Chapitre 19: La pieuvre et ses fils
Après un long et interminable silence, je finis par cligner des yeux, comme pour sortir d'un charme dans lequel m'auraient plongée ses mots. Je m'attendais à beaucoup de choses quand il est venu me chercher chez Ellen, mais certainement pas à ça.
Que je travaille pour lui ? Et puis quoi encore ? Je ne sais même pas ce qu'il fait dans la vie et, de toute façon, je m'en moque.
Quand je ferme les yeux et que je m'imagine travailler avec lui, je vois un véritable cauchemar.
Il va me rendre complètement dingue.
Maria apporte nos commandes : une bière pour Riccardo et un cocktail sans alcool pour moi.
– Tu as disjoncté ou quoi ?
– Non. Je suis très sérieux. Je t'ai déjà prévenu que ma bonne action avait un prix.
Évidemment, il a fait venir ma famille ici et, en plus, il va payer pour l'opération de mon père. Je ne suis pas assez bête pour l'oublier.
– Je vais te rembourser. Je travaille au restaurant , plus tard, je trouverai un deuxième boulot et je te ferai un versement chaque mois.
Ça va me prendre toute une vie, mais c'est comme ça que fonctionnent les banques, non ?
– Si tu étais en mesure de payer une opération du cœur avec un job de serveuse, pourquoi avoir attendu aussi longtemps ?
Touchée !
Je le fusille du regard, mais honnêtement, il n'a pas tort, mon salaire de serveuse peine à couvrir un loyer, en comptant les pourboires.
– Travailler pour toi, je ne le sens pas. De plus, je ne sais absolument rien de toi.
Il se laisse aller en arrière, la main posée de façon décontractée sur la banquette en cuir. L'autre porte sa bière à ses lèvres.
– Pose-moi tes questions.
– Qu'est-ce que tu fais pour vivre ?
– Je tue des gens, répond-il sans hésitation, avec un sourire narquois. Je soupire avant de saisir mon verre pour prendre une gorgée. J'attends qu'il se décide à parler.
– Mon père est la pieuvre, autrement dit, il est le chef de la Cosa Nostra.
– La Cosa Nostra ?
– Tu le fais exprès, pas vrai ?
– Écoute, Riccardo, tu veux que je travaille avec toi alors sois clair avec moi.
– Non, je te tends une perche, un moyen de me rembourser.
– Une perche remplie d'épines, j'ai l'impression. Tu veux que je travaille avec toi, tu dois au moins me dire où je mets les pieds.
– Pas avec moi. Pour moi. Je fais la moue en jouant avec ma paille alors qu'il reprend.
– C'est une grande organisation implantée en Sicile qui a ses activités un peu partout dans le monde.
– Quel genre d'organisation ?
– Une organisation criminelle. Je t'expliquerai tout en détail plus tard.
– Et je suis censée faire quoi, moi ? Hormis eviter la police.
Il a de nouveau ce sourire énigmatique.
– Ça dépend. Tu feras tout ce que je te demanderai, tu seras mon assistante en quelque sorte.
– Et si je refuse ?
– Ton père n'aura pas son opération. Mes bonnes actions ne sont jamais désintéressées, Gayle. Je n'investit jamais sans avoir la certitude d'avoir un retour sur investissement.
– Mon père n'est pas une transaction financiere !
On se regarde dans les blancs des yeux. Je refuse de travailler pour lui, surtout si j'ai en face de moi le fils du chef de la Cosa Nostra, l'une des organisations criminelles les plus importantes d'Italie. Je ne suis pas assez courageuse pour être dans ce genre de milieu. J'ai eu un petit aperçu le soir où Franco m'a kidnappée, et ça me suffit pour le reste de mon existence. Ce taux élevé d'adrénaline n'est pas bon pour mon pauvre cœur.
– C'est vraiment hideux ce que tu fais. N'as-tu donc aucune humanité ? On parle d'un homme malade. Enfin, Riccardo, il y a sûrement au fond de toi un cœur qui bat, un cœur capable de pitié, de générosité. Un cœur altruiste.
