Chapitre 70 : Ce pourquoi on s'est battu
Vous êtes prêts pour la dernière salve?
Vous êtes prêt.e.s à faire vos adieux à Lucy et compagnie?
Allez. C'est parti et enjoy ! La fin est peu modifiée, j'ai juste rajouté quelques petits passages (vous allez les capter. Vous allez les apprécier).
Allez bonne lecture <3
***
Chapitre 70 : Ce pourquoi on s'est battu.
Lucy gémit dans ses couvertures quand le médicomage palpa ses côtes. Elle crut que sa poitrine allait exploser.
-Une de cassée, évalua-t-il alors en se redressant. Je vais te donner une potion qui te remettra sur pied, d'accord ?
Lucy ne répondit pas, repliant un peu plus ses jambes contre sa poitrine. Le médicomage s'éloigna dans l'infirmerie et s'arrêta devant le lit de Lorcan, qui s'était tordu la cheville en poursuivant Ellie Cattermole. Quelques médicomages de Ste-Mangouste avaient été dépêchés à Poudlard quand Hannah s'était avérée incapable de soigner les quelques blessés, bien trop bouleversée par la mort de Zephan Finnigan.
Zephan.
Lucy réprima les sanglots qui lui nouaient la gorge et menaçaient de sortir. Elle revoyait ce qui s'était passé dans la Chambre des Secrets comme dans un mauvais rêve. Ils avaient décidé de la jouer fine et de d'abord libérer discrètement les otages. La voix amplifiée, Roxanne avait parlé Fourchelang pour faire diversion et semer le trouble dans le rang des Fantômes. James, Louis, Jina et Lucy en avait profité pour se glisser dans la Salle sous un sortilège de Désillusion. Elle avait été la première à atteindre Gethin, simplement stupéfixié. Elle avait presque pleuré de soulagement en constatant que le Gryffondor était indemne. James avait récupéré leurs baguettes et Jina et Louis s'occupaient de ceux attachés au bûcher.
Puis Laureen avait incendié celui de Shannon, provoquant éclat, cris, et la marche en avant des élèves de Poudlard contre les Fantômes. Ils avaient tous surgi du tunnel, la baguette brandie, désarmant les ravisseurs. Après avoir constaté que, contre toute attente, Shannon n'avait pas été blessée, Lucy avait levé le sortilège de Désillusion pour ne pas prendre un sort perdu et s'était jetée sur la personne qui tenait Luke en joue. Celui-ci avait été libéré par Jina, et avait récupéré un instant plus tard sa baguette, si bien qu'il se trouva vite aux coté de Lucy. Molly était venu la rejoindre également, stupéfixiant un homme dans son dos, que la jeune fille n'avait pas vu venir. Le sang sur le visage de sa sœur avait effrayé la préfète, mais elle fut soulagée de voir dans la puissance de ses sorts qu'elle était en pleine possession de ses capacités. Luke avait l'air indemne également, comme presque tout le monde, excepté Shannon. Lucy avait eu le temps d'apercevoir la tâche noire sur sa poitrine avant que la Poufsouffle ne se jette sur sa cousine. Les Aurors avaient surgi un instant plus tard, Victoire et Harry à leur tête. Trop occupée par ses propres combats, elle n'avait pas suivi celui entre les Finnigan et Laureen Bones. Un sortilège l'avait envoyée valser à l'autre bout de la pièce, et c'était sans doute ce choc qui avait brisé ses côtes fragiles. Pourtant elle avait ignoré la douleur et s'était relevée.
Mais à un moment, tout s'était arrêté.
Et quand elle s'était retournée, elle avait trouvé une Shannon éplorée sur le corps sans vie de Zephan.
Lucy avait eu l'impression d'entendre les pleurs de Shannon à travers un long tunnel, comme s'ils avaient appartenu à un autre monde. Elle avait voulu se précipiter vers son amie, mais Harry l'en avait défendu et l'avait forcé à évacuer parmi les premières pour soigner ses blessures. Ils étaient si nombreux, et la sortie était si étroite qu'ils avaient dû utiliser des portoloins pour s'échapper de ce sinistre tombeau. Lucy avait été parmi les premières à sortir de là, avec Lorcan et Molly. Victoire l'avant emmené directement à l'infirmerie, où elle était restée longtemps dans les bras de sa sœur, pleurant toutes les larmes de son corps. Molly avait tenté de la rassurer, de lui dire que si elle était arrivée une seconde plus tard, il n'y aurait pas qu'un cadavre mais sept. Mais cela ne consolait pas Lucy le moins du monde.
Peu à peu, l'infirmerie s'était remplie. Tous les élèves qui avaient été enlevé avaient été forcés de s'y rendre, même s'ils n'avaient rien. Luke se retrouva ainsi dans le lit à d'en face, avec Lily et Scorpius. Max Yaxley et Edward Roockwood avaient été emmené plus loin. Shannon, elle, avait été directement emmené dans le bureau de Hannah, pour lui laisser plus d'intimité. Adam avait été autorisé à rester avec Gethin dans le fond de l'infirmerie. McGonagall était elle aussi passée par là, avec d'autres professeurs. Mais elle paraissait beaucoup trop émue pour ne serait-ce que pour songer à les réprimander. Elle annonça que les parents des victimes et des blessés avaient été prévenus, et que tous les Fantômes avaient été arrêté. Cinq avaient essayé de fuir quand les élèves avaient attaqué, mais Marcus, Rose et Henry, restés à l'entrée de la bouche, avaient été efficaces : personne ne s'était échappé. L'oncle Harry passa ensuite visiter Lily, Ginny le talonnant. Molly n'avait pas quitté Lucy et les deux sœurs étaient restées entrelacées. Un médicomage avait soigné la blessure de Molly à l'arcade sourcilière. Elle semblait assez secouée, mais restait assez forte pour Lucy.
Après examen du médicomage, Luke se leva et s'assit au pied du lit de Lucy. Elle avait été tellement soulagée de le retrouver sain et sauf, mais ce soulagement avait été vide balayé par la mort de Zephan. Luke pressa le genou de Lucy.
-Comment tu te sens, Weasley ?
-Minable.
En disant cela, elle sentit les larmes lui monter à nouveau aux yeux. Molly resserra un peu plus sa prise sur elle, et Luke lui jeta un regard pénétrant, insondable.
-Weasley ... Tu n'avais pas le temps d'attendre les secours. Quand vous êtes arrivés, ils étaient à une seconde de nous cramer. Tu ne pouvais pas attendre les Aurors. Tu as fait ce qu'il fallait.
-Ce qu'il fallait ? répéta Lucy d'une voix rauque. Ce ... ce qu'il fallait ? Tu veux rire, j'ai tout fait de travers ! On ... on s'est cru trop fort, on a cru qu'on allait tout arranger ...
Elle pressa les paupières. Et voilà que l'hybris revenait la hanter mais cette fois elle n'avait pas été seule. Ça avait été un orgueil collectif – et au combien démesuré.
-Vous vouliez juste nous sauver, répliqua Molly en caressant doucement les cheveux de sa sœur. Et c'est ce que vous avez fait.
-Non. On a tué Zephan.
