Chapitre 33: Le point

Je me suis réveillée quelques minutes plus tard quand la voiture s'arrête devant un bâtiment en pierre construit sur plusieurs étages.

– Où sommes-nous ? Riccardo se penche sur moi, me prenant par surprise. Je plonge mes yeux dans les siens, le souffle court.

– C'est dans ce bâtiment que j'amène des filles innocentes, pour leur faire des trucs inimaginables. Je déglutis, il me fait marcher, je le sais, alors je décide de rentrer dans son jeu.

– Malheureusement pour toi, je ne suis pas une jeune fille innocente. Un sourire étire ses lèvres, sa main se déplace et il détache ma ceinture de sécurité avec expertise.

– J'avais déjà remarqué. Nous sommes au Point, je dois récupérer quelque chose avec Luca. Il coupe le contact avant de descendre. Je serre sa veste contre moi, privée du chauffage, le froid de la nuit me colle comme une seconde peau.

Riccardo ouvre la portière pour faire sortir les félins, aussitôt Persée vient se mettre à côté de moi, nous suivant dans la ruelle si étroite que nous devons marcher sur le côté.

Riccardo s'arrête devant une porte qui ressemble à s'y méprendre à un mur, puis il frappe deux coups.

– Mot de passe ?

– Va te faire foutre, Bud. Un rire retentit derrière le battant, puis la porte s'ouvre sur un homme vêtu d'un jean sombre et d'une chemise blanche. Il a de longs cheveux sombres coiffés en tresses et de petites boucles d'oreilles en diamant aux oreilles. Le prénommé Bud me détaille avant d'émettre un sifflement.

– Il m'avait dit que tu étais belle, mais je ne pensais pas que c'était à ce point. Bud, pour te servir.

– Range ta main ou je la coupe, menace Riccardo en se mettant entre nous. Il a dit à son ami que j'étais belle ? Il parle de moi à ses amis !? Seigneur, qu'est-ce qu'il leur a dit d'autre ? Que j'avais mauvais caractère ?

Bud lève les mains en signe d'apaisement avant de bondir en arrière, les yeux écarquillés en avisant les félins.

– Mais tu es malade d'apporter ces chats ici. Il s'écarte pour nous laisser entrer, chose dont je lui suis secrètement reconnaissante, j'ai froid dans mes vêtements mouillés.

Nous traversons un petit couloir sombre, je sens la main de Riccardo se placer sur le bas de mon dos, aussitôt je me rapproche de lui, avide de la chaleur de son corps.

– Tu as froid ? Je ferme les yeux. C'est moi ou sa voix est plus grave que tout à l'heure, et les contractions involontaires de ses doigts sur le bas de mon dos me rendent complètement folle.

– Oui... Il m'attire à lui et je dois résister à l'envie de ronronner de bien-être comme le fait Persée. Cette soirée risque d'être interminable.

– Le Point est un club privé, explique le démon. Seuls les membres de l'organisation et ceux en qui ils ont confiance y ont accès.

Dès qu'on pénètre dans le club à la décoration minimaliste, Luca se détache d'un groupe d'hommes et se dirige vers nous.

– Salut mon cœur. Il se baisse pour caresser Médusa et, miracle, elle se laisse faire. D'ailleurs, elle semble très heureuse.

– Génial, je suis la seule qu'elle hait, dis-je d'un ton amer bien malgré moi. Luca se redresse et, me prenant au dépourvu, il claque un baiser sur ma joue.

– Ne sois pas jalouse, elle aime les mecs, les vrais. Il contracte son biceps et y pose ses lèvres.

– Je crois que je commence à comprendre pourquoi Riccardo et toi êtes amis.

Les deux hommes me regardent avant de hausser un sourcil en parfaite synchronisation.

C'est plus fort que moi, j'éclate de rire.

– Je peux savoir ce que tu avais de si important à faire pour ne pas t'occuper de Kaido ?

– C'est l'anniversaire d'Arya, il n'est pas question que je la quitte. Tu sais qu'elle va me faire la misère. En plus, si j'étais allé voir cet idiot de Kaido, je l'aurais tué, ce mec se paie nos têtes.

Comme si elle avait entendu son nom, la blonde au carré court que j'avais vue au restaurant se dirige vers nous. Elle porte une robe d'été bleue et des chaussures plates. À côté d'elle, Camille est vêtue d'une jupe courte et d'un top sans manches dévoilant son ventre, le tout agrémenté de chaussures à talons, ses longs cheveux sombres cascadant sur ses épaules. À elles deux, elles sont la représentation parfaite du soleil et des ténèbres.

