Chapitre 40: Ce poignant sentiment de rejet
– Tu en as mis du temps, déclare Dante quand je pénètre dans sa cabine quelques minutes plus tard.
Je suis dans un état second, comme un drogué après une piqûre d'héroïne. J'ai pris une douche rapide car partout sur moi, il y avait l'odeur de Riccardo et du sexe. J'ai enfilé un ensemble de pull et jogging gris. Mais malgré l'épaisseur des vêtements, j'ai extrêmement froid.
Je me sens comblée, mais en même temps, je m'en veux d'avoir ressenti du plaisir parce que j'ai l'impression qu'il m'a utilisée, puis abandonnée, comme si je ne valais absolument rien à ses yeux.
C'est complètement ridicule, tu as eu un orgasme monumental ; normalement, c'est la seule chose qui devrait compter.
Je chasse ces pensées de ma tête. Il faut que j'arrête de penser à ce qui s'est passé.
Je fais un faible sourire à Dante avant de me laisser tomber sur son lit. Il me surprend en prenant brusquement mon visage en coupe.
– Toi, tu as pleuré !
– Non, pas du tout. J'ai dû prendre un bain.
Merde, pourquoi je lui dis que j'ai pris un bain ? Il faut que j'arrête de parler sans réfléchir.
Il plisse des yeux, suspicieux. Le silence qui s'installe entre nous est lourd de sens, gênant à un point que je regrette de ne plus avoir mes cheveux longs pour me cacher derrière eux.
C'était un tic nerveux ; il m'arrive parfois d'essayer de le faire comme par réflexe, à l'instar d'un amputé qui sent la présence de ses membres fantômes.
Dante finit par détourner le regard. Il a envie de poser des questions, mais il respecte mon silence et je lui en suis reconnaissante. Le beau blanc se concentre sur son ordinateur.
– Pitié, dis-moi que ce n'est pas 9 semaines ½ ?
Il pouffe, avant de réajuster l'appareil pour que l'écran soit entre nous et lance la vidéo.
– Je ne regarderai jamais ce genre de film avec une fille si je ne suis pas sûr de conclure. Je lève les yeux au ciel, avant de pousser un cri de joie quand je reconnais le Prince de New York.
– Oh, j'adore Eddie Murphy, m'exclamé-je en sentant ma joie revenir.
– Tu l'as déjà regardé ? Il questionne, surpris.
– Évidemment, c'est un classique !
– Et moi qui espérais te surprendre.
Non, merci, j'ai eu assez de surprises pour aujourd'hui.
– C'est parfait !
Dante pose un énorme paquet de chips entre nous et on commence à regarder le film en silence. Ça fait bizarre de me dire que je suis sur une énorme machine flottante au milieu de l'océan. Après avoir regardé Titanic, j'avais juré que jamais je ne prendrais un bateau ; pourtant, aussi étrange que ça puisse paraître, je ne vois pas de grande différence, les avions, c'est plus effrayant.
Plus j'essaie de me concentrer sur le film, plus mon esprit s'égare. Ce maudit Riccardo n'arrête pas de se frayer un chemin dans ma tête ; je me demande où il est. Arya doit être dans sa cabine avec Luca. Alors, il est certainement avec Camille. J'ai un pincement au cœur, mais je ne veux pas ressentir ça. D'ailleurs, je ne comprends même pas c'est quoi mon problème. Pourquoi cette impression d'avoir été utilisée n'arrête pas de persister ? Il ne m'a pas touchée parce qu'il en avait envie. Non, il voulait se venger de moi à cause de toutes les insinuations d'Arya.
Je pense que c'était une sorte de défi qu'il s'est lancé contre lui-même pour me montrer qui contrôle. Je m'enfonce dans l'oreiller ; j'ai encore l'impression de sentir la brûlure des menottes et son corps dur et chaud sur le mien.
J'ai vraiment hâte que ce voyage prenne fin. À chaque fois que je me dis que Riccardo n'est pas une personne aussi difficile que ça, qu'il y a forcément un moyen pour qu'on s'entende, il fait ou dit quelque chose qui balaie mes espoirs comme une rafale de vent qui s'acharne sur un tas de feuilles d'automne.
Dante se met à rire et, sans même savoir pourquoi, je souris avant de me rendre compte que le film est en pause et qu'il m'observe.
– C'était un test pour voir si tu regardais ; tu as lamentablement échoué ! Je soupire, avant d'éclater de rire de bon cœur. Cette fois, il m'a bien eu.