Une larme roula sur sa joue. Molly renifla à ses côtés et Lucy comprit qu'elle non plus n'était pas loin de pleurer. Même Luke abandonna son expression compatissante et parut sur le point de craquer. Il ouvrit la bouche, mais avant qu'il ne puisse dire un mot, la porte de l'infirmerie s'ouvrit à la volée. Percy Weasley en personne la passa, les cheveux ébouriffés, les lunettes de travers, si bien que Lucy fut certaine qu'on venait de le tirer du lit. Son regard se porta sur ses filles, et le soulagement emplit ses iris. Il se précipita vers elle et agrippa leurs deux mains.
-McGonagall vient de tout me raconter, annonça-t-il d'une voix qui tremblait un peu. Comment vous allez ?
-On n'a rien de grave, ne t'en fais pas, le rassura Molly avec un sourire tendu.
Mais visiblement, leur père s'inquiétait tout de même et il caressa doucement du pouce la fraiche cicatrice sur le front de Molly. Puis son regard se porta sur Lucy et effleura les larmes qui coulaient sur ses joues. Il pressa doucement ses doigts.
-Ma chérie ... Rien de ce qui ne s'est passé n'est de ta faute. James et Louis nous ont tout raconté. Harry serait arrivé trop tard, il le savait. Il l'a admis.
-Mais on aurait dû interdire à Zephan de venir ... Et à Will et Rose ... Ils étaient trop jeunes ...
-Aucun d'entre vous n'aurez dû y aller. C'était ... Une erreur, une grossière erreur. Et ce n'est de la faute de personne.
-A part de Laureen Bones, vous voulez dire, répliqua Luke, mortifié.
Percy pencha la tête pour lui accorder ce point. La gorge de Lucy se noua d'avantage quand elle songea à la Préfète de Serdaigle. Elle l'avait déjà vu user d'un Sortilège Impardonnable. C'était contre Shannon, et il s'agissait du sortilège Doloris. Mais à ce moment, Shannon avait réussi à le parer avec une facilité déconcertante, et pour justifier cet exploit, elle avait argué que Laureen n'avait pas la capacité magique suffisante pour lancer un sortilège d'une telle puissance, et qu'il avait été si faible qu'elle avait pu le parer.
Mais alors, comment diable avait-elle fait pour réussir le pire d'entre tous ?
-Je ne comprends vraiment pas ..., gémit-t-elle en se prenant la tête entre les mains. Papa, je te jure ... Je ne comprends pas ce qui a pu se passer ... Comment on a pu foirer à ce point ...
Percy serra un peu plus la main de sa fille, et Lucy sentit un de ses doigts lui caresser tendrement la joue.
-Il faut que tu te reposes, ma chérie. Demain ce sera déjà plus clair. C'est valable pour vous aussi (il jeta un bref regard à Molly et Luke). On a reçu une lettre de tes parents d'ailleurs, Luke. Ils sont rassurés de savoir que tu vas bien, mais ne peuvent pas se déplacer jusqu'ici.
-Rien ne pouvait me faire plus plaisir, railla Luke, avec néanmoins moins de vergue qu'ordinaire.
Percy eut un regard d'avertissement, l'air de lui rappeler ce que Luke avait promis dans cette même infirmerie il y avait quelques semaines : faire profil bas. Il ajouta :
-Je vais demander aux médicomages de vous préparer une potion de sommeil, pour ceux qui le souhaitent ...
-Ce ne serait pas de refus, avoua Luke dans un filet de voix. Merci, Monsieur Weasley.
-Vous avez prévenu toutes les familles ? s'enquit Molly avant que leur père ne s'éloigne. Même la mère de Gethin ?
-J'ai envoyé quelqu'un la prévenir, oui. Et de ce que je sais, Minerva parle actuellement à Susan et Seamus Finnigan.
-Oh mon dieu, souffla Molly, hébétée. Susan ... Ça va la détruire ...
Penser à la réaction de Susan Finnigan quand on lui annoncerait le décès de son fils brisa le cœur de Lucy et lui arracha encore quelques larmes. Et son professeur de sortilège, aurait-il toujours le sourire aux lèvres après la disparition de son neveu ? Et Shannon ... Shannon ... La culpabilité lui rongeait les entrailles, si bien qu'elle n'était pas sûre de trouver le sommeil, potion ou non. La porte de l'infirmerie s'ouvrit à nouveau, et un homme blond à la barbe finement taillée passa la porte, en compagnie d'une femme brune aux yeux larmoyants. Percy, qui discutait avec le médicomage, alla à leur rencontre.
-Mr. et Mrs. Yaxley, les salua-t-il dignement, avec professionnalisme. Votre fils est là-bas, si vous le souhaitez ...
-Le professeur Londubat nous a dit qu'un garçon était mort, hasarda timidement la femme. C'est vrai ?
Percy hocha gravement la tête et Mrs. Yaxley laissa échapper un hoquet d'horreur. Ils se précipitèrent dans le fond de l'infirmerie. Les parents de Edward Rookwood, furent les prochains à passer la porte, suivis de Daphné Greengrass, non en tant que directrice de Maison, mais en tant que tante de Scorpius. Elle se précipita à son chevet, sans adresser un regard à Lucy. Puis quelqu'un que Lucy ne s'attendait pas à avoir entra dans la l'infirmerie.
-Daphnéa ? s'étonna Molly, alors que l'ancienne Serpentard se précipiter vers elle.
Le feu et les larmes se battaient dans les yeux de la journaliste. Elle fixait sa petite-amie, et Lucy ne sut si elle voulait la frapper ou la prendre dans ses bras. Finalement, ce fut cette dernière option qui prima, et elle s'assit au bord du lit pour amener Molly contre elle.
-Oh par Merlin, Dieu merci tu vas bien, souffla-t-elle, visiblement secouée. Et toi aussi (Elle tapota la main de Lucy. La jeune fille sentit ses doigts trembler). Vous allez tous bien, Dieu merci ... Oh monsieur Weasley ! (Percy venait de réapparaitre, des fioles de potion à la main). J'ai fait ce que vous m'avez demandé.
Elle désigna la porte de l'infirmerie du menton et Lucy constata alors que Daphnéa n'était pas venue seule. Meredith, l'aînée des Scampers, se tenait sur le bas de la porte, les bras croisés sur sa poitrine. Elle était encore vêtue de sa blouse blanche que Lucy devinait être son uniforme de travail et un masque pendait à son poignet.
-Ah, Mrs. Barry, devina Percy en apercevant la jeune femme. Merci, Daphnéa.
-On m'a dit que Gethin avait été enlevé, dit Meredith d'une voix incertaine. Je sais que vous auriez préféré que ce soit ma mère qui vienne, mais comme j'étais debout ... J'étais censé être de garde, cette nuit ...
-Il n'y a aucun problème. Venez, vos frères sont au fond. Ne vous en faites pas, ils ne sont pas blessés. Venez, je vais vous expliquer ...
-Ce garçon qui est mort ..., demanda Daphnéa à Molly, alors que Percy s'éloignait avec Meredith. Quel âge il avait ?
-Quinze ans.
Daphnéa sembla accuser le coup. Elle couvrit sa bouche de sa main, les larmes aux yeux.