Quand les deux filles arrivent à notre hauteur, Médusa crache dans leur direction. Camille crache en retour.

– Ferme-la ou je te transforme en manteau. La féline rejette ses oreilles en arrière. Je pouffe quand elle se planque derrière Riccardo.

– Salut, vous avez manqué la fête, déclare Arya.

– On a improvisé une petite fête, répond le démon avec un coup d'œil complice à mon intention. Un sourire étire mes lèvres, il appelle ce qui s'est passé chez Kaido une fête ?

Visiblement oui. Luca et Riccardo s'éclipsent à l'étage et je suis entraînée au bar par Camille et Arya. Je remarque que quelques têtes se tournent vers moi, je suis clairement dans les conversations de ceux qui sont dans la pièce. Comme s'il avait perçu mon anxiété, Persée s'est rapprochée, son corps chaud frotte contre ma jambe. Médusa, elle, a suivi son maître pour mon plus grand bonheur.

– Ne t'inquiète pas, ils sont juste curieux. Riccardo ne s'affiche jamais avec une fille, dit Camille en remarquant ma nervosité. C'est étrange, la première fois au restaurant, elle était très désagréable, là elle se montre presque aimable. Comme je ne suis pas du genre à mâcher mes mots, je lance :

– Tu es sacrément gentille avec moi aujourd'hui. Tu n'aurais pas un peu de fièvre ? Arya éclate de rire alors que la belle brune grimace.

– Désolée, j'étais une vraie salope lors de notre première rencontre. L'hilarité d'Arya redouble, ce qui l'agace. On s'installe sur les tabourets tournants en face du bar et le félin se couche à quelques pas de moi.

– Ce qu'elle ne te dit pas, c'est que Riccardo l'a menacée. Si j'ai bonne mémoire, Luca aussi a dû te menacer pour que tu te montres moins salope avec moi.

– Je ne le fais pas exprès. Luca et Riccardo sont ma seule famille, alors je fais attention à qui entre dans leur vie.

– Je ne suis pas une menace pour Riccardo, dis-je sur la défensive. Le barman pose devant moi un cocktail vert avec quelques tranches de kiwi posées sur les glaçons.

– Oh je le sais, mais Arya, par contre, est une menace.

– Qu'est-ce que tu racontes, j'aime Luca, j'espère juste qu'il rentrera dans le droit chemin et arrêtera de vivre dans le crime.

– Ça n'arrivera pas et tu le sais, il a ça en lui. Les épaules d'Arya s'affaissent de tristesse, puis la seconde d'après, elle me sourit. Oh non, je sens que je ne vais pas aimer ce qui va suivre.

– Alors Ricky et toi, vous avez fait quoi ce soir ?

– On a rendu visite à un ami, dis-je en prenant une gorgée de ma boisson, résistant à l'envie de rire devant sa mine déçue.

– C'est tout ? J'ai senti une grande tension entre vous au restaurant, je suis sûre qu'il meurt d'envie de ravir ta petite fleur.

Camille et moi manquons de nous étouffer avec nos boissons.

– Arya, tu parles de vagin ? Pitié, dis-moi que tu ne parles pas de sexe ? Arya rougit jusqu'à la racine des cheveux.

– Quoi, j'essaye juste de ne pas être vulgaire, je trouve que "chatte", ça manque de classe.

– Je commence à me demander comment tu fais pour être avec Luca. Je dis en secouant la tête. Luca, pour le peu que j'ai vu, semble fait du même bois que Riccardo, tandis qu'Arya est si innocente qu'on a l'impression qu'elle a été façonnée par les anges. Je me trompe peut-être, après tout, les apparences peuvent être trompeuses.

– On ne parle pas de moi, mais de Ricky et toi.

Ricky ? Intéressant ! Je termine mon verre et aussitôt, le barman pose un autre devant moi.

– Nous travaillons ensemble, voilà tout. Elle fait la moue et, les minutes qui suivent, elle se met en devoir de me convaincre qu'elle est un détecteur de tension.

– Eh bien, tu te trompes, il n'y a rien entre nous. Dès que je dis ça, la nuit dans l'avion me revient en mémoire, plus précisément le moment où il a pris mon téton dans sa bouche. Je vide mon verre pour essayer de réchauffer mes entrailles, mais je bois trop vite et ma tête commence à tourner. Il y a de l'alcool dans ce truc.

