Gayle
– Coucou les filles ! Arya pousse la porte et s'introduit dans la cabine que je partage avec Camille. Aussitôt, on se met à se moquer d'elle en prenant des poses suggestives.
– Oh oui, Luca, plus fort, plus fort. Putain bébé, c'est tellement bon hmm. Arya devient rouge comme une pivoine, et dans la cabine voisine à la nôtre, on entend Luca se marrer avant de dire.
– J'ai mis toute mon énergie, vous trouvez pas que je mérite une médaille les filles ?
– Si, répond Camille, reste plus qu'à trouver ta catégorie olympique.
– Je ne pensais pas avoir fait autant de bruit, marmonne Arya, la tête entre les mains.
– Je suis sûre que même les oiseaux qui volent près de l'avion t'ont entendue.
– Grrr la honte, bon changeons de sujet avant que je ne décide de m'immoler par le feu pour ne plus ressentir cette gêne. Vous faites quoi ?
Je tourne l'ordinateur sur lequel on regarde Me Before You. Camille voulait un film d'horreur mais je l'ai battue à pierre-papier-ciseaux. Elle n'arrête pas de râler, mais je suis persuadée qu'au fond d'elle, elle aime beaucoup.
– J'ai faim.
– Tu m'étonnes après le sport que tu as fait. Elle tire l'oreiller et fait mine de m'étrangler.
– Faire l'amour c'est bon pour la santé !
– Ah parce que tu étais en train de faire l'amour, j'ai cru que Luca testait une nouvelle technique de torture sur toi, raille Camille.
Non Gayle, ne pense pas à lui, ne pense pas à lui. Merde, j'ai pensé à lui !
– Je vais chercher des sandwichs. Je lève le pouce dans sa direction. Camille se lève à son tour, arguant qu'elle préfère ses propres sandwichs. Je préfère m'en faire aussi, mais je n'ai aucune envie de sortir et d'être confrontée au nouveau couple en vogue d'Italie. J'en fais des cauchemars !
Comment ça peut être aussi facile pour lui de passer à autre chose ? J'ai l'impression que notre histoire n'a jamais existé. Comme si c'était un rêve, compliqué et merveilleux à la fois et que maintenant je dois vivre loin de cette bulle d'euphorie. La chute est brutale et je n'ai pas eu le temps de me préparer.
J'ai adopté une routine que Cass a qualifiée : spéciale zombie.
Je mange, je me lève, je dors, j'écris avec une douleur lancinante dans la poitrine. La douleur devient encore plus insupportable quand je les imagine ensemble ou pire quand ils sont ensemble, comme en cet instant. D'ailleurs, j'ai l'impression qu'ils sont constamment fourrés l'un avec l'autre. Et ça m'insupporte.
Leurs histoires a repri là où elles en étaient avant l'enlèvement de Rebecca et moi je ne suis plus rien. Je pousse un soupir et me roule en boule sur le lit.
Tu t'es sacrément fait utiliser ma pauvre petite.
Je n'arrête pas de me dire que c'est ma faute. Qu'il n'a pas supporté la vidéo avec Franco. Mais lui aussi a embrassé Rebecca à sa sortie de prison pourtant je lui ai pardonné, je l'ai même cru quand il m'a dit que c'est elle qui l'avait fait. Maintenant je commence à avoir de sacré doutes.
Il voulait mettre un terme à la relation c'est tout. Il faut que j'arrête de lui chercher des excuses.
C'est peut-être ça ton problème espèce d'idiote, tu l'aimes tellement que tu en as oublié que tu étais le prix et que c'était à lui de se battre pour te gagner. Merde, pourquoi je parle comme l'une de ces influenceuses sur Instagram.
– Tu n'es qu'une idiote, une idiote ! Un rire cristallin retentit dans l'avion, pas besoin d'être devin pour savoir que c'est Rebecca installée sur les sièges à côté de Riccardo qui rigole. Heureusement que j'ai une cabine, ça aurait pu être pire ! Ce vol pour le Nevada risque d'être le plus long de ma vie.
Ahh, je me bouche les oreilles en secouant la tête quand elle dit quelque chose en riant à nouveau, son bonheur me poignarde le cœur, son bonheur me donne envie de la soulever et de la jeter du haut de l'avion, son bonheur me donne envie de brûler le monde. Mais qu'est-ce que je fiche ici ?