– Tu as raison, j'ai la tête ailleurs.
– Riccardo ? Mon visage s'enflamme. Dante était derrière la porte quand le démon m'a fait jouir ; il a sûrement tout entendu, à moins que, pour une fois, la chance ne soit de mon côté et que les cloisons soient insonorisées.
– Non, ce n'est pas lui. Je peux te poser une question ?
Il se tourne pour me faire face et j'en fais de même en adoptant une position en tailleur.
– Je t'écoute. Il est peut-être un peu trop attentif ; ses yeux bleus profondément ancrés aux miens me déstabilisent, mais je prends une grande inspiration avant de demander.
– Une fille t'a déjà donné un orgasme, genre monumental. Un truc incroyable, puis à la fin, tu as l'impression d'avoir été utilisé, rejeté ? Il arque un sourcil, son expression est médusée, puis il secoue doucement la tête.
– C'est moi qui ai eu un orgasme dans l'histoire ?
– Oui. Mais au fond de toi, tu te sens... Je ne sais pas, pas mal...
– Gayle, aucun mec sain d'esprit ne se sentirait mal après ça ; je m'en voudrais seulement si elle ne prend pas de plaisir, mais...
– Mais quoi ?
– Si tu te sens comme ça, c'est qu'il y a forcément un problème.
– Qu'est-ce que tu racontes, je déclare sous la défensive. Il ne s'agit pas de moi, mais de l'ami de mon amie.
– Je vois... raille Dante. Je me dépêche de remettre le film pour lui signaler que la discussion est terminée, mais après une dizaine de minutes, il reprend la parole.
– Je ne sais pas ce qu'Arya essaie de faire, mais elle devrait arrêter.
– Ah, tu as remarqué ?
– C'est évident, sauf peut-être pour Riccardo. C'était drôle au début de jouer avec sa jalousie, mais là, il est carrément à cran.
– Tu faisais exprès de suivre le jeu d'Arya ? Dante a un rire.
– Évidemment que je le faisais exprès. Riccardo ne s'est jamais attaché à aucune fille. Pour lui, rien n'a jamais d'importance. Alors, on trouvait amusant de le pousser à bout, mais ça va trop loin.
– Il n'est pas jaloux, c'est juste un gros con ! Je lâche entre mes dents serrées avec amertume.
– Oui, ça lui arrive d'être con, mais il tient à toi et je suis sûr qu'il ne sait pas comment le gérer. Riccardo est quelqu'un de spécial. Si je dois le décrire, je dirais que c'est un être de sensations, pas un être de sentiments. Maintenant que ça lui tombe dessus, il ne sait pas comment le gérer.
– Tu parles comme s'il avait 15 ans. Dante a un petit rire.
– On a tous 15 ans quand on tombe amoureux. Il dit en écartant une mèche de cheveux de mon visage avec sa douceur habituelle.
– Je n'arrive pas à croire que tu le défendes alors qu'il t'a jetée par-dessus bord. Ma remarque le fait rire, il hoche une épaule.
– Quand sa mère est partie, la mienne l'a recueillie, nos luttes ont commencé depuis notre plus tendre enfance et ils ne sont pas prêts à s'arrêter, mais il est de ma famille et je donnerai ma vie pour lui et il en fera de même. J'en suis persuadé.
– Je n'arrive pas à le comprendre. J'essaie mais...
– Je ne vais pas te mentir. Ça ne sera pas facile. Il a toujours évolué seul...
La porte choisit cet instant pour s'ouvrir, Dante et moi sursautons comme deux amants pris en faute.
Riccardo se tient devant l'entrée, il analyse la situation comme le chasseur qu'il est habitué à être, ses yeux passant de moi à Dante. On est extrêmement proches, ça peut pousser à confusion. Mais de toute façon, j'en ai rien à faire, il peut penser ce qu'il veut, il a déjà une piètre opinion de moi, pourquoi chercher à lui prouver le contraire ?
Riccardo serre la mâchoire avant de claquer la porte derrière lui.
– Tu devras aller le voir.
– Non, j'ai eu ma dose pour ce soir.
Dante ne fait aucun commentaire et on continue à regarder le film, et cette fois je suis si concentrée que je ris de bon cœur, je suis presque en larmes durant la scène du restaurant.
Vers la fin du film, mes paupières deviennent de plus en plus lourdes et je finis par m'endormir contre l'épaule de Dante.
