1- Le palais d'Antigor.
" Dans un monde où saisons et périodes se mêlent, époques et contemporains s'entremêlent ; l'histoire fait désormais partie du présent et vice versa."
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On disait d'elle qu'elle était machiavélique, et qu'elle prenait un malin plaisir à faire souffrir les autres.
On disait d'elle qu'elle avait tué son propre père pour hériter au plus vite du trône d'Antigor et de son incommensurable palace luxueux qu'elle s'était empressée de transformer en prison dorée.
On disait d'elle qu'elle avait comis l'infamie avec son cousin, et qu'elle avait tué le fruit de ses entrailles, leur enfant pour l'offrir comme sacrifice à des dieux inconnus.
On disait d'elle qu'elle égorgeait des hommes à l'heure de la pleine lune après s'être servie d'eux comme déversoir à pulsions et objet de jouissance.
On disait d'elle qu'elle était méprisante, sournoise, imbue d'elle même et n'avait aucune compassion pour le pauvre, la veuve et l'orphelin.
On disait d'elle qu'elle n'avait pas de respect pour la chose d'autrui, qu'elle arrachait des terres à de nobles fermiers, les laissant sans demeure, sans rien pour se reconstruire.
On disait d'elle qu'elle possédait les âmes de tous ceux à son service, les envoûtait, les assujettissait pour que jamais ils ne se révoltent et lui soient entièrement dévoués.
On l'appelait Souveraine du malheur, car aucune avancée, aucun changement ne se faisait voir à Antigor, tandis que la faim, la maladie était le quotidien du bas peuple. La population croulait sur le poid d'innombrables taxes.
Et quiconque intentait une rébellion était passible de la peine de mort.
On disait d'elle qu'elle faisait régner la terreur dans son royaume, et s'était vrai.
Des rumeurs, et encore des rumeurs. Héraclite avait assez entendu. Mais peu lui importait, sa décision était déjà prise. Il irait tenter sa chance auprès de la souveraine ; quitte à mettre sa vie en péril.
__ « C'est du pur suicide ! » ; « Tu cours droit vers l'enfer ! » ; « Cette femme est sadique ! C'est une sorcière ! Elle n'aime personne ! » ; « Elle égorge des hommes, les arrache le cœur pour ensuite s'abreuver de leur sang ! », avaient lancé ses proches à son endroit pour tenter de le convaincre et de le faire revenir sur sa décision.
Il les avait balayé du revers de la main. Pour lui, c'était juste des rumeurs infondées. On médisait d'elle comme on le faisait avec la plupart des gouvernants de cette planète. Et puis, il irait voir de lui même. Chaque année pourtant, une vingtaine d'hommes étaient sélectionnés : beaux, forts, adeptes des jeux de combats, fort cultivés, capables de parler et d'écrire plusieurs langues ; les parfaits stéréotypes des standards de beauté, établis depuis des millénaires par la société humaine elle même. Vingt hommes, qui prétendaient au titre de Prince Évetier de Witminllord, l'époux où plutôt le fameux "époux" de la souveraine.
Vingt des plus robustes, beaux et intelligents d'Antigor, qui partaient chaque année, courtiser la reine, la séduire, et trouver grâce à ses yeux, pour un futur (on l'espérait vivement) mariage royal, mais qui ne revenaient jamais. Que leur arrivait-ils ? Que devenaient-ils ? Où étaient-ils tous passés ? Mouraient-ils ? Devenaient-ils esclaves de la méchante souveraine ? Les envoyait-on en exil dans un lieu méconnu des hommes pour que jamais ils ne révèlent quoique ce soit ? Personne n'avait la réponse, car aucun n'était jamais revenu. Personne n'avait plus donné de nouvelles à leurs familles, les laissant dans le désarroi et l'amertume totale. Depuis dix ans c'était succédé des vagues de vingt chaque année, qui disparaîssaient en ne laissant qu'une seule et même trace : la souveraine toujours célibataire.
