Chapitre 18
Je me relevais en lui lançant un regard noir. Je n'aimais pas du tout la tournure que prenait cette rencontre. J'appréciais Michel, c'était une jeune fille adorable et elle m'avait beaucoup aidée même si j'avais du mal à la cerner parfois. Cependant, je n'allais pas la laisser me traiter de faible comme ça. Surtout que je ne comprenais pas son comportement.
« Michel. Je t'aime beaucoup, mais tu ne devrais pas dire des choses pareilles. Rétorquai-je, en fonçant des sourcils.
- Je ne fais que dire la vérité. Tu es faible. Répéta-t-elle, en plongeant sur moi et armant son poing. »
Je l'esquivais de justesse, alors qu'elle continuait à donner l'assaut. Elle était agile et elle ne manquait pas de force. Elle savait se battre, alors que je reculais pour éviter un coup de poing de sa part, elle me fit trébucher en plaçant sa jambe derrière moi. Je tombais sur les fesses, et elle me toisait de haut.
« Trop peureuse et trop naïve. Tu n'arrives même pas rester debout. Cracha-t-elle, en avançant vers moi.
- Michel. C'est mon dernier avertissement. Soit tu t'arrêtes, soit je te force à t'arrêter. La prévins-je, en me remettant encore une fois debout.
- Tu ne me fais pas peur. Tu n'es pas menaçante pour un clou ! Tu n'es même pas capable d'utiliser ta force parce que tu n'es qu'une froussarde ! S'exclama-t-elle, en bondissant vers moi pour me frapper. »
Je tentais de l'esquiver, mais elle changea de direction et me frappa de plein fouet au niveau de l'abdomen. L'air s'échappa de mes poumons et je me retrouvais à genou à ses pieds. Position que je n'aimais guère. Je toussais un peu, alors qu'elle m'attrapa par mes cheveux pour me faire redresser la tête.
« Tu as peur mais tu refuses de l'avouer. Tu as peur de tout ce qui t'entoure, de toi-même, des morts et même de lui ! Déclara-t-elle, tandis que je lui lançais mon regard le plus meurtrier.
- Je ne vois pas de quoi tu parles. Objectai-je, entre deux bouffées d'air.
- Si tu es effrayée. Tu n'es qu'une larve qui refuse de sortir de son cocon. Ricana-t-elle, même si son rire sonnait faux dans mes oreilles.
- T'as pété les plombs, Michel. Articulai-je, en attrapant son poignet et le serrant pour qu'elle relâche un peu sa prise. »
Michel me tira violemment en arrière, avant de me jeter contre le sol. Je me réceptionnai sur mes mains, roulant sur le côté pour éviter de lui offrir mon dos exposé. La blonde avait dû anticiper mes mouvements car elle avait bloqué ma retraite et s'était mise à califourchon sur moi. Son regard était de glace, alors qu'elle écrasait ma gorge avec une de ses mains. Je plantai mes ongles dans son avant-bras pour qu'elle me lâche, alors que l'autre essayait de lui asséner un coup. Seulement elle cloua mon bras avec sa main de libre. Michel avait beaucoup trop de force pour une jeune fille.
« Tu me déçois beaucoup. Lâcha-t-elle, en me fixant froidement.
- Dommage pour toi, ma vie ne consiste pas à te plaire. Rétorquai-je, en la fusillant du regard.
- Je te pensais courage et forte, mais tu ne fais que repousser l'inévitable. Tu refuses d'admettre qui tu es vraiment et tu es incapable de t'accepter. Tu as trop peur qu'on te rejette. C'est pour cette raison que tu rejettes les autres. Et tu ne le remarques même pas toi-même. Me critiqua la blonde, en faisant un peu plus pression sur ma gorge.
- Je ne rejette personne. Réussis-je à dire alors qu'elle me comprimait ma trachée. »
Un rire jaune s'échappa de ses lèvres, et son regard se fit plus glaçant. Un frisson me parcourut et je sentis le serpent en moi effleurer la surface. Il n'acceptait pas cette soumission, le fait d'être réduit à la merci d'une petite fille blonde aux yeux clairs. Il siffla dans mes oreilles, mais je le laissais où il était. Je ne voulais pas tuer Michel, même si elle méritait une bonne correction. Elle ne savait pas de quoi elle parlait la pauvre. Elle était certainement devenue cinglée. Je ne voyais que ça.
« Tu penses que je n'ai plus toute ma tête, n'est-ce pas ? Mais entre nous deux, ce n'est pas moi qui nie ce que je suis. Je le sais parfaitement, c'est pour ça que je suis au-dessus et toi en dessous. Sourit-elle, sarcastique.