Depuis qu'elle est enceinte, Cass est effrayante, elle l'a toujours été mais maintenant c'est effroyable. Je suis venue la voir, pour lui dire que je n'irai pas dans le Nevada, je suis arrivée juste au moment où elle hurlait sur l'une des danseuses formées par Maddy. La pauvre s'est brisé la jambe. Mais Cass lui a quand même fait une scène, on dirait une version asiatique de Miranda Priestly dans Le Diable s'habille en Prada.
J'ai perdu mon courage et me voilà dans un avion en train de mourir de jalousie parce que mon ex s'est rabiboché avec son ex. J'espère qu'ils vont attraper la variole du singe supplément herpès.
Je me mets à rire. C'est assez drôle de qualifier Riccardo d'ex. On n'a jamais collé d'étiquettes sur notre relation. Une minute, suis-je en train de devenir folle ? Je n'arrête pas de rire seule.
Étiquettes ou pas. J'ai atrocement mal.
– Je vais vomir, putain je la hais ! Crache Camille en pénétrant dans la cabine, un plateau à la main. Arya brandit une bouteille de whisky.
– Ne vomis pas sur les sandwichs, je meurs de faim, dis-je en me poussant pour qu'elles s'installent.
– Oh, tu sais très bien que je veux vomir sur Miss Morale et lui faire ravaler son rire, je suis sûre qu'elle le fait exprès pour te blesser.
Elle y arrive. Très bien même.
– Ce n'est rien, je m'en moque.
– Arrête ça marche pas avec nous ça. Tu sais quoi ?
– Quoi ?
– écarte les jambes je vais te donner un orgasme, on n'a pas besoin d'homme. J'ai même pas le temps de réfléchir qu'elle me saute dessus et soulève mon tee-shirt. J'écarquille les yeux.
– Camille, lâche-moi.
– Donne-moi cette chatte donne-la moi, elle est à nous mon précieux. J'éclate de rire en appelant Arya à l'aide mais elle est trop occupée à prendre des vidéos.
– Je veux te donner un orgasme. Je veux te donner un orgasme. Elle se place au-dessus de moi et claque un baiser sonore sur ma joue.
– Mais ça va, lâche-moi.
– Je me sens abandonnée là. Arya n'a même pas terminé sa phrase que la porte de la cabine s'ouvre sur Bud. Ses yeux s'écarquillent à mesure qu'il nous analyse. Je suis couchée sur le dos, retenant mon poids sur mes coudes et Camille est couchée au-dessus de moi, la tête sur ma poitrine. Nous devons offrir un spectacle sacrément sensuel parce qu'il émet un sifflement.
– Qu'est-ce que tu veux Bud ? Je questionne.
– Vous m'avez appelé.
– Quoi n'importe quoi, si j'ai envie de voir un idiot j'aurais mis Tom et Jerry.
– Dis ce que tu veux Camille mais j'ai entendu chatte et orgasme et c'est la formule magique pour invoquer le grand-Amérindien que je suis.
– Dégage marmonne Arya, et arrête de nous rabattre les oreilles avec tes origines.
– Ce n'est pas une question d'origine. Je suis de la communauté de Pocahontas, je suis le seul vrai Américain dans cet avion.
– Je suis Américaine aussi ! argue Camille, qui est toujours au-dessus de moi. Arya lève le doigt en prenant sa tête de prof d'école.
– Bud dit vrai. L'Américain comme nous le connaissons aujourd'hui est l'Africain, l'Européen, l'Asiatique, des purs produits de la migration. Mais les Indiens d'Amérique sont les seuls natifs.
– Vous voyez !
– On n'a jamais dit le contraire, mais, dehors le natif , on veux pas de toi ici. J'argue en pointant un doigt en direction de la sortie. Bud pose une main sur son cœur.
– C'est exactement ça que l'envahisseur blanc a dit a mon peuple avant de nous voler l'amerique. Vous êtes sûrs que vous ne voulez pas qu'on reste ?
– On ?
– Mes muscles et moi !
– Luca vient chercher ton pote ou je le tue.
– Vise le cœur, réplique Luca de la cabine à côté. Bud, jugeant que ces paroles sont de la haute trahison, décide d'aller alpaguer son ami. Arya ferme la cabine.
– Où en étions-nous ? Elle questionne en se frottant les mains.