– Chérie, réveille-toi ! J'ouvre les yeux en sentant une pression sur mon épaule. Mon regard s'éclaire avant de s'agrandir.
Maman est penchée au-dessus de moi avec un sourire. Elle porte une jupe en satin et un haut en velours, j'ai toujours trouvé ce haut complètement moche mais elle l'a trouvé dans une friperie pour trois fois rien et elle l'adorait, la vendeuse lui a surtout fait croire que c'était la collection printemps-automne d'une grande marque alors qu'il vient de Shein. Ses cheveux crépus sont retenus au sommet du crâne et un gloss très brillant est enduit sur ses lèvres.
Maman...
– Viens avec moi. Elle se dirige déjà vers la porte. Je me lève, je jette un dernier coup d'œil à Dante qui dort profondément avant de la suivre. C'est étrange, maman n'a pas eu besoin d'ouvrir la porte pour sortir, j'ai toujours su que ma maman avait des pouvoirs cachés, je l'ai su le jour où j'ai cherché pendant plus d'une heure mes chaussettes et qu'il lui a fallu que quelques secondes pour les trouver.
Elle me fait un sourire avant de traverser le couloir, je me dépêche de la suivre, je veux être à côté d'elle, sentir son odeur, je veux lui parler, j'ai tellement de choses à lui dire, elle sera folle de joie si elle apprend que papa a un nouveau cœur. Elle descend les marches et je fais de même, nous traversons le coin salon, passons à côté de la cuisine avant de sortir sur le pont.
Je tends la main pour essayer d'attraper sa jupe comme quand j'étais petite fille et que je la suivais au centre commercial, il lui arrivait de me perdre de vue, mais au final elle me trouvait toujours. Ma tentative est un échec. Sa jupe m'échappe, je suis tétanisée, à ma deuxième tentative, mes doigts passent à travers le tissu. Je ne comprends pas ce qui se passe. Pourquoi, je n'arrive pas à la toucher ?
L'air iodé me fouette le visage, j'ai soudain très froid et sur le pont, je prends conscience que je suis sur un mastodonte de mer qui bouge. Comment a-t-elle réussi à venir sur le bateau ? Nous sommes bien loin du littoral.
– Chérie, viens avec moi. répète maman pour la troisième fois, elle passe près des banquettes négligemment posées sur le pont, elle a un froncement de sourcils et se penche pour arranger les coussins avant de se diriger vers l'avant du yacht. Je fais tomber les coussins avec un sourire pour l'énerver, elle va se plaindre et dire que je suis bordélique. Comme toujours, papa va prendre ma défense et m'acheter des chips, ceux de Picard, mes préférés. Maman va secouer la tête arguant qu'il me gâte beaucoup trop et Emma va se mettre à pleurer parce qu'elle n'a pas reçu de chips...
J'arrive enfin à sa hauteur, son parfum m'envahit et des larmes me montent aux yeux, j'aimerais lui dire à quel point elle m'a manqué mais je n'arrive pas à parler.
Elle s'agrippe à la barre de fer avec un sourire.
– Je dois y aller, le temps presse. Tu veux venir ? Je fronce les sourcils, mais oui. J'irai où elle ira, mais j'aimerais qu'elle me donne plus d'informations. D'ailleurs, où était-elle durant tout ce temps ? Je me suis inquiété, papa aussi s'est inquiété. Elle doit revenir à la maison, sinon il va encore nous faire son bœuf bourguignon sans sel. Il faut que je lui parle de Riccardo aussi, j'ai tellement de choses à dire sur lui.
Maman pose un pied sur la rambarde de fer puis le deuxième, elle se hisse et donne son visage au vent.
– Je dois y aller. Viens avec moi, tu seras plus heureuse avec moi ! Puis elle saute, un cri franchit enfin mes lèvres, je me précipite vers la rambarde pour regarder dans l'océan, elle était là et maintenant elle a disparu, juste comme ça ?
Mais oui, je dois la suivre. Je monte à mon tour, contrairement à maman je tremble et je glisse plusieurs fois, je suis surtout troublée car quelqu'un appelle mon nom. Sans importance, maman m'a demandé de la rejoindre, je me laisse tomber en avant.
Je me réveille en poussant un hurlement quand l'eau froide me mord la peau et s'introduit dans ma bouche, elle est salée, elle me pique les yeux.
De l'eau ?
