Chapitre 52: La dernière tentative
J'ai lu un nombre incalculable de thrillers, c'est pour ça que j'atteste que Donato Carrisi est le meilleur. Le Chuchoteur, quelle claque ! Cette histoire ne me laisse même pas le temps de respirer, elle est addictive, palpitante, et je ne sais jamais à quoi m'attendre, un peu comme mon histoire avec Riccardo.
Comme je le lui ai demandé, Luca m'a conduite chez lui.
J'ai eu la surprise de ma vie en pénétrant dans ma chambre, celle au mur vert, en me rendant compte que Rebecca était tranquillement endormie dans les draps. Un sentiment de jalousie incontrôlable m'a saisie, j'avais une folle envie de la tirer par les cheveux et de la foutre dehors, mais j'ai réussi à réfréner mon impulsivité. Ça aurait été stupide.
Tara m'a confié que ses parents étant absents, Riccardo la garde ici le temps qu'ils reviennent.
Savoir Rebecca sous le même toit que Riccardo ne me rassure que moyennement. Elle a appris depuis si longtemps à le détester que j'ai peur qu'elle lui fasse du mal.
Ou qu'elle réapprenne à l'aimer. Ou pire, qu'il l'aime ! Oui, je suis devenue une boule de nerfs qui pense constamment à ce genre de choses.
Je suis installée dans le fauteuil en cuir de sa chambre, près de la baie vitrée, mon pied jouant avec la fourrure de Persée, couché sur la moquette.
Je vérifie mon téléphone pour voir si Cass m'a répondu. Aux dernières nouvelles, les fiançailles de Gia ont encore été repoussées. Je me demande c'est quoi leur problème. Peut-être que Giacomo refuse de se marier, il s'est enfin rendu compte que Cass mérite qu'on se batte pour elle.
Un clic métallique provenant de l'ascenseur me prévient qu'il est rentré. Tout mon corps est en alerte, mais je ne bouge pas d'un iota.
Il s'avance dans l'immense pièce et lâche un juron dès qu'il se rend compte de ma présence.
Je cache mon sourire de satisfaction derrière mon livre avant de plisser les yeux dans sa direction.
– Tu en as mis du temps. Il ne répond pas, comme je m'y attendais. À la place, il siffle et Persée bondit comme un beau diable et se dirige vers la sortie.
– Mince, tu viens de chasser le seul être chaleureux de cette pièce.
Il passe à côté de moi en marmonnant avant d'aller s'enfermer dans la salle de bain. Et quelques secondes plus tard, j'entends l'eau couler.
J'ai une oppression dans la poitrine à chaque fois qu'il agit comme si j'étais invisible, alors que je suis incapable de faire comme si sa présence ne signifiait rien. Même si je le voulais, les cellules de mon corps, qui hurlent comme le vent lors d'un orage, me trahissent.
Je me sens pathétique, je n'ai jamais été le genre de personne à courir après quelqu'un. Mais je ne veux pas abandonner, lui ne l'a jamais fait. Je veux me donner une dernière chance de lui faire comprendre que j'ai les épaules assez larges pour supporter son handicap mental. Oui, ça me fait peur que les événements du village des pêcheurs recommencent, mais j'ai encore plus peur de baisser les bras.
Je tente une dernière fois ce soir, et si ça ne marche pas, alors je laisse tomber.
J'essaie de me concentrer, mais ni mon livre ni mon cœur meurtri par son indifférence ne m'empêchent de penser au corps massif tout nu sous la douche. Les pointes de mes seins sont si dures qu'elles me font mal. Je tire sur ma chemise d'emprunt pour éviter que le tissu ne frotte contre ma poitrine.
Concentre-toi, Gayle, tu es ici pour parler !
Je ferme les yeux quand une bouffée de chaleur me traverse. Je frémis, le souffle court, mes orteils se recroquevillent. Mince, ce n'est pas gagné...
Riccardo sort de la salle de bain, je me tends comme un arc en le sentant derrière moi. Il reste immobile durant au moins une minute avant de disparaître dans le dressing en claquant la porte.
Il a une façon bien à lui de me faire comprendre que ma présence est le poison de son existence, sans ouvrir la bouche.
Je grimace, son attitude d'ours mal léché me tape sur le système. Il sort avec un jogging et un tee-shirt, se frottant la tête avec une serviette.
– Brise les murs pendant que tu y es ! je marmonne quand il claque à nouveau la porte.
– Je devrais commencer à acheter mes vêtements en paire ? Je souris derrière mon livre. Il fait allusion à mon habitude de toujours lui piquer ses tee-shirts.
