Chapitre 22: L'ombre de la Cosa Nostra


- Tu veux une invitation pour sortir ? Je serre les dents avant de faire un doigt d'honneur à mon nouveau patron. Le fait qu'il ne soit pas dans la même pièce que moi booste mon courage.

Je coupe la communication sans rien dire, la gorge nouée par une très grande envie de pleurer. Mais c'est quoi ce type qui ne dort jamais ? Il est deux heures, bordel, deux heures !Les gens parfaitement constitués doivent être dans les bras de Morphée, le pays des rêves peu importe comment on l'appelle.

J'en ai marre !

J'écarte ma couverture avec regret avant d'aller dans la salle de bain.

Je me contente d'une douche rapide, effrayée à l'idée qu'il vienne encore me faire une scène comme avec les glaçons il y a trois jours.

J'enfile ensuite mes vêtements d'entraînement constitués d'un jogging, d'un débardeur et d'un pull à capuche.

Je sors de la chambre le plus discrètement possible, veillant à ne pas réveiller papa ou pire, Emma ; je ne suis vraiment pas d'humeur pour la confrontation.

- Tu sors ? Je sursaute et mon téléphone m'échappe des mains. Je me force à me calmer en ayant reconnu la voix de Nathan. Je ne le vois pas parce que les lumières sont éteintes, mais je suis persuadée qu'il est sur le canapé.

- Oui, je vais aller courir. Je n'ai pas à me justifier sur mes allées et venues auprès du copain de ma sœur, mais je me sens obligée.

- À cette heure ? Je viens avec toi. La détermination dans sa voix me fait grimacer. Je l'entends se déplacer et il allume la lampe. Il est torse nu, vêtu d'un short kaki, les cheveux bouclés en bataille comme s'il y avait passé la main plusieurs fois.

Je refuse poliment en ramassant mon téléphone.

- Je me permets d'insister, les rues ne sont pas sûres. Tu ne regardes pas les informations, mais moi si : plusieurs filles se font kidnapper par des organisations criminelles et la police ne fait jamais rien pour les aider.

- Nathan... Il m'interrompt en posant une main sur mon épaule.

- J'insiste, il n'est pas question que je te laisse sortir d'ici seule.

- Non, j'essaye de te... Il pose le doigt sur mes lèvres. Non mais j'hallucine.

- Je viens, c'est non négociable !

- Tu vas me laisser parler ? je m'agace avant de prendre une grande inspiration pour me calmer en me rappelant qu'il veut juste aider.

- Je ne serai pas seule. Riccardo m'attend dehors.

Une lueur passe dans son regard puis il secoue la tête comme s'il n'en revenait pas. Moi non plus, mon cher Nathan, j'ai l'impression d'avoir vendu mon âme au diable.

- Tu ne devrais pas fréquenter ce type, je sais que je n'ai aucun droit de te dire ça, après tout tu es adulte, mais renseigne-toi sur la signification de la pieuvre qu'il a au cou. Il semble bien au fait de ce qui se passe ici dis donc.

- C'est juste un tatouage. Nathan secoue la tête avec véhémence.

- Non, Gayle, ce n'est pas juste un tatouage, c'est la preuve de son appartenance à un clan.

Je consulte mon téléphone, merde, il va me tuer.

- Écoute Nathan, je te remercie de t'inquiéter pour moi, mais tout va bien. Tu devrais aller dormir.

- Toi aussi tu devrais dormir à cette heure, pas courir les rues avec un type aussi louche. Je soupire en ouvrant la porte. Le pire, c'est qu'il a raison. Il faut que j'essaye de négocier les horaires de mon travail, si on peut qualifier ça ainsi.

Dehors, je croise les bras en frissonnant quand la brise nocturne me caresse les parties visibles de la peau.

C'est une nuit de printemps sans lune. Le ciel est d'un noir profond, parsemé d'étoiles scintillantes qui semblent briller plus fort en l'absence de la lune. L'air est doux et tiède, chargé des senteurs subtiles des fleurs de saison et celle encore plus agréable de la terre fraîchement retournée, dégagée à cause de la fine pluie de tout à l'heure.

