Gayle
– Ils sont ponctuels.
– Qui ? Mais avant qu'il ne réponde, la portière du SUV s'ouvre. Trois hommes vêtus de costumes sortent de l'arrière, puis un autre homme sort par l'avant. Je vois d'abord une chaussure en cuir, un pantalon de toile. Mes yeux remontent sur son torse mince moulé dans un costume, puis sur son visage : des lèvres minces, un nez tordu et de grands yeux bruns. Mon examen prend fin sur ses boucles sombres.
Je me plaque contre mon siège. Jawad, l'homme de main d'Adrien Leblanc, celui qui a violé puis tué ma mère.
– Je suis désolé, Gayle. La voix de Dante me parvient comme à des années-lumière.
Je sursaute quand je sens son arme contre mon flanc.
– Descends.
– Qu'est-ce qui se passe ?
– Ils ont mis le prix fort pour te récupérer. Rien de personnel, mais je suis fidèle à mon oncle.
Mon cœur se brise. L'homme que je considère comme mon meilleur ami me livre à mon pire ennemi. Cette attaque n'était qu'une diversion pour noyer ma mefiance ?
Il m'a conduit à une mort certaine.
– Qu'est-ce que, pourquoi ?
– La Cosa Nostra passe avant tout.
Dante descend de la voiture alors que je suis cloué sur place, je n'arrive pas à bouger et ma respiration se fait sifflante. Quelqu'un d'autre sort de la voiture à la suite de Jawad, Claude, la fille qui m'avait coupé les cheveux. Automatiquement, je regarde ses mains à la recherche de la bague de fiançailles de ma mère. Mon cœur rate un battement quand je vois le diamant de plusieurs carats qui étincelle dans la nuit. Même si c'est la dernière chose que je fais avant de mourir, j'aurai sa peau.
La portière côté passager s'ouvre et sans dire un mot, Dante me tire hors de l'habitacle. Je me sens bizarre, tout engourdi et ce n'est pas seulement à cause du choc. Les gens autour de moi deviennent de moins en moins nets.
– Qu'est-ce que tu m'as fait ? La main de Dante autour de mon bras comprime ma chair.
– J'ai mis de la drogue dans ton verre. Il me jette par terre et j'atterris à quatre pattes, juste à côté des chaussures de Jawad. Ce dernier éclate de rire avant d'empoigner mes cheveux.
– Tu m'as manqué, petit oiseau, mais je connais quelqu'un qui sera encore plus heureux que moi de te revoir et cette fois il ne compte plus te laisser filer. Tu sais de qui je parle, pas vrai ?
– Oh, ses cheveux ont repoussés depuis la dernière fois, chantonne Claude. J'essaie de me relever mais mes bras se dérobent sous moi, je ne vois presque plus rien.
– Nous avons tenu nos engagements, avec les salutations de la pieuvre. Je vois Dante tourner les talons et la panique de rester seule avec mes ennemis me donne la force d'essayer de me lever. Mais mes épaules s'affaissent. Dante est-il vraiment mon ami ? Il n'a pas hésité à me trahir. Il doit forcément y avoir une raison. Notre amitié était sincère. Je n'ai pas pu me tromper à ce point.
– Dante, attends, je veux au moins savoir pourquoi ! Je te considère comme mon meilleur ami. Il me regarde, je n'arrive pas à sonder son expression. Après ce que j'avais vécu, je pensais que plus rien ne pourrait me surprendre. Mais pourtant.
Dante s'accroupit en face de moi.
– C'est vrai, au nom de cette relation que nous avons vécue, je te dois au moins ça. Il y a longtemps, j'ai aimé une fille et Riccardo m'a donné deux choix : soit je la tue, soit il s'en charge. Et ce n'est pas à toi qu'on va décrire la barbarie de la pieuvre de l'ombre. J'ai choisi de la tuer, je n'ai jamais pu me le pardonner mais surtout je n'ai jamaiis pu lui pardonner. Je veux qu'il sache ce que ça fait de perdre la femme qu'on aime. J'ai patiemment attendu qu'il tombe amoureux. Je t'avoue que je n'y croyais plus. Puis tu es arrivé et j'ai vu Riccardo se battre contre lui-même et le monde pour te garder en sécurité. Alors j'ai compris que tu étais le cheval de Troie dont j'avais besoin pour mettre mon plan en marche. Tu veux connaître le Graal dans cette histoire ? Lui n'aura même pas à choisir. Tu vas mourir, Gayle, et de sa prison il ne pourra rien faire. J'espère qu'il arrivera à s'en remettre. Parce que moi, je n'ai jamais pu m'en remettre, je ne suis plus qu'un foutu zombie qui survit grâce à la drogue.
– Alors c'est toi qui l'a dénoncé pour le meurtre de Bellucci ? Ses yeux se troublent brièvement puis ses lèvres s'incurvent en un sourire.
– Alors tu n'es pas au courant de ce qui est arrivé à Riccardo ?
