Chapitre douzième : Mère et fille


          Salutations ! Un nouveau chapitre, un ! C'est un chapitre assez court, mais important pour Aurélie et sa fille, elles vont se retrouver face à face après ce qui a été dit à l'hôpital ! Comment vous réagiriez si votre parent ou personne proche vous traite de monstre dans un moment très important de votre vie, où vous êtes perdus et qu'il s'agit de la seule bouée de sauvetage à laquelle vous auriez pu vous accrocher ? Fuiriez-vous comme notre protagoniste ? Ou affronterez-vous la personne comme dans ce chapitre ? Je vous souhaite une bonne lecture 📖


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     Après qu'Émeline eut fini de narrer ce qu'il s'était réellement passé dans la classe, Ariel resta bouche-bée. C'était encore pire que ce qu'elle avait pu s'imaginer. Matthieu était donc ami avec Raphaël, un garçon terroriste et sanguinaire. Impossible, ça ne lui correspondait pas du tout. Tout ce qu'elle pouvait retenir de tout ça était qu'elle ne ferait plus jamais confiance à la fille qui se tenait devant elle, que son ami avait été enlevé pour une raison encore mystérieuse et qu'elle se devait de la découvrir.

Emeline attendait une réaction de sa vis-à-vis en triturant ses doigts. Qu'est-ce qui allait se passer ? Elle avait tout raconté, ça l'avait libérée. Mais pour combien de temps ? Est-ce qu'Ariel la comprendrait et serait clémente ? Avec un peu de chance, oui. Si sa camarade venait à lui en vouloir et la rejeter, que fera-t-elle ? Elle n'était pas certaine de survivre en sachant qu'Ariel la haïssait. Après tout, elle agissait dans l'unique but de la protéger et de lui donner un environnement idéal.

_ Tu sais quoi ? commença son amie en se relevant. Va te faire foutre. Ne t'approche plus de moi, ni de Matthieu quand je le retrouverai. En fait, ne t'approche plus de personne. Je ne veux plus te voir dans mon champ de vision, devient invisible, disparait de cette Terre et là, peut-être, je te pardonnerai.

Ariel se dirigea sans plus de cérémonie vers le grillage, abandonnant son ancienne amie. Emeline la regardait, impuissante, partir loin d'elle. Des larmes noyèrent ses joues, et sa voix se brisa.

_Je suis désolée, tellement désolée, Ariel ! Je pensais agir pour le mieux, pour te protéger, je te le jure ! Ne t'en vas pas, j'en t'en supplie, reste avec moi ! On est amies, toi et moi ! Donne-moi une seconde chance, je te jure que je ferai tout pour toi, absolument tout !

Mais sa camarade n'en eut cure, elle passa la barrière sans même ralentir un instant, ignorant les suppliques de celles qu'elle avait autrefois pris sous son aile. Pourquoi agirait-elle autrement ? Ce qu'elle a fait était impardonnable. Elle avait mis en danger la vie de Matthieu en gardant le silence.

_ Ne m'abandonne pas... murmura Emeline, les yeux dans le vide et le cœur anéanti.

Ariel disparut derrière les buissons, la laissant seule face à la culpabilité déchirante. Les larmes affluèrent jusqu'à ce que la lune se reflète vivement dans le lac. Finalement, elle leva mollement son regard désespéré vers les cieux noirs. Elle y vit une étoile filante, ce qui la fit rire nerveusement. Sérieusement ? Elle était plus bas que terre, elle songeait à mettre fin à sa vie, prête à remplir ses poches de pierres, et voilà qu'elle voyait un météore comme dans les films. Et si la légende était vraie ? Et si en priant le firmament, on obtenait ce que l'on désirait ? Si l'aérolithe entendait son souhait le plus cher et, telle une lettre, rapportait ce dernier aux dieux ? De toute manière, avait-t-elle quelque chose à perdre ? Plus maintenant.

