grand, de forme trapue, avec une musculature développée. Des cheveux sombres parfaitement coiffés, pas une mèche ne dépasse, des yeux bleus vides, pas une émotion ne transparaît.
Je suis l'image de ce que doit être un chef de la mafia.
Le charisme, la domination, le pouvoir.
Je serre ma cravate quand la porte s'ouvre sur Riccardo. Envolée, son attitude lorsqu'il était en présence de sa femme. Froid, distant, l'œil calculateur. La posture d'un misérable tueur, un prédateur...
Et tout le monde dit que ce type a plus de mérite que moi, une bombe à retardement, un hystérique paranoïaque qui fonctionne grâce à des médicaments, a plus de mérite que moi...
- Tu es venu célébrer mon malheur.
- Si ça ne tenait qu'à moi, je serais au fin fond de la forêt avec ma petite serveuse, mais on est une famille... les puissants Gaviera, on doit être ensemble en public et s'entretuer en privé.
Il a un lent sourire en disant ça. Je sens quelque chose bouillonner dans mon ventre, de la colère ?
Être en colère ne sert à rien. Ça empêche de réfléchir, il faut toujours prendre du recul et ainsi opter pour les meilleures décisions. Toujours.
- Tu n'es pas venu jusqu'ici pour me dire ça ?
- Non, je viens te dire de te dépêcher. L'heure ne t'attend pas.
- Tu m'as pris quelque chose qui m'était très cher.
Mon frère arque un sourcil, il s'avance vers moi, claque la porte comme si s'enfermer avec moi ne lui provoquait aucune crainte malgré l'amertume que je ressens pour lui.
Il n'a peur de rien. Exactement comme père l'a toujours voulu... Mais ça, c'était avant sa femme...
- Tu veux te venger ? Vas-y, mais ne rate pas ton coup, Giacomo, n'oublie pas que moi, quand je tue, même le cadavre souffle. L'heure tourne.
Il sort de la pièce, me présentant son dos sans aucune hésitation. Parce qu'il sait que je suis un homme honorable qui n'attaque jamais par derrière.
L'honneur...
Après avoir longuement regardé mon reflet, je sors de la chambre d'hôtel. Direction la salle de cérémonie où doit se dérouler l'office.
J'entre par une porte qui mène directement vers l'autel. Ils sont tous là, des membres de la glorieuse Cosa Nostra aux membres de certains cartels alliés, en passant par la Camorra. Mon père est d'ailleurs installé à l'avant avec son ami, le parrain de la Camorra.
Mon regard est attiré par Reichs Miller, le parrain de la branche noire de l'Outfit de Chicago.
Le voir ici augmente cette rage que j'étouffe en moi. Il n'a rien à faire ici.
La chapelle est pleine à craquer, des têtes et encore des têtes... Mais elle n'est nulle part. Pourquoi n'est-elle pas venue ?
Elle aurait dû être là et affronter ce qu'elle me pousse à faire.
Dante et Riccardo, qui sont mes témoins, sont debout à côté de moi, parlant de je ne sais quoi. L'un d'eux aurait dû se trouver devant cet autel à attendre Adela. Je veux être le chef, mais je ne veux pas de cette gamine à mes côtés.
***
Ce n'est pas ta fille...
Salope, elle va me payer ça. Son mariage est fixé dans une semaine, mais ça ne changera rien. Elle sera toujours à moi. Ni Reichs ni Adela n'ont le pouvoir de briser un lien forgé dans la peur.
La musique retentit, et les invités se lèvent. Je me tiens droit, la mine égale, alors que les portes en bois de chêne s'ouvrent pour laisser entrer Adela et sa sœur, qui, derrière elle, tient sa robe. Son père tient sa main et la conduit vers moi d'un pas conquérant, comme si le monde leur appartenait. Maudite Camorra.
Je ne vois pas son visage à cause du voile, mais son corps pulpeux est mis en valeur par le tissu qui en épouse chaque parcelle.
Elle s'avance trop lentement, ce qui m'agace. Au premier rang, sa mère renifle bruyamment.