– Au courant de quoi ? Il se lève avec un sourire, me laissant dans le flou le plus total.
– Nous devrions le tuer, marmonne Claude pour ne pas être entendue par Dante.
– Arrête de dire n'importe quoi, c'est le fils du consigliere. De plus, on a eu ce qu'on voulait. Jawad conclut sa phrase en me donnant une tape aux fesses.
Les phares de la voiture de Dante illuminent mon visage, mes yeux agrandis par la peur et les larmes alors qu'il s'éloigne. J'ai envie de lui hurler de ne pas me laisser mais je n'y arrive pas. J'ai cette sensation désagréable que mon cœur a été plongé dans une cuve d'acide.
Je n'oppose aucune résistance quand Claude arrache le collier que j'ai autour du cou, me blessant au passage. Je ne résiste toujours pas quand je suis soulevé et conduit en direction de l'hélicoptère.
J'entends Jawad dire au pilote de me conduire chez le chef, qu'il les rejoindra en voiture aussi vite que possible. J'ai l'impression de recevoir un uppercut quand il caresse mon visage. Je sens ses lèvres sur les miennes, je fais appel au peu de force qu'il me reste. J'emprisonne sa lèvre inférieure entre mes dents et je le mords de toutes mes forces. Jawad grogne, il essaie de s'éloigner mais je ne le lâche pas. Son sang inonde ma bouche et je sens la pointe d'un couteau contre ma gorge, ce qui me pousse à lâcher prise.
– Salope ! hurle Jawad, en portant une main à ses lèvres. J'ai le menton maculé de rouge et un goût métallique dans la bouche.
Ma tête retombe mollement sur mon buste alors qu'il me fait asseoir et attache la ceinture de sécurité autour de mon corps, me ficelant comme du jambon.
Je n'arrive pas à bouger, mais je suis toujours consciente quand l'appareil prend de l'altitude dans un bruit assourdissant, soulevant de la poussière au passage.
Je n'arrête pas de penser à Dante. J'ai un peu l'impression de payer pour les actes de Riccardo, mais je n'arrive pas à lui en vouloir. Il devait vraiment aimer cette fille pour garder rancune aussi longtemps.
Riccardo a vraiment planté de la merde partout.
J'ai fini par perdre conscience après une dizaine de minutes. Mais je suis réveillée par le bruit que produisent les hélices. Je me mords l'intérieur de la joue en espérant que la douleur éclairera mon regard, mais les lumières de Rome demeurent des points étincelants à l'horizon alors même que le goût métallique du sang se répand dans ma bouche. Je ne sais pas ce que Dante a mis dans mon verre mais, en plus de me rendre faible, ça me donne envie de vomir. Je halète alors qu'une larme roule sur ma joue. Comment Dante a-t-il pu me faire ça ?
Je pensais que nous étions amis ! Je ne suis pas du genre à accorder ma confiance mais je tenais à lui.
Et les autres, étaient-ils au courant ? Je me passe la main sur le visage. Dans mon malheur, je ne pense qu'à Cassandre, qui est partie à l'hôpital d'urgence. J'espère de tout cœur qu'elle ne va pas perdre le bébé.
L'air s'engouffre dans l'appareil quand il commence à amorcer sa descente.
Je regarde autour de moi sans rien voir, une perle de sueur roule entre mes seins.
Riccardo, où peux-tu bien être ? Que va devenir ma famille maintenant que je suis entre les mains de Leblanc ? Je panique mais je m'efforce de ne pas éclater en sanglots, ça ne sert à rien et il n'est pas question que je me montre faible devant l'homme qui veut désespérément me détruire.
Je ne dois pas penser à la pieuvre de l'ombre et aux énigmatiques révélations qu'a faites Dante avant de disparaître.
Il faut que je me montre forte.
Je suis tirée sans ménagement hors de l'appareil. Nous avons atterri sur le toit d'un immeuble, la ville s'étend à perte de vue. De là où je suis, je distingue parfaitement le Colisée de rome.
Un homme que je ne connais pas se place devant moi et me dévore littéralement des yeux, c'est étrange mais les traits de son visage me rappellent vaguement quelqu'un.
– Tu ne t'en souviens sûrement pas, mais tu as tué mon frère.
Je arque un sourcil. Je n'aurais jamais cru entendre des paroles comme ça un jour.
– Tu es un Leblanc ?
Il secoue la tête avec un sourire qui n'atteint pas ses yeux. S'il n'est pas le fils d'Adrian Leblanc, il est sans aucun doute le frère du type que j'ai tué par inadvertance.
– C'était un accident, mais entre nous, si c'était à refaire, je viserais les couilles.
Je m'attendais à sa réaction, son coup de poing envoie ma tête valser sur le côté, et du sang envahit ma bouche quand je mords ma langue par inadvertance.
Voilà ce qui arrive, Gayle, quand on ne la ferme pas. Et tu ne la fermes jamais.