OK, j'essaie de jouer la carte de la pitié, mais ses yeux restent complètement froids. Il se permet même de sourire.
– Je t'ai déjà dit que mon cœur se trouve sous ma ceinture. Tu peux toujours grimper sur mes jambes pour essayer de me convaincre.
Ma main se referme autour du verre et, comme s'il avait lu mes intentions, il lève un doigt.
– Fais ça et je te le ferai regretter. Je repose le verre, il ne s'agit plus seulement que de moi, papa est dans l'équation maintenant. Il faut que je la joue intelligemment, au moins jusqu'à ce que l'opération se fasse.
– C'est ton père, pas le mien. Je trouve d'ailleurs que j'ai été très gentille avec toi. C'est à ton tour.
Je soupire. Riccardo est une personne très étrange, je ne sais jamais dans quelle catégorie le placer. Mais il a raison en disant que c'est mon père, c'est à moi de faire en sorte qu'il se sente bien après tous les chamboulements que j'ai causés à notre famille. C'est le minimum. Mais quelque chose en moi me dit que Riccardo a besoin que je travaille avec lui, sinon il ne se serait pas donné tout ce mal. Je dois en tirer avantage. Au point où j'en suis, une dette de plus ne changera rien.
– J'accepte, mais à une seule condition.
Il sourit.
– Tu crois être en mesure d'imposer des conditions, petite serveuse ?
– Non, mais je vais le faire. Je veux un endroit où vivre.
– Tu vis chez Giacomo.
Je secoue énergiquement la tête.
– Si je dois travailler avec... Pour toi, je veux au moins avoir un lieu où je pourrais vivre avec ma famille. Je veux juste quelque chose de simple.
– C'est faisable. D'autres conditions ?
– Non, c'est tout. Alors marché conclu !
Il regarde ma main tendue avec une moue avant de l'ignorer.
– Le marché sera conclu après signature du contrat. Je vais être honnête avec toi. Travailler avec moi n'est pas sans risque, ma famille a beaucoup d'ennemis et j'en ai aussi personnellement, alors tu dois faire tout ce que je te dis si tu ne veux pas finir six pieds sous terre. La première règle, c'est de ne faire confiance à personne, surtout pas à la police. Et tu ne dois parler de nous et de nos activités à personne, sinon, je serais obligé de te tuer. Compris ?
– Oui. Quand tu parles d'ennemis tu fais reference à Franco?
– En quelque sorte. Franco, comme je te l'ai dit, est de la Sacra Corona Unita, nous avons une entente, mais elle est très fragile.
Il regarde sa montre.
– Je te ramène chez Giacomo. J'ai des choses à faire.
– Je... J'ai entendu des rumeurs sur toi. Je ne sais pas si c'est raisonnable de te poser la question.
Il se penche en avant, ses lèvres frémissent, j'ai l'impression qu'il se retient de rire.
– Tu veux te montrer raisonnable maintenant après les verres d'eau ?
Je croise les bras en faisant la moue. Il n'a pas tort.
– J'ai entendu dire que tu as des pulsions qui te poussent à t'attaquer à ceux qui travaillent avec toi. C'est vrai ?
Une étrange lueur traverse ses prunelles sombres comme les plumes d'un corbeau. Il retrouve néanmoins son éternel sourire narquois.
– C'est vrai, mais avec toi, mes pulsions sont d'une autre nature.
Ses yeux parcourent brièvement mon corps, puis il les plante à nouveau dans les miens.
– Je ne comprends pas.
– Je ne veux pas que tu comprennes. Il regarde à nouveau sa montre. Debout, nous partons.
Son habitude de me donner des ordres me tape sur le système.
– Je dois retourner au restaurant, je te signale.
– Tu n'as plus besoin d'y travailler.
– Ouais, mais je dois au moins démissionner et rendre mon uniforme. Et là, je dois aller aux toilettes.