Oh, déjà ? Ne pleure pas maintenant. Pas avant que j'aie brisé ta petite princesse et que je t'aie envoyé chaque morceau dans une boîte en diamant.
Adela s'arrête devant moi, et son père place sa main délicate dans la mienne.
- Je te confie mon bien le plus précieux.
Je l'enfermerai dans une boîte, comme on le fait d'un bien précieux.
- J'en prendrai soin, je vous le promets. Il fait un hochement de tête solennel avant de s'éloigner.
Et je suis soudain pris d'un espoir : si je soulève le voile, ce sera une autre femme qui me regardera. Des yeux bridés, un nez fin, une bouche en forme de cœur, des cheveux sombres comme l'ébène ou teints d'une couleur différente. Si je soulève le voile, mes illusions seront réalité, et mes cauchemars des mirages.
Si je soulève le voile, tout sera comme ça doit être. Je reçois une légère tape de Dante, et je me rends compte que je suis resté figé là, mes mains crispées sur le tissu à la douceur incroyable. Je le rejette impatiemment en arrière et... ce n'est pas elle.
Adela me fixe de ses maudits yeux verts. Elle papillonne des paupières, rougissant comme une misérable pucelle.
Elle attend un compliment, peut-être ?
Tenant toujours sa main, je me tourne vers le prêtre qui dirige la cérémonie.
Il débite un nombre incalculable de stupidités sur le mariage, la fidélité, la patience, la compréhension et l'amour. La loyauté aussi, je crois, puis il nous demande de prononcer nos vœux. Adela débite Dieu sait quoi d'une voix passionnée.
- ... Je te prends, Giacomo Gaviera, comme époux, jusqu'à ce que la mort nous sépare.
Oh, vraiment ? Je risque de te prendre au mot, et plus vite que tu ne le crois.
- À vous, mon fils.
Je ne suis pas ton fils, je ne suis même pas sûr d'être le fils de l'homme que j'appelle père. Si c'était le cas, je ne serais pas aussi différent.
- Je te prends, Cassandre, comme épouse. Je promets de te protéger, de t'honorer, jusqu'à ce que la mort nous sépare.
Adela se décompose, et sa main, qui était dans la mienne depuis le début de la cérémonie, se libère et tombe le long de son corps.
Qu'est-ce qui lui prend ? Un siège tombe lourdement sur le sol. Federico, le frère d'Adela, se lève, arme dégainée, pointée sur mon visage.
- Tu te payes ma tête ? Ma sœur s'appelle Cassandre ?
Aussitôt, Riccardo dégaine, braquant son arme sur le bassin de Federico. Il n'a aucune envie de me protéger, mais je reste la future pieuvre, et lui, mon bras armé. Il fait son devoir, non ?
- Recule, Federico, il serait dommage que la Camorra n'ait pas d'héritier.
- Baisse ton arme, Gaviera, ou j'explose la cervelle de ta charmante épouse.
Autour de nous, tous les gangsters ont sorti leurs armes. Et je comprends enfin pourquoi : j'ai prononcé le nom de Cassandre plutôt que celui d'Adela. J'ai insulté leur sœur devant tout le monde.
Le cousin d'Adela se tient derrière Gayle, qui, comme tous les autres, s'est levé.
Riccardo, plutôt que de réagir comme un mari dont la femme est menacée, me surprend en souriant, le genre de sourire énervant dont lui seul a le secret. Et je comprends bien vite pourquoi : Gayle se baisse brusquement, glissant sous l'un des bancs. Le cousin, qui ne l'a pas vu venir, laisse échapper une exclamation de rage et fait feu. La balle troue le banc, mais Gayle est déjà de l'autre côté.
Mon frère arrête de rire, la situation est moins amusante maintenant qu'il à fait feu. Il est en colère, et quand le petit Riccardo est fâché, il fait n'importe quoi.
Il braque son arme en direction du cousin d'Adela et lui loge une balle dans le bras, le tout sous les exclamations médusées des invités.