– Je ne me trompe jamais, il te regarde comme s'il voulait te tuer.

– C'est censé être romantique ?

– Dans le cas de Riccardo, oui ! Elles hurlent de rire en même temps, ce qui nous fait éclater de rire aussi.

Heureusement pour moi, la litanie de la belle blonde est interrompue par Camille, qui crache en direction de l'entrée.

– C'est incroyable, tu as exactement la même expression que Médusa, la taquiné-je en jouant avec ma paille.

– C'est à cause de ce fils de docteur, je ne le supporte pas.

– Elle dit ça, mais sa petite fleur, elle adore.

– Arya, par pitié, laisse ma chatte tranquille. Mais regarde-le, cet air suffisant, cette arrogance, je ne le supporte pas. J'espère que Bud ne va pas le ramener ici.

Je regarde en direction de l'entrée. Le prénommé Bud est en grande conversation avec un mec à tomber. Je siffle admirative, ce qui me vaut un regard noir de la part de Camille.

– Il ressemble à un aristocrate, il a ce je-ne-sais-quoi...

– C'est un vrai gentleman. Il ne dit pas "salut", mais "salutation". Attends...

– Arya, non ! Mais trop tard, elle fait déjà signe à Bud et les deux hommes commencent à avancer dans notre direction.

– Salutation, les filles. Arya part d'un éclat de rire alors que Camille a le visage aussi joyeux qu'une porte de prison. Je réprime mon hilarité et lui tends la main.

– Je ne vous ai jamais vu par ici.

– Non, c'est ma première fois.

– C'est la protégée de Ricky. Je grince des dents.

– Je ne suis la protégée de personne, je m'appelle Gayle.

– Giovani. Il lance un coup d'œil à Camille avec un sourire à faire fondre une pierre, mais elle reste de marbre. Je suis prise d'un élan de sympathie pour ce pauvre Giovani. Alors qu'il parle avec Bud à bonne distance de notre petit groupe, je demande en me penchant sur la belle brune :

– Pourquoi tu le traites comme ça ?

– Je ne le fais pas exprès, mais putain, il représente tout ce que je déteste.

Je sens que c'est plus profond que ça, alors je n'insiste pas, je ne veux pas me montrer indiscrète.

Arya s'excuse pour aller aux toilettes et je reste seule avec Camille qui râle à cause de la musique. Elle se lève pour aller la changer, mais je ne suis pas dupe, la présence de Giovani la met mal à l'aise et elle essaye de s'accrocher à sa colère.

Restée seule, je suis mal à l'aise. J'ai l'impression que tout le monde me regarde, qu'ils parlent de moi. Je me demande ce qu'ils se racontent en ne faisant aucun effort pour être discrets. Je hausse une épaule, continuant à m'empiffrer de cocktails alcoolisés. Je suis trop heureuse aujourd'hui et personne ne va me retirer ça. Ma première mission avec Riccardo était une vraie catastrophe, c'était à peine si on se supportait. Pas une seule fois il n'a jugé bon de me tenir au courant de ce qui se passait dans cet orphelinat, ni qu'il prévoyait de se débarrasser de sa tante. Mais chez Kaido, tout était différent, j'ai vraiment eu l'impression qu'il voulait m'inclure, qu'il avait assez confiance en moi pour me laisser surveiller ses arrières. Le barman récupère mon verre vide et m'en donne un autre. Il me regarde avec curiosité, mais ne dit rien. Je soupire. Sympa, pourquoi agissent-ils tous comme s'ils avaient peur de s'approcher de moi ? Je ne suis pas radioactive, à ce que je sache.

– Salut. Je sursaute légèrement, prise au dépourvu avant de sourire en reconnaissant Maddy.

– Tu ne sais pas à quel point je suis heureuse de te voir. J'ai l'impression que tout le monde me regarde.

– Tout le monde te regarde ! Tu as débarqué ici avec un Gaviera et pas n'importe lequel.

– Je ne comprends rien.

– Ne t'inquiète pas, ça leur passera. L'avantage, c'est qu'ils ont tellement peur de Riccardo que personne ne s'approchera de toi. Ton mec est connu pour briser des cous pour un rien.

– Ce n'est pas mon mec ! Maddy hausse un sourcil.