-Ça va, affirma-t-elle quand Molly lui jeta un regard inquiet. C'est juste que ... Il a le même âge que Will ... Par Merlin, ça aurait pu être lui ...
-Ils étaient dans la même année, se souvint Lucy, la gorge nouée. Je crois qu'ils étaient un peu amis, je les ai déjà vu trainer ensemble ...
C'était d'ailleurs derrière lui que Zephan s'était élancé dans le long tunnel qui menait à la Chambre, se souvint Lucy, la gorge comprimée. Juste après avoir demandé à ce qu'on dise à Roxanne qui l'aimait si jamais ... Oh par Merlin. Si jamais.
-Va voir ton frère, alors, fit Molly en pressa doucement la main de Daphnéa. Il va avoir besoin de toi.
-Mais ...
-Je vais bien ! insista-t-elle, ses yeux roulants dans ses orbites. Ton frère doit plus avoir besoin de toi, Daph'. Tu devrais aller le voir.
Daphnéa finit par hocher mollement la tête et sortit de l'infirmerie. Quelques secondes plus tard, Harry émergea du couloir. Ses cheveux étaient en désordre et dans ses yeux, Lucy lisait un profond trouble. Son regard tomba sur sa nièce et son visage s'assombrit.
-Ah Lucy, ça tombe bien que tu sois là ... Je devais te parler, à toi et à Adam Scampers. Pour ce qui s'est passé.
-Ça ne peut pas attendre ? cingla immédiatement Luke. Elle a besoin de se reposer ...
-Malheureusement non. J'essaie d'assembler les pièces du puzzle le plus vite que possible. En l'occurrence, ça concerne cela.
Harry extirpa un parchemin de sa poche et Lucy reconnut la prophétie que Lysander, Adam et elle avait retranscrite. Un de ses cousins avait dû la garder et la donner à Harry. Luke jeta un regard interrogatif à son amie, avant de soupirer profondément :
-Dans ces cas-là je vais chercher Scampers ... Ne bougez pas ...
-Molly ? Tu peux nous laisser ?
Molly jeta un regard peu amène à Harry, et Lucy comprit qu'elle aussi aurait préféré que les questions attendent le matin. Pourtant, elle se leva, et retourna à son lit d'un air digne. Aussitôt, elle manqua à Lucy. Elle aurait voulu garder la présence rassurante de sa sœur auprès d'elle. Luke revint un instant plus tard, Adam sur ses talons. Le Gryffondor était dans un sale état, encore couverts de boue, les traits tirés, et les yeux rouges. Lucy voulut le prendre immédiatement dans ses bras, mais ses côtes l'en empêchaient. Le regard d'Adam passa brièvement sur elle, avant de se poser sur le parchemin que tenait Harry. Son visage devint livide. Il devait sans doute deviner quelle allait être la teneur de cette conversation.
-Ça ne peut pas attendre demain ? demanda-t-il en un murmure fatigué.
-Non, Adam, je regrette, il me faut des réponses.
-Gethin dort. Alors il faudra que ça attende demain.
Lucy ne fut pas surprise de la fermeté dans la voix d'Adam. Maintenant plus que jamais, il semblait déterminé à défendre son frère. Le visage de Harry se ferma et son regard s'assombrit. Lucy craignit alors que sa patience ait atteint ses limites et qu'il ne supporte plus la moindre réponse lacunaire.
-Ecoutez, entonna alors lentement Harry, d'une voix à peine plus haute qu'un murmure. Quelqu'un est mort ce soir. Et il y a de grandes chances que cela aurait pu être éviter ... Si vous nous aviez parlé de ce que vous nous cachez depuis le début.
-Oncle Harry ! suffoqua Lucy, indignée.
La culpabilité lui remua les entrailles de manière douloureuse ; mais ça ne devait rien être en comparaison d'Adam. Celui-ci eu un mouvement recul, comme si les mots de Harry le blessaient, de façon physique.
-On l'avait deviné, qu'il y avait des lacunes dans ce que vous nous disiez, poursuivit l'Auror sans le moindre état d'âme. On savait que ça te concernait, Adam. On vous a laissé nous le cacher sans creuser. J'étais ... j'étais persuadé que si ça avait été important, vous nous l'auriez dit. Que vous aviez compris, tous autant que vous êtes, que nous n'étions pas vos ennemis. Et pourtant, mon vieil instinct me dit que ce n'était pas si anodin que ça. Que ça aurait pu faire la différence entre un cadavre et aucun.
-Taisez-vous.
La voix d'Adam était très basse, brisée, et Lucy sut en entendant son timbre que ce que disait Harry faisait écho à ses peurs, à sa propre culpabilité. Adam se sentait responsable de la mort de Zephan.
Parce qu'il avait tardé à parler de Gethin. Et donc par extension de Laureen.
C'était atroce. Tout bonnement atroce. Luke jeta un regard venimeux à l'oncle Harry.
-Oh je vous en prie ! Ce n'est que l'un des nombreux paramètres dans ce fiasco ! Ne leur faites pas porter le chapeau, simplement parce que vous, vous vous êtes trompés.
-Luke !
Harry fixa Luke d'un air consterné, presque choqué. Adam aussi leva doucement les yeux sur le Serpentard. Si une lueur de reconnaissance brilla dans ses yeux, Lucy comprit que cela ne suffirait pas à le décharger de sa conscience.
-Mais enfin non, laissa échapper Harry, visiblement contrarié par la tournure de la conversation. Ce n'est absolument pas ... Je veux juste éviter d'avoir d'autres mauvaises surprises, je ...
-Je pense que maintenant, il n'y aura pas de nouvelles mauvaises surprises, Harry.
Percy venait d'émerger du fond de l'infirmerie, Meredith à ses côtés. La jeune femme noua son bras autour de celui de son frère en remarquant son trouble. Elle jeta un regard dérouté à Harry, puis à Lucy.
-Qu'est-ce qu'il se passe ?
-J'avais besoin d'interroger les enfants, s'expliqua Harry d'une voix résolument calme. Pour enfin pouvoir comprendre cette affaire dans son entièreté.
-Ça attendra demain, Harry, trancha Percy avec fermeté. Ils ont tous besoin de se reposer, la soirée a été longue pour tout le monde.
Lucy consulta sa montre et constata qu'il était deux heures du matin. Elle se rendit alors compte de l'immense fatigue qui lui tombait sur les épaules, bien qu'elle sache qu'elle ne saurait pas fermer l'œil. Harry fronça les sourcils, mais finit par se plier à l'avis de son beau-frère et quitta prestement l'infirmerie, avec une dernière œillade suspicieuse à Adam. Le Gryffondor se frotta le visage quand le battant de la porte se referma sur Harry.
-Adam ? s'inquiéta Meredith en serrant un peu plus son bras. Ça va ?
-Pas vraiment. J'ai ... J'ai besoin de prendre un peu l'air.
-Adam !
Mais il ne se retourna pas sur Lucy, et sortit sans demander son reste. Meredith et Lucy échangèrent un regard anxieux. La jeune fille voulut se lever pour suivre Adam, mais Luke plaqua une main sur son épaule pour l'en dissuader.
-Repose-toi, Weasley, tu es blessée. Je m'en charge.
