Nero, le Chronaute (Scène)
"Nero-ci, Nero-ça... On dirait j'suis leur dealer attitré maintenant !?"
Dans un silence presque absolu, le jeune homme descendait la cage d'escalier en jurant copieusement. Autour de lui, ses pas ne produisaient aucun son, seules ses paroles résonnaient dans l'immeuble.
Il arriva devant la porte du hall. Le système de celle-ci était électrique. Il arriva et frappa dans la porte d'un coup de pied. Le coup ne produit aucun bruit. La porte ne trembla pas.
"Évidemment ! Pas de loquet mécanique ! Putain de soirée de merde !"
Il souffla un instant.
"Bon. Je dois avoir un quart de seconde, non ?"
Il appuya sur le bouton de la porte. Celui-ci resta enfoncé, même lorsque le jeune homme retourna face à la porte, la main sur la poignée.
Il ferma les yeux et sembla se concentrer un instant.
Bruit de frappe contre le bois.
Sonnerie aiguë.
Tapotements de pluie.
Il pousse la porte.
Tout s'arrête.
"J'espère que j'ai fait assez court."
Il sortit dehors. Une rue parisienne assez étroite et pluvieuse se dévoila à lui. Les passants étaient nombreux, les voitures qui s'embouteillaient devant le feu à quelques dizaines de mètres mêlaient la lueur de leurs phares laiteux aux oranges plus doux des lampadaires de la capitale.
"Merde. Il pleut."
Les gouttes étaient figées dans le ciel. Les voitures n'avançaient pas du tout, les passants demeuraient immobiles eux aussi, comme une horde pétrifiée. Et aucun son n'habitait la petite rue. Seul le bruit de sa respiration atteignait ses oreilles. Mais Nero ne semblait pas s'en soucier et commença à marcher dans la rue.
"Bon, grommela t-il. Direction la cité. J'avais bien dit que je ramenais la weed cette fois-ci..."
Le jeune homme continua à marcher nonchalamment dans la rue en évitant les passants immobiles. Les gouttes de pluie flottantes dans les airs vinrent se coller à sa chemise bleu clair.
"PUTAIN ! Tout ça parce que j'avais promis de pécho ce soir quoi ! Heureusement que ça me coûte rien à moi !"
Il s'arrêta sur la chaussée et souffla pour se calmer.
"C'est pas grave... On fera un crochet par la maison et je me changer-"
De l'autre côté de la rue, quelqu'un marchait. Une jeune femme en imperméable noir. Elle allait dans le sens opposé au sien et ne l'avait pas vu. Il pencha la tête et écarquilla des yeux incrédules. Elle traversa un groupe de passants figés et leva les yeux vers lui.
Leurs regards se croisèrent.
Elle s'arrêta.
Et dans une précipitation maladroite, se figea dans une position semblant vaguement être celle d'une statue entrain de marcher.
Nero était bouche bée.
"Non..." lâcha t-il à voix haute.
Il commença à traverser la rue et passa entre deux voitures.
"Nooon..."
Il arriva à peu près à la hauteur du groupe que la jeune femme venait de traverser.
"Mais nooon... Je le crois pas."
Devant lui, elle était là. En équilibre sur une jambe, elle était immobilisée. Mais pas comme les autres, Nero pouvait voir de légers tremblements musculaires. Il fit un pas vers elle et lui pointa son index.
"Tu as marché."
La jeune femme resta immobile.
"Tu as marché alors que j'ai arrêté le temps."
Elle maintint sa position sans bouger.
"Et maintenant tu essaies de me faire croire que j'ai rêvé."
Nero perçut un subtil mouvement de pupille de sa part.
"Sauf que je reconnais ton imper' noir. Et je vois tes yeux."
Elle ne répondit ni ne réagit pas.
"Tu sais que tu peux peut-être cacher tes mouvements mais tu as toujours besoin de respirer, hein ?"
Les yeux de la jeune femme s'écarquillèrent subrepticement. Nero approcha son oreille du visage de l'inconnue.
Il n'entendit rien.
Il afficha alors un sourire en coin.
Et resta ainsi pendant de longues secondes.
Comme lorsqu'il avait commencé sa marche, seul le son de sa propre respiration lui était perceptible.
Jusqu'au moment où un petit couinement grinça depuis la gorge de la jeune femme.
Le sourire espiègle de Nero s'agrandit alors et il de maintint ainsi encore un moment.
Un autre couinement retentit.
Puis deux autres.
Un dernier.
Puis elle expira brutalement.
Et reprit une bouffée d'air bruyante.
"OK ! OK ! J'ABANDONNE !" cria t-elle en levant les mains. "Ne me fais pas de mal, je t'en supplie !"
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