Chapitre cinquième : L'interrogatoire
Un nouveau chapitre que j'ai eu un peu de mal à écrire, je l'admets ! Bonne lecture !
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_ Camarades, la mission qui nous a été confiée par le Boss est à moitié réussie, déclara calmement l'homme qui venait d'arriver. Seuls trois élèves ont, par ma faute, fui. J'assumerai entièrement cet échec, car l'un d'entre eux était notre cible.
L'homme marqua une pause pour observer les réactions des autres avant de reprendre la parole d'une voix autoritaire.
_ Que l'équipe trois brûle tout ce qui se trouve ici, je ne veux voir que des cendres. Les autres, vous pouvez rentrer.
Ce qui semblait être le chef attendit, face à tout le monde, que quelqu'un prenne la parole tout en caressant l'une des créatures qui s'était avancée. Comment cette scène pouvait-elle se passer devant leurs yeux ? Ce n'était pas une série ni un film. C'était la réalité. Ces hommes, ces monstres, avaient assassiné leurs amis. Des piles de cadavres devaient désormais s'entasser dans chaque pièce de leur école. Et eux aussi auraient dû être de la partie. À cette idée, Ariel frissonna.
_ Moi, j'ai une question, intervint un autre individu d'un ton sec en s'avançant vers le supérieur. Pourquoi les as-tu laissés partir ?
Un silence de plomb régna pendant quelques secondes. Apparemment, leur groupe n'était pas aussi uni que les adolescents le pensaient. Tous les terroristes entassés dans la cour étaient tendus, des groupes commençaient à se former en leur sein.
_ Je ne l'ai pas fait exprès, reprit celui qui commandait. La mission était de l...
_ Ne joue pas à ça avec moi, je t'ai vu parler à la cible. Elle était face à toi, t'avais des Inhumans, t'avais tout à disposition, même nous, l'accusa son vis-à-vis. Je l'ai même mise hors d'état de nuire !
L'assemblée soupira, chacun se mit à faire des messes basses avec son voisin. De tels conflits entre eux ne semblaient guère les surprendre, ils en étaient plutôt agacés.
_ Tu as ordonné à un Inhuman d'attaquer sans mon consentement, tu as blessé la cible volontairement, tu es toi aussi coupable de sa fuite, tu en es même la cause, Romain, déclara l'accusé d'un ton accusateur. La transporter ne serait qu'une gêne dans son état actuel. Qui plus est, elle a besoin de soins dans les plus brefs délais. Si nous l'avions emmenée, qui sait si elle s'en serait sortie. Je la laisse donc se faire soigner et, ensuite, nous la capturerons. Comme je l'ai dit, Romain, j'assumerai ma décision alors ne t'en fait pas, le Boss ne t'en tiendra pas rigueur. De toute manière, que ce soit moi ou un autre qui ait commis une erreur lors d'une mission, je reste le chef, c'est donc à moi de subir la sanction qui sera donnée.
Deux autres personnes se joignirent au meneur, le visage découvert. L'un était assez jeune, blond, les yeux pétillants, petit tandis que l'autre le dépassait de deux têtes, une aura posée se dégageait de lui, ses cheveux roux mi-longs dansant dans l'air.
_ Raph' a raison tu sais. Quoi qu'il arrive, le Boss ne porte attention qu'à lui. Toi, t'es qu'un cale-porte sur son passage. Je suis même pas sûr qu'il sache que t'existe ! se moqua ouvertement le blond en tirant vulgairement la langue.
_ Répètes un peu ça, enfoiré ! s'emporta Romain en se rapprochant de lui rapidement, les poings serrés.
Il leva son bras, prêt à frapper, mais il se fit arrêter par les créatures qui l'attrapèrent et le plaquèrent au sol avec leur queue. Ils allaient abattre leur masse sur lui lorsque le chef cria quelque chose qu'Ariel ne su décrypter. Les bêtes se stoppèrent alors pour aller se replacer à leur place initiale.
_ Ce n'était pas très malin de ta part de t'en prendre à lui devant nos protégés ! commenta l'homme roux en relevant celui à terre tandis que le chef entamait une marche vers la sortie, accompagné des autres.
_ Fermes ta gueule, Marc ! Mêle-toi de ton cul avant de l'ouvrir ! grogna l'intéressé en chassant les mains de son camarade.
Tous disparurent peu à peu de la cour B, passant par la A avec Romain qui marchait d'un pas énervé derrière les autres, sous leurs moqueries, mais aussi avec le soutien d'une minorité de personnes.
