Chapitre 5 :
Même si cela faisait des heures qu'elles avaient levé le camp, les jeunes filles avançaient bien plus lentement que durant la nuit. La casse de l'aegian y était pour quelque chose, elles avaient du traverser la moitié du flanc de la montagne grâce à celui-ci.
Hélàs, désormais, il était hors-service.
— Tournons nous à droite ou à gauche, ma chère Shane ? À droite, si je ne m'abuse.
— Mais non Lili ! Tu tiens l'plan à l'envers.
Après une rapide observation de la carte la rouquine comprit et retourna la carte. Il était sûrement plus facile de se repérer avec une carte dans le bon sens.
— En effet, merci Shane. Où avais-je donc la tête ?
— Je préfère pas savoir !
Leur descente les mena à l'orée d'une forêt.
— T'es sûre qu'on passe par là ?
La rousse hocha la tête, convaincue.
— Bien évidemment Shane ! Ce passage sera un gain de temps exceptionnel.
Elles entrèrent donc dans les bois. Les lieux ne semblaient pas avoir été investis par l'être humain depuis des siècles. Les sapins tordaient leur branches vers le ciel, comme si ils avaient l'orgueil de se croire digne de tutoyer les sommets. Au milieu des grands connifères, un chemin timide se faufilait vers le bas. Envahi par les branches, il était pris en étau par la nature. Le vent se leva, souleva les branches, comme pour défier les jeunes filles à continuer leur route.
Insensibles à cette atmosphère étrange, elles continuèrent sans problèmes. Malgré l'épaisseur des arbres, la lumière s'invitait dans la forêt par endroit. Sa puissance était pourtant amoindrie : elle inondait le reste de la montagne.
Les adolescentes marchaient tranquillement, humant parfois l'odeur des sapins. Elle régnait en maître sur la forêt, on ne pouvait rien y sentir d'autre. Lee vent s'intensifia. De son souffle, il battait les branches, qui fouettaient l'air. Plus aucuns sons ne fut audible.
Seuls les branches battues et le souffle du vent.
— Et c'est quand qu'on sort de la forêt en fait ?
Lilaï jeta un oeil à la carte.
— Je t'avouerai que je suis perdue. Avec une règle, il m'est facile de mesurer des distances, mais je me sens incapable de les estimer. Veut tu l'observer ? Peut-être performera tu plus que moi.
Après quelques efforts pour comprendre le sens de la phrase de sa camarade, Shane tendit le bras.
Alors que la carte se préparait à changer de main, une bourrasque l'arracha. La brune mit quelques secondes à réagir. Elle courut ensuite après la carte. Suivie de près par son amie, elle traversait la forêt de gauche à droite. Le vent soufflait toujours plus fort. Shane ne se laissait pourtant pas distancer. Le fouet des branches frôlaient son visage. Elle s'en fichait. Au moins le vent n'allait pas vers la vallée. Son souffle se raccourcissait. Elle se rapprochait de la carte. Elle avait un point de côté. La carte était à trois mètres. Elle avait mal. La carte venait de sortir de la forêt. Shane aussi. Le vent s'arrêta. La carte toucha le sol. La brune la ramassa.
— Nom d'un concombre putréfié !
Lilaï, arrivée juste après, comprit vite la cause des injures de son amie. La carte avait été en contact avec le sol humide. Ce qui était autrefois la réplique presque exacte du relief de la vallée ressemblait désormais à une oeuvre d'art douteuse, entre abstrait et raté. Le beau papier gondolait et l'encre, dont les pigments noirs dessinaient auparavant le paysage, se rassemblaient en d'immenses taches disgracieuses.
Quel dommage ce fut un si bel objet. Cette carte était admirablement réalisée. Heureusement qu'il ne s'agissait que d'une réplique.
Tandis que Lilaï se perdait dans des considérations artistiques, Shane semblait voir un problèmes plus important.
— Comment qu'on va faire pour se repérer sans cette carte ? Pourquoi on n'a pas pris les autres ?
D'un poing rageur, elle fit valdinguer le frêle sapin qui se tenait à côté d'elle. Puis, ses épaules s'affaisèrent et elle commença à sangloter.
— Comment on va f-faire ? Pourquoi j-je suis partie ? Je suis désolée Lili, je voulais pas t'entraîner dans cette galère.
La rousse prit son amie dans ses bras et elle lui murmura quelques mots.