Alors que les énormes grilles du palais grincèrent derrière son dos, Héraclite eu une réflexion ,: "J'ignore combien de temps ont les sélectionnés pour gagner ses faveurs, mais si au bout d'un mois je suis toujours vivant je m'échapperai d'ici. Je m'en fais la promesse.„ Le temps était d'une chaleur massacrante. Le soleil à son Zenith, brillait triomphalement dans le ciel par cette heure de midi. Telles des flammes on se sentait consumer de l'intérieur comme de l'extérieur. Le jeune homme avança le pas et traversa le premier pont-levis. À priori celui-ci pouvait se présenter comme un échappatoire favorable. Il n'y avait aucun garde posté, les seuls qu'il avait rencontré, deux pour être plus précis, se tenaient au niveau des grilles de fer à bonne distance de là. Alors il retint cet endroit au cas où. Mais ce qu'il ignorait c'était que le pont mesurait plus de 15 mètres de haut et avait été construit à un endroit stratégique de la rivière ou son lit était peu profond et jonché de rochers tous plus gros les uns des autres. Tout avait été savamment pensé pour que la chute soit inévitablement mortelle. Le jeune homme passa le deuxième pont identique au précédent et se trouvait maintenant devant une imposante forteresse. On ouvrit un des grands battants pour le laisser entrer ; ils étaient informés des arrivées des prétendants de la souveraine en temps et en heure.
Au fur et mesure qu'il avançait, Héraclite était subjugué par les fortes protections qui entouraient ce palais. Du temps du roi, le palais ne comportait que son grand portail de fer qui laissait bien entrevoir les bâtiments de pierre du château, ainsi que ses jolis jardins de l'extérieur. Les habitants avaient pour habitude de le contempler à bonne distance. Du temps de sa fille s'était tout un arsenal de barricades qui avait été mis en place. Craignait-elle qu'on vienne la déloger de sa place de choix ? Où pire craignait-elle d'être un jour assassinée dans son sommeil ? Avec tout ce qui se disait sur elle, cela ne serait pas très étonnant. Après la forteresse, il passa le fameux portail de fer qui avait été gardé, et aperçu l'édifice royal. D'immenses jardins de gauche à droite soigneusement entretenu, séparaient le palais de son portail. Les vastes étendues verdoyant s'étendaient sur des milliers de mètres carrés et au milieu, une longue et droite allée pavée se révélait. Le jeune homme l'emprunta et au bout de cinq minutes de marche arriva enfin en face de l'édifice royal.
Il ne s'y attarda pas. Poussa les deux grands battants de bois massif, car il n'y avait pas de gardes une fois de plus et se retrouva dans le hall d'entrée, une immense pièce luxueuse haute de huit mètres était ornée de grands lustres où brillaient autant d'ampoule que possible, de plusieurs vases contenant des centaines de fleurs, de fresques minutieusement peintes sur le plafond et certains murs. Aussi un beau tapis rouge recouvrait une partie du sol de marbre ainsi que les escaliers menant aux niveaux supérieurs de la demeure. La pièce était chaleureuse.
Il y eu des pas, et Héraclite tourna le regard parallèlement aux escaliers et aperçu un homme qui s'approchait de lui à grand pas. "Peut être un servant", se dit il. Arrivé à sa hauteur, l'homme se présenta :
__ Alexor de Bovane, je suis le majordome de Madame. Je suis chargé d'accueillir les prétendants de sa Majesté ainsi que de les orienter comme il se doit dans son humble château, se présenta l'homme à l'embonpoint remarquable en s'inclinant légèrement face à l'hôte du palais.