Ce mariage va se transformer en noce pourpre parce que je n'ai pas été foutu de prononcer le nom de la bonne femme.
- Ça suffit ! hurle le père d'Adela. Nous sommes dans une église, un lieu sacré !
Tout le monde range son flingue. Contrairement au parrain de la Camorra, le père lui ne s'est pas levé. Il ne parle pas, mais il lui suffit d'un regard en direction de l'autel, en fixant Riccardo et Dante précisément, puis d'un autre regard circulaire vers ses hommes, pour que tous les membres de la Cosa Nostra abaissent leurs armes.
Riccardo traverse la pièce après m'avoir lancé un regard plein de mépris, pour rejoindre la pimbêche qui lui sert de femme.
- Mon père, veuillez reprendre, argue Marinelli. Son fils, Federico, se braque, mais il ne dit rien. Les dents serrées, il retourne s'asseoir, et le prêtre continue la cérémonie.
Quel est l'importance de prononcer le nom de leur fille ou celui d'une autre ? Ce mariage n'a qu'un seul but : unir les deux plus grandes organisations de ce pays.
Après cela, tout se passe dans un brouillard. Nous quittons la chapelle sous les acclamations des invités, même si l'entrain n'est plus le même depuis que j'ai prononcé le mauvais nom. Adela est à mon bras, raide, silencieuse.
L'ai-je blessée ? Ai-je envoyé valser ses illusions de petite fille sur cet autel ? Quand j'ai fait ma bévue, son regard s'est agrandi brièvement, mais elle a rapidement revêtu un masque. C'est bien, cela signifie qu'elle est capable de faire semblant, ça lui sera utile avec moi.
Toute la soirée, nous sommes installés à la table des mariés. Tout le monde semble s'amuser sauf nous. Des gens viennent inlassablement nous féliciter, on mange - moi plus qu'Adela, on boit - elle plus que moi. Je suppose qu'elle veut se saouler le plus possible avant la cérémonie du coucher.
Adela partage une danse avec son père, et c'est là que sa sœur, une copie conforme d'elle, vient me parler. Elle doit avoir 15 ans, vêtue d'une robe rouge, le regard transpirant de colère.
- Si tu fais du mal à Dela, je te tuerai moi-même. Tu ne la mérites pas.
Elle a craché chaque mot, me postillonnant au visage. Sa mère, qui surveillait la danse entre le père et la fille, reporte son attention vers la table principale. Elle écarquille les yeux en avisant sa cadette, avant de venir la chercher.
- Mais Mama, je discutais juste avec mon beau-frère, j'ai le droit !
Je fais la moue, vide mon verre, et demande à la serveuse de m'en apporter un autre. Je scrute la foule : elle n'est pas venue à la fête. Le contraire m'aurait étonné. Je partage moi aussi une danse avec ma femme. La qualifier comme ça a un goût encore plus acide que l'alcool. Dans un monde parfait, ma femme n'a pas de cheveux blonds, elle n'est ni petite ni pulpeuse.
Arrive enfin la cérémonie du coucher, et je crois que c'est le seul moment où je me sens heureux de la soirée. Les cousins d'Adela se précipitent vers elle pour la soulever, tandis que les femmes de sa famille scandent des chansons traditionnelles. Je grimace, impatient que cette mascarade prenne fin. Je réussis à me dérober en disparaissant dans la chambre le premier, mais pas avant qu'un des cousins d'Adela me glisse :
- Fais-nous une belle tache, mon frère.
Je ferme la porte d'un coup sec. J'avais complètement oublié cette tradition aussi vieille que le monde. Comme Adela est vierge, ils s'attendent à voir une tache de sang sur le drap, preuve de la consommation du mariage.
Ma femme est recroquevillée sur le lit, se perdant dans sa robe blanche qui la rend encore plus minuscule. Elle doit avoir du mal à respirer avec ce corset.
- J'ai un cadeau pour toi, Adela, dis-je en me débarrassant de ma veste.