– Vraiment ? Son téléphone sonne, un SMS. Elle le consulte en lâchant un juron.

– Merde, on ne peut jamais avoir une minute de répit avec Cass comme patronne. Je reviens.

J'ai presque envie de supplier Maddy de ne pas me laisser seule. Si j'avais su que Riccardo allait disparaître aussi longtemps, je serais restée l'attendre dans la voiture.

Deux mains se posent sur mon siège, je reconnais le tatouage tribal et le revolver avant que le tabouret ne tourne.

– On s'ennuie, petite serveuse ?

Je penche la tête sur le côté en souriant avant de glisser la paille entre mes lèvres et de prendre autant de boisson que je peux. Elle me rafraîchit, mais pas assez pour calmer le feu dans mes reins.

– Non, Arya et Camille sont de très bonne compagnie, Ricky.

Il a un tic nerveux, j'en étais sûre, il déteste ce surnom, je vais pouvoir me payer sa tête.

– Je ne veux plus entendre ce surnom, prévient le démon en levant le doigt. Je résiste à l'envie de rouler des yeux. Il croit vraiment pouvoir m'impressionner avec ça ?

– Sinon quoi, tu vas me donner à manger à Medusa, Ricky ?

Son regard s'assombrit. Il pose doucement ses mains sur mes jambes et les écarte avant de se placer entre elles.

– Ne me provoque pas, tu n'aimerais pas le résultat.

– Peut-être que j'espère un résultat.

Je sens sa respiration s'accélérer quand je me penche pour mordiller la peau de son cou. Il laisse échapper un son presque désespéré et ses hanches butent contre mes reins, m'arrachant un gémissement. Bon sang. En regardant par-dessus son épaule, je me rends compte que tout le monde a les yeux braqués sur nous. Ok, je suis audacieuse, mais là, c'est trop pour moi, j'ai l'impression d'être une bête de foire. C'est quoi leur problème, putain ?

– Tout le monde nous regarde.

– Je peux te donner leurs yeux, si tu veux.

Il déclare ça comme s'il me proposait une balade à vélo. Je manque de m'étouffer parce que quelque chose dans ses yeux à lui me confirme qu'il ne rigole pas.

– Ce ne sera pas nécessaire, mais... merci ?

– Dommage, ça aurait pu être amusant. Rentrons, mes bébés ont faim, et moi aussi.

Je regarde les félins, puis lui.

– Tu n'as pas dîné ?

Il sourit avant d'aspirer sa lèvre entre ses dents.

– Qui t'a dit que je parle de nourriture ?

Je suis incapable de dire quoi que ce soit, heureusement Luca vient à mon secours.

– Mec, je peux te parler, urgence.

Riccardo soupire en fusillant Luca du regard, le genre de regard qui en ferait trembler plus d'un, mais Luca se contente de sourire.

– Range ta queue, on a des affaires à régler.

Mon visage est si chaud qu'il n'a rien à envier au soleil.

– Tu es con, putain. Je ne sais pas comment Arya fait pour te supporter.

– Elle est accro à ma grande... intelligence.

J'éclate de rire, je ne m'attendais pas à ça.

– Je reviens, tu peux aller m'attendre dans la voiture.

Il me donne les clés de la Bugatti, un frisson me parcourt.

– Je peux conduire ?

– Je peux me laisser convaincre.

J'arque un sourcil, je vais le convaincre. Non, j'ai envie de le convaincre.

J'empoigne son tee-shirt et l'attire à moi avant de me donner un temps de réflexion. Je me penche doucement, très doucement, sans le quitter des yeux. Dès que nos lèvres se touchent, mes paupières s'abaissent et un petit gémissement m'échappe. Malgré mon désir, je ne m'empresse pas, je prends le temps de m'imprégner de sa saveur. Mes lèvres bougent sensuellement contre les siennes, je lui mordille la lèvre inférieure, faisant vibrer son torse avant de m'éloigner. J'ai envie de continuer, mais j'ai peur de me laisser emporter par le désir débridé qui est né dans mon corps depuis que je le connais. Il n'est pas question que je me donne en spectacle devant tous ces gens qui me jugent d'un regard hostile.

– Convaincue ?