Matthieu sortit une plainte étouffée. Les filles décidèrent de ne pas s'attarder ici plus longtemps. Ils eurent beaucoup de mal à atteindre l'ancien bâtiment car l'état du blond s'était gravement empiré, cependant ils ne se firent pas repérer. Ils longèrent le bâtiment B jusqu'à la grille délimitant l'enceinte du lycée et passèrent par le trou, non sans accros pour l'adolescent.
À peine eurent-ils posé un pied en dehors des grilles qu'ils se firent menacer par des armes braquées sur eux.
_ Veuillez lever les mains au-dessus de vos têtes immédiatement et nous donner vos noms sans bouger de là où vous vous trouvez ! beugla un soldat en s'avançant légèrement.
_ Nous ne pouvons pas lever nos bras, nous soutenons un blessé ! hurla la brune d'une voix fébrile. Je suis Aubry Ariel, ma camarade est Briand Émeline et mon ami, Klein Matthieu !
_ Dans ce cas, nous allons demander à Madame Aubry de vous identifier, répondit-il rapidement.
Une lumière vive éblouit les trois survivants, puis une personne se jeta sur eux en criant leur nom et en pleurant. Les soldats baissèrent leur arme sur-le-champ et s'occupèrent des enfants un par un pour les mener à des ambulances. Après un examen rapide de l'état de santé de chacun, l'unijambiste et le blessé grave se firent escorter vers l'hôpital le plus proche pendant qu'Ariel, la seule jugée valide, se faisait interroger.
Un homme armé l'emmena, ainsi que sa mère qui était beaucoup trop inquiète pour la laisser seule, dans un car assez haut pour y rester debout aisément, aussi profond qu'un bus, peut-être même plus, et assez large pour trois personnes. À l'intérieur se trouvaient un bureau qui portait un ordinateur et quelques objets, une table et des chaises. Un soldat déjà présent pria la brune de s'asseoir.
_ Je suis le colonel Ernest Gareau, je suis désormais chargé de cette affaire, commença-t-il d'un ton doucereux. Tu es Ariel Aubry, c'est bien ça ?
La jeune fille confirma d'un signe de la tête. Elle n'était pas vraiment consciente d'être sortie de cet enfer, elle ne réalisait pas qu'elle était désormais en sécurité auprès de sa mère. Tout ce à quoi elle pensait se résumait à Matthieu et les terroristes. Elle était certaine que la cible dont ils parlaient était son meilleur ami. Mais qu'est-ce qu'ils lui voulaient ? Pourquoi avoir tué tout le monde ? Ces monstres, d'où venaient-ils ? Et Matthieu avait-il su ce qui allait se passer ? Aurait-il pu éviter tout ça ? Incapable de sortir ses interrogations et ses peurs de la tête, Ariel souhaitait plus que tout se rendre à l'hôpital pour s'assurer que ses amis se portaient bien. Mais avant cela, elle devait répondre au colonel. Décidée à en finir rapidement avec cet interrogatoire, elle se concentra sur la voix rauque de l'homme.
_ Enchanté, Ariel. Je sais qu'après ce que tu viens de vivre tu souhaites t'éloigner d'ici au plus vite, mais je dois te poser certaines questions primordiales pour que nous comprenions ce qui s'est passé. D'accord ? lui demanda-t-il gentiment.
Une barbe grise entourait sa mâchoire carrée, accompagnée de cheveux hérissés sur la tête. Comme un hérisson. Comme les pics dans le dos des monstres... songea la jeune fille, un long frisson parcourant son corps. Cet homme dégageait une autorité naturelle, il s'agissait du chef ici, et cela se percevait sans peine. Malgré cette aura impressionnante, la mère d'Ariel se sentait rassurée auprès de lui. Il était compatissant, tentait d'être le moins brutal possible et les accueillait chaleureusement dans ce qui lui servait de bureau. Il s'agissait d'un homme fiable ; après tout, il était soldat ! Mais sa fille n'était pas en accord avec cette idée, elle se méfiait. Peut-être était-ce dû au traumatisme qu'elle venait de vivre, aux cheveux hérissés qui lui rappelaient sans cesse ces horribles créatures ou, peut-être, n'était-ce que la personne elle-même. Elle n'aurait su le dire, et elle s'en moquait. Une nouvelle fois, elle acquiesça.
_ Merci de ta coopération, la Nation t'en est reconnaissante, déclara-t-il solennellement.