Elle me regarde timidement. Adela pensait sûrement que dès que les portes seraient fermées, je lui tomberais dessus comme un animal pour consommer le mariage.
Je l'aide à se lever du lit et la conduis vers le dressing, où la boîte que je me suis fait livrer nous attend.
- Une malle ? questionne Adela, perplexe, me regardant moi puis la gigantesque malle à nos pieds.
- C'est un modèle unique que j'ai fait faire sur mesure, spécialement pour ma douce épouse.
- Je... Eh bien, merci. Elle est magnifique.
- Tu dois avoir envie de retirer cette robe, j'ai l'impression que tu as du mal à respirer.
Elle recule quand je m'approche d'elle, en mordant sa lèvre inférieure.
- Oui, mais avant d'aller plus loin, j'ai une confidence à te faire. Je suis, je n'ai jamais...
La politesse voudrait que je lui donne l'occasion de terminer sa phrase, mais je n'aime pas les femmes hésitantes. C'est tellement agaçant.
- Je sais que tu es vierge. On ira doucement, à ton rythme. Pour l'instant, tu vas te débarrasser de cette robe, prendre une douche, et te reposer. La journée a dû être éprouvante.
Elle me regarde enfin, les yeux agrandis par la surprise.
- Tu ne veux pas... enfin, tu sais... ?
- Rien ne presse. On a toute la vie devant nous.
- C'est gentil. J'ai besoin d'un coup de main, je ne peux pas retirer cette robe toute seule.
Elle se tourne pour me présenter son dos. J'écarte ses cheveux et m'attaque aussitôt à la multitude de crochets qui retiennent sa robe. Il me faut une dizaine de minutes pour en venir à bout. Adela pousse un long soupir quand elle tombe à terre, et reste devant moi en chemise de coton blanc qui lui arrive aux genoux.
- Merci.
- Tu ne m'as pas demandé à quoi sert la malle.
- J'avoue que ça me laisse perplexe, mais c'est une malle magnifique. Je lui trouverai une utilité, si d'aventure on doit voyager.
Douce et tellement conciliante, élevée pour être l'épouse parfaite. Une princesse qui croit naïvement qu'elle vient d'accéder au rôle de reine.
- Ouvre-la.
- Quoi ?
- Ouvre la malle.
Elle hoche la tête. Adela repousse le couvercle doucement. Je sors mon arme de ma ceinture.
- Entre à l'intérieur.
Cette fois, elle est livide. Est-ce à cause de l'arme ou de l'ordre ?
- Je ne comprends pas, tu veux que je rentre dans cette boîte ?
- Oui, et tout de suite.
Je retire le cran de sécurité, rapprochant le canon de sa tête. Adela recule, effrayée. Parfaite. Elle enjambe la malle et y entre comme une automate.
- Assise.
Cette fois, elle comprend ce que j'ai l'intention de faire, et elle se met à sangloter. Adela obéit. Dès qu'elle s'installe, ramenant ses jambes contre son torse, je referme le couvercle et enclenche le verrou.
- Ne t'inquiète pas, tu peux respirer.
- Pourquoi tu fais ça ? Je ne comprends pas.
- Parce qu'il n'est pas question que je sois le seul à être enfermé dans une boîte. Cette malle est ta nouvelle réalité.
Je m'éloigne en refermant la porte du dressing, ce qui étouffe ses hurlements. Elle finira par s'endormir d'épuisement, mais il n'est pas question que je la libère avant l'aube. Je saisis un couteau et un verre, puis me dirige vers la salle de bain. Je me taillade la paume et laisse le sang tomber dans le verre, avant de le diluer avec un peu d'eau. Ensuite, je verse le mélange de manière stratégique sur le drap, pour leur donner une foutue preuve de consommation.
Le gentil Giacomo, qui fait constamment ce qu'on attend de lui.
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COUCOU LES AMIS !!!
vous allez bien ? Bon, on va pas négligé le dernier tome de la série non plus lol. Je vais essayer de poster un chapitre chapitre dimanche.
Passer une bonne soirée !
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