J'entends le murmure léger des feuilles agitées par une brise discrète.

Les ombres des arbres et des bâtiments se dessinent à peine, donnant à l'environnement un aspect mystérieux. Les rues et les chemins sont plongés dans une semi-obscurité, éclairés seulement par la lumière tamisée des réverbères ou des fenêtres des maisons. Tout semble calme, presque figé.

L'absence de la lune crée une atmosphère intime et secrète, propice aux confidences murmurées ou à la contemplation silencieuse. C'est une nuit où le monde semble se reposer, où l'on peut se perdre dans ses pensées ou simplement se laisser emporter par la beauté simple de la nuit. La rêveuse en moi aurait sûrement trouvé ça magnifique, mais après ce que j'ai vécu, une seule pensée me traverse : c'est une nuit propice au kidnapping. N'importe qui peut me tomber dessus et personne ne m'entendra hurler !

Je presse le pas pour me rapprocher de la moto de mon exécrable nouveau patron, qui est garée près de la seule lampe qui éclaire la rue.

- ... Je m'efforce juste de suivre toutes les pistes, il ne faut rien laisser au hasard. Je l'entends dire quand je me suis rapprochée davantage, il est au téléphone adossé à sa bécane. Je souhaite secrètement qu'elle se dérobe sous son poids et qu'il se retrouve avachi sur le sol. Cette pensée fugace me fait rire, mais je me force à adopter une mine impassible. Il se tait sûrement pour écouter son interlocuteur. Quand je me campe devant lui, la mine aussi affable que Grinch durant Noël, il plisse les yeux, détaille ma tenue pour s'attarder sur mes chaussures puis sur mon visage avec un jugement évident.

Merde, quelle idiote, j'ai pris des claquettes. Pas très pratique pour s'entraîner.

Voilà ce qui arrive quand on est privé d'un truc aussi essentiel que le sommeil.

Il me fait un signe du doigt, sûrement pour que j'aille changer de chaussures, mais n'appréciant pas sa façon de faire, je reste campée sur place en le fusillant du regard. Jamais quelqu'un n'arrive à m'agacer plus que ce type, il suffit que je croise son regard pour avoir envie de faire des choses inimaginables. Comprenant que j'essaye de le provoquer, il arque un sourcil avant de sourire.

Merde, il est vraiment trop beau.

- Non, je suis persuadé que Tommaso n'a pas quitté le pays. Tant qu'il n'aura pas sa vengeance, il restera ici.

Tommaso, vengeance ?

Pas que ça me concerne, mais je suis d'une curiosité maladive.

- Ne t'inquiète pas, je te tiens au courant si mes recherches aboutissent à quelque chose. Il raccroche avant de me regarder.

- Tu es en retard.

- J'ai été retenue par Nathan. Un muscle tique dans sa mâchoire, mais il ne fait aucun commentaire. Il regarde à nouveau mes chaussures,, on dirait même que ça l'amuse.

Je comprends pourquoi quand on arrive dans la salle de sport. Il m'ordonne de faire 10 minutes sur le tapis de course. Je suis persuadée qu'il le fait exprès pour me punir de ne pas avoir changé de chaussures. Fière comme un paon, je décide quand même de le faire, mais courir sur un truc électrique lancé à pleine vitesse avec des claquettes glissantes, bonjour l'horreur. Riccardo me dédie un regard amusé, il court juste à côté de moi, on a l'impression que ça ne lui demande aucun effort alors que moi, je suis à bout de souffle dans la troisième minute. Et de nous deux je tiens à préciser que c'est lui le fumeur.

- Un problème avec les chaussures peut-être ? Je lève le pouce pour lui prouver que je suis zen, mais je perds l'équilibre et je suis violemment éjectée du tapis de course. Le mur amortit ma chute, mais à quel prix, bordel, ça fait un mal de chien.