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Ariel descendit hâtivement les escaliers et se précipita dans la cuisine. Sa mère y cuisinait des lasagnes. Lorsqu'elle entendit les pas de sa fille, elle se tendit, redoutant le face à face que la plus jeune évitait depuis trois jours. Elle finit d'éparpiller le gruyère sur le dessus avant de pivoter vers la nouvelle venue qui humait l'odeur de sauce tomate avec de l'appétit dans les yeux.

_ Bonjour Ariel... commença-t-elle, la voix fébrile. J'étais inquiète, ça faisait tout de même trois jours que tu refusais de sortir de ton antre.

L'adolescente s'approcha d'elle sans la regarder. Elle attrapa une chaise en bois au passage et la positionna juste à ses côtés. Elle grimpa dessus afin d'attraper deux assiettes.

_ On se demande pourquoi, hein ? Le monstre qui se terre dans sa tanière, ça doit te rassurer pourtant, non ? Au moins, je ne fais de mal à personne, cracha-t-elle en descendant de son perchoir de manière adroite.

Elle qui avait mis trois jours à se calmer au sujet de cet événement, voilà qu'elle sentait la colère s'insinuer de nouveau en elle. Elle pensait avoir réussi à l'endiguer, mais elle se rendit compte que ça n'était qu'en surface. Elle ne pouvait pas simplement oublier que sa mère avait choisi le parti d'une menteuse, et encore moins qu'elle l'eut traitée de monstre. Son père ne l'aurait jamais fait, lui.

Des perles d'eau salée naquirent au coin des yeux d'Aurélie. Elle regrettait amèrement ses paroles. Ses mots avaient largement dépassé sa pensée et son coeur ce jour-là. Mais aucun retour en arrière ne pouvait être fait, il était trop tard, elle ne pouvait pas remonter le temps.

_ J'ai conscience que ce que je t'ai dit est tout bonnement inacceptable, et je m'excuse pour la énième fois. J'étais en colère et j'avais peur, mes émotions ont pris le dessus sur moi. Toi, tu t'en ai pris à Emeline, et moi à toi. Dans ton cas, c'était tout à fait légitime, mais pas dans le mien, je le sais.

A leur tour, les yeux de la jeune fille s'humidifièrent. Alors que sa mère ne dissimulait pas son mal-être, ça ne fut pas son cas. Elle fit en sorte de ne pas croiser le regard d'Aurélie et mit la table, usant de gestes brusques et puissants.

_ Pour être honnête, j'en ai rien à faire de te croiser ou non. Je faisais des recherches. Tu sais, pour Matthieu. Mon meilleur ami. Mon frère. Ton fils. Il a disparu. Et tu sais quoi ? Emeline, la fille que j'ai insultée, et bah figure toi qu'elle savait ça depuis qu'on a été attaqués. Fascinant, hein ? Oh, ça ne lui est pas venu à l'esprit de nous en faire part, histoire qu'il se fasse p't'être tuer. T'imagine, on retrouve son cadavre ? Tu t'en mordras les doigts d'avoir défendu cette salope. Ouais, c'est une vraie connasse, y'a pas à dire. Je sais même pas comment ça se fait que je ne l'ai pas encore butée.

L'air était tendu, sa mère ne savait plus quoi répondre ni faire pour briser le mur qu'elle avait elle-même construit entre elle. Elle ne voulait plus défendre Emeline. Après tout, elle ne la connaissait que très peu, et cacher une telle information... Certes, elle devait avoir ses raisons, et Matthieu aussi, mais c'était beaucoup trop important.

_ Écoute, Ariel, je sais que ce que je t'ai dit était vraiment méchant et idiot. C'est plutôt moi, le monstre, à t'avoir traité comme ça. Je t'ai tournée le dos au moment où tu avais le plus besoin de moi. Je n'ai, une nouvelle fois, pas su jouer mon rôle de mère et je te demande pardon. Encore. Je ne veux plus que ce genre de chose arrive et je ne défendrai plus ta camarade. Elle et Matthieu ont peut-être leurs raisons de nous avoir caché ça, mais s'ils nous l'avaient dit nous aurions pu agir.