-Vraiment ?
L'idée amusa très vaguement, petite lueur de joie dans son océan de profonde tristesse. Luke se fendit d'un demi-sourire et sortit à son tour, en promettant de revenir avec Adam. Meredith couvrit sa bouche de ses mains, le regard embué.
-Ce qui s'est passé ... La mort du garçon ... C'est vraiment de sa faute ?
-Bien sûr que non, affirma Lucy avant que son père ne puisse ouvrir la bouche. Luke a raison, il ... il y a beaucoup trop de paramètre pour que ce ne soit que la faute d'Adam.
-Nous ne blâmons personne, confirma Percy en hochant la tête. Mais ce serait bien que je vois Gethin quand il se réveillera. En attendant, des lits ont été mis à votre disposition dans la pièce adjacente.
Meredith hocha la tête la tête, et suivit Percy dans une autre salle. Les autres parents la suivirent, même le froid père de Scorpius, Drago Malefoy. Celui-ci avait l'air d'ailleurs singulièrement secoué. Percy revint ensuite et donna une fiole de potion à chacune de ses filles pour les inciter à dormir. Puis il quitta la pièce – et Lucy se demanda un instant si ce n'était pas pour chercher Luke et Adam. Molly but la potion et roula sur le côté. Un instant plus tard, un léger ronflement indiqua à sa sœur qu'elle dormait profondément. Lucy ne put se résoudre à la boire dans l'immédiat. Elle préférait attendre le retour de Luke et d'Adam. Alors elle se roula en boule dans son lit, le regard fixé sur la porte, la tête pleine des images horribles qui lui arrachèrent quelques larmes. Le sourire malicieux de Zephan et les gémissements de Shannon lui venaient sans cesse à l'esprit. Puis, après environ une heure d'attente, Luke et Adam passèrent la porte. Son meilleur ami partit dormir sans demander son reste, mais Adam remarqua qu'elle ne dormait pas. Il s'arrêta devant son lit, un instant, sans bouger. Ils se regardèrent sans dire un mot, avant que Lucy ne se redresse pour ouvrir les bras. Adam parut un instant hésiter, puis s'avança vers elle. Il se glissa dans ses draps avec elle et elle se blottit contre lui. Pour la première fois depuis des heures, elle s'autorisa à se détendre, et poussa un petit soupir pour évacuer la tension. Adam referma ses bras sur elle et cala sa tête sous son menton.
-Comment ça va ?
-Mes côtes me font un mal de chien. Mais ça va. Et toi ?
La question était idiote, Lucy le savait. Mais elle se sentait obligée de la poser. Les mains d'Adam se crispèrent dans son dos, et elle l'enlaça timidement.
-Luke a raison tu sais ... Ce n'est pas de ta faute.
-Comment tu peux dire ça ?
La voix d'Adam était atrocement rauque et étouffée. Lucy se défit de son étreinte, et se mit à sa hauteur pour pouvoir le regarder dans les yeux. Des larmes emplissaient ceux d'Adam. Elle ne se souvenait pas l'avoir vu pleurer une seule fois. Mais cette fois, il semblait réellement craquer.
-Si on avait parlé de Gethin..., poursuivit Adam en un murmure déchirant. Si on vous avait écouté et qu'on en avait parlé, on aurait parlé de Laureen. Et là ils auraient pu faire quelque chose. Il l'aurait peut-être arrêté. Elle aurait peut-être parlé de Crivey et de son but. Et il n'y aurait pas eu de rafle. Pas eu de Chambre et surtout ... Zephan ...
Adam s'interrompit et Lucy vit une larme rouler sur sa joue. Cette larme lui brisa le cœur et elle l'essuya de son pouce.
-Et peut-être que si Harry avait laissé plus d'Auror, ils seraient intervenus à temps et Zephan n'aurait pas eu à descendre, chuchota Lucy avec douceur. Peut-être que si j'avais été plus responsable, je ne l'aurais pas laissé descendre. Si Susan n'avait pas soutenu la loi, ils ne s'en seraient pas pris à Shannon, et Zephan n'aurait pas éprouvé le besoin de sauver sa sœur. Si un Détraqueur n'était pas passé devait Anthony Goldstein, Laureen n'aurait pas été traumatisée et n'aurait jamais tourné ainsi. Adam, il y a tellement de paramètres, tellement de scénarios différents qui auraient pu se produire pour empêcher cela ... Toi et Gethin n'êtes en rien responsable. Ou si tu l'es, je suis le suis tout autant. Lysander l'est, Luke l'est. Shannon l'est aussi. On aurait tous pu parler de Gethin. On ne l'a pas fait ... Mais Adam, ce n'est pas ça qui a tué Zephan. C'est Laureen. Elle et seulement elle.
Alors qu'elle disait ces mots, elle sentit ses larmes mouiller à nouveau ses joues, identiquement à Adam. Ils tremblaient tous les deux, éprouvés, les mains jointes sur le matelas, la culpabilité leur rongeant les entrailles doucement, comme un venin lent et douloureux. Adam se mordit la lèvre et Lucy entendit un sanglot s'échapper de sa gorge. N'y tenant plus, elle le prit dans ses bras et il nicha son visage dans son cou, pleurant tous les mots qu'il n'avait pas su sortir, tous ses regrets, et la perte de Zephan.
***
-Ça ne te fait rien de voir ta fille dormir avec un garçon ?
Lucy s'éveilla au son de cette voix, déboussolée. A ses côtés, Adam dormait à poing fermé, épuisé par ses pleurs, sa main toujours dans la sienne. A travers ses paupières mi-closes, Lucy vit que l'aube pointait dans l'infirmerie. Ses yeux se refermèrent alors qu'une autre voix dans son dos entonnait :
-Je ne suis pas idiot, Harry. Et puis s'il faut qu'elle ait un copain, ce garçon me semble très bien. Excellent élève, droit, aimable. De toute manière, je n'ai rien à dire sur la vie de ma fille.
Harry se tut après les mots de Percy. Ce fut celui-ci qui lâcha avec une certaine froideur :
-Du nouveau ?
-Oui. La nièce de Susan et Simon, Laureen ... Elle était tellement bouleversée d'avoir tué son cousin qu'elle a tout lâché. Ce n'était pas toujours très cohérent, mais ça nous a donné une bonne idée de leur plan d'ensemble.
-J'avoue ne pas comprendre cette fille ... Mettre tout en œuvre, tenter de tuer sa cousine, tuer le frère ... Pour après le regretter. Ça me dépasse complétement.
-Elle n'est pas équilibrée, Percy. Je te propose même un passage à Ste-Mangouste pour elle. Elle ... Elle a tellement été plongée dans la haine, une haine vraiment absolue qui ne trouvait pas vraiment de raison. Je me souviens qu'un jour Bellatrix Lestrange m'a dit qu'il fallait réellement vouloir la souffrance de l'autre, pour lancer ce genre de sortilège. Et vu comment elle parlait ... Cette souffrance, oui, elle la voulait. Elle a puisé dans sa haine pour lancer ce sortilège. C'est ce qui lui a donné la puissance nécessaire à mon sens. Elle a vu son premier plan échouer, elle ne voulait pas avoir fait ses efforts pour rien ... Percy ... Elle a incendié le bûcher de Shannon, tué Zephan ... Et quand on lui demande pourquoi, elle répète qu'elle « voulait arrêter de souffrir ».