– Bud m'a coupé l'envie, déclare Camille en roulant sur le côté avant de s'installer en tailleur.
– Pour ma part il m'a sauvé la vie.
Je saisis un sandwich et commence à manger.
– Je comprends pas, commence Arya. Il s'est passé quoi pour qu'il se comporte comme l'empereur des cons ?
– Il pense que je me suis envoyée Franco.
– Mais n'importe quoi, ce connard t'a droguée. Je t'avais dit de lui dire la vérité.
– Ça va, on va pas refaire le monde avec des si. Je me sens assez mal, n'en rajoutez pas.
– Désolée, je suis pas douée pour remonter le moral. Vous êtes mes premières amies alors...
– Ça, on avait remarqué, marmonne Arya. Elle saisit un nouveau sandwich.
– Je suis sûre que Rebecca lui a retourné le cerveau, c'est une sorcière. Tu aurais dû la laisser chez Dominguez. Oh mère malsaine, c'est vraiment méchant ça, non ?
– Arrête Arya, personne n'a le pouvoir de séparer deux personnes qui s'aiment. S'il agit comme ça avec moi, c'est juste parce qu'il ne m'aime pas !
– Il t'aime ! affirme Camille avec conviction, je ne sais pas à quoi il joue, mais je sais qu'il a des sentiments pour toi. C'est juste que son côté idiot et fier Italien qui pense que son honneur a été bafoué est plus puissant que son amour.
– Merci, ça fait plaisir à entendre que quelque chose est plus fort que son amour. Je me sens vachement mieux, si mieux que j'ai envie de sauter dans un four.
– Camille, combien de fois t'ai-je répété de ne jamais essayer de remonter le moral de quelqu'un ?
– Ça va, lâchez-moi. Il est con, tu mérites mieux. Mais c'est dommage que vous ne soyez pas mariés.
– Pourquoi ? je questionne en retirant le fromage de mon sandwich.
– Si vous étiez mariés, tu serais partie avec la moitié de sa fortune, mais là tu t'en tires sans rien. Tu veux des idées de vengeance ? Épouse son père.
Je grimace en secouant la tête. La porte de la cabine s'ouvre encore, mais cette fois c'est pas Bud, c'est pire.
– Vous pourriez faire moins de bruit, il y en a qui essayent de dormir. Miss « je pleure sur commande » referme la porte et disparaît. On se regarde, ébahies, avant de secouer la tête.
À la fin du film et de la bouteille, Arya rejoint sa cabine en titubant. Elle n'arrête pas de glousser et manque de tomber entre le lit et la porte plusieurs fois.
Camille ronfle doucement à côté de moi, j'essaie de résister, même si j'ai très envie de faire pipi, je ne veux pas les voir ensemble.
Mais personne n'est assez fort pour stopper l'appel de la nature. Je me lève en prenant de grandes inspirations, je peux le faire. Je suis une femme forte, je peux le faire !
Je sors de la cabine en regardant devant moi comme un robot. Je serre les dents, non seulement ils sont ensemble, mais elle est endormie, la tête sur l'épaule de Riccardo. C'était ma place il y a moins de deux semaines, j'espère qu'ils vont attraper l'hérpes supplements gonococcie.
Il lève brièvement les yeux de son ordinateur et son regard sombre croise les miens, froids comme une nuit d'hiver en Alaska.
Je déglutis péniblement, mais je redresse fièrement la tête et file dans les toilettes, pas question de lui montrer à quel point j'ai mal. Mais seule dans la cabine, je m'effondre et des larmes ruissellent sur mes joues.
J'en peux plus. C'est tellement difficile de les côtoyer au quotidien. Encore plus difficile de jouer l'indifférente alors que je n'ai qu'une seule envie : me jeter sur lui et lui demander ce que j'ai fait pour mériter un tel traitement. Génial, je n'aurais jamais dû boire parce que l'alcool me rend plus émotive que je ne le suis déjà.
Je refuse de vivre dans un monde où je ne suis plus l'homme que tu aimes.
Pour ton malheur petite serveuse, tu es en train de devenir mon bien le plus précieux.
Mensonges, que des mensonges. Il n'a jamais été sincère. Il a suffi d'une épreuve pour que tout vole en éclat !