— Ne te tracasse pas trop Shane. Bien que tout ne se passe pas comme prévu, il ne faut pas perdre espoir. Après tout, si ta mère a appuyé notre départ, alors nous pouvons retrouver notre chemin. De plus, il n'est pas difficile de descendre une montagne, puisqu'il s'agit d'aller vers le bas. Après, vers quel bas aller.. Nous improviserons sinon, après tout tu es tellement talentueuse dans ce domaine.
Shane sourit. Son amie avait raison. Après tout, si sa mère les avait aidé, elles pourraient retrouver leur chemin. Ensemble, elles y arriveraient. Après tout, elles étaient de si bonnes amies ! Elles étaient une bonne équipe.
— Merci Lili. T'es forte pour les discours réconfortants. À propos d'improvisation, tu pourrais pas utiliser tes pouvoirs de super myaliste pour nous emmener en bas ?
La rouquine baissa la tête, un sourire amusé plaqué sur le visage.
— Shane j'ai seulement glané quelques informations grâce aux enseignements que l'école nous a offert. Je connais les principes théoriques, dont les modes d'activation mais je ne possède aucune connaissance en termes de pratique.
— Je suis très déçue par ton comportement Lili !
Les yeux de la jeune fille disait le contraire et revenaient ses airs d'enfant qui prépare une mauvaise blague.
— Tss.. Mais bon trêves de bavardages, reprenons la route, je t'en prie.
Shane hocha la tête et suivit son amie qui s'enfonçait à nouveau dans les bois. Après tout, c'était bien ce qu'indiquait la carte, lorsqu'elle était encore lisible. Avant de s'enfoncer dans la forêt, elle remarqua deux traces de roues dans la terre boueuse.
Le bois semblait bien moins impressionnant maintenant que le vent s'était calmé. Il semblait preque chaleureux.
Les jeunes filles avançaient à un bon rytmme. Quand le soleil arriva à son zénith, l'appel lacintant de la faim se fit ressentir. Elles s'arrêterent donc au milieu du chemin, posant au sol leurs fins matelas. Puis elles sortirent leurs casse-croûte de leurs sacs.
— Ahh cha fait quand même franchement du bien. Chais pas trop si ch'est franchement diétèchose mais bon pas grave.
Lilaï approuva mentalement, trop concentrée dans l'engloutissement de son propre casse-croûte pour donner des signes visibles. Son appétit était tout de même visible. Elles engloutissaient chacune le repas avec le même entrain, se fichant pas mal qu'un morceau de pain aux courgettes et à la truite séchée ne soit pas le meilleur moyen possible de glorifier la gastronomie.
Elles burent ensuite quelques gorgées d'eau. Quand elles eurent finies leur pause rafraîchissante, elles reprirent leur cheminement dans les bois. Leurs sacs leur semblaient moins lourd.
Enfin, il est techniquement moins lourd vu qu'on a bouffé.
Quelques minutes après leur pause, Shane commença à serrer ses jambes et s'arrêta.
— Euh Lili ? Tu peut garder mon sac, j'ai un truc important à faire.
Elle partit en courant entre les arbres. Pour des raisons de bienséance, la scène qui a suivi ne fut pas décrite. Il ne sera pas non plus question de ce qu'à fait Lilaï, sûrement partie satisfaire ses propres besoins naturels, mais comme dit précedemment, la bienséance avant tout.
Après cette scène censurée, les jeunes filles reprirent leur route. Plus l'après-midi s'avançait, plus la descente devenait difficile, plus la moiteur de l'air devenait insupportable. Les jeunes filles s'arrêtaient régulièrement pour boire quelques gorgées d'eau.
Le bois semblait être infini, elles y étaient encore quand le soir commençait à s'installer. Elles mangèrent un morceau puis s'installèrent.
— Pourquoi on sort pas des bois, au moins pour dormir ? Ah oui, si il pleut, on sera moins mouillées ici.
— En effet. Je te souhaite une excellente nuit Shane.
— Ouahh.. Toi aussi Lili, toi aussi..
Shane s'enroula dans sa fine couverture et bailla. Le sommeil vint rapidement.
Ce soir là, la lune et les étoiles brillaient. La nuit était douceur, toutes traces de l'orages efffacées. Même les flaques les plus tenaces avaient séchées dans l'après-midi. Les cigales avaient même recommencé à chanter. Le calme régnait et le sommeil des deux amies ne fut nullement troublé.
Shane ouvrit lentement ses paupières. Elle était moins fatiguée que la veille, mais pas tout à fait opérationnelle non plus. Une légère rotation de sa tête lui apprit que Lilaï était déjà réveillée.