En habitué des lieux, il m'indique où se trouvent les toilettes. Je traverse le club avant de prendre une porte près du bar. J'ai encore du mal à réaliser tout ce qui m'arrive. Il y a moins d'un mois, j'étais une étudiante sans but et dépressive. Et là, j'ai accepté de travailler pour la Cosa Nostra ?
J'essaie de me convaincre que je le fais pour papa, mais une part égoïste de moi m'a fait accepter pour mes propres intérêts, pour assouvir ma curiosité maladive.
Je me lave les mains avant de me passer un peu d'eau sur le visage. En me penchant pour récupérer une serviette en papier, je remarque que quelqu'un se tient derrière moi ; nos regards se croisent dans le miroir. Je déglutis avant de me tourner vers lui. Un homme que je n'ai jamais vu, mince, vêtu d'une chemise et d'un pantalon de toile.
– Vous êtes Gayle. Je déglutis, mais je ne réponds pas. Je pose la serviette avant de me diriger vers la sortie. Là, l'homme dégaine une arme en la pointant sur moi. Je reçois une décharge électrique d'une telle violence que je suis pétrifiée. L'impact crée une douleur extrême, comme je n'en ai jamais connue. Je m'effondre, privée de tout contrôle sur mon corps.
***
– Vous vous réveillez enfin. Je bats des paupières avant d'ouvrir les yeux, m'adaptant à la forte luminosité de la pièce. Je regarde autour de moi sans comprendre. Je suis dans une pièce aux dimensions gigantesques ; tout un coin du mur est occupé par une bibliothèque, et en face de moi, un homme est installé dans un fauteuil en cuir. Un bureau en bois lustré nous sépare. Mes pieds sont liés, ainsi que mes bras ? Non, je suis scotché à mon siège.
– Qui êtes-vous ? L'homme en face de moi, qui doit avoir une quarantaine d'années, porte un costume qui met en valeur ses larges épaules. Son crâne est rasé, il a une mâchoire très forte et des yeux qui, de là où je me trouve, semblent bleus.
– C'est moi qui pose les questions, dit-il en plissant des yeux.
– Qui êtes-vous ? Un rire nerveux m'échappe. Est-ce une blague ? Je commence à en avoir par-dessus la tête de ce cercle sans fin.
– Il vous arrive souvent d'enlever des femmes que vous ne connaissez pas ? Il rejette la tête en arrière, me regardant à travers ses cils.
– J'ai beaucoup entendu parler de vous, Riccardo, à zigouiller l'un des hommes de Franco pour vous récupérer. Sachant que ce n'est pas son genre, ça a titillé ma curiosité.
Il ouvre ses tiroirs avant de poser quelque chose sur le bureau juste à côté de moi. Une photo. Je m'avance autant que me le permet mon corps entravé. C'est une photo de moi et Riccardo prise dans le parking de l'hôpital. Nous sommes de profil et je suis contre son torse alors que lui a ses bras enroulés autour de ma taille. En nous voyant comme ça, on a presque l'impression d'être face à la photo de deux amants qui se font des promesses d'éternité, alors qu'en temps normal, Riccardo et moi passons notre temps à nous battre. Le van n'apparaît pas sur le cliché, mais j'ai l'impression de le voir. Comme un membre fantôme d'un moment d'exception.
– Je répète ma question, qui êtes-vous ?
– Personne. Que me voulez-vous ? Pourquoi suis-je ici ?
– Pas de panique, je ne vous veux aucun mal. Mon chauffeur vous ramènera chez vous si vous répondez à mes questions.
– Pourquoi ne pas les poser directement à Riccardo si vous êtes aussi curieux ? Ses yeux se plissent quand il sourit.
– J'ai mes raisons.
– Alors vous comprendrez que j'ai également mes raisons de garder le silence. De plus, je pars du principe que si vous m'avez traînée ici, vous en savez assez.