Le sadique continue de courir sans un regard pour moi, je hais ce type, comment peut-il être aussi insensible ?

- Je crois que je me suis brisé la colonne vertébrale ! Je marmonne 10 minutes plus tard en me massant le dos, alors qu'on pénètre dans une pièce qu'il appelle une armurerie.

- Crois-moi, si tu avais la colonne vertébrale brisée, tu le saurais.

Évidemment.

- Je ne comprends pas l'intérêt de tout ça ! Il appuie sur un bouton rouge et je vois, les yeux écarquillés par la surprise, tout un pan du mur pivoter pour dévoiler une pièce aux proportions impressionnantes. Il y a un ring dans un coin, plusieurs cibles pour les lancers de couteaux et d'autres pour l'entraînement des armes à feu, si je ne me trompe pas.

- Tu as accepté de travailler pour moi, il faut que tu acquières des compétences, il n'est pas question que je me coltine un boulet. Je lève les yeux en le suivant alors qu'il se dirige vers une table où sont posées plusieurs armes.

- Je pourrais faire un truc moins épuisant comme prendre ton courrier, promener tes chiens, ou écrire tes mails.

- Tu ne veux pas venger ta mère ? Je m'arrête brusquement en le regardant avec surprise.

- Si, mais comment ?

- Crois-moi, l'occasion se présentera, les gens dans ce monde ont la dent dure.

- Tu penses qu'ils sont à ma recherche ?

- J'en suis persuadé. Je grimace.

- Tu pourrais enrober la réalité dans du chocolat, juste pour me rassurer.

- Ce n'est pas mon truc. Il te cherche et s'ils te trouvent, ils te tueront. Si mon père découvre qui tu es, il te tuera pour éviter d'avoir des problèmes avec ses associés.

- Mais pourquoi m'avoir sauvée si ton père risque de se retourner contre moi ?

Il hausse une épaule avant de remonter les manches de son pull pour dévoiler sa montre, puis son tatouage tribal.

- J'en sais rien, j'étais sûrement défoncé.

Non, il n'était pas défoncé. Et je ne comprends pas pourquoi il fait tout ça pour moi, surtout que la plupart du temps, il agit comme si ma présence lui donnait envie de sauter de l'immeuble le plus haut de l'île. Il me sort de mes pensées en m'ordonnant de choisir trois armes.

- Un poignard, un couteau et une arme à feu. Choisie bien, ils deviendrons tes compagnons au quotidien.

Avec un sourire, je me dépêche de prendre le plus grand couteau posé sur la table. J'hésite un peu avec les poignards, mais mon choix se porte rapidement sur le plus grand. Il n'est pas très beau, mais je suis persuadée qu'il fera plus de dégâts. Sans hésiter, je prends une carabine. Je me tourne vers mon instructeur, qui me regarde complètement dépité.

- Je me suis fourré dans la merde, marmonne-t-il.

- Quoi ? Tu m'as dit de choisir.

- Tu te sens à l'aise avec ça ?

- C'est gros, donc ça fera forcément des dégâts.

Il secoue la tête et recupere le couteau et le poignard avant de me demander de me positionner avec la carabine.

Excitée par cette nouvelle expérience, je m'exécute, l'arme au niveau de ma poitrine. Je vise une cible imaginaire, le doigt sur la gâchette. Riccardo positionne la crosse contre mon épaule.

- Comment tu te sens ?

- Bien.

- Reste comme ça.

- Jusqu'à quand ?

- Quand je te donnerai l'ordre, réplique-t-il sèchement. Quel espèce de... Il me prend pour sa chose, comment est-ce possible d'être aussi beau et aussi exécrable ? Les minutes s'écoulent, et le démon reste là à m'observer, comme s'il attendait quelque chose. De la sueur commence à perler sur mon corps, et je tremble légèrement parce que la carabine est trop lourde. Mais à quoi il joue ? Je ne vais pas passer toute la matinée dans cette position.