Percy garda le silence un instant, l'air de méditer la proposition de Harry. Lucy gardait religieusement le silence, en s'efforçant de garder les larmes à distance.
-Et donc ? Qu'est-ce qu'elle t'a dit d'autre ?
-Dennis était en possession de la prophétie, depuis un long moment. Il semble qu'il n'ait pas immédiatement souhaité en faire usage. C'est l'annonce d'une loi d'Amnistie qui les a mis en ébullition. Ellie Cattermole m'a raconté que c'est là que Dennis leur a montré la prophétie et qu'ils ont décidé de la réaliser. De ... « brûler les erreurs du passé ».
-Avec le Sérum.
-Oui. D'abord, Dennis a essayé de semer le trouble, de faire comprendre que le temps de la vengeance était venu. Les photos de Colin collées aux lieux stratégiques, les messages, et enfin les agressions .... Et puis, les ennuis dans la Salle Commune de Serpentard. Apparemment, Crivey a jeté plusieurs fois le sortilège de l'Imperium à des élèves de Serpentard pour qu'ils enduisent leurs fenêtres d'une potion qui les rend sensibles aux vibrations, au point de les briser. Et il a lui-même posé des explosifs pour inonder leur Salle Commune.
-Et toutes ces potions ... C'était bien Pénélope ?
La réserve de son père crispa quelque peu Lucy. Elle se souvint alors que Pénélope Campbell – anciennement Deauclaire – avait été la petite amie de son père. L'imaginer en dangereuse criminelle devait être difficile pour lui.
-Justement, à ce propos ... Mes Aurors ont fait une descente à leur QG. Tu savais que Pénélope avait des enfants ?
-On ne s'est plus vraiment parlé après notre rupture ..., avoua Percy avec lenteur. J'étais un idiot et ... Bref. Non, je l'ignorais. Pourquoi ?
-Elle en a deux. Une fille et un garçon, de dix et sept ans. Ils les ont tous les deux retrouvés dans une cave insonorisée, hermétique à la magie. Oh ils allaient bien. Pas de maltraitances, pas de malnutrition, rien de ça ...
-Tu veux dire ... Qu'on a séquestré ses enfants ?
Lucy sentit une main invisible lui presser le cœur et lui retourna les entrailles. Le schéma de ce qui s'est passé au sein de ce groupe se faisait lentement dans son esprit. Harry parut opiner du chef.
-Donc tu penses ... Qu'on l'a obligée, qu'on l'a contrainte ?
-Ça colle avec son attitude. Elle n'a jamais rien dit : pas parce qu'elle ne voulait pas mais ... on aurait dit qu'elle avait peur. Et les autres membres ... Ils ne parlaient d'elle comme faisant partie intégrante du groupe. Juste qu'elle avait « plié ».
-Alors dès que tu auras la preuve formelle, ainsi que ses aveux, il faudra la libérer. J'irais la voir. Ils ont parlé des attaques du Mangenmagot ?
-C'est Evan Cressel qui a avoué le premier cela. Il m'a donné quelques noms. Pas Dennis – il était à l'école. Mais l'idée venait de lui.
-Ça me rend malade quand je repense aux heures que mes filles ont passées dans sa classe. Lucy me disait sans cesse qu'il la détestait, parce qu'elle était une Serpentard. Je ne la croyais pas. Je pensais qu'elle exagérait. Qu'elle n'aimait simplement pas la matière. Qu'est-ce que j'ai pu être stupide ...
Lucy fut prise d'une envie irrépressible de se retourner et de consoler son père. Chacun se sentait coupable de la situation, à sa manière.
-Je suis désolé, lâcha alors Harry. J'ai été brusque avec les gamins, tout à l'heure. Je ne voulais pas avoir l'air de les accabler. Peut-être que le fils Zabini a raison. Je cherchais à rejeter sur eux ma propre responsabilité.
-Sûr que tu as manqué de délicatesse. Je pense que les Scampers ont eu une vie assez difficile comme ça pour qu'on y rajoute la responsabilité de la mort d'un garçon.
-Enfin ... J'aimerais tout de même savoir ...
-En temps voulu, Harry. Je pense qu'ils ont compris. Mais laisse-les se remettre. A vrai dire, je pense commencer à avoir une certaine idée de ce qui se passe ... Et que ce n'est pas Adam qui nous donnera les réponses que l'on veut.
Le cœur de Lucy se serra. Evidemment, son père n'était pas idiot. L'enlèvement de Gethin et la découverte de la prophétie devaient soulever des soupçons. Un long silence s'installa entre les deux hommes. Puis Harry le brisa en déclarant :
-Je comprendrais que Hermione demande ma démission après ce fiasco ...
Lucy demeura figée, estomaquée par la proposition de son oncle. Elle entendit son père soupirer derrière elle, longuement. Elle sentait sa lassitude dans son râle.
-Vu ce qu'il s'est passé, je ne te cache pas qu'il y aura une enquête ministérielle. Et je pense ... préférable d'attendre ces conclusions pour prendre la moindre décision. Mais Luke Zabini a raison, Harry. Il y a tellement de choses, de paramètres qui auraient pu faire basculer ce qu'il s'est passé ... Personne n'est responsable. Si ce n'est la personne qui a jeté le sort.
-J'ai fait quand même de lourdes erreurs. J'aurais dû laisser plus d'Aurors à Poudlard, et des plus expérimentés que Victoire. J'aurais dû penser à la Chambre, les enfants m'avaient expliqué le lien, il était cohérent ... Quand je pense que des simples bonbons peuvent leurs permettre d'y entrer, c'est comme ça qu'à fait Dennis également.
-Ne te torture pas, Harry. Il y aura des procès et des enquêtes qui délieront tout ça. Tout ce qu'on peut faire, c'est attendre et tout faire pour que cela ne se reproduise plus. J'espère que la loi d'Amnistie aidera.
-Où ça en est ?
-Les débats sont clos. Elle sera votée ce matin dans son texte complet. C'est pour ça qu'Audrey n'a pas pu venir ici. Mais elle a de très bon espoir.
-Tant mieux. Tant mieux.
La conversation s'acheva en un grand silence, mortifié et gêné. Puis un des adjoints de Harry vint le chercher, alors que Percy restait au chevet de ses filles. Elle sentit son père ramener sa couverture jusque son menton et caresser ses cheveux avant de s'éloigner vers Molly. Lucy resta un long moment éveillée, les yeux clos, remettant de l'ordre dans sa tête. Finalement, une heure plus tard, elle n'y tint plus et se redressa lentement pour ne pas réveiller Adam. Percy était assis entre son lit et celui de Molly, lisant un dossier étalé sur leurs tables de chevet. Sa sœur dormait toujours profondément. Le Ministre leva les yeux sur elle, et sourit.
-Bien dormi ?
-Mouais.
Elle jeta un regard gêné à Adam, puis à son père. Elle n'avait jamais dit à ses parents qu'elle avait un petit-ami, et il était vrai qu'être surprise en train de dormir avec par son père avait quelque chose d'embarrassant. Mais Percy eut un sourire indulgent.