Il se lève de son fauteuil, cette fois avec un éclat de rire sincère, il contourne son bureau, passant à côté de moi. Ses doigts frôlent le dossier du siège sur lequel je suis ligotée avant qu'il ne parte en direction du bar.
Mince, pendant une fraction de seconde, j'ai cru qu'il allait me frapper.
– Je suis curieux de savoir pourquoi une femme sortie de nulle part a une telle importance pour Riccardo, lui qui n'accorde jamais d'importance à personne.
Je grimace en l'observant. Il saisit une bouteille de whisky et remplit un verre avant de revenir vers moi. Je ne sais pas d'où il tient ses informations, mais il se fout le doigt dans l'œil s'il pense que je suis importante pour le comte Dracula. Pour lui, je ne suis qu'un moyen de mener à bien ses missions.
– Qui êtes-vous ? Pourquoi suis-je ici ? Je questionne à nouveau avec impatience.
– Je m'assure que vous n'êtes pas une menace pour la famille. Parlez-moi de vous, Gayle Attal.
– Je ne vous connais pas, donc je ne vous dirai rien, ni sur moi ni sur Riccardo.
C'est peut-être un connard de première, mais ma loyauté lui est due depuis qu'il a sauvé ma famille.
L'homme pose une fesse de manière décontractée sur le bureau, ses yeux ne me lâchent pas.
– J'ai réussi à faire parler des hommes plus coriaces sous la torture.
– Vous l'avez dit, sous la torture. Il est facile de plier une personne sous la douleur. Si c'est ce que vous me réservez, finissez-en. En plus, je ne suis pas un homme.
Mon Dieu, Gayle, ferme-la !
Un sourire de requin étire ses lèvres. Ce sourire, je le connais, je le connais même très bien, je l'ai vu un nombre incalculable de fois. Ce sourire m'a énervée, il m'a troublée, m'a fait frémir ; c'est le sourire en coin de Riccardo.
À cet instant, la porte s'ouvre. Je sursaute en me dévissant le cou pour voir l'origine du bruit.
Giacomo. Vêtu comme à son habitude d'un costume trois pièces. Il fronce les sourcils en me voyant, puis Riccardo pénètre dans la pièce à son tour.
Les mains dans les poches de son jean, son tee-shirt sombre met en valeur son torse musclé. Je m'attarde sur son bras serpenté de tatouages avant de plonger mon regard dans ses yeux sans expression. Je suis tellement soulagée que l'étau invisible qui enserrait mes muscles disparaît.
Dans quel monde l'apparition de ce type est-elle un soulagement pour moi ?
– Père, qu'est-ce que ça signifie ? questionne Giacomo.
Je ne suis pas surprise de constater que cet homme est leur père. Il a les mêmes yeux que Giacomo et le sourire de Riccardo.
Giacomo commence à me détacher dès qu'il se rend compte que je suis entravée. Riccardo se dirige vers le coin bar où il se sert deux doigts de whisky qu'il vide d'un trait avant de remplir encore son verre. Il ne me quitte pas des yeux.
– Va m'attendre dehors, il se contente de dire une fois que je suis libre. Je le fusille du regard, ce qui fait rire son père.
– Fils, on peut te faire confiance pour trouver les femmes les plus belles au caractère de lionne. Son sens de la répartie est très divertissant. Vous avez interrompu notre petite fête.
– Gayle. Son ton est calme, très calme. Ce n'est pas Riccardo, ça, du moins pas la facette de lui à laquelle je suis en général confrontée.
Je me lève pour me retrouver nez à nez avec le père Gaviera. Il sourit, ses yeux, semblables à ceux de Riccardo, se posent sur mon décolleté puis descendent plus bas sur mes jambes nues. Je me sens à l'étroit dans mon uniforme de service. Pourtant, son regard n'a rien de sexuel, il cherche à m'intimider.
– Assieds-toi ! dit simplement le père en détachant chaque syllabe. Son ton n'admet pas de réplique, c'est un homme habitué à obtenir ce qu'il veut.
