Chapitre 9: Le nouveau jouet de Riccardo
Je regarde une dernière fois la douche italienne avec envie avant de sortir. Si je ne peux pas sortir par la fenêtre de la salle de bain, je vais essayer par le balcon.
Je monte les quelques marches qui mènent à la plate-forme où est situé le lit avant d'ouvrir les portes. Je regarde en dessous, c'est vraiment haut, mais l'avantage, c'est que je suis certaine d'atterrir dans la piscine. Je prends une grande inspiration avant de grimper sur le balcon. Une fois en hauteur, je regarde autour de moi. La priorité sur laquelle je suis retenue semble immense, du côté du jardin je repére un flamboyant majestueux juste derriere une muraille, je pourrais l'escalader sans peine. Je compte jusqu'à trois, avant de me laisser tomber.
Je retiens avec beaucoup de peine mon hurlement, le vent s'engouffre dans ma robe faisant gonfler le tissu, quand je suis sur le point de tomber dans la piscine, Je remplis ma bouche d'air pour ensuite retenir ma respiration. Je tombe sans douceur dans l'eau, la pression me tire vers les profondeurs. Je bats des mains et des pieds pour tenter de remonter à la surface. Mais j'ai beaucoup de mal, ma bouche s'est remplie d'eau dès l'instant où je suis tombée. Je n'ai jamais été une nageuse hors du commun, quand j'allais en vacances avec mes cousins, ils se moquaient de mes capacités. Ils étaient aussi à l'aise que des poissons dans l'eau alors que moi, je me tournais constamment vers la bouée au bout de quelques heures. Mettant plus d'énergie, je réussis à sortir ma tête de l'eau. J'ouvre la bouche pour remplir mes poumons d'air avant de passer une main tremblante sur mon visage.
Je regarde autour de moi, il ne semble y avoir personne. Parfait, je vais pouvoir me tirer d'ici. Je nage jusqu'à la berge. Si mes cousins me voyaient, ils seraient impressionnés.
J'ai un sourire triste. Maintenant que je suis sur le point de tout perdre, je me rends compte que j'avais beaucoup de chance. J'ai fui pour aller à Nîmes, mes parents, le peu d'amis que j'avais, ma famille. Et maintenant, ils sont peut-être tous en danger à cause de moi. Les mains posées sur la berge je tente de me hisser hors de l'eau mais, je suis soudain alertée par un son étrange.
Des grognements, répétitifs et menaçants. Je regarde du côté du jardin, je me fige, mon sang se glace et ma vision se brouille, mes membres deviennent lourds et les battements de mon cœur s'accélèrent. Je commence même à transpirer alors que je suis dans une piscine légèrement froide.
Deux yeux d'un gris clair me fixent, ils appartiennent à une bête immense, sombre comme la nuit, ses babines sont retroussées sur ses crocs alors qu'elle s'avance vers moi.
Une panthère noire ? J'hallucine, un chien, OK, un chat, d'accord, mais une panthère dans une maison ? Mais où ai-je atterri ? Le prédateur ne me lâche pas, ses muscles puissants roulent sous sa peau à mesure qu'elle comble la distance. Alors que je pense que mon calvaire ne pouvait pas atteindre le sommet de l'horreur, une autre créature rejoint la panthère noire, un léopard. Mon Dieu, il ne manquerait plus que des requins dans l'eau.
Quoi que... Je fais un tour sur moi-même pour vérifier qu'il n'y a rien dans la piscine. Les deux prédateurs prennent mes mouvements comme une menace et leurs pas se font nettement plus rapides.
Mon cœur rate un battement, je nage en reculant, ma robe bleue flottant autour de moi, la panthère est à côté de la berge. Je suis néanmoins soulagée de voir que le léopard, lui, ne bouge pas, préférant m'observer avec animosité.
J'entends un rire, quand je relève la tête, je vois Riccardo, une cigarette coincée entre les lèvres, vêtu d'un bas de jogging gris et d'un tee-shirt. Sa main droite est serpentée de tatouages que je n'avais pas remarqués à cause des vêtements couvrants qu'il portait lors de nos précédentes rencontres. Derrière lui se tient Pedro, toujours vêtu de son costume strict.
- J'ai gagné !, déclare Riccardo sans me quitter des yeux. Il tend la main à Pedro, qui y glisse un billet.
Je fronce les sourcils. À quoi ça rime?
- J'avais parié que tu allais sauter, et Pedro était persuadé que tu allais essayer de te tirer par la salle de bain, je lui lance un regard, remplie de rage. Ma main éclabousse la surface de l'eau et aussitôt, la panthère bondit. Je pousse un hurlement, nageant de plus en plus vite pour m'éloigner.
Mon Dieu, jamais je ne m'aurais cru capable de progresser à une telle vitesse. L'adrénaline coule dans mes veines, elle me propulse le plus loin possible de cette créature dotée de griffes et de crocs venus tout droit des profondeurs de l'enfer. Je sens quelque chose effleurer mon pied, je hurle de plus belle, battant des jambes et des mains.
Mes mouvements deviennent saccadés, ma respiration sifflante. Je suis en proie à une panique grandissante qui m'empêche de réfléchir. Quand j'arrive à la limite de la piscine, je me retourne pour me rendre compte avec horreur que je n'étais pas poursuivie par une, mais par deux prédateurs. Au loin, je vois Riccardo assis sur le bord de la piscine, les yeux dans le vague. Il tire une bouffée de sa cigarette et expulse l'air avec son éternel sourire amusé.