-Oh ne t'en fais, j'avais presque déjà deviné quand je suis venu pour l'histoire de l'antidote. Et ça m'a l'air d'un garçon bien, alors je ne dirais rien. Je te laisse gérer ça.
Lucy sourit et s'abstint de commentaire. Les gens commencèrent doucement à s'animer dans l'infirmerie : le père de Scorpius se leva pour se rendre au chevet de son fils, la mère Yaxley partit de bonne heure pour le Magenmagot, Lysander entra pour s'enquérir de l'état de Lorcan, blessé à la cheville. Mais le pire pour Lucy fut de voir le père de Shannon, Seamus Finnigan, passer la porte de l'infirmerie, les traits tirés et les yeux rouges. Percy l'emmena voir Shannon dans le bureau d'Hannah. Meredith s'éveilla et se rapprocha de Lucy au moment où Percy revenait vers elles.
-Comment va Shannon ? s'enquit Lucy à l'adresse de son père.
-Difficile à dire. Sa blessure est guérissable. Lourde, douloureuse, mais guérissable. Mais à l'heure actuelle ... Je ne suis pas sûre qu'elle ait envie de guérir.
Lucy sentit son cœur se serrer. Elle aurait voulu elle aussi aller au chevet de son amie, mais une partie d'elle avait peur qu'elle lui en veuille pour ce qui était arrivé à Zephan. Penser au garçon de Gryffondor fit remonter les larmes et elle les chassa d'un battement de cil.
-C'est terrible, souffla Meredith, elle aussi les larmes aux yeux. J'ai aussi failli perdre mes frères à plusieurs reprises ... La fois où Alan est passé par l'escalier ... On a vraiment cru ...
Meredith secoua la tête pour chasser les affreuses images de sa tête. Lucy et Percy échangèrent un regard gêné. Il était vrai que la situation devait rappeler de mauvais souvenir à l'aînée des Scampers. Des pas se firent entendre dans le fond de l'infirmerie, et Lucy vit la tête ébouriffée et fatiguée de Gethin émerger. Ses yeux s'écarquillèrent quand il croisa le regard de sa sœur.
-Meredith ?
-Coucou puceron.
La jeune femme lui ouvrit les bras. Gethin hésita un instant, avant de s'avancer et de se laisser étreindre par sa sœur. Lucy le vit lorgner Adam sous le bras de Meredith, les yeux douloureusement hantés. Il se dégagea, avant de se tourner vers Percy. Son regard était résolu, brillant, et Lucy comprit que le temps du sacro-saint secret des Scampers avait pris fin. Percy parut le lire également dans ses yeux, car il hocha doucement la tête.
-Il paraît que vous et moi devons parler, monsieur Scampers.
-Oui. Monsieur Weasley ... Je suis vraiment ...
Les larmes s'accumulèrent aux yeux de Gethin. Le garçon devait se sentir doublement coupable : c'était sa prophétie qui avait amené à la vengeance des Fantômes des Oubliés, et son silence sur son don n'avait rien arrangé. Percy lui pressa doucement l'épaule.
-Tu n'as pas à t'excuser. Rien de ce qui se passe n'a été de ta faute. Je vais jeter un sortilège et tu m'expliqueras tout, d'accord ?
Incapable d'articuler le moindre mot, Gethin hocha la tête et prit une chaise en face de celle de Percy. Celui-ci jeta un « assiurdiato », et laissa l'enfant vider son sac. Il expliqua tout ce qu'il avait dit à Lucy, il y a si longtemps dans la Salle-sur-Demande : les dessins, les visions, tout. Lucy prit le relai pour ce qui concernait la prophétie et raconta comment ils en avaient découvert l'existence. Gethin, toujours sous le joug du sortilège d'Oublis, laissa échapper quelques larmes. Adam se réveilla entre temps, les yeux rouges et vaincus.
Percy finit par hocher la tête et emmener les Scampers plus loin pour parler de ce qu'ils pourraient envisager pour protéger Gethin, laissa Lucy seule avec une Molly qui venait de se réveiller. Après passage du médicomage, l'ensemble des élèves, exception faite de Shannon, furent autorisés à quitter l'infirmerie. Molly prit sa sœur par le bras et elles sortirent dans le couloir.
-Comment tu te sens ? demanda Lucy.
Sa voix restait rauque, réduite à un murmure. Molly se passa la main sur le visage et plus particulièrement sur son arcade sourcilière fraîchement réparée.
-J'ai l'impression d'avoir une très mauvaise gueule de bois.
-Tu as déjà eu une gueule de bois ? demanda Lucy avec l'ombre d'un sourire.
-Ah ah ... Si tu savais ...
Molly se figea soudainement. Elles venaient d'arriver à dans le Hall d'entrée qui fourmillaient d'officiels. Parmi eux, Lucy reconnut le présentateur télé Tiberius Ackerley. Loin de sa flamboyance habituelle, il paraissait vouloir se faire tout petit devant oncle Harry. Plus loin, Lucy vit une femme qui ne pouvait qu'être une journaliste avec sa longue plume et son bloc-notes. Elle avait la décence d'avoir l'air affligé devant une autre femme, plus petite, aux abondantes boucles brunes qui pendaient sur ses épaules. Elle portait un simple jean et un tee-shirt délavé. Lucy la dévisagea, frappée par la foudre.
-Mais ... c'est Victoria Bennett ?
Molly lui planta son coude dans les côtes et Lucy sut qu'elle avait parlé un peu trop fort car les yeux de la célèbre joueuse de Quidditch se posèrent sur elle. Difficile de discerner le bleu de ses iris tant le blanc était veiné de rouge, et face à cette marque manifeste d'émotion, Lucy se rappela que ce n'était pas un poster mais une véritable personne, une humaine qui se tenait devant elle. Et que l'humaine en question venait de perdre un neveu.
-Vicky !
Simon Bones venait d'apparaître dans les escaliers, flanqué de ses deux enfants. Arwen se précipita immédiatement vers Victoria Bennett qui dédaigna la journaliste pour prendre sa fille dans ses bras et la serrer contre elle avec un gros soupir. Les sanglots de la petite chanteuse de Gryffondor morcelèrent le cœur de Lucy, malgré l'image touchante qui suivit. Car William lui aussi se précipita vers sa mère et son professeur de sortilège vint plaquer un long baiser au sommet du crâne de sa femme qui s'appuya largement sur lui.
Une véritable famille unie. Une véritable famille en deuil.
-Lucy, souffla Molly en la prenant par le bras. Viens, la directrice doit dire quelques mots au déjeuner ...
Lucy hocha mollement la tête, incapable de détacher son regard de la famille Bones et se laissa entrainer dans la Grande Salle. Molly les mena aux côtés Daphnéa et Will dans la Grande Salle. L'Attrapeur avait l'air singulièrement secoué, les yeux rouges, la mine pâle. Albus à côté de lui n'en menait pas plus large et fixait d'un air inquiet Scorpius qui paraissait se remettre difficilement de son enlèvement. Plus loin, chez les Gryffondor, Rose pleurait éperdument sur l'épaule de Hope et Max Yaxley regardait le vide, hagard. Londubat était lui avec Zoey et ils passaient tous les deux de table en table, l'air affecté. Seuls James, Roxanne et Louis manquaient à l'appel.