Une très forte pression me tire vers le bas, partout autour de moi c'est les ténèbres, je ne comprends rien. Mes mouvements sont saccadés par la peur qui me tord le ventre, j'essaie de hurler mais c'est un échec.
Ma peur grandit quand je me rends compte que je n'arrive pas à respirer.
Mes muscles sont engourdis et ma bouche remplie d'eau que je n'arrive même pas à cracher, j'entends un grand bruit puis la seconde d'après, quelque chose s'enroule autour de moi. Paniquée, j'essaie de me dégager, je donne des coups de pied, mais je ne rencontre qu'un grand vide.
– Calme-toi, c'est moi. J'arrive enfin à ouvrir les yeux, je suis extraite des ténèbres qui m'entouraient. Je crache toute l'eau que j'avais accumulée et je me mets à tousser de manière incontrôlable.
Je sens une légère tape sur mon dos et quelqu'un m'encourage à me laisser aller, l'eau est froide et le courant beaucoup trop fort, je n'arrive à avoir aucun contrôle sur mes jambes, heureusement que la personne me tient fermement.
– Riccardo.
– Oui, c'est moi, calme-toi, je ne vais pas te lâcher, putain je ne te lâcherai jamais. Calme-toi, je te tiens.
Il me masse le dos comme pour m'apaiser. Je hoche la tête, forçant mon corps à arrêter de se débattre.
– Qu'est-ce qui se passe ? J'ai fini par demander. Mais la réponse me tombe dessus comme une claque, putain, qu'est-ce que je fous au milieu de l'océan ? Riccardo fronce les sourcils comme s'il se posait exactement la même question.
– Tu es tombé, viens, il faut nager, il y a des requins par ici. Je me crispe et, comme si j'avais reçu un shoot d'adrénaline, je me mets à nager en direction des marches à l'arrière du bateau. Riccardo m'aide à me hisser avant de monter à son tour, ce n'est qu'une fois sur le pont que je me laisse tomber complètement lessivée et troublée. Je ne me souviens de rien. Comment me suis-je retrouvée dans l'eau ? J'ai toujours eu ces tendances suicidaires, mais... on se souvient de ce genre de chose.
– Gayle, ça va ? Riccardo se laisse tomber à côté de moi, hésitant. Non, il n'est pas hésitant, là, il me zieute comme si j'étais une débile mentale avec qui il faut y aller avec des pincettes. Il pose une main sur mon épaule avant de m'attirer dans ses bras. Surprise par son acte et le soupir presque désespéré qui a franchi ses lèvres, je me crispe avant de me laisser aller contre son torse nu. Mes bras s'enroulent autour de ses épaules, il enfouit son visage dans mes cheveux mouillés.
– Comment as-tu su, je veux dire... Il me soulève d'un mouvement souple et me pose sur ses jambes, je me mets à cheval sur lui. Peu importe à quel point il est difficile à comprendre. Peu importe à quel point son comportement est problématique, je me sens toujours en sécurité quand il me tient comme ça.
– Je n'arrivais pas à dormir, je t'ai vue passer... Ne fais plus jamais ça, je t'interdis de mourir !
– Tu me l'interdis ? Pour qui tu te prends ? Je fais ce que je veux !
– Ferme-la ! Il ordonne d'une voix forte en tirant sur mes cheveux pour que je croise son regard. Mon courage fend comme neige au soleil. Je déglutis avant de dire :
– Je n'ai pas sauté. Enfin si, mais je ne comprends pas.
– Je crois que tu as fait une crise de somnambulisme, j'étais dans la cuisine quand tu es passée, mais je pensais que tu avais besoin d'air.
Ses cheveux sombres lui collent à la tête autant que les miens. Je résiste à l'envie de les écarter de son front.
– Ça ne m'est jamais arrivé...
Nous sommes alertées par des pas sur le pont. Je me tourne alors que Dante s'avance, il analyse la situation avant que ses yeux ne se mettent à briller de colère.
– Qu'est-ce que tu lui as fait ? Riccardo se lève et je fais de même, les jambes légèrement tremblantes. Il me tient par le bras pour me stabiliser avant de s'éloigner en direction de son cousin.
Bon sang, ça ne va pas recommencer.
– Je suis tombée dans l'eau ce...
– Tu l'as poussée, tu as encore eu une crise ?
– Fais attention à ce que tu dis, je ne lui ferai jamais de mal ! Les deux hommes se font face, les poings serrés. Pitié, ils ne vont pas recommencer. Deux minutes, pourquoi Dante parle de crise ?
