Partie 3

Merci pour votre accueil et vos commentaires pour les 2 premiers chapitres !
On poursuit sur les 'retrouvailles' et le déni d'Harry, et c'est clairement pas la joie, ne m'en voulez pas trop...

***

Il est assis parterre dans un coin de la pièce, les jambes repliées. Quand il lève les yeux vers moi, je vois que son arcade sourcilière est ouverte et que du sang s'y coagule. Je serre les dents. Que pourrais-je dire contre cet évident interrogatoire musclé ?

Le silence est palpable entre nous.

Je me racle la gorge. J'ai mille questions à lui poser, mille reproches, mille accusations. Mais c'est lui qui brise le silence.

Il se lève difficilement et s'approche du voile magnétique.

- Merci d'être revenu...
- Je ne sais pas si j'aurai du, je bredouille.

Je baisse les yeux vers mes chaussures, pour fuir son regard et puiser la force de rester face à lui sans flancher. Je hausse les épaules.

- Je ne sais pas ce que tu attends de moi Malefoy, et je ne suis pas sûr de pouvoir t'aider.

Le silence s'étire et je lève les yeux vers lui. Il fait pâle figure dans ses vêtements déchirés et ses cernes sous les yeux. J'ai l'impression qu'il suffirait d'un souffle pour qu'il s'effondre en miettes. Il m'observe, me détaille et l'intensité de son regard me fait rougir. Je ne sais pas ce qu'il veut et j'aimerais lui hurler, mais pourquoi tu es revenu ?, pourquoi tu n'es pas mort une bonne fois pour toutes !!

- Tu sais Harry, ce n'est qu'en pensant à toi que j'ai tenu tout ce temps...

Sa voix est posée et contrôlée malgré le contexte et sa fatigue manifeste. Mais il ne peut pas jouer à ce jeu-là. Il a perdu ce droit après trois ans sans la moindre nouvelle. Trois ans à tenter d'oublier ce qu'il s'était passé entre nous, une putain d'erreur inavouable ! Un moment de faiblesse ! Trois ans à effacer sa gueule de mangemort de ma mémoire !
Il ne peut pas me regarder en face et me dire ça sans trembler. Je n'y arrive pas moi, comment aurait-il le droit lui ? Alors j'explose.

- Tu nous as trahi Malefoy ! Tu as tué des gens, des enfants ! Les survivants peuvent en témoigner, tu étais là lors des rafles et des exécutions !

S'il était calme jusqu'à présent, il fronce maintenant les sourcils. Son regard se rétrécit et se fait perçant.

- Mais tu croyais quoi Potter ? Que je pouvais vraiment m'infiltrer et gagner Sa confiance sans verser le moindre sang ? Ne fais pas l'innocent ! Tu le savais quand j'ai pris ma décision ! J'ai fait ce que j'ai pu : des listes modifiées, des lieux renseignés, j'ai réussi à rayer des centaines de noms sur ces listes de Cracmols, pas d'un coup bien sûr mais quelques dizaines à chaque fois, et des enfants principalement.. j'ai envoyé ces renseignements à Rogue qui faisait passer à des informateurs de l'Ordre ! Je peux te donner des dates, des noms de villes et même certains noms de sorciers que j'ai pu sauver, va vérifier par toi-même !

Il fait les cent pas dans la cellule minuscule. Sa voix tremble et sa colère est froide. Elle pourrait déborder, se faufiler, trouver un chemin dans ces larmes accrochées à ses cils qu'il retient. Je sais qu'il pourrait frapper des poings contre le champ magnétique mais les précédentes décharges l'ont dissuadé...

Je sors de la cellule et reviens avec un carnet. Je note les noms et les lieux qu'il me donne ainsi que des dates précises. Pendant que je tente de relire et de corriger tant bien que mal mes pattes de mouches, je sens son regard brûlant sur ma nuque.

Je range le carnet dans ma poche arrière, je ne sais pas si ces informations changeront quoique ce soit, ni si quelqu'un se donnera même la peine d'aller vérifier ce qu'il dit.

- Je transmettrai ces informations aux Aurors.

Il hoche la tête, comme pour dire Merci.
Il enfouit ses mains dans ses poches mais son regard ne me quitte pas, comme s'il ne voulait pas me laisser partir.

- Pourquoi tu n'es pas Auror toi-même Harry, c'était ton rêve à l'époque...

A l'époque.
J'ai envie d'enfouir ma tête sous un coussin de plomb et d'empêcher le passé de remonter à la surface.

- Les journaux disent que tu t'es fiancé avec la rouquine Weasley.

Face à mon silence, un drôle de son sort de sa bouche entre le sanglot et le ricanement.

- C'est donc vrai ?

Oui. Et alors ? J'ai envie de lui crier. Qu'est-ce que ça peut te foutre ? Tu n'as aucun droit de demander ça !!
Il murmure.

- Je l'ai fait pour nous, tu te souviens ?

Et là tout de suite, j'ai envie de le frapper parce qu'il n'a aucun droit de me regarder avec cette tristesse dans le regard !

- C'était dans une autre vie Drago !! Une putain d'éternité !!

- Trois ans Harry !! Trois ans, à l'échelle d'une vie, c'est rien !! Pour moi rien a changé...