Madame Aubry lâcha un énorme sourire, fière de sa fille qui allait aider sa patrie malgré ce qu'elle venait de vivre, mais aussi charmée par le charisme du colonel. Bien qu'au départ elle ait refusé que la brune soit interrogée après avoir vécu une telle horreur, elle ne le regrettait pas. Elle savait très bien que sa fille cachait ses émotions en ce moment même, qu'elle était gravement touchée mentalement par cette histoire, cependant l'empêcher d'être forte devant d'autres personnes ne ferait qu'empirer les choses, elle se replierait sur elle-même. Alors, elle préférait la laisser faire, après tout, c'était la brune qui avait accepté d'aider les soldats.
De son côté, Ariel fit une grimace à l'entente de ces mots. La Nation ? Sérieusement ? Il pouvait très bien éviter toutes ces fioritures, elle n'avait pas que ça à faire, d'être prise pour une enfant de six ans. Voyant que son interlocutrice n'était pas satisfaite des paroles de coutumes, il reprit la parole d'un ton plus grave.
_ La première chose que j'aimerais savoir est si vous êtes les seuls survivants ?
La jeune fille déglutit difficilement.
_ J-Je ne sais pas vraiment... Je crois... murmura Ariel, les yeux baissés.
Elle ferma les yeux un instant, se rappelant ce que le chef des terroristes avait indiqué à ses collègues. Elle serra les dents pour retenir ses larmes et inspira profondément. Une légère odeur métallique provenant de ses vêtements s'inséra dans ses narines pour lui rappeler ce qu'elle venait de vivre. Elle se corrigea, la voix remplie de colère.
_ En fait, si, je sais. Nous ne sommes que trois putains de survivants. Le taré qui les dirigeait l'a dit lui-même, et il parlait de nous. Ils les ont tous tués, Marco, Da Silva, et même le surveillant, Normand ! Tous, ils sont tous morts !
Ernest acquiesça de la tête d'un air désolé et nota la réponse. Madame Aubry posa ses mains sur les épaules de sa fille, abattue par ce qu'elle venait d'entendre. Comment pourrait-elle l'aider dans une telle situation ? Elle commençait à avoir peur. Peur de ne pas savoir comment tenir son rôle de mère.
_ Merci de ta réponse, Ariel. Je sais que c'est difficile de devoir te remémorer tout ça, mais dis-toi que c'est un mal nécessaire.
La brune ne fit aucun geste, trop concentrée à ne pas laisser ses larmes de haine et de terreur envahir ses joues. Elle devait désormais être forte. Elle n'avait pas su l'être au moment le plus important, elle aurait pu mourir dans cette classe par sa faiblesse. Elle avait toujours fait en sorte qu'on la prenne pour quelqu'un de fiable, robuste, jusqu'à elle-même y croire. Mais ce qui s'était passé l'avait fait revenir dans la réalité. Elle n'était qu'une pleurnicheuse, une effarouchée, une menteuse, une lâche. Elle n'était rien de ce qu'elle prétendait. Alors qu'Ariel se perdait dans ses préoccupations, la voix grave du colonel Gareau la fit sursauter.
_ Peux-tu me dire de quelle manière vous vous êtes échappés ?
Cette question la fit ruminer. En quoi cette question était-elle urgente ?!
_ Par un miracle accordé par les dieux ? ironisa faussement la jeune fille.
L'air, tendu, se fit plus lourd. Un silence s'installa rapidement. Bien qu'elle ne voulait qu'une seule chose, sortir d'ici, Ariel n'oubliait pas qu'elle avait elle-même accepté de répondre aux questions.
_ Il n'y avait que deux sorties normales possibles, reprit-elle posément, le regard vide. La porte par laquelle on était entrés, comme des élèves normaux quoi. Et puis ils ont fait un énorme trou dans le mur. Mais les deux possibilités étaient gardées par les monstres. On pouvait pas y passer sans se faire dévorer. Il suffit de voir comment certains ont fini en tentant de le faire... souffla-t-elle, le cœur battant dans ses tempes.
Elle s'arrêta un instant afin de se calmer et d'éclaircir ses idées qui se faisaient envahir par les souvenirs du cauchemar.
_ On était au deuxième étage, on n'aurait jamais pu sauter sans y laisser notre peau. Mais Matthieu est intelligent, courageux, et tout ce que vous voulez. Il y a une gouttière qui passe près de deux fenêtres. On est descendus par là. C'était son idée. Il nous a sauvées, Émeline et moi.