– Oui, ça serait gentil.
– Gayle, qu'est-ce que tu fais là, à quoi tu joues ?
Je me lève en tirant sur le bas de mon vêtement, arrivée en face de lui, je serre le livre contre moi comme un bouclier.
– Où voudrais-tu que je sois ? Riccardo ne bouge pas durant un long moment avant de tendre le bras dans ma direction.
Il glisse ses doigts dans mes cheveux, les empoignant. Il rejette ma tête en arrière pour me confronter à son expression dure, ses lèvres forment une ligne mince de contrariété, un muscle tressaute sur sa mâchoire. Il est constamment en colère ces derniers temps. Sa légèreté me manque, mais je ne peux pas lui en vouloir d'être dans cet état, la situation quoi que j'en pense. Pourtant, quand j'ouvre la bouche, c'est pour dire quelque chose qui n'a absolument aucun rapport avec ce qu'on vit. Enfin, si, un peu.
– Qu'est-ce qu'elle fait là ?
– C'est sans importance, je veux que tu parte.
– Alors elle, elle peut rester mais pas moi ? C'était donc vrai, tu m'as juste utilisée pour retrouver ta femme ?
Dis non, je t'en pris. Pour une fois, dis-moi ce que je veux entendre.
– Bordel tu mélange tout, écoute rentre chez toi, je te libère de ta dette, fou moi la paix merde !
Je secoue la tête avec vigueur, je m'en irai seulement après lui avoir dit ce que j'ai sur le cœur, mes ses mots me brise le cœur à un point où je sens mon regard devenir humide de larme.
– Non, tu peux partir si tu ne veux pas me voir ici.
– Arrête de jouer à ce petit jeu avec moi !
Sa voix rauque résonne dans toute la pièce, ne comprend-il pas qu'à ce stade je ne joue pas contre lui, mais contre tous les monstres invisibles qui se placent entre lui et moi ? Je suis autant décidée à ne pas abandonner la partie que lui à ne pas céder. Toute sa vie, Riccardo a connu la violence. Il est né dans un monde imprégné de sang, de sueur, de peur et de mort. La violence est fermement enroulée autour de son corps, comme les tentacules de la pieuvre qu'il a tatouée au cou. Je ne me fais aucune illusion, je ne pourrai jamais le sortir de ce monde. Ça, c'est à lui de le faire s'il le veut, et je le soutiendrai. J'estime que c'est ça mon rôle. Mais il y a une chose que je peux faire de toutes mes forces : l'aimer, être la part de normalité dans son monde.
C'est épuisant. D'autant plus que sa carapace me donne constamment l'impression qu'il ne me supporte pas. Mais comme l'a affirmé Dante plus tôt, on se raccroche tous à un infime espoir : Arya, à la cellule de voir Luca tout abandonner pour elle, et moi, à celle qu'il accepte de me donner une chance d'embrasser ses monstres.
Je me redresse avec un doux sourire qui le déstabilise, je le vois reculer comme s'il avait reçu un uppercut. Je saisis son poignet et l'entraîne de force avec moi près du canapé.
Je le pousse dessus avant de prendre place sur ses jambes, dos à lui, et je pose ma tête sur son épaule.
– Putain Gayle. Sa voix est moins sur que tout à l'heure, il est confu.
– Tu es mon prisonnier maintenant, tu ne pourras plus t'enfuir. Le temps d'une soirée, on peut éviter de se disputer, je t'avoue que je suis épuisée. Je veux juste qu'on parle de ce qui s'est passé.
– Tu veux jouer à ça après ce qui s'est passé ? À cette illusion de normalité ? Comment peux-tu ne pas m'en vouloir ? Je me tourne assez pour passer mes jambes à travers l'accoudoir, la main de Riccardo se contracte sur ma taille déclenchant une avalanche de sensation dans mon ventre.
– Oh, mais je t'en veux. Mais pas pour les raisons que tu sembles tellement espérer. Je t'en veux de ne m'avoir rien dit, je t'en veux de fuir plutôt que de parler de tes problèmes. Et je t'en veux de ne pas m'avoir fait confiance. Ça a dû être tellement dur pour toi d'essayer de me le cacher, je comprends tout maintenant et je suis vraiment désolée pour tout ce que tu as vécu. Je veux juste que tu saches que je serai là pour toi. Je veux juste que tu me donnes une chance. C'est trop te demander ?
Il se lève tellement vite que je ne remarque rien. Il y a une seconde, j'étais installée sur ses jambes, et maintenant, il est debout devant moi.