Je termine mes besoins et sors de la cabine, ils mettent quoi dans l'alcool de nos jours ? Plutôt que de me faire oublier ce qu'il y a autour de moi, c'est l'inverse, on dirait presque que ma perception des choses s'est décuplée ! Je titube jusqu'à la cabine et me laisse tomber sur le lit après avoir éteint les lumières. Camille se retourne et je reçois sa main en plein sur la nuque, elle gémit quelque chose. Je grimace sous la douleur mais je ne bouge pas, ce n'est que physique. Il y a bien pire, mon cœur en bouillie depuis des semaines.
Madara Uchiha avait raison.
Love is not necessary, power is the only true necessity. J'aurais dû l'écouter mais voilà, il a suffi d'un bel Italien pour que je jette toute prudence à la poubelle. Qu'est-ce que j'y peux, il semblait si convaincant...
Je m'endors en riant comme l'idiote que je suis en train de devenir.
Je suis réveillée par le bruit de la porte qui s'ouvre et se referme. Je plisse des yeux, mais je ne distingue rien dans le noir. Quelqu'un s'avance vers le lit, je le sais au bruit qu'il produit, même s'il est très discret. Il s'accroupit en face de moi. La main de Camille est retirée de mon cou et la couverture remontée sur mes épaules.
Des doigts rugueux écartent mes cheveux puis ils suivent la ligne de mon nez. Je sens quelque chose se presser contre ma joue, puis la personne disparaît en refermant la porte derrière elle.
On dirait le parfum de Bud. Mais avec l'alcool, je ne peux rien affirmer.
***
– J'ai un putain de marteau-pique dans la tête. Je dis quand Cass frappe dans ses mains pour nous réveiller : Arya, Camille et moi. On est debout, mais on dort tant oon est épuisé par le vol.
Nous sommes arrivés dans le Nevada, plus précisément dans la ville d'Henderson, dans le comté de Clark.
– C'est bientôt terminé, du nerf ! hurle Cass à nouveau. Elle s'arrête pour écouter son interlocuteur : Non, non, je vous ai dit que je veux toutes les chambres. Videz l'hôtel si vous voulez, mais je veux que les 50 chambres soient prêtes pour accueillir nos invités. C'est très important... Trouvez une solution ou vous êtes virés !
Elle raccroche. Je fais semblant de ranger les fleurs et Camille astique une sculpture en bronze avec sa robe.
– Arrêtez, vous êtes ridicule, je ne vais pas vous manger. Sur la scène, Maddy peaufine le numéro des filles. D'après ce que m'a dit Cass, après la réunion il y aura une grande fête, s'il n'y a pas de bain de sang, évidemment. Les plus grandes familles mafieuses confinées dans la même pièce, ça peut faire des étincelles.
– Où est-ce que je mets ça, madame Gaviera ? Cass fronce les sourcils à l'intention de l'homme en costume qui vient de lui parler. Ça me fait toujours bizarre d'entendre les gens l'appeler ainsi, mais quand elle a commencé à travailler avec Giacomo, la pieuvre l'a adoptée, comme avec Luca, et lui a permis de porter son nom. Je me demande combien d'enfants adoptifs à Gieusé
Gaviera.
L'homme tient des packs contenant des bouteilles d'eau.
– Gayle, va avec lui dans la salle de conférence et dispose les bouteilles. Ces salauds méfiants ne vont même pas y toucher, tout le monde sait que la pieuvre a une grande maîtrise du poison, mais il faut bien faire les choses. Allez, du nerf, on n'a pas toute la matinée.
Je me dépêche de suivre l'homme qui se dirige déjà vers l'escalier.
– Je veux que la sécurité soit renforcée. Camille, va voir en cuisine où en est le...
– Elle est terrifiante, commente l'homme en costume. J'éclate de rire avant de grimacer. Mais qu'est-ce qui m'a pris de boire ?
– Oui, j'avoue que c'est impressionnant de la voir à l'œuvre.
Et je dois prendre la place d'une dame de fer pareille, il suffit d'un regard de sa part pour que tout le monde se mette au garde-à-vous. Je ne serai jamais à la hauteur.
Nous pénétrons dans la salle de conférence. Le livreur pose les packs d'eau sur la table avant de s'en aller. J'extirpe mon couteau de ma ceinture et déchire le plastique avec des mouvements rageurs en espérant que c'est la tête de la pieuvre de l'ombre qui s'y trouve à la place.