Une nouvelle fois, Ernest parut satisfait de la réponse et la prit en note sous le regard chamboulé d'Aurélie Aubry qui serra ses mains plus fortement. En attendant sa fille, elle prit conscience du miracle auquel elle faisait face. Ariel était en vie. Malheureusement, peu pourront se réjouir de ce fait car peu recevront de bonnes nouvelles aujourd'hui. Mais elle ne pouvait s'empêcher d'être rassurée de pouvoir entendre, voir et sentir celle qu'elle avait portée dans son ventre. Elle n'aurait pas supporté de la perdre, elle aussi.
_ Ton ami, Matthieu Klein, a été salement blessé. Nous n'avons pas pu lui poser de questions quant à son état au vu de l'urgence de soin dont il avait besoin. Pour Émeline Briand, l'un de mes collègues s'est chargé de l'interrogée puisqu'elle était en état de l'être, constata-t-il en lisant ses fiches, les sourcils froncés. De ce fait, peux-tu m'expliquer la manière dont il a été blessé ? Était-ce durant l'attaque ou durant la fuite ?
_ Franchement, je sais pas, mais j'aimerais moi aussi avoir des réponses... marmonna l'adolescente, se perdant de nouveau dans ses pensées.
Ernest et Aurélie la regardèrent, étonnés par cette révélation.
_ Comment ça ? Vous n'étiez pas ensemble durant tout le... processus ? hésita-t-il, incertain de la manière dont il devait nommer l'attaque devant la jeune fille.
Ariel lorgna l'homme devant elle, l'analysant. Elle ne l'aimait pas, c'en était certain. Elle l'avait senti, ce ton accusateur. Elle était tellement frustrée d'être là, sur une chaise, à répondre à des questions qui pouvaient attendre à la place d'être au chevet des ses amis. Et, en plus de ça, voilà qu'on allait lui reprocher son comportement ! Oui, elle avait été lâche, mais elle n'avait rien demandé après tout ! Elle s'en voulait bien assez comme ça, elle n'avait pas besoin qu'un inconnu descende de son piédestal pour la juger !
_ Non, moi j'étais déjà descendue, répondit-elle d'une voix irritée. Ça pose un problème ? Et puis vous n'aurez qu'à poser vos questions à Émeline, elle était là, elle.
Ernest, face à cet élan, toussota, gêné, en regardant Aurélie. Cette dernière détourna les yeux, dans le même état.
_ Excuse-moi, Ariel, je ne voulais pas être offensant, ça n'était pas un reproche, dit-il pour essayer de calmer les choses. Il ne me reste que deux questions, ensuite tu pourras te diriger vers l'hôpital. Ça te va ?
Ariel ronchonna comme une enfant, les bras croisés sur la poitrine.
_ Tu m'as parlé d'un chef, de créatures et de terroristes. Peux-tu m'en dire plus ? demanda-t-il le plus doucereusement possible.
La voix mielleuse de son interlocuteur et sa question firent contracter les muscles d'Ariel dans tout le corps.
_ Ce que je sais, commença-t-elle vivement, la voix courroucée et les poings serrés, c'est qu'ils utilisent des putains de monstres pour tuer des ados qui n'ont rien demandé ! Et leur chef, il obéissait à un autre enfoiré de chef, appelé, avec beaucoup d'originalité, « Boss ». Et puis, ils ne s'entendent pas tous, c'est tout ce que je sais. C'est quoi, la dernière question ?
Malgré la haine qui envahissait ses pensées et son corps, Ariel ne se laissa pas domptée par ses émotions. Du moins, pas entièrement. Elle avait omis volontairement certains passages comme la discussion sur « la cible » qu'elle avait entendue. Elle devait savoir ce qu'il en était avant d'en parler. Si ça concernait Matthieu, elle était prête à cacher des choses à sa « nation ». Dire quoi que ce soit, c'était le mettre en danger. Et elle ne faisait pas confiance au Colonel Ernest Gareau.
Face à l'adolescente remontée, le soldat décida de ne pas poser sa dernière question, jugeant qu'elle n'était pas nécessaire. Il remercia madame Aubry et sa fille avant de leur donner la permission de partir. C'est avec hâte qu'elles sortirent du camion blindé en direction de l'hôpital. Ariel appréhendait leur arrivée autant qu'elle l'attendait. Elle allait avoir des réponses. Elle allait savoir ce qui s'était passé, comment Matthieu s'était blessé et quel lien il entretenait avec cette affaire.
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