Riccardo m'observe, la mâchoire serrée, et avant que je ne puisse comprendre ce qui se passe, il investit ma bouche. Mon chaste baiser n'est qu'un vieux souvenir. Il empoigne mes cheveux en rejetant ma tête en arrière, ses lèvres bougent contre les miennes, sa langue glisse entre elles, effleurant la mienne avec une lenteur qui me pousse à me plaquer contre lui, dans une recherche désespérée de sa proximité. Mes mains parcourent ses bras avant de se verrouiller autour de son cou. Il grogne et approfondit notre baiser, sa langue s'enroule autour de la mienne, exigeante, conquérante, en des mouvements lascifs.

Il se presse étroitement contre moi, en dévorant ma bouche. Ses dents mordillent ma lèvre inférieure avant qu'il ne la suce avec délectation. Merde...

Notre baiser s'intensifie, nos langues se mêlent avec fièvre, notre respiration devient haletante. Riccardo tire sur mes cheveux, forçant mon buste à ployer en arrière. Son corps massif recouvre le mien, il recueille mes gémissements. J'adore sentir son poids sur moi. Je sens sa main glisser sous ma jupe, sur ma peau nue, il rapproche mon bassin du sien et bientôt c'est tout mon corps qui ploie en arrière.

Je me retrouve couchée sur le bar, accueillant ses assauts.

Quelqu'un se racle la gorge, deux fois, mais le son me parvient comme dans un brouillard. Je suis incapable de penser à autre chose que ce corps lourd et chaud qui se presse contre moi. Riccardo roule des hanches contre le cœur brûlant de mon intimité, me tirant un long râle. Mes ongles s'enfoncent dans ses épaules et je creuse les hanches pour venir à sa rencontre. Je tire sur ses cheveux au niveau de sa nuque. Sa langue se délie de la mienne avant de revenir à l'assaut. Il reproduit ce manège sensuel plusieurs fois et je me mets à trembler. Je veux plus, ici et maintenant, même si je sais que ce n'est pas raisonnable.

– Bon sang...

Râle Riccardo en glissant la tête dans mon cou. Sa voix est méconnaissable, enrouée. Il lèche la veine palpitante de mon cou avant de descendre plus bas, traçant un sillon brûlant sur ma peau. Il mordille mon téton à travers mon chemisier. Son nom m'échappe comme une supplication. Mes orteils se recroquevillent dans mes chaussures. J'attire sa tête plus haut, scellant nos lèvres à nouveau. Il m'embrasse à pleine bouche. Je verrouille mes jambes autour de ses hanches, le serrant plus étroitement contre moi. Les mains de Riccardo ont glissé sous ma veste et ils empoignent ma taille. Il gémit quand mes seins aux tétons durs frottent contre son torse. Le bout de sa langue caresse la mienne. Je gémis très longuement comme un écho au torrent qui chamboule mon corps. Les mains de Riccardo tremblent contre ma taille. Il mordille ma langue avant de l'aspirer, il bouge ses hanches contre moi dans un râle. Une flèche de désir me traverse.

– Riccardo !

Appelle Luca avec plus de force cette fois, poussant le démon à s'éloigner. Il plonge ses yeux dans les miens, son regard est encore plus sombre que d'habitude. On se regarde sans qu'aucun de nous ne bouge, la respiration de Riccardo est hachée autant que la mienne, son corps tremble du même désir que le mien, et il y a quelque chose dans ses prunelles couleur corbeau qui me pousse à toujours vouloir me rapprocher de lui. Je n'arrive pas à comprendre ce que je ressens, ce n'est pas que physique. J'ai l'impression d'avoir été marquée au fer rouge. Comme si d'un baiser, il m'avait fait perdre tous mes repères.

Il s'avance vers moi et je suis le mouvement. Mes mains empoignent durement ses cheveux quand nos lèvres se retrouvent...

– Ric, putain !

Je sursaute en me redressant. Riccardo halète quand je frotte contre sa verge tendue, il ferme les yeux avec une grimace, la mâchoire serrée.

– Merde... Il râle en éloignant ses hanches de moi. Je suis pâle comme un linge, sous le choc. Je me suis donné en spectacle dans un club bondé, exactement ce que je craignais. Mais qu'est-ce qui ne va pas avec moi ? Je regarde à gauche : Luca, Bud et Medusa. À droite, Arya, Maddy et Camille me sourient. Comment j'ai pu me laisser aller au point d'oublier où j'étais ?

Je cache mon visage sur l'épaule du démon, il caresse mes cheveux, je le sens frissonner.

– Je veux mourir, je murmure contre son cou. Arya se racle la gorge. Cette fois, je repousse Riccardo en descendant du tabouret. Mes jambes tremblent tellement que je dois me retenir au bar.