Je suis en train de disposer les bouteilles juste en face des sièges quand quelqu'un ouvre la porte. Rebecca pénètre dans la pièce. Elle porte un pantalon en toile dans lequel est rentrée une chemise blanche. Ses cheveux sont retenus au sommet du crâne et elle est maquillée juste assez pour mettre en valeur ses yeux bleus.
À la place, je ressemble aux méchants dans les films de Noël, une méchante qui s'est mise la main dans une prise électrique tant ses cheveux ont besoin de soins. D'ailleurs, la première attaque de Rebecca ne se fait pas attendre.
– Tu t'es fait électrocuter ?
J'aurais dû la laisser chez Dominguez ! J'ai l'impression d'avoir libéré les sept plaies d'Égypte.
Mes cheveux partent dans tous les sens à cause de Cass et de son empressement. Aucune de nous n'a eu le temps de se préparer avant de quitter l'avion. On n'a même pas déjeuné !
Je porte un short, un tee-shirt et des tennis. La classe. Je pose une dernière bouteille près du siège au centre, certainement celle de la pieuvre vu que c'est lui qui reçoit.
Rebecca pose sa main sur le bureau à plat. Je reçois un uppercut si violent dans la poitrine que mon cœur dégringole, la bile me monte à la gorge. Je crois que je vais vomir.
Elle porte la bague d'Aura Gaviera, cette même bague qu'il m'a offerte en affirmant que j'étais la seule qui méritait de l'avoir.
– C'est fascinant, je me demande ce que tu fais là. Tu n'as pas ta place parmi nous.
C'est également le sentiment que j'ai depuis quelque temps, mais je ne laisse rien paraître. Je ramasse le plastique et le mets dans la poubelle.
– Si tu as un problème, va te plaindre chez Don Gaviera.
– Il est à moi maintenant. Je t'avais dit que je me battrais pour lui.
– Je suis contente pour toi. Elle éclate de rire.
– Non, tu ne l'es pas. À quoi bon nier ?
– Qu'est-ce que tu cherches, Rebecca ? On n'est pas dans un soap-opera, ne t'imagine pas que je vais me battre avec toi pour lui. Je ne me battrais jamais avec une femme pour un homme, aussi craquant soit-il. Et si ma mémoire est bonne, je te l'ai déjà dit.
Elle s'avance et pose une main sur la table, juste là où se trouve mon couteau, nous faisant à présent face.
– Parce que tu ne l'aimes pas comme je l'aime.
– C'est sans importance. Tu as eu ce que tu voulais, pourquoi continues-tu à me harceler ? Ce qui te fait autant mal, c'est que je ne t'accorde aucune importance. Excuse-moi. Je tente de prendre mon couteau pour sortir de la salle de conférence, mais Rebecca est plus rapide que moi. Elle le saisit et me regarde en souriant. Je plisse les lèvres.
– Je te le laisse. Tu as une certaine obsession avec tout ce qui m'appartient, à ce que je vois. Soudain, le sourire de Rebecca s'efface. Elle soulève son bras, je recule de crainte qu'elle ne me frappe, mais elle plante le couteau dans sa cuisse ! Putain, cette fille est complètement cinglée.
– Bon sang, Rebec... Son hurlement déchire l'air, si strident que mes oreilles en deviennent douloureuses. Elle hurle comme si un diable vieux de plusieurs millénaires avait pris possession de son corps. Elle se courbe en deux en répétant ces bruits assourdissants qui me vrillent les oreilles. Si les vitres n'étaient pas blindées, je suis persuadée qu'elles auraient explosé en mille morceaux !
Mais qu'est-ce qui lui prend à hurler aussi fort ? Je suis tellement hébétée que je n'arrive pas à réagir.
On entend des bruits de pas, et Rebecca se jette sur moi à ce moment-là. Elle pose les mains sur mes épaules, plaquant mon corps frêle contre le sien. La porte s'ouvre sur Riccardo et Camille armes dégainés. Ils sont bientôt suivis par Luca, qui tient carrément une carabine !
Le regard de Riccardo passe de moi à Rebecca. J'ai les yeux écarquillés, je ne comprends rien. Rebecca éclate en sanglots et s'éloigne de moi, se tenant la jambe.
– Qu'est-ce qui se passe ici ? questionne Luca. J'ouvre la bouche pour tenter de parler, mais Rebecca me devance.