Et je suis une idiote car je réplique.
– Non. Il part d'un éclat de rire qui me laisse médusée. C'est bien le père de Riccardo ; ils soufflent tous les deux le chaud et le froid sans jamais me laisser un temps d'adaptation. Comme à son habitude, Giacomo est la voix de la raison.
– On a des affaires plus importantes à régler.
– Je veux d'abord savoir qui est cette fille et pourquoi mon fils semble tellement s'intéresser à elle.
– Posez-moi vos questions. Gayle, dehors. Mes yeux se plantent dans ceux de Riccardo et cette fois, j'obéis. Je contourne mon siège et me dirige vers la porte. Mais les deux hommes stationnés devant elle me barrent le chemin.
Génial !
– Dégagez, je ne le répéterai pas, déclare Riccardo d'un ton calme. L'un d'eux reste de marbre, l'autre déglutit en lançant un regard du côté du père Gaviera, et contre toute attente, ils s'écartent pour me laisser sortir.
Quand la porte se referme derrière moi, je remplis mes poumons d'air. Bordel, j'ai vraiment angoissé, leur père est flippant, et cette façon qu'il a eue de balayer mon corps du regard, c'est comme s'il me condamnait à mort rien qu'avec ses yeux.
Je frissonne. J'ai toujours rêvé de vivre une vie palpitante, mais je pense que j'aurais dû préciser quel type de vie je voulais. Tout ça, c'est beaucoup trop pour mon pauvre cœur. Je remonte le couloir sans vraiment savoir où je vais, quand je suis soudain saisie par le bras et plaquée violemment contre le mur. Mon cœur rate un battement et la panique me saisit. Je m'imagine toutes sortes de scénarios quand finalement je me rends compte que c'est Riccardo, les yeux écarquillés. Je le repousse en hurlant.
– Putain, mais je commence à en avoir marre. Qu'est-ce que je vous ai fait pour que vous vous acharniez tous sur moi ainsi ?
– Ferme-la !
Une larme dévale sur ma joue. Je commence à en avoir assez d'être constamment prise au dépourvu. Il ne peut pas faire de bruit en marchant comme tout le monde.
Sans prendre en compte mes états d'âme, il me tire à sa suite et ouvre une porte avant de me pousser à l'intérieur. Mon dos bute contre des étagères où sont rangées des piles de serviettes et des produits de nettoyage. La réserve des domestiques.
– La prochaine fois que je te demande de dégager, tu dégages !
– Va te faire foutre, Riccardo Gaviera ! Au cas où tu ne l'aurais pas remarqué, c'est ton père qui m'a emmenée ici de force.
Il se passe la main sur le visage, écartant ses cheveux d'ombre au passage. Son tatouage au motif tribal capte à nouveau mon attention. Il est formé de lignes noires complexes agencées de manière à obtenir un rendu visuellement très agréable. Je résiste à l'envie d'y porter mes doigts.
– Qu'est-ce que tu lui as dit ?
– Je n'ai rien dit. Pourquoi ne lui demandes-tu pas directement ?
Je connais ce tatouage, j'en suis persuadée. Je l'ai déjà vu quelque part, mais où ?
Sérieusement, Gayle ? Tu es sous le viseur du criminel le plus puissant de l'île et tu t'inquiètes pour un tatouage ?
– Je ne veux pas lui donner l'impression que c'est important pour moi.
– Je ne suis pas importante pour toi. Il aspire sa lèvre inférieure en me regardant. Je m'attendais vraiment à ce qu'il me contredise ?
– Je déteste quand il dit ça, mais Giacomo a raison quand il me traite d'imbécile impulsif. Mon père essaie de faire un marché avec les Leblanc pour dominer le secteur de la drogue dans le sud de la France. S'il apprend qui tu es, il va te livrer à eux sans hésiter, s'il ne décide pas de te tuer lui-même pour faire disparaître le problème.
Je croise les bras sur la poitrine.