Eléonore, Luke et Marcus firent leur apparition et s'installèrent à leurs côtés.
-Tu ne t'es pas trompée de table ? tenta de plaisanter Eléonore face à Molly.
-Non, je suis là où je dois être, affirma-t-elle en prenant les mains de Lucy et Daphnéa.
Lucy sourit doucement alors que Luke s'installait à côté de lui. Lysander et Lorcan arrivèrent et Dominique sauta au cou de son petit-ami. Stephen Bennett passait d'élève en élève avec inquiétude malgré sa propre peine. Henry, Alexandra et Dorothy s'installèrent, et Luke détourna le regard. Lucy devina qu'il devait avoir dit à sa camarade de chambre qu'il ne souhaitait pas poursuivre leur relation, et cela se deviner à la détresse dans les yeux d'Alexandra. Lucy prit la main de son meilleur ami dans la sienne, arrachant un sourire à Luke. Les Bones finirent par rentrer dans la Grande Salle et à se disposer entre les tables de Gryffondor et de Poufsouffle. Les Scampers furent les derniers élèves à passer, avec Meredith, avant que la directrice n'arrive.
Lucy remarqua que la table des professeurs avait été agrandie pour prévoir de la place pour les parents qui était là : Ginny et Harry Potter, Drago Malefoy, Mrs. Yaxley, Mrs. et Mr. Roockwood ... Seuls les Finnigan manquaient, avant que Lucy n'aperçoive Susan remonter l'allée, les yeux brillants. Et elle n'était pas seule.
Percy et Audrey Weasley l'accompagnaient. Et dans leur foulée, les cheveux bruns tiré en arrière, le menton résolument relevé, Hermione Granger-Weasley avançait.
-Qu'est-ce que ta tante fout là, Weasley ? s'enquit Luke avec une certaine retenue dans la voix.
-J'ai une petite idée, évalua lentement Lucy, le cœur battant la chamade. On verra bien ...
-C'est tellement affreux ce qui se passe, commenta Henry d'une voix enrouée. Je ... Je ne pensais pas vivre ça un jour à Poudlard.
-On a des nouvelles de la fille ? s'enquit Gloria un peu plus loin. Comment elle s'appelle, déjà, Charlotte ?
-Shannon.
Les voix conjointes de Will, Luke et Lucy étaient froides et agacées. Mais la préfète résuma tout de même ce que son père lui avait dit. Will se prit la tête entre les mains et Daphnéa entoura ses épaules de son bras. Le haut de son corps se mit à trembler si fort que sa sœur l'enlaça un peu plus.
-Willy ...
-Non, c'est juste ... (Les larmes de Will s'écrasaient dans son assiette). Je ... Je passais mon temps à le charrier. C'était mon ami, le seul que j'avais en dehors de Serpentard, j'étais souvent en cours à côté de lui ... Mais je ne faisais que le charrier, toujours toujours, je ...
Un sanglot s'échappa de ses lèvres et Daphnéa posa sa tête contre la sienne, pleurant aussi face à la détresse de son frère. Marcus, en face de lui, allongea le bras pour poser une main sur la sienne et Will la serra. Il n'était pas le seul à pleurer : Rose, beaucoup de quatrième année qui avait connu Zephan ... Lucy ne savait ce qui était le plus déchirant entre les jumeaux Bones qui sanglotaient dans les bras de leurs parents ou Gethin, assis seul au bout de la table des Gryffondor, qui contemplait le tableau en pleurant silencieusement.
Finalement, McGonagall se leva et le silence se fit dans la Grande Salle, uniquement entrecoupé de reniflements et de pleurs. Lucy voyait d'ici le regard usé et ému de la directrice.
-Poudlard ce matin, entonna-t-elle d'une voix digne, mais rauque, se réveille avec l'impression d'avoir vécu un cauchemar. Des peurs et des choses que l'on a longuement pensé enterrées ont resurgi à la surface de la plus atroce des manières. Je ne doute pas un seul instant qu'aujourd'hui, certains d'entre vous ne souhaitent pas entendre ce que j'ai à dire et voudraient pleurer en paix. Mais j'ai pensé que nous vous devions quelques explications quant à ce qu'il s'est passé hier soir ... C'est pour ça que je laisse la parole au chef du Bureau des Aurors Harry Potter, et à la Ministre de la Magie Hermione Granger-Weasley.
Un silence éploré accueillit les deux anciens héros qui se levaient. Ils se mirent alors à résumer la conversation que Lucy avait surprise au petit matin, ajoutant que tous les Fantômes des Oubliés avaient été arrêtés et seraient jugés, Crivey en tête de liste. Pénélope Campbell, quant à elle, serait réhabilité dans son rôle de Maître des Potions : elle avait agi sous la contrainte, ses enfants étant menacés par les Fantômes. Tout le monde fut horrifié de l'apprendre, et Luke le premier, lui qui avait incriminé leur professeur. Ses doigts se crispèrent sur ceux de Lucy.
-Nous sommes conscient que ces révélations puissent en bouleverser plus d'un, poursuivit Hermione avec une grande douceur. Ainsi que, comme certain le savent déjà ... l'annonce du décès tragique de l'un des élèves de cette école.
Quelques sanglots accueillirent ses paroles. Susan Finnigan se prit le visage entre les mains et Simon Bones se pencha sur elle alors qu'elle semblait vaciller sur sa chaise. McGonagall elle-même semblait retenir ses larmes lorsqu'elle remplaça Hermione sur le présentoir.
-Zephan Finnigan, reprit-t-elle d'une voix aux accents étranglés, était un élève vif. Je ne vais pas mentir en disant que cela me plaisait, car rien ne semblait plus le rendre vivant que d'outrepasser le règlement. Il ... Il était néanmoins loyal et juste, et n'a pas hésité une seule seconde à aller sauver ceux qui avait été enlevé. Et à se sacrifier pour ceux qu'il aimait. Son immense courage doit évidemment être loué, et je ne pense pas me tromper que c'est ce que nous retiendrons de Zephan.
-Avec l'oreiller de Roxanne qui se transforme en porcelet, ajouta tout bas Luke avec un sourire. Ça, c'était du génie.
-Et ces deux « idées lumineuses », ricana Will en essuyant une de ses larmes. Inonder les toilettes des filles ... Il n'y avait que lui pour penser à ça.
Lucy hocha doucement la tête. A bien des égards, c'était grâce à Zephan qu'ils avaient réussi à descendre dans la Chambre. McGonagall marqua une pause, inspira profondément et annonça :
-Cette année scolaire a été éprouvante pour tous, si bien élèves que professeurs. Et elle a mis en lumière certains aspects de cette école et de ma direction que je ne voyais pas au moment où tout allait bien.
Certains élèves échangèrent des regards interloqués alors que la directrice prenait une inspiration. Lucy voyait en cet instant à quel point McGonagall était âgée : des fils blancs striés son chignon toujours impeccable, de profondes rides creusait son visage altier et sa main parcheminée agrippait la table. Ses yeux étaient d'un éclat sans âge de ceux qui avaient vécu trop de choses. Alors qu'elle prenait conscience de ses détails, une idée assez précise de ce que McGonagall pouvait annoncer se forma dans son esprit. Et cela ne manqua pas :
-C'est pourquoi j'ai pris la décision de démissionner de mon poste de directrice de Poudlard.