L'adolescente écouta sa mère avec les bras croisés et les sourcils froncés. Aurélie lâcha ce qu'elle avait dans les mains et s'adossa à la table, se positionnant en face de ce qu'elle avait de plus cher au monde avant de reprendre d'une voix tremblante.

_ Je suis vraiment, vraiment désolée, sache-le. J'étais autant sous le choc que toi, Matthieu est comme un fils pour moi. Depuis qu'il est tout petit je prends soin de lui à la place de ses parents adoptifs. J'ai extériorisé mes émotions sur toi, je m'en veux vraiment. Je sais ce que tu fais de ton côté. Tu essaies de l'aider, d'avoir des indices. Mais je t'en prie, je ne veux pas te perdre, toi aussi ! sanglota la femme en prenant sa fille par les épaules. Ça fait trop mal, ton père a disparu, je ne supporterai pas qu'il t'arrive quelque chose ! Laisse faire la police, l'armée et tous ceux qui sont aptes à cette tâche, mais toi tu n'es qu'une adolescente qui vient de perdre toute sa classe ! Laisse-moi être présente pour toi, pense à autre chose, aucun de nous ne peut surmonter ça de son côté, seul.

Le ton désespéré de sa mère mit un coup de poignard dans le cœur d'Ariel qui l'imita alors, versant des larmes qui noyèrent ses joues rondelettes. Elle aussi s'était trop emportée, la seule coupable était Emeline, pas Aurélie. Elle ne pouvait pas s'en prendre à quelqu'un qui ne pouvait rien faire de toute manière. Seulement, ses mots lui avaient fait tellement de mal ! A l'avenir, elle essaiera d'effacer ce lugubre souvenir de sa mémoire pour ne pas entacher plus profondément sa relation avec sa mère. Ca sera difficile, elle le savait, mais elle fera des efforts.

_ C'est vraiment dur, je suis perdue sans lui ! Comment je suis sensée réagir ? Mon meilleur-ami, mon frère a disparu, enlevé par des monstres ! Je t'en prie, aide-moi ! geignit-elle en essuyant avec sa manche la morve qui commençait à couler.

Aurélie ne répondit rien. Elle n'en avait pas besoin, elle le savait. Elle serra simplement plus fort l'enfant qui se trouvait dans ses bras. Elles restèrent ainsi pendant de longues minutes, se calmant mutuellement. Lorsque leur respiration devint plus calme, la plus âgée proposa de finir de cuisiner un dessert ensemble et de manger tranquillement, comme elles le faisaient avant les horribles événements. Ariel acquiesça. Elle était morte de faim. Voilà trois jours qu'elle n'avait pas eu de véritable repas. Incapable de cuisiner et abhorrant l'idée de demander quelque chose à sa génitrice, elle s'était contentée de chips et des plats préparés achetés au supermarché. Elles dégustèrent leur lasagne, ce qui n'avait pas été le cas depuis longtemps, en discutant de tout. Elles éludèrent cependant les sujets fâcheux tels que Matthieu, l'école ou encore Émeline. Aucune d'elle ne voulait raviver la flamme de la colère ou du regret. La télévision, allumée par habitude pour combler le calme entre chaque bouchée, arrêta soudainement de diffuser la musique locale afin de laisser place aux informations d'urgence. Les deux Aubry se figèrent devant le titre.

ALERTE KIDNAPPING : Matthieu Klein, âgé de 17 ans, a disparu dans la nuit du 09/10/2026. Si vous l'avez vu, contactez-nous au numéro d'urgence XXXX. Des informations vous seront commu...

Aurélie coupa la télévision, laissant place à un lourd silence. Les deux avaient perdu le peu de gaieté qu'elles avaient réussi à rassembler. Matthieu n'était plus là. Reviendrait-il ? Ou était-il déjà trop tard ? Ariel, à cette pensée, ne put retenir un sanglot de franchir ses lèvres. S'il ne revenait pas, que ferait-elle ? Elle ne pouvait même pas envisager cette possibilité. Il reviendra. Elle le retrouvera. Et elle tuera tous ceux qui se mettront sur son passage.

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