– Oui, c'est trop me demander, Gayle. Tu l'as dit, mes putains de problèmes, mes putains de ténèbres, en quoi ça te concerne ?
Il prend une inspiration qui fait trembler sa poitrine massive avant de dire :
– C'est fou d'être aussi bornée.
– Là, tu te comportes comme un gamin capricieux. Tu peux garder ton venin pour toi, tu ne réussiras pas à me faire partir avec des mots blessants.
– Vous allez partir, non, vous devez partir. Je tressaille en faisant un pas dans sa direction, mais il recule en fermant les yeux, comme si ma présence lui était insupportable.
– J'ai tout préparé. Ta famille et toi, vous irez dans un autre pays, le plus loin possible.
J'expire entre mes dents, la colère m'aveugle, mes yeux se brouillent un instant, tout autour de moi se fragmente en deux, je sens une perle de transpiration glisser entre mes seins. J'avale ma lèvre pour l'empêcher de trembler.
– Tu te moques de moi ? Tu n'as aucun droit de prendre une telle décision pour moi et ma famille ! Mais pour qui tu me prends ? Un ballon que tu peux shooter comme bon te semble ? Tu veux vraiment que je parte après tout ce que tu m'as confié sur la falaise ?
– J'étais aussi saoul que toi, bordel, je ne le pensais pas. Je ne serai pas ton foutu héros sorti d'un livre, ou toutes les conneries que tu mires. Putain, tu as quel âge pour penser qu'un homme, particulièrement moi, peut te faire vivre un conte de fées ?
Je ravale ma bile. En quelques mots, il a piétiné le peu de rêve que j'ai eu la bêtise de conserver dans ce monde qui a transformé toutes mes illusions de petite fille en cauchemar.
Il vient se camper devant moi, j'ai un mouvement de recul instinctif, dû à la colère, mais Riccardo l'interprète comme de la peur. Il baisse brièvement les yeux sur mes mains et je vois, durant un bref instant, son masque de froideur se fragmenter. Il me regardait enfin, avec douleur et dégoût, mais pas pour moi, pour lui-même. Une larme roule sur ma joue, il baisse les yeux, incapable de soutenir mon regard.
– Je te déteste. Je souffle.
– Tu ne peux pas rester ici, je ne peux rien t'apporter de bon. Tu vas souffrir ou, pire, tu vas mourir. Je n'ai aucun contrôle sur ça. Je t'en prie, ne me pousse pas à vivre avec ça sur la conscience.
– Tu n'as pas le droit, Riccardo. Tu ne peux pas entrer dans ma vie, tout bouleverser, et vouloir tout changer en un claquement de doigts. Mes sentiments n'ont donc aucune importance ? Son masque remis en place, il coule sur moi un regard froid avant de sourire.
– Tout est prêt. Vous partez dans deux jours. Une maison a été mise à votre disposition, et je m'assurerai que ta sœur et son larbin trouvent du travail. Quant à toi, tu pourras réaliser tes rêves, avoir une vie normale.
– Arrête ! Comme toujours, tu ne me laisses jamais la liberté de choisir.
– Très bien, fais ton choix.
– Je veux rester.
– Un choix stupide. Adrian Leblanc ne tardera pas à te trouver, et mon père ne va pas risquer un allié pour toi. Il y a aussi Tommasa, sans oublier... tu n'es pas en sécurité.
– Sans oublier quoi ?
– Moi.
Il y a un long silence, on ne se quitte pas des yeux. Je suis partagée entre l'envie de me jeter dans ses bras et celle de le griffer. Mince, je suis beaucoup trop impulsive et violente, mais il fait remonter en moi ce qu'il y a de pire.
– J'aimerais qu'on parle de ce qui s'est passé la dernière fois. Comme des gens normaux. Qu'on règle le problème. Fuir n'est pas une solution, repousser les autres avec de la froideur non plus. Tu te fais du mal !
– C'est un problème que tu ne peux pas régler, mais tu peux partir et ainsi rester loin de ce problème, putain !
Je me masse la tempe, sentant la migraine me submerger. Comblant la distance qui nous sépare, je pose les mains sur ses joues pour qu'il me regarde.
– Tu es un personnage insupportable, vraiment. Mais je refuse de partir, je ne te quitterai pas. La psychose n'est pas aussi effrayante, la science a fait des progrès. Tu pourrais voir un médecin, accepter de te faire aider.
Il me repousse encore une fois. Comment ça peut être aussi facile pour lui ?
?