- Michel...
- Tu refuses d'accepter que tu es une Banshee. Est-ce que tu le leur a dit au moins ? Ou bien tu les as laissés dans le flou total comme tu le fais toujours ? Je suis sûre que le pauvre Cameron n'est même pas au courant. »
Je grinçai des dents en l'entendant prononcer le nom de mon loup. Il n'avait rien à faire dans cette discussion. Et certes je ne leur avais rien dit, mais j'avais trop peu d'élément pour tout leur dire justement. De plus, ils devaient bien s'en douter vu les recherches que je leur avais donné à faire. Ils n'étaient pas idiots. De plus la priorité était d'arrêter Gabriel. Le Sidh ne devait pas s'ouvrir.
« Arrête. Dis-je, dans un souffle.
- Regarde. Tu refuses la vérité. Tout comme tu refuses d'accepter Cameron dans sa véritable forme. Qu'est-ce qui te fait le plus mal ? Le fait qu'il te l'ait dit en dernier ou bien le fait de savoir que comme toi, il ne te dit pas tout de lui ? »
Elle fit mine de réfléchir, alors qu'elle savait déjà sûrement la réponse. En effet, je n'avais pas aimé qu'il me cache cette partie de lui. Je pensais avoir tout vu avec son dédoublement de personnalité, mais là, j'avais été peiné qu'il ne me dise rien sur sa forme gigantesque. Je faisais partie de sa vie et il ne m'avait jamais rien dit. Comme moi, je me butais à ne rien lui dire sur moi, mes sentiments et tout le reste. C'était parce qu'il avait agi comme moi, j'agissais envers lui. C'était pour ça que ça me faisait si mal et que j'avais décidé de le mettre en second plan.
Je sentis mes larmes venir. Je fermais les yeux, alors qu'elles se mettaient à rouler sur ma peau. La pression sur ma gorge disparut et un sanglot s'éleva dans le silence qui nous entourait. C'était mes sanglots qui rompaient la tranquillité de la forêt. Michel s'était levée et m'attrapa les bras pour me redresser. Je continuais à pleurer, mais cette fois-ci contre sa poitrine. Elle me caressa tendrement la tête, alors que les larmes continuaient de couler, abondamment. Je m'accrochais à elle, avec force comme si elle était ma bouée de sauvetage.
« Je suis détestable. Tellement faible et incapable. Reniflai-je, alors qu'elle me berçait.
- Oui, mais ça ne veut pas dire que tu ne peux pas changer. Me souffla-t-elle, en continuant de me serrer et de me bercer.
- Je les ai laissés tomber en ne pensant qu'à moi. Je n'ai même pas cherché à m'inquiéter pour lui. Si ça se trouve, il avait vraiment des raisons qui le poussaient à ne pas me montrer cette forme. Et moi... Et moi... Je ne voulais pas les entendre. Bredouillai-je, en sanglotant. »
Elle me tint un peu plus fort contre elle, alors que je balbutiais et racontais tout ce qui me venait. Je lui disais tout ce que j'avais sur le cœur entre deux sanglots. Toutes mes peurs, toutes mes craintes. Je m'excusais aussi, pour tout et pour rien. Je m'excusais pour ne pas être plus forte que cette façade superficielle que je donnais. Je voudrais être tellement plus que cette simple loque qui craignait le monde en lui-même.
« Ne pleure plus, Espérance. Chuchota-t-elle, à mon oreille. »
Je ne relevais pas le fait qu'elle s'était trompée en m'appelant ainsi. Mes pensées étaient confuses et je voulais seulement pleurer dans le giron de Michel encore plusieurs minutes. Seulement, mes larmes se tarirent et je les essuyais. Je devais avoir une sale tête. Les yeux bouffis et le nez coulant. Elle me tendit un mouchoir que j'acceptais et je me mouchais. Je reniflais encore un peu, mais ça allait mieux. Elle s'assit à côté de moi, et enveloppa mes épaules de son bras, et je posai ma tête contre son épaule.
« J'ai été un peu rude mais c'était pour ton bien. Me dit-elle pour justifier ses actes.
- Rude ? Tu m'as massacré en deux-deux. Ris-je, doucement, en me mouchant.
- D'accord, je n'y suis pas allée avec le dos de la cuillère. Mais depuis que tu as quitté la maison de Raphaël, ça m'énervait de te voir comme ça. Si perdue et incapable d'accepter qui tu étais. Je pensais que ça irait mieux quand Cameron t'aurait retrouvé, mais ça n'a pas changé d'un pouce. Grommela-t-elle, en soupirant.