– Tu lui fais constamment du mal. Elle a été triste toute la soirée et je suis sûr que c'est à cause de toi. Riccardo me regarde brièvement, son regard est indéchirable.
– Dante, je suis tombée toute seule !
– Mais arrête de le défendre, je suis persuadé que c'est lui.
Seigneur...
– Ça suffit, je suis vraiment tombée toute seule, Riccardo m'a remontée...
Dante me regarde enfin avant de s'avancer, mais c'est sans compter Riccardo qui s'interpose. Il retient son cousin par le poignet et le repousse avant de lui envoyer son poing sur la figure.
– Et c'est reparti pour un tour, marmonne une voix que je reconnais comme celle de Luca. Il est amusé, ce qui m'agace encore plus, cette situation est tout sauf drôle.
– Ne t'avise pas de la toucher !
– Bordel, arrêtez ! Mais aucun d'eux ne m'écoute, ils se mettent à se rouer de coups, et en voulant m'interposer, je me prends un coup de poing de Riccardo dans le ventre. J'expire un souffle, il a de la force à revendre, ce connard !
– Merde, Gayle.
– Tu vois, tu es un danger pour elle.
– Merde, ça suffit. Vous êtes ridicules. Dante, peu importe ce qui te fait penser ça, il ne m'a pas poussée, je suis tombée toute seule comme une grande et, quant à toi, Riccardo, on ne règle pas tout avec des poings !
J'étais tellement partie dans ma litanie que je n'avais pas remarqué les deux autres qui viennent de nous rejoindre. Arya nous observe avant de se mettre à côté de moi.
– Tout va bien ?
– Ouais, je peux dormir avec toi ?
– Évidemment. La mâchoire de Luca se décroche sûrement dû au fait que je lui pique sa copine, mais il ne fait aucun commentaire.
Une fois dans la cabine d'Arya, je me débarrasse de mes vêtements mouillés et enfile l'un de ses pyjamas avant de me glisser sous les couvertures.
– Il s'est passé quoi ? Elle questionne après s'être installée à côté de moi.
– Un épisode de somnambulisme. J'ai sauté dans l'eau. Je grimace face à la mine d'Arya.
– Toi, on peut dire que tu ne fais pas les choses à moitié. Je m'en veux pour la tension entre Dante et Riccardo, tout ça est de ma faute.
– Arrête, ce n'est pas ta faute s'ils se comportent comme des idiots.
– Si, je voulais juste que Riccardo soit jaloux et qu'il se rende compte qu'il est à fond sur toi. Mais tout ce que j'ai réussi à faire, c'est envenimer les choses entre vous, pas vrai ?
– Non, tu n'as rien fait. Les choses ont toujours été compliquées entre nous.
Deux coups discrets frappent à la porte, puis Camille passe la tête par l'entrebâillement.
– Je peux me joindre à vous ?
– Oui, bien sûr ! réplique Arya en se poussant pour lui faire de la place sur le lit.
– Faut vraiment être timbré pour sauter par-dessus bord !
Et c'est reparti pour un tour. Je fourre mon doigt dans ma bouche et le mords très fort. Je n'ai pas d'énergie pour une nouvelle confrontation.
– Gayle n'a pas sauté, commence Arya de son habituelle voix douce, elle a eu un épisode de somnambulisme. Les yeux bleus de Camille s'écarquillent.
– Désolée, comment tu te sens ?
– Bien !
– Ça m'est déjà arrivé. En fait, quand j'étais petite, ça m'arrivait tout le temps. Une fois, je me suis glissée dans la cuisine et j'ai pris un couteau, j'ai failli poignarder ma mère. Cette pute m'a placée à l'adoption après ça. Ma première famille d'accueil était une vraie prison. Une part de moi se dit que j'aurais dû la poignarder, cette salope qui me sert de mère, au moins j'aurais eu de bonnes raisons d'aller en prison.
– Camille ! s'indigne Arya.
– Quoi ?
– Elle est toujours vivante ? je questionne.
– Oui, aux dernières nouvelles, c'était une junky sans le sou.
Alors que j'écoute Camille parler de son abominable mère, la mienne me revient en mémoire et je me rappelle plus précisément mon rêve.
– Ce voyage est un vrai calvaire, je marmonne.
– Oui, et merci beaucoup à Arya et son histoire de petite fleur à la con.
– Ça va, je me sens déjà assez coupable.
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