– Et pendant ce temps, tu vas me tenir la main et m'accompagner à mes séances chez le psy comme une bonne petite amie aimante ? Tu veux vraiment risquer ta vie parce que tu crois être amoureuse de moi ? Il secoue la tête avant de sourire, comme s'il n'en revenait pas que je sois aussi stupide.
– Ma décision est déjà prise, Gayle. Tu pars. Cette nuit sur la falaise, je t'ai dit que je ne serai jamais ton héros. Ça, je le pensais.
– Mais le reste non ? Je n'ai jamais rêvé au héros ! Je hurle presque, de plus en plus frustré.
– Non, tu te mens à toi-même. Chaque personne rêve de trouver cet être qui lui apportera un semblant de paix. Je ne serai jamais cette personne pour toi, tu seras toujours en danger, que ce soit à cause des ennemis que je me suis faits ou à cause des monstres qui résident dans ma tête. Tu pourras me faire confiance, mais je ne pourrai jamais me faire confiance. Je te ferai toujours mal, consciemment ou inconsciemment. Peut-être même que je te ferai plus de mal en pleine conscience. Je n'ai aucune envie de me réveiller un jour avec ton cadavre à côté de moi et de me rendre compte que c'est moi qui t'ai tuée.
– Je prends le risque, je refuse de t'abandonner pour ce que tu n'as pas choisi. Tu ne comprends pas que ça m'est égal !
– Putain, tu es un vrai boulet. Je tressaille, et je recule, les yeux écarquillés. Il a presque hurlé, lui qui est toujours maître de lui.
– Que les choses soient claires, je me moque que tu sois assez stupide pour être tombée amoureuse de moi, je ne t'aime pas et je ne t'aimerai jamais. Je n'ai qu'un seul amour : la Cosa Nostra.
– Tu es un manipulateur, tu as toujours fonctionné comme ça, pas vrai ? Tu pousses les gens à te détester, soit par la violence de tes mots, soit par la violence de tes actes. Mais tu veux savoir le plus blessant ? Ce n'est pas ce que tu m'as fait en étant inconscient, non, c'est ce que tu fais là, maintenant, alors que je suis prête...
– Prête à quoi ? Il siffle entre ses dents, les épaules tremblantes de rage contenue. Prête à risquer ta vie ? Tu veux vraiment jouer à ça ? Aimer un homme comme moi, c'est comme faire un pari avec le diable. Tu n'en sortiras jamais vainqueur. Je ne veux pas prendre ce risque.
– J'ai déjà fait ce pari.
Il se met à rire, un rire sec qui me fait me sentir toute petite, comme une enfant, humiliée.
– C'est incroyable comme les filles peuvent être facilement manipulables. Je t'accorde un peu d'attention et tu te mets à imaginer un avenir radieux, avide de mon attention comme un foutu chat avide de caresses.
Il fait un pas dans ma direction.
– Seras-tu toujours disposée à te battre avec moi contre mes démons quand tu sauras que je t'ai toujours menti ?
– Qu'est-ce que tu racontes encore ? je questionne avec un tremblement dans la voix. Il sort une cigarette de sa poche et l'allume avant d'aller s'installer sur le fauteuil, les jambes écartées, une main sur l'accoudoir, dans une posture dominante.
– Tu te rappelles ce soir au restaurant ? La nuit où Adrian Junior t'a suivie ? Évidemment que tu t'en souviens. Mais ce que tu ignores, c'est que j'étais là. Je l'avais suivi pour lui faire la peau. C'est d'ailleurs ce que j'ai fait.
– Non, tu mens, encore ! C'est moi qui l'ai tué !
– Tu l'as blessé, c'est tout. C'est moi qui l'ai achevé. Je suis allé jeter son corps plus loin et j'ai nettoyé le peu de sang qui se trouvait là. Il se lève en s'étirant comme un chat.
– Tu mens.
– Pour une fois, je te raconte la vérité, putain, réfléchis un peu. Ta lame l'a à peine effleuré, et comment expliques-tu que son corps ait disparu aussi vite ?
Un froid glacial s'empare de moi, mes jambes et mes bras se couvrent de chair de poule. Je me rappelle brusquement le jour où la pieuvre m'avait fait enlever pour me poser des questions. Riccardo était dans la réserve des domestiques et il a dit : les flics que tu as appelés ne t'ont servi à rien. Quand je lui ai posé plus de questions, il s'est dérobé et je suis passée à autre chose, mais maintenant tout prend son sens. Il fallait que j'aie appelé des flics parce qu'il était là !