Luca entraîne le démon à l'étage avec impatience, je suis soulagée qu'il parte, il me regarde comme s'il voulait posséder à la fois mon corps et mon âme.

– Il a failli ravir ta fleur sur le bar ! s'exclame Arya d'une voix excitée, comme si elle avait trop bu. Non, c'est moi qui ai trop bu, il y avait quoi dans ces cocktails ? J'ai tellement honte !

– Arya, pitié, j'ai déjà assez honte.

Camille se rapproche de moi, elle sort un briquet et l'allume devant mon visage.

– Qu'est-ce que tu fous ?

– Je vérifie si tu ne prends pas feu ! Elle éclate de rire, provoquant l'hilarité d'Arya et de Bud. Mais dès que Giovanni commence à rire, le visage de Camille se ferme.

– Je sors ! je lance en sifflant aux félins qui se mettent aussitôt sur pattes.

– Je viens avec toi, Luca m'a demandé de l'attendre dehors.

– Moi aussi, je veux rentrer. Hey Gayle, tu ne veux pas réchauffer ma bière avec la chaleur de tes reins ?

Suite à la blague de Camille, Arya et elle éclatent de rire. Je me prends le visage entre les mains. Cette fois, j'ai vraiment réussi à toucher le fond.

On se dirige vers la sortie et les blagues n'arrêtent pas de pleuvoir.

Mais je n'arrive même pas à faire attention à elles, j'ai le corps en feu et même l'air de la nuit n'y change rien. J'ouvre la portière de la Bugatti et les félins se glissent sur la banquette arrière. Mon Dieu, comment je vais me comporter quand Riccardo va revenir ?

Je ne peux même pas mettre ça sur le dos de l'alcool. Je fais vraiment n'importe quoi quand il est dans les parages.

Je vais rejoindre les filles près de la voiture de Luca, une Range Rover grise métallisée.

– Vous dites quoi que ce soit, je vous donne à manger à Medusa. Arya éclate de rire.

– Tu passes tellement de temps avec Ricky que tu parles comme lui. Je lève les yeux au ciel, elle m'attire à elle en enroulant une main autour de mes épaules.

– C'est bon, j'arrête de te taquiner.

– Vous n'entendez pas ça ? Je fronce les sourcils, toute trace d'humour a disparu du visage de Camille, elle a la tête légèrement penchée sur le côté, l'air inquiète.

– Quoi ? J'entends rien, réplique Arya d'une petite voix. Camille lève la main devant son visage pour lui intimer le silence.

Je me concentre. Dans le silence de la nuit, en plus des murmures du vent, j'entends soudain un petit bruit répétitif, comme le tic-tac d'une horloge.

– Tic-tac, je dis. Le regard de Camille s'illumine, elle se met à tourner autour de la Range Rover, à tâter la carrosserie.

– Mais qu'est-ce qu'elle fait ? questionne Arya, quand Camille se met à quatre pattes pour regarder sous la voiture. Elle glisse sous la bagnole jusqu'aux genoux, mon cœur commence à battre vite, j'ai soudain un très mauvais pressentiment. Je remarque soudain le froid glacial de la nuit, arrosé d'une légère bruine. Le vent se lève et des feuilles, qui se trouvaient éparpillées ici et là, s'envolent. L'ambiance s'alourdit, devenant glauque. Mes bras se couvrent de chair de poule et un frisson secoue Arya, qui est toujours contre moi. La voix de Camille retentit avec la force d'un boomerang.

– Putain de bordel de merde, il y a une putain de bombe sous la voiture de Luca !

Camille glisse et se redresse aussi vite que ses talons hauts le lui permettent, elle nous hurle de nous tirer. Je suis tout de suite en alerte, je saisis la main d'une Arya ébahie, qui s'est transformée en statue, et on commence à s'éloigner.

Mais trop tard. J'ai le temps d'entendre le cri de Camille qui nous dit d'aller plus vite, avant que la détonation ne retentisse. Mes pensées vont aux félins bloqués dans la voiture de Riccardo, avant qu'un souffle chaud ne balaie tout mon corps. Ma main lâche celle d'Arya et, sous la force de la détonation, je suis projetée dans les airs. Mon dos se cogne contre quelque chose avant que je ne roule sur le côté. Mon corps heurte le sol dur de plein fouet et je perds instantanément connaissance. 

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