- Riccardo, tu attends quelque chose en particulier ?

- Oui, j'attends que tu te rendes compte que cette arme ne te correspond pas. À peine cinq minutes, et tu trembles, tu transpires et tu as le bras légèrement engourdi, pas vrai ?

Je hoche la tête, et un soupir de soulagement m'échappe quand le sadique m'ordonne de baisser les bras. Malheureusement, j'avais le doigt sur la gâchette. Je pousse un hurlement quand la détonation retentit, avant d'écarquiller les yeux quand la balle passe entre les jambes écartées du démon avant d'aller s'enfoncer dans le ring.

Oh Seigneur, j'ai failli le tuer ! Il regarde la trajectoire de la balle, puis moi, les yeux écarquillés, le teint blême.

- Je suis sincèrement navrée.

- Commence par retirer ton doigt de la gâchette. Tu sais quoi? Oublie Adrian Leblanc, c'est moi qui risque de te tuer.

Cette fois, je ne me fais pas prier pour obéir. Riccardo prend une inspiration comme pour se calmer et m'arrache la carabine des mains.

- Bien, garde une chose en tête : ce n'est pas parce qu'une arme est énorme qu'elle te correspond. Tu ferras plus de dégâts si tu es à l'aise.

Il est de profil, en train de chercher Dieu sait quoi sur la table où se trouvent les poignards. Il est vraiment grand, je me demande combien il mesure. 1 mètre 80 ? Non, sûrement plus. Et comment a-t-il eu l'idée de ce tatouage ? Il est sûrement fan de la WWE. Ce qui nous fait un point en commun... Il a une copine ? Non, s'il en avait une, il ne passerait pas autant de temps avec moi. Quel homme en couple sort de chez lui au milieu de la nuit pour aller s'entraîner ? Mais beau comme il est, je suis persuadée que les filles ne doivent pas manquer dans son entourage.

- ... Putain Gayle, tu m'écoutes ?

Je sors de mes rêveries en souriant de manière innocente.

- Oui, oui.

Il plisse les yeux avant de glisser un poignard à côté de moi, bientôt suivi d'un couteau.

- C'est un poignard tunisien, regarde, le bout est légèrement courbé. Avec ça, si tu vises bien au corps à corps, tu feras des dégâts.

- Il est beau, mais il est petit.

- Il est pratique, répond doucement Riccardo avant de prendre un pistolet, puis un couteau.

- Ton arme doit être une extension de ton bras, tu dois constamment avoir l'impression de ne pas être encombrée. Avec la carabine, il te faudrait deux minutes pour avoir mal, et le couteau que tu avais choisi était trop grand. Un adversaire plus expérimenté n'aurait aucun mal à le retourner contre toi. Bien, voyons ce que tu vaux au corps à corps.

Oh merde. Pourquoi à chaque fois qu'il dit corps à corps, mon esprit s'égare ? Gayle, il parle de combat, il parle de combat, arrête de t'imaginer l'impossible ! Je sursaute quand je me rends compte qu'il s'est dangereusement rapproché.

Je me mordille la lèvre en sentant une bouffée de chaleur envahir mon corps. Je croise les bras sur le ventre dans l'espoir d'étouffer cette sensation.

Il claque des doigts devant mon visage. Pour toute défense, je souris à nouveau comme la parfaite idiote que je suis en train de devenir. Bordel, si je continue comme ça...

- Tu es atteinte de TDA ?

- Quoi ? Non, je...

- Sur le ring ! Sa voix claque comme un fouet. Brusquement, je pense à la soirée durant laquelle Franco m'a kidnappée. C'est étrange, mais je me rends compte qu'il était diablement sexy quand il a fait sauter les portes. Ok, c'était too much, mais il y avait dans la scène quelque chose de captivant que j'étais trop effrayée pour saisir. Mes yeux remontent sur son tatouage, cette pieuvre terrifiante qui parfois semble presque vivante.