- Je rêve où tu as soupiré ? Pouffai-je, en la taquinant un peu.
- C'est de ta faute ! S'horrifia-t-elle, en me repoussant légèrement. »
Je secouais la tête, alors qu'un sourire s'esquissa sur ses lèvres. Le regard de Michel avait retrouvé cette douce chaleur. Je finis par m'allonger sur le sol, regardant le ciel. La lune éclairait assez et quelques étoiles brillaient. Je repensais aux paroles de Michel, il était vrai qu'elle était dure mais je le méritais. Être aussi indécise et fuir par la même occasion n'étaient pas un bon mélange. Je devais prendre le temps de me réorganiser.
« Qu'est-ce que tu comptes faire ? S'enquit Michel.
- Devenir plus forte, et ce que j'entends pas cela, ce n'est pas l'être uniquement de façade.
- Tu comptes t'y prendre comment ? M'interrogea-t-elle. »
Je sentais le poids de son regard sur moi. Je savais qu'elle me ferait mordre la poussière encore une fois si je disais une bêtise. Étrangement, je me sentais en colère contre Michel parce qu'elle touchait là où ça faisait mal. Seulement, elle mettait en lumière tout ce que je mettais à l'ombre et ça ne me gênait pas venant d'elle. Cela ne voulait pas dire pour autant que j'aimais me manger le sol.
« Accepter que je suis une banshee, que je peux ouvrir le Sidh et que je peux prédire la mort des gens par cris stridents à vous casser les oreilles. Déclarai-je, sur un ton un peu espiègle à la fin.
- Et ? Insista-t-elle.
- Que je suis bien plus que ça. Et qu'être une Banshee est davantage un plus qu'un moins. Répondis-je, en souriant. »
Je baissais mes yeux sur le profil de Michel. Elle hocha la tête, puis son regard bleu plongea dans mes prunelles noisettes. Elle avait une expression très sérieuse sur le visage. Il semblerait qu'il y avait autre chose qu'elle voulait mettre en avant, mais je n'avais pas besoin qu'elle me le dise pour que je comprenne. C'était à propos de Cameron. Même si mes sentiments étaient un peu confus, je savais que je l'aimais, et parce que je l'aimais je devais lui dire. Il n'y avait pas de bonnes routes pour protéger quelqu'un, on pouvait seulement faire de son mieux. De plus, si je ne lui disais rien comment pouvait-il être prudent et faire attention à lui ?
« Si tu lâches un soupir. Je te le fais ravaler, et je ne plaisante pas. Me prévint Michel, en me menaçant de son index.
- Dixit celle qui l'a fait juste avant. Me moquai-je, en lui lançant un regard malicieux.
- J'ai le droit, moi ! Parce que même avec toute la bonne volonté du monde, tu es désespérante à souhait. Décréta-t-elle, en levant les yeux au ciel.
- Quelle sympathie, dis donc ! Rétorquai-je, en croisant les bras sous ma poitrine. »
Elle m'offrit un sourire, et nous riions ensemble pendant un moment. Je me sentais bien mieux. C'était comme si toute la tension de mon corps s'était envolée. Je me sentais plus détendue comme si ces derniers jours n'étaient pas arrivés. Je lançais un regard à la ronde, et je remarquais qu'il n'y avait vraiment personne. C'était comme si personne n'avait entendu ce qu'il s'était passé entre Michel et moi. Comme si on était dans une autre dimension. C'était étrange, mais ça ne me gênait pas plus que ça. Michel avait ce côté énigmatique et la situation était semblable à elle.
« Tu sais ce que tu dois faire maintenant ou bien je dois te massacrer de nouveau ? S'enquit Michel, en se relevant. »
Je lui souris et elle me tendit la main pour m'aider à me relever. Une fois sur mes jambes, alors que j'étais exténuée, il y avait à peine une heure avant, je me sentais en pleine forme. Michel me sourit et me fit signe qu'il était temps pour elle de s'en aller. Juste avant de quitter le terrain d'entraînement, elle se tourna vers moi.
« Souvent la meilleure des solutions est celle qu'on considère comme la pire d'entre toutes. Me dit-elle, en souriant avec mystère. »
Je la regardais disparaître dans l'obscurité de la nuit, avant de mémoriser ses paroles mystérieuses. Elles m'avaient toujours aidée quand j'en avais le plus besoin, et cette fois encore, elles m'aideront quand j'en aurais besoin.
Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top