– Elle m'a poignardée ! Mon visage se décompose, je me tiens au dossier du siège présidentiel que doit occuper le Don pour ne pas tomber.
– Quoi ? J'arrive à articuler.
– Inutile de faire l'innocente. Je lui ai proposé mon aide pour disposer l'eau. Et elle a refusé. Elle m'a humiliée en parlant de Tommaso, et comme si ce n'était pas suffisant, quand elle a vu la bague à mon doigt, elle s'est jetée sur moi. Elle est complètement folle. Riccardo, je veux qu'elle parte, elle me fait peur.
Je secoue la tête, comme une automate.
– Arrête tes bobards. Si Gayle t'avait poignardée, elle aurait visé le cœur tant elle te déteste ! déclare Camille en venant dans ma direction.
– Évidemment que tu prends sa défense, c'est ton amie. Tu ne vois pas le monstre qu'elle est.
– Le seul monstre que je vois dans cette pièce, Rebecca, c'est toi !
– Je ne l'ai pas poignardée ! Je réussis à déclarer en regardant Riccardo. Je recule face au dégoût que je lis sur son visage. Il ne m'a jamais regardée comme ça. Il a un rire sarcastique.
– Alors ton couteau a volé à travers la pièce et s'est enfoncé dans sa putain de jambe ? questionne-t-il d'un ton calme.
– Elle a bien pu se l'enfoncer toute seule, dit Camille, cette pétasse est cinglée !
– Reste en dehors de ça, Cam.
– Gayle, tu vas beaucoup trop loin. Je ne veux plus que tu l'approches.
– Putain mec, c'est toi qui vas trop loin, intervient Luca. Rebecca carre les épaules en fusillant ce dernier du regard.
– Pourquoi tu prends sa défense, Luca ? Tu as couché avec elle aussi. Arya devrait peut-être le savoir.
– Laisse Arya en dehors de ça ou je ne réponds plus de moi. Face à la colère de Luca, Rebecca recule.
J'ai un rire hystérique en me prenant les cheveux dans mes poings. Je les tire si fort que j'en arrache quelques mèches.
– Je n'ai rien fait ! Elle a saisi mon couteau et se l'est enfoncé dans la jambe !
– Et pourquoi ferais-je ça ? Ce que Tommaso m'a fait subir n'était pas suffisant ? Tu penses que j'ai envie d'avoir d'autres cicatrices ?
Je me mords la lèvre et je sens le goût métallique du sang envahir ma bouche.
– Pourquoi tu ne me crois pas ? Je ne l'ai pas poignardée ! Il faut que tu me croies. Je ne t'ai jamais donné une putain de raison de me traiter comme ça.
– Tu as perdu ma confiance le jour où tu as laissé Franco te toucher. Je me passe une main sur le visage, je nettoie les larmes qui se forment dans le coin de mon œil avant de regarder Rebecca. Elle a les yeux rougis et les larmes ne cessent de ruisseler sur son visage.
Quand j'étais petite, ma sœur avait l'habitude de faire des bêtises et de m'accuser à sa place. Comme je ne disais jamais rien, je me faisais toujours punir. C'est un sentiment horrible lorsque mes parents ne me croyaient pas les rares fois où je me défendais. J'avais l'impression d'être seule au monde.
C'est exactement ce que je ressens en cet instant. Je penche la tête sur le côté. Rebecca baisse légèrement la siennz et elle sourit brièvement avant de revêtir son masque de douleur.
Soudain, la colère explose en moi avec la force d'un torrent. Je comble les quelques pas de distance qui nous séparent et je tire sur le couteau. Elle pousse un cri, mais je n'en ai pas fini. J'enfonce le couteau dans sa jambe valide en souriant. Quand elle essaie de s'éloigner, je la retiens par les cheveux. Je soulève brusquement la lame qui est toujours plantée dans sa cuisse, déchirant la chair sur toute la longueur. Son visage se décompose, devenant rouge. Elle doit avoir tellement mal qu'elle n'hurle même pas. Je m'éloigne en souriant avant de déclarer :
– Maintenant, je t'ai poignardée. Tu peux garder le couteau, c'était un cadeau de Riccardo et je ne veux plus rien avoir de lui. Et je te préviens, la prochaine fois que tu t'approches de moi, ce ne sera pas un putain de couteau que tu auras dans la cuisse.
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