Brusquement, je sens mes pieds perdre leur appui avec le sol. Riccardo me soulève et me jette par-dessus son épaule. La seconde d'après, j'atterris sur le sol.

- Non mais ça va pas ? je m'écris en le fusillant du regard. Il esquisse un sourire.

- Leçon numéro un : prêter attention à son adversaire.

Je lui prête attention, mais pas pour les bonnes raisons.

Riccardo me tend la main. Je tends mon bras pour m'en saisir, mais il dévie brusquement de trajectoire, et je sens son poignard contre ma gorge.

- Leçon numéro deux : n'accorde ta confiance à personne. La main qui t'aide à te relever peut aussi être celle qui te fait tomber. Relève-toi et attaque-moi.

Plutôt que de le faire, je me laisse emporter par une réaction impulsive. Je balance mon pied pour le frapper à l'entrejambe. Riccardo, comme s'il avait deviné mon intention, saisit rapidement mon pied et le tort. Il ne me fait pas mal, mais la pression est assez forte pour me faire grimacer.

- Tes intentions sont lisibles sur ton visage, apprends à être impassible.

Il relâche mon pied et me tend la main pour m'aider à me relever. Agacée qu'il passe son temps à m'humilier, je me redresse et je capture ses doigts pour les mordre de toutes mes forces.

- Leçon numéro 1 : évite de mettre ta main près de mes dents.

Il éclate de rire avant de marmonner :

- Ma main n'est pas la seule chose que je mettrais loin de tes dents.

J'ai parfaitement compris l'allusion.

***

Le lendemain, je poireaute sur le ring en faisant de mon mieux pour ne pas m'endormir quand quelque chose me percute de plein fouet par derrière.

- Leçon numéro trois : surveille tes arrières avec tes ennemis, mais encore plus avec tes amis.

Putain, je le hais. Je me retourne brusquement et fonce sur lui ; il s'écarte et je percute les cordes. Je serais passée par-dessus elles s'il ne m'avait pas retenue.

- J'aime beaucoup ton énergie ce matin. Il raille en me remettant sur pied.

- On t'a déjà dit que tu étais un tyran ?

- Tu viens de le faire. Relève-toi et attaque-moi.

Plutôt que de faire ce qu'il me demande, je me couche sur le ring en le défiant du regard.

- J'en ai pas envie.

Pour me punir de l'avoir défié, le démon rallonge l'entraînement de deux heures. Pendant cette heure, j'ai frappé sur un sac de sable non-stop, avant de nettoyer l'armuerie de fond en comble. En une seule matiné je suis passé de Mlan à Cendrillon.

Le troisième jour, quand mon réveil sonne, j'éclate en sanglots. J'ai mal partout et j'ai passé la nuit à lire plutôt que de dormir. Je n'ai aucune envie de m'entraîner et je sais très bien qu'il va débarquer dans ma chambre, alors je me glisse sous mon lit et me rendors. Je suis trop fatiguée pour me rendre compte à quel point le sol est froid et inconfortable.

- Non mais tu te payes ma tête ?

J'ouvre les yeux sans comprendre. Riccardo se tient au-dessus de moi ; ce taré a retiré mon matelas. Mais c'est qui ce type ?

- On pourrait faire une pause ?

- Putain, non !

- Pied gauche, pied droit.

J'obéis à ses instructions en balançant les pieds contre le sac de sable avec l'énergie d'un escargot. Il se campe derriere moi, la mine sombre, et saisit ma jambe au niveau du genou pour la lever le plus haut possible. Je sens sa chaleur corporelle sur mon dos, et aussi étrange que ça puisse paraître, sa proximité me réveille plus efficacement que le café.

- Quand tu frappes, étire ta jambe autant que possible pour éviter de te faire mal.

Je regarde par-dessus mon épaule ; il est beaucoup trop proche et qui sent aussi bon après avoir couru plus de dix minutes sur un tapis de course ?

- Ça va, je peux le faire, pousse-toi !