Non, ce n'est pas possible. C'est trop tiré par les cheveux. Il ment. Pourtant, une partie de mon esprit essaie de me donner des claques pour que je me réveille. Il me dit la vérité, mon sentiment de soulagement de ne pas avoir le sang d'un homme sur les mains est remplacé par une prise de conscience qui m'horrifie.
J'ai vécu tous ces malheurs pour rien ?
Mes jambes tremblent tellement que je me laisse tomber sur la moquette. Je me sens mal. Comme à chaque fois que je suis dans cet état, j'ai envie de pleurer, mais je n'y arrive pas. Je me sens vide, un monstre de tristesse grandit dans mon ventre, il se déploie en s'accrochant à chaque cellule de mon être.
C'est d'une voix blanche que je déclare :
– Si je comprends bien, j'ai été kidnappée pour rien, torturée pour rien, violée pour rien, ma mère a été violée, décapitée pour rien, c'est toi le coupable. Nous avons payé pour ton acte. Pourquoi ?
– Tu étais la couverture parfaite ; j'avais placé un micro dans sa voiture et je l'ai entendu dire à ce Jawad qu'il avait trouvé une fille pour s'amuser. J'ai vite deviné que c'était toi. Au restaurant, il ne te quittait pas des yeux...
Je me lève sans même m'en rendre compte et me dirige vers l'ascenseur. J'ai besoin de sortir, j'étouffe dans cette pièce.
– Une couverture parfaite ? C'est tout ce que je représente pour toi, une couverture parfaite ? Sur la falaise, tu as dit que ma vie ne serait jamais un jeu pour toi.
Il hausse une épaule avec désinvolture. Riccardo me regarde à nouveau comme une idiote qui accorde de l'importance à des choses qui sont pour lui anodines.
– Les conneries qu'un mec peut dire quand il veut coucher avec une fille. Ça crépite dans ta tête, pas vrai ? Il s'avance encore, posant ses mains sur mes épaules, me forçant à le regarder. Ça bouillonne là-dedans, tes neurones vont exploser à cause de moi. Tu te demandes quoi croire, à laquelle de mes personnalités t'accrocher. Les choses sont simples, petite serveuse, crois au monstre qui n'a pas hésité à poignarder sa tante, parce que c'est le même qui t'a utilisée pour avoir Adrian et toujours le même qui a bousillé tes mains. J'allais te tuer, nous le savons tous les deux. Sans l'intervention de Luca, tu serais morte, et moi, j'aurai repris le cours de mon existence comme si de rien n'était. C'est comme ça que je fonctionne.
– Retire tes mains. Je marmonne d'une voix monocorde. Je le regarde mais je ne le vois pas. Il y a comme une vaste fissure invisible dans ma poitrine, une douleur sourde et profonde, et je suis effrayée par l'idée qu'elle ne s'atténue jamais. C'est comme si un poids s'installait dans ma poitrine, rendant chacune de mes respirations plus difficile. Les émotions se mêlent : tristesse, colère, regret, formant un tourbillon de souvenirs et de moments heureux qui semblent désormais lointains et inaccessibles. Non, ils sont juste effacés par les mauvais souvenirs. Je n'arrive à penser maintenant qu'à tout ce que j'ai pu vivre de pire. Avec lui comme avec n'importe qui d'autre.
Alors comme ça, tu es vierge, quel merveilleux cadeau. Ça ne ramènera pas mon fils, mais j'apprécie.
Quand je remarque que Riccardo ne m'a pas lâchée, je recule. Je le hais tellement en cet instant que même ses mains sur moi me donnent envie de vomir.
Tant que j'avais la certitude d'avoir tué son fils, je me disais que je méritais ce qui m'était arrivé. Mais maintenant, je suis juste la victime de la perfidie d'Adrian Jr., et celle du plan de Riccardo qui m'a fait porter le chapeau.
Je titube jusqu'à l'ascenseur, un sourire placardé sur le visage. Je crois que je suis en train de perdre la tête, mais j'ai envie de me rouler en boule et de rire jusqu'à la fin des temps. Je mords ma lèvre jusqu'à sentir le goût métallique m'emplir la bouche.
Je sens une main se poser sur mon épaule, je pivote sur mes jambes
Je sens une main se poser sur mon épaule, je pivote sur mes jambes d'un mouvement souple, ma propre main se referme sur le couteau coincé dans ma jarretière en cuir, et je l'enfonce dans sa poitrine.
Riccardo devient blanc, il écarquille les yeux et les baisse sur la lame qui transperce son pectoral gauche. Il titube en arrière.
– Ne me touche plus jamais.
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