Tais-toi !! je devrais lui crier, mais mes oreilles bourdonnent, cette putain de salle trop blanche me donne le tournis. Quand est-ce que j'ai perdu le contrôle de ma vie ?
Il me fixe avec une intensité grave, il attend une réponse et ma langue est devenue de plomb. Au bout de longues secondes, ses épaules s'affaissent.

- Mais si ça ne veut plus rien dire pour toi, alors donne-moi le baiser de la Mort, c'est ce que tu voudrais toi, n'est-ce pas ?

Il ferme les yeux et va s'appuyer contre le mur, au fond de la pièce, dos tourné.

- Va-t-en, laisse tomber et va retrouver ta vie Potter !

***

- Malefoy serait donc des nôtres, je peux pas y croire ! lance Ron en se resservant dans la grande marmite posée sur la table. Pourquoi il ne s'est pas rendu dès la mort de Vous-Savez-Qui ? Pourquoi il est pas revenu vers nous ?

Hermione hausse les épaules.

- Il n'y avait personne pour témoigner de son innocence, tous les mangemorts arrêtés ont fini à Azkaban, personne ne sait ce qu'il a vécu depuis tout ce temps, on ne peut pas le juger si facilement.

La conversation est cotonneuse, lointaine. Je suis attablé avec eux, mes doigts serrés sur ma fourchette mais je suis à mille lieues de moi-même. Quand Ron m'interpelle j'essaie de me reconcentrer.

- Tu en penses quoi Harry ? Il dit la vérité ?

Quelle vérité ? La vérité, c'est qu'il était plus simple de crier à l'abandon, à la traîtrise, aux erreurs de jeunesse et de se construire une raison, une mémoire défaillante, des non-dits enterrés sous une culpabilité qui me rongeait. La vérité, c'est Malefoy dans sa cellule minuscule après trois ans de cauchemars, de noirceurs, de désespoir, qui pense pourtant avoir agi pour le bien. La vérité, c'est le doute qui s'immisce dans mes entrailles. Et s'il disait la vérité ? Le souvenir de la douleur de l'abandon me revient comme un haut-le-cœur. La vérité, c'est que c'était plus simple d'avoir remisé ces souvenirs, de se dire que j'avais tout imaginé, que Malefoy m'avait simplement trahi plutôt que de me sentir responsable de son sort au plus près des Ténèbres.
Et la vérité ce soir-là, c'est que toutes mes certitudes sont en train de fondre.

***

Je suis à nouveau devant la porte de sa cellule, mes allées et venues grâce à la dérogation exceptionnelle de Shacklebot ne semblent intriguer personne. J'ai beau ne pas travailler au Ministère, voir et saluer le célèbre Harry Potter dans ses couloirs semble être devenu une habitude.

Le sorcier en charge de la sécurité me fait un petit signe de tête et j'entre dans la pièce. Malefoy est assis dans le même coin que la dernière fois. Il lève les yeux vers moi, et je peux voir sa pommette violacée. Sa tête retombe entre ses bras quand il me reconnaît.

Je ne sais pas pourquoi le voir dans cet état me met à ce point en colère. Je ressors en fulminant dans le couloir et hurle au sorcier sur le pas de la porte d'annuler le sort du bouclier magnétique. Il refuse, bredouille des excuses. J'en prends la responsabilité, je lui dis. Et apparemment les ordres d'Harry Potter valent des gallions.

Je retourne dans la cellule, ma baguette en main. Je tends le bras pour vérifier que le bouclier a bien été levé et c'est le cas.

Malefoy lève les yeux et j'y vois de la panique. Il se lève et serre les poings, prêt à se battre ?
Je m'assois sur le banc et l'invite à me rejoindre. Viens là. Mon ton est un peu plus autoritaire que je ne le voudrais.
Il s'approche, méfiant, un regard vers la porte.
Quand je pose ma baguette sur son arcade puis sur sa pommette pour le soigner il semble se détendre. Les yeux baissés, il fuit mon regard, je le sens.
Bientôt je sens ses doigts effleurés les miens, et je retire ma main rapidement. Il se raidit.

- Harry, tu sais ce qui me retenait de sombrer dans la folie, de mourir à petit feu là-bas ? C'était l'idée qu'un jour, je te reverrai et que je pourrais te serrer dans mes bras.

Je secoue la tête.

- C'est impossible Malefoy...
- Qu'est devenu le Potter qui était prêt à tout par Amour et qui se foutait des règles ?

Je range ma baguette, j'ai une boule de la taille d'un souaffle dans la gorge.

- Je crois qu'il est mort quand tu es parti...

Il retente une approche, et pose sa main fine sur la mienne. Elle est froide.

- Je te le redis Harry, pour moi rien a changé.

Comment peut-il foutre autant le bordel dans ma vie en une seule seconde ? Déséquilibrer les fondements d'une vie qu'on pensait toute tracée.

Je me lève rapidement et secoue la tête.

- Eh bien pour moi, tout a changé...

***

Bon... vous avez le droit de vous défouler et d'insulter notre Harry, mais je voulais montrer à quel point où on peut renier qui on est ou qui on a été pour se conformer aux regards des autres, et d'une certaine façon, effacer qui on est. C'est pas joyeux, mais Harry va avoir besoin de faire un gros travail sur lui :/

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