Madame ?? Pourquoi l'avait-il appelé de façon si familière pour un homme de son rang ? Laissait-il entrevoir par là que la souveraine était une femme approchable ? Et tu parles d'un humble château, même dans les hôtels les plus somptueux d'Oragor la capitale, on n'y voyait pareille opulence. Héraclite acquiesça au monsieur bouru et le suivit simplement. Les deux hommes longèrent le couloir par lequel Alexor le majordome était venu, prirent des escaliers moins frappant que ceux du hall et débouchèrent sur un carrefour. Plusieurs couloirs de droite à gauche et par devant se croisèrent en ce point central. Plusieurs domestiques et ouvriers s'activaient avec une grande énergie. Les allées de l'enceinte étaient bondés, des gens venaient et repartaient, plateaux en mains, paniers, linges, s'évitaient de près manquant de se bousculer au passage. Ils se saluaient au passage, riaient à quelques blagues éclairs, certains même se permettaient de fredonner des airs mélodieux. Quel choc ! On avait dit de cette endroit qu'il était froid, renfermé et irrémédiablement sans aucun signe de vie, encore moins de joie. Là encore, ça n'avait été que des rumeurs qui avaient circulé dans l'unique but de ternir l'image de la détestable souveraine d'Antigor. Où alors toute cette agitation était tout simplement dû à l'arrivée des vingt nouveaux aspirants.
Le jeune prétendant suivi le majordome, se faufilant maladroitement entre les nombreux ouvriers qui allaient et venaient. Ils prirent à gauche, puis dévalaient à nouveau des escaliers et arrivèrent dans un couloir, plus calme et surtout désert. Tout était toujours magnifiquement agencé et ne laissait aucune place pour la critique. Le majordome s'arrêta devant une porte, se tourna vers son suiveur et lui fit savoir d'un léger inclinement de la tête qu'il était arrivé. Aussitôt il disparut dans le couloir laissant Héraclite seul face à son destin.
__ Bon bah... allons y.
Il activa la poignée et pénétra dans une grande pièce lumineuse. Une chambre. "Où plutôt une maison miniature", pensa le jeune homme. En effet elle était vaste, dotée d'un grand lit qui trônait majestueusement au centre de la pièce. Sur le côté opposé à la porte se trouvait un petit bureau et en face, un petit salon bien aménagé. Il eut juste le temps de déposer son petit bagage près du lit que la porte s'ouvrit en trombe. Trois servantes et un valet avaient fait leur entrée sans même prendre la peine de frapper. Et s'il s'était retrouvé en posture indélicate ? Décidément, certaines manières devaient être revues dans ce palais.
__ Lequel de ces costumes pensez-vous le conviendra le mieux ? Le noir où le rouge sang ?questionna une des servantes à ses comparses.
__ J'avais songé au marron, émit une deuxième. Ce marron. Celui que tient Aurélius.
__ Hummmm il est un p'tit peu trop voyant je crois, renchérit la concernée. Trouvons lui quelque chose de plus discret.
Ils parlaient entre eux comme ci Héraclite n'était guère présent. Ils ne lui avaient même pas adressé un regard depuis qu'ils étaient entrés, ignorant complètement sa présence et son avis. Le jeune homme lui, se contenta à son tour d'observer la scène non sans amusement comme s'il ne s'agissait pas de lui.
__ Il est juste trop éclatant voyons ! Avez-vous peur des belles choses très chère ? riat celle qui avait proposé le costume marron.
__ Moi je préfère le noir. Il est beaucoup plus sobre et élégant que les autres, émit enfin le seul homme du groupe.
Et Héraclite partageait le choix du jeune valet. D'un commun accord les ouvriers acquiescèrent et choisirent une chemise de la même couleur ainsi qu'une belle paire de bottines homme d'un noir ciré, et se retournèrent enfin vers le jeune homme toujours debout près du lit. Zina, une des servantes vint déposer sur le lit, le fameux costume noir d'une main délicate et retourna se placer près de ses camarades en face du jeune homme.
__ Maintenant habillez-vous, dirent-ils en chœur.
Confus, il préféra ne pas deviner ce que son cerveau se démerdait déjà à lui faire comprendre et osa quand même.
__ Euh... pourrais-je avoir un peu d'intimité s'ils vous plaît ?
Ils le fixèrent avec gravité une seconde, puis ils éclataient tous les quatre de rire.
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