– Pourquoi devrait-il me tuer, moi ? Je te rappelle que c'est toi qui nous a mis dans cette situation. Si tu m'avais laissée en France...
– Ferme-la, Gayle. Si je t'avais laissée en France, Adrian Leblanc t'aurait violée puis donnée à ses hommes quand il en aurait fini, avant de foutre une balle dans ta jolie petite chatte pour s'assurer que tu ne vois plus jamais les rayons du soleil.
Je sursaute presque face à ses mots crus. Il a raison, je le sais pertinemment. Mais je refuse de lui accorder ça.
– Non, j'irai voir la police et je le mettrai hors d'état de nuire. Cette fois, il me regarde comme si j'étais complètement idiote avant de secouer la tête.
– Les flics que tu as appelés cette nuit-là ne t'ont pas servi à grand-chose. Riccardo et moi, on se fige face à ses mots.
– Comment tu sais que j'ai prévenu la police ?
– Je ne le sais pas, c'était une question. Non, ce n'était pas une question et on le sait très bien tous les deux, mais il ne me dira rien. Soudain, la lumière se fait dans ma tête.
– Le tatouage de Roman Reigns ! Je m'écrie en le reconnaissant enfin. Riccardo se détend et son éternel sourire en coin revient.
– Impressionnant ! Il semble sincèrement surpris.
– Bah, disons que j'ai une petite obsession pour Roman Reigns. J'avais un énorme poster de lui placardé dans ma chambre. Je peux le voir en entier ?
Il fait mine de réfléchir avant de s'écarter pour retirer son tee-shirt sombre. Son collier, que je n'avais jamais remarqué, s'accroche au tissu avant que la plaque ne retombe entre ses pectoraux. Je retiens mon souffle, c'est exactement le même que celui du célèbre catcheur. Je l'ai assez observé pour le reconnaître sur n'importe qui. Les motifs partent de son bras avant d'encercler tout son pectoral gauche. Ils remontent sur son épaule, et je suis certaine que les motifs continuent jusqu'à son dos. Mais contrairement à mon crush de la WWE, le démon a un tatouage sur le flanc, deux lignes de phrases en italique entourant une suite de chiffres de 1 à 5, précédée et terminée d'une étoile.
Curieuse de savoir ce que les phrases signifient, je m'agenouille devant lui. Riccardo laisse échapper un souffle quand mes doigts parcourent son flanc. Je ne comprends rien à ses phrases étant donné que la langue utilisée est le latin.
– Gayle ! Je relève la tête, croisant son regard luisant. Il aspire ses lèvres entre ses dents avant de fermer les yeux, une veine se met à battre à la base de son cou.
– Bordel, lève-toi. Il me tire par le bras et me met debout. Je lui donne une tape.
– Ne me touche pas, je regardais juste ton tatouage.
– Quel fléau. Il remet son tee-shirt rapidement avant de glisser une main dans sa poche et d'en sortir une carte de crédit.
– Tiens, Cass va t'accompagner faire du shopping. Prends ce dont tu auras besoin.
– Non merci, ma dette est déjà assez élevée comme ça.
– Arrête de dire n'importe quoi. C'est nécessaire maintenant qu'on va travailler ensemble. Il te faut des vêtements adaptés. Je souris en prenant la carte.
– Donc, on travaille ensemble, comme une équipe. Il penche la tête sur le côté, avec ses lèvres frémissantes, avant de faire un pas vers moi. Instinctivement, je recule, mais l'espace est si étroit que mes fesses butent contre les étagères. Riccardo me saisit brusquement par la taille et il me pose sur l'étagère. De son genou, il écarte mes jambes et se place entre elles. Je me sens toute étourdie par cette proximité soudaine.
– J'ai hâte que tu sois sous mes ordres. J'adore qu'on m'obéisse au doigt et à l'œil. Après un dernier sourire moqueur, il sort de la réserve, me laissant troublée.
Je sens qu'il va me faire vivre un enfer.
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