- J'en ai ma claque !

Le septième jour d'entraînement. Nous sommes dans une forêt au beau milieu de nulle part, le soleil commence à peine à percer l'horizon. Contrairement aux jours précédents, je suis moins fatiguée, moins essoufflée quand je cours et mes courbatures ont disparu. Mon corps commence à s'habituer à cette horreur, mais j'en ai par-dessus la tête.

- Je ne suis pas une machine, je n'arrête pas de courir partout jour et nuit comme une chienne. Nous sommes dans une putain de forêt, une forêt ! Je ne juge pas tes fantasmes, hein, mais si tu es le genre à conduire les filles dans une forêt, c'est ton problème. Mais le soleil n'a même pas dit bonjour que déjà Monsieur m'a conduite ici pour un entraînement. À quoi ça va me servir ? J'en ai marre, j'abandonne !

Riccardo m'observe longuement et, contre toute attente, il se met à rire. Ma rage bouillonne avant d'exploser. Je me débarrasse du sac que j'ai au dos et je lui envoie mon poing sur le visage. Il arrête le coup, mais remonter comme je suis, ça ne m'arrête pas . Je lui donne un coup de pied cette fois, j'étire ma jambe au maximum ; il réussit à s'en emparer encore. J'utilise sa main comme appui et je prends mon élan avant de sauter pour lui écraser mon pied gauche au visage.

- Bordel !

Sa tête bascule sur le côté et il tangue.

Merde, quand ai-je appris à faire ça ?

Les leçons à la con me reviennent en mémoire.

Leçon numéro 5 : Quand tu décèles une ouverture, ne perds pas de temps. Je lui tourne autour avant de sauter sur son dos, j'enroule mes jambes autour de ses hanches et mon bras autour de son cou.

- Je veux faire une putain de pause !

- Tu n'es pas en mesure de vouloir quoi que ce soit.

Il recule et mon dos percute l'arbre, mais je ne le lâche pas. Riccardo laisse échapper un juron, se baisse brusquement et me propulse en avant. Je tombe sur un amas de feuilles mortes humides.

- Relève-toi.

Je roule sur le côté, extirpe mon couteau de ma chaussure et le projette dans sa direction. Il se décale de justesse sur la gauche et l'arme se plante dans l'arbre. Riccardo la récupère et me la retourne. Je me lève juste à temps. Ce taré rate presque jamais ses cibles. Il fait craquer sa nuque avec un sourire satisfait.

- La première fois que je t'ai vue, je savais que tu avais quelque chose de spécial. Tu décides enfin de laisser brûler ce feu qui est en toi...

- Je veux faire une pause, mais regarde-moi, je ressemble à Imhotep dans La Momie. Le week-end a été créé pour que les gens se reposent.

Il fonce brusquement sur moi, sa main s'enroule autour de mon cou et il me plaque contre l'arbre. Mon corps se met à battre trop vite mais pas pour les bonnes raisons. Je retiens de justess un gemissement quand la prise sur mon cou se resserre.

- Écoute-moi bien, tes histoires à deux balles n'ont aucune importance pour moi. Tu penses que ça me fait plaisir d'être ici ? J'ai des putains de responsabilités que j'ai mises de côté pour superviser ton entraînement.

- Mais je ne t'ai rien demandé. Je suis fatigué de ses entraînements à répétitions. Je trouverai un moyen de te rembourser.

- Ce n'est pas une question d'argent, merde. J'ai assez d'argent pour financer une secte de 500 personnes pendant un siècle. Je veux que tu apprennes à te défendre. C'est la jungle, petite serveuse, et les faible n'ont aucune chance de survivre. Je ne serai pas toujours là.

Je déglutis. S'il n'a pas besoin de l'argent qu'il a investi en moi, pourquoi tient-il tant que ça à ce que je travaille pour lui ? Je ne sais pas s'il s'en rend compte, mais à lui tout seul, cet homme est une vraie contradiction.

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