Je me redresse et crache sur son pantalon, juste au niveau de son entrejambe. Au moins le coup me met les idées en place.
– Oops, je crois que tu as tes règles, copine. Je te prêterais bien untampax mais je n'ai plus mon sac.
Il saisit ma mâchoiren rejetant ma tête en arrière pour que je croise son regard. Il est petit et mince, dans le genre pas impressionnant sans ses armes.
– Tu fais la maligne parce que tu es devenue la pute des Gaviera. Personne ne viendra te sauver et ce traître de Riccardo Gaviera est mort pour avoir marché sur nos plates-bandes.
Je tressaille en fermant brièvement les yeux, avant de lui sourire.
– C'est drôle, mais je n'ai pas eu besoin de Gaviera pour en finir avec ton frère. Et je n'ai pas besoin d'eux pour te faire ça !
Je termine ma phrase en lui enfonçant mon genou dans son entrejambe. Les hommes autour de nous, 3 au total, dégainent , mais je m'en moque, ça sera une aubaine pour moi s'ils tirent. Qu'ai-je à perdre ?
Je me fige soudain, les yeux écarquillés. Il a dit que Riccardo est mort, je n'ai pas rêvé ? Non, ce n'est pas possible.
Merde, reste concentrée, Gayle.
– Tu vas payer ça, putain de pieuvre.
Un coup de poing m'envoie valser sur le sol. Rapide comme l'éclair, le petit homme me retourne et se place au-dessus de moi. J'expire un souffle quand il me frappe à nouveau au visage, ses mains empoignent mon cou. J'ai l'impression d'halluciner mais je vois Riccardo au-dessus de moi. J'entends même sa voix.
– Imagine que je suis en train de t'étrangler, tu fais quoi ?
Nous sommes dans la salle d'entraînement de la Cosa Nostra, il est au-dessus de moi vêtu d'un jogging et d'un tee-shirt blanc.
– Je te frappe à l'entrejambe ?
Il avait fait la moue.
– C'est efficace, mais imagine que tu tombes sur un eunuque.
J'avais éclaté de rire, mais il était resté sérieux avant de se jeter sur moi et de commencer à serrer ma gorge. Je l'avais frappé mais il avait ri en voyant ma réaction quand j'avais touché la protection qu'il avait utilisée pour protéger ses bijoux de famille.
– Allez, petite serveuse, cherche donc un point faible, c'est évident, tu les as juste sous tes yeux.
Ce jour-là, je n'avais rien pu faire et Riccardo m'avait lâchée avant que je ne manque d'air.
Je reviens à la réalité.
– Le boss ne va pas apprécier. J'entends l'un des hommes dire, il continue à presser ma gorge et de l'autre main, il baisse sa braguette pour libérer son sexe en érection. Il pense vraiment que ça sera aussi facile ?
– Elle a tué mon frère, j'ai bien droit à ma vengeance. Je remarque qu'il a un couteau coincé sous sa ceinture.
Cherche les points faibles, c'est évident, tu les as juste sous tes yeux.
Merde c'etait tellement evident.
Ma bouche forme un O de surprise, alors qu'il est occupé à relever ma robe et à déchirer mes sous-vêtements. Je porte mes mains à sa tête, il resserre l'étreinte de la sienne autour de mon cou en me hurlant des obscénités, mais je ne m'arrête pas. Je saisis sa tête à deux mains, les doigts écartés avant de presser mes pouces sur ses paupières qui se sont naturellement fermées pour protéger ses yeux. Je presse, très fort, en enfonçant mes ongles dans la peau tendre. Ils sont d'assez bonne taille. Je presse jusqu'à sentir ses yeux s'enfoncer dans ses orbites. La sensation est foutrement dégoûtante, mais je n'y prête pas attention. Poussée par l'énergie du désespoir, la force de mon attaque augmente. Il s'éloigne avec un cri, je roule sur le côté, remplissant mes poumons d'air quand sa main libère ma gorge.
– Putain, tu vas tenir tranquille. Sa frustration m'aurait fait rire si elle n'était pas à l'image de la mienne.
– Tu es con ou quoi ? Tu demandes vraiment à une femme de ce tenir tranquille pour que tu puisses abusé d'elle ?
Il fulmine suite à ma railleries.
Je ne sens même plus les coups que je reçois. Je réussis à me redresser assez pour saisir son couteau. Sans hésitation, je l'enfonce dans son bras. Il se redresse en éructant avant de prendre un élan et de me frapper avec sa chaussure à la gorge. Je me mets à tousser.
– Bon ça suffit, le boss nous attend. L'autre type m'arrache le couteau des mains en tordant mon poignet et il me soulève. Je fais un sourire au petit homme avant de baisser les yeux.
– Il y a un petit ver qui dépasse de ta braguette. Je n'ai pas le temps de savourer sa réaction que je suis traînée à l'intérieur du petit bâtiment blanc qui se trouve sur le toit.
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