L'annonce eu son effet : des chuchotements perplexes et choqués parcourent la Salle alors que certains parents d'élèves tournaient un visage éberlué vers McGonagall.
-Mais Minerva, commença à protester Greengrass.
-Merci, Daphné, la coupa-t-elle immédiatement d'une voix devenue impérieuse. Ce n'est pas une décision que je prends sur un coup de tête : j'y ai réfléchi cette année scolaire durant. J'ai vécu assez de chose à Poudlard. Deux guerres et maintenant ça ... J'avoue ... Ne plus avoir le cœur assez solide pour continuer. Oh ce n'est pas par lâcheté. Je pense simplement qu'il est temps pour moi de passer la main. L'année prochaine, le Conseil d'Administration nommera un nouveau directeur plus jeune, qui saura gérer ce genre de situation. Sachez simplement ... que j'ai été plus que ravie de servir cette école, des années durant. Que ce soit en tant que professeur ou directrice. Poudlard restera à jamais une partie de moi.
-Et vous resterez une partie de Poudlard, assura Hermione avec déférence. Soyez-en assurée, Minerva.
-Merci, madame la Ministre ... Quoiqu'il en soit ... J'ai été ravie de tous vous connaître, et de vous avoir comme élèves. Et je vous souhaite à tous le meilleur, bien entendu. Oui, même à vous trois !
McGonagall fixait de son regard perçant la porte d'entrée et tout le monde se tourna d'un bloc vers les Mousquetaires. Aucun des trois ne s'étaient assis, se contentant de s'adosser aux murs en pierre avec flegme, le visage grave. Un sourire effleura leurs lèvres quand la directrice les apostropha.
-Ça aurait été moins drôle si ça n'avait pas été vous, professeur, garantit James. Notre succès, c'est aussi le vôtre.
-Et j'ignore si je dois prendre ça comme un compliment, Potter. Oh par Merlin. Rien que le fait d'avoir connu trois générations de Potter me fait rendre compte qu'il est grand temps que je prenne ma retraite. Je n'en supporterais pas une quatrième.
Une partie de l'assemblée éclata d'un petit rire qui creva la bulle de tension dans laquelle la pièce était plongée. McGonagall eut un sourire et échangea un regard avec Hermione qui hocha gravement la tête.
-Maintenant je dois céder la parole à Audrey Weasley, une membre éminente de notre Magenmagot.
Luke retint son souffle aux cotés de Lucy alors qu'Audrey se levait. Elle promena son regard bleu sur l'assemblée et eut un petit sourire en apercevant ses deux filles.
-Comme vous le savez, entonna-t-elle alors. Ce qui a déclenché toute cette folie, c'est l'annonce qu'une loi d'Amnistie était en projet. Et je pense qu'il est en mon devoir de vous éclaircir là-dessus. C'est une loi visant à pardonner pénalement à des personnes condamnées pour leurs crimes lors de la seconde guerre des sorciers. Evidemment que cette loi ne s'appliquera pas aux grands criminels de guerres. Evidemment que ceux qui ont tués, torturé ou emprisonné resteront derrière les barreaux. A vrai dire, notre principal objectif en édifiant cette loi ... C'était de libérer les enfants qui payaient pour leurs parents.
Elle entreprit alors d'expliquer les régimes spéciaux qui régissaient la vie des familles Mangemort et partisanes. Les regards des élèves jaugèrent ceux qui paraissaient en être victime : Scorpius, Edward Rookwood, Max Yaxley, Luke et Eléonore ... Les doigts du préfet se crispaient si fort sur deux de Lucy qu'elle en grimaça.
-Et c'est pourquoi, acheva Audrey en laissant échapper un petit sourire satisfait. J'ai réussi à obtenir du Magenmagot la mise en place de commissions qui décideront pour chaque famille si les contraintes restent de mise ou non. Mais plus que tout ... nous avons réussir à faire passer que tous ces enfants soient libérés de ce système. Plus aucune contrainte ne pèsera sur eux. Alors bien sûr, c'est une décision en sursit : au moindre fait suspect, acte anti-moldu, ou infraction à la loi, l'individu sera à nouveau soumis à une surveillance. Mais tant que vous êtes droit ... Vous pouvez considérer que vous êtes libérés.
Un immense silence tomba sur la Salle. Mais Lucy perçut le soulagement à ses petites choses. Luke lâcha un grand soupir et un petit sourire s'échappa de ses lèvres. Eléonore avait plaqué la main sur sa bouche, avant d'attraper celle de son frère, les yeux brillants. Marcus avait entouré les épaules de sa petite-amie et plaqué un baiser dans ses cheveux. Pourtant, d'autre personnes avaient une réaction tout autre : Roxanne avait pincé les lèvres, Lionel avait essuyé un rire incrédule, et Mary Arlett poussa un grognement sonore. Dégoûtée par ces réactions, Lucy fit la seule chose qu'elle pouvait faire en tant qu'enfant de ses parents. Elle lâcha la main de Luke, et se mit à lentement applaudir. Ses applaudissements résonnèrent dans la Salle, isolés mais sonores, jusqu'à qu'elle se rende compte qu'elle n'était plus seule. Adam se joignit à elle, puis Lysander, Molly, Stephen, les Mousquetaires, Jina, Marcus ... Bientôt, la majorité de la Salle salua la décision du Magenmagot, à grande force d'applaudissement. Audrey eut un grand sourire et posa un regard tendre sur Lucy – et elle comprit qu'elle la remerciait. Quand les applaudissements se perdirent dans les murs du château, Audrey se rassit et McGonagall reprit la parole, le visage plus grave.
-Maintenant ... Nous allons vous demander de nous lever et d'observer une minute de silence, en mémoire de Zephan Finnigan.
Tout le monde se leva et l'atmosphère changea du tout au tout. Gethin laissa Adam le prendre dans ses bras, les yeux humides. Luke serra doucement les doigts de Lucy et elle lui servit un sourire crispé. Pendant un moment, personne ne parla, la tête baissée en signe de recueillement. Même les pleurs se faisaient silencieux. Puis, alors que la minute semblait s'être écoulée, Lucy entendit un « clac » qui lui fit relever la tête. Elle découvrit alors Louis, James et Roxanne, la baguette tendue délivrant étincelles jaunes et vertes. Les étincelles se rejoignirent à mi-hauteur de la grande salle pour former un immense farfadet qui s'anima, volant dans toute la salle pour jeter des pièces d'or de son chaudron. Avant de toucher le sol, les pièces devinrent des milliers d'étincelles dorées qui se déversèrent sur les élèves en deuil. Lucy n'essaya même pas d'époussetée les paillettes qui souillaient sa robe, les larmes aux yeux. Elle vit à peine Louis s'éloigner, immédiatement après avoir achevé son sortilège.
Un Farfadet.
Le plus bel hommage que les Mousquetaires pouvaient rendre à Zephan Finnigan.
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