Putain, je le méprise !, je me mets à trembler. La panthère est si proche que je sens son souffle balayer mon visage. Cette créature est immense, jamais je n'aurais un jour cru me retrouver face à elle. Je ferme les yeux, me préparant à une mort atroce. Je vois déjà mon cadavre déchiqueté flottant dans la piscine, alors que mon sang teinte l'eau d'écarlate. Je sens quelque chose d'humide et de rêche sur mon visage, je me risque à ouvrir un œil. La panthère me lèche le visage.
La panthère me lèche le visage ! Putain, j'hallucine ? Je suis passé par tout ça pour qu'elle me lèche le visage ?
- Je te présente Médusa c'est un léopard atteint de mélanisme. Et à côté de lui, son frère Persée.
Je ne prête plus attention à Riccardo, je me risque à toucher le félin, il me lèche la paume. C'est chatouilleux, je laisse échapper un rire.
Medusa continue de m'observer avec méfiance et je dois avouer qu'elle me fait peur. J'ai l'impression qu'elle peut bondir à chaque instant. Prenant une grande inspiration, je décide de nager jusqu'à la berge. Contre toute attente, Medusa se glisse sous mon bras comme pour m'aider. Je sens ses muscles bouger à chaque mouvement. Je sursaute et j'ai beaucoup de mal à progresser, mais je ne suis pas assez folle pour le repousser.
C'est avec soulagement que je me hisse hors de la piscine. Riccardo en profite pour m'envoyer la fumée de sa cigarette au visage avant de se lever.
- La douche a été revigorante ? Je le fusille du regard, on se fait face et même si j'ai très peur, je n'ai pas oublié mes projets de fuite. Je lui envoie un coup de pied à l'entrejambe. Riccardo expire un souffle et sa cigarette s'echappe de ses lèvres. Il pose une main là où je l'ai frappé, mais il me retient du mouvement rapide quand j'essaie de m'enfuir. Je me retrouve le dos plaqué contre son torse, sa main serrant douloureusement mon poignet.
- Tu es bête à ce point ? Tu ne ferras pas un pas que Medusa te transformera en charpie. Je hoquette, je n'avais pas pensé au léopard. Mon cœur se serre, malgré la douleur que je lui ai causée, il m'a retenue pour me...protéger ?
- J'avoue que ça pourrait être un spectacle intéressant, mais je préférerais te transformer en passoire moi-même.
Fausse alerte, il ne veut absolument pas me protéger. Finalement, j'ai bien fait de le frapper. Il me lâche et je tangue avant de me retourner. Ses yeux sombres parcourent mon corps, la robe en coton mouillé ne laisse aucune place à l'imagination. Je croise les bras sur la poitrine. Riccardo sourit, il allume une nouvelle cigarette.
- Je suis curieux de savoir où tu comptes aller. Tu es consciente qu'on est en Sicile et que tu n'as pas un sou.
- Sortir, trouver de l'aide, j'irai trouver l'immigration s'il le faut si je n'ai pas de papier ils vont forcément m'expulser.
Il hoche la tête une fois, deux fois avant de sourire.
- Je suis la seule personne dont tu as besoin. Je soupire avec agacement.
- Les motivations de Adrian Leblanc étaient claires, j'ai tué son fils et il voulait me faire payer. Mais toi, qu'est-ce que tu me veux ? À quoi ça rime tout ça ? Est-ce parce que je t'ai versé du champagne, je ne comprends pas.
- Ah, le bon vieux temps. Je dois te remercier pour cette soirée. J'étais de très mauvaise humeur jusqu'à cet incident, mais vu la façon dont tu as frotté ma bite, je comprends pourquoi ton copain a préféré ta sœur.
Mes iris se rétractent, je comble la distance qui nous sépare et lui flanque une gifle monumentale.
- Salaud. Je siffle, sa tête penchée sur le côté et aussitôt je regrette mon geste. Il sourit très lentement en me regardant. Soudainement, il est devant moi, il saisit la main qui l'a frappé et la regarde attentivement, de manière presque rêveuse.
- La dernière fois qu'une femme m'a frappé, je l'ai forcée à avaler le membre sectionné de son fils. Je me rends compte qu'il tremble comme si ce souvenir ravivait en lui des flammes d'excitation. Il ferme les yeux sans me lâcher la main et commence à parler.
- Il était mort depuis trois jours, je ne te parle pas de l'odeur qui s'en degageait. Elle s'est mise à pleurer et à me hurler dessus sans savoir que le pire était à venir...
Son expression me glace le sang, une pure béatitude, son visage d'ange contrastant avec ses paroles horribles. Je ne sais pas pourquoi mais au fond de moi, je sais que ce ne sont pas des mots dont le seul but est de m'effrayer. Non, j'ai l'impression qu'il ne me parle même pas. Il ouvre des yeux luisants d'une excitation malsaine avant de me relâcher. Son attitude change, il me sourit de manière amicale et ses yeux retrouvent leur lueur normale.
C'est quoi ce délire ?
- Ne recommence plus jamais ça, petite serveuse, c'est un conseil d'ami. Pedro va te raccompagner à ta chambre, nous parlerons de ton père plus tard.
Pedro se manifeste derrière lui. Il me demande de le suivre et étrangement, je ne le fais pas prier.
Quelque chose dans l'attitude de Riccardo, ou plutôt dans son changement d'attitude, m'a glacé le sang.
- Je t'ai déjà conseillé de ne pas l'énerver.
- C'était quoi ça ? Il hausse une épaule avec un faible sourire.
- Juste Riccardo dans toute sa splendeur. Giacomo m'a dit de te prévenir qu'il viendra te voir.Le frère aîné de Riccardo, il m'a paru beaucoup plus sympathique que ces derniers, mais j'évite de me fier aux apparences.
- Pourquoi ?
- Pour s'assurer que Riccardo ne t'a pas donné à manger à Médusa et Persé.
Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top