— Ouahh j'ai bien dormi.. J'ai faim..
Son amie, dont les besoins semblaient en accord avec les sien, sortit quelques biscuits. Après en avoir mangé deux chacune, elles repartirent.
Il faisait encore un peu sombre dans les bois. Quelquefois, les minces lueurs matinales se faufilait entre les branches, ajoutant des teintes jaunes au brun de la terre. Le sol ainsi illuminé ressemblait aux petits caramels d'Helyha, qu'on ne mangeait qu'au jours de fête. Les branches vertes viraient vers les courgettes trop mûres que sa mère la forçait à manger quand elle était petite.
Après de longues heures, de marche la fin du bois s'anonça enfin. Shane ouvrit les bras, afin de sentir à nouveau la caresse du soleil. Elle plissa tout de même les yeux, un peu éblouie.
— Enfin, on est sorti de ce putain de bois ! La vraie lumière m'avait manqué.
N'en étant pas une elle même, la brune ne voyait pas le vrai problème que posait la sortie de la forêt. Ce passage était en effet le seul avéré dans leur descente, et mis à part qu'l était sûr qu'elles devaient descendre en bas, la direction précise n'était pas assurée.
LilaÏ rappela donc sa camarade à la réalité.
— Shane ? Sans vouloir vexer ta merveilleuse personne, loin de moi cette idée bien sûr, j'ai une objection à formuler. Moi aussi, je suis fort soulagée d'être sortie de ce bois. Après tout, c'est une étape en moins. Mais mainteant, j'ignore où nous allons descendre.
Elle hésita quelques instants puis ajouta.
— Heureusement, ton sens de l'improvisation légendaire est là pour nous guider. Je me fierais à ton jugement.
Si par jugement, pile ou face intérieur était entendu, alors Shane possèdait de fantastiques capacités de jugement. Cependant, elle ne prit pas la décision suivante au hasard, bien que cela paraisse difficile à croire. Elle regarda en effet le sol puis déclara.
— Là, l'herbe est piétinée et des traces continuent sur le chemin. Quelqu'un a du passé par là si je ne m'abuse.
Son sens de l'observation-pas encore légendaire mais ça ne saurait tarder- avait vu juste. À quelques mètres des jeunes filles, deux longs traits applatissaient l'herbe. Elles suivirent sa trace jusqu'au chemin.
— Je te prie de m'excuser Shane, mais comment être sûr de savoir si au final, ceux qui ont pris ce chemin ne remontent pas ?
— Bah c'est pas grave. Au pire on aura retrouvé la route, et c'est franchement déjà pas mal.
Son amie hocha la tête, puis elles continuèrent leur chemin. La route serpentait en de longs virages. L'avantage de la forêt était une pente plus élevée, qui permettait de descendre plus vite.
Sur la route, le soleil tapait très fort. Shane commença à regretter d'avoir quitté la forêt. Un coup d'oeil rapide lui apprit que sa camarade était dans le même état. Elle s'épongeait régulièrement le front et s'éventait.
— Ahh.. J'espère qu'on a au moins un village en chemin.. Deux jours déjà qu'on est parties.. Dormir dans un vrai lit me manque déjà.
Quand midi arriva, elles n'avaient croisé personne sur la route, ni voyageurs, ni carioles, ni villages. Et de ce qu'on voyait en bas, il leur aurait fallut dévier de leur route, ce qui n'était pas préferable. Malgré la chaleur, Shane commençait à se rafraîchir. Son dos, pourtant mal aéré à cause du sac, était presque froid.
Elles s'arrêtrent sur le bord de la route, au cas où quelqu'un apparaitraient- par miracle, on ne sait jamais après tout-.
— Quelle chaleur insupportable ! Je suis bien heureuse que nous nous soyons arrêté.
—Moi aussi. Même si j'ai un peu moins chaud.
La rouquine but quelques gorgées de sa gourde.
— Shane aurais-tu l'amabilité de me remplir ma bouteille ? Après tout, c'est toi qui a l'outre.
Elle opéra et décrocha son sac de son dos. Elle comprit tout de suite ce qui clochait. IL était détrempé et des petites flaques d'eau marquaient son chemin. Elle ouvrit son bagage, pour vérifier son intuition. Des gouttes ruisselaient partout à l'intérieur. Du couteau de cuisine, à ses vêtements de rechange, tout était trempé. L'outre, elle, était presque vide, percée d'une longue entaille sur le côté.
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