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Déverrouillage de la route Pierrot Blanc
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Début de l'histoire « Pierrot Blanc »

*****

Dans une bibliothèque, une femme aux cheveux courts et aux yeux vairons s'occupait d'archiver une nouvelle arrivée de livres venant de tout le multivers. C'était l'un des rares établissements à conserver encore des écrits. Le travail de la bibliothécaire s'interrompit avec l'arrivée d'enfants de différents âges, hybrides, humains ou monstres. Elle se dirigea avec eux dans une pièce un peu plus isolée, accompagnée d'un livre plutôt ancien. Aujourd'hui, comme tous les vendredis, elle allait leur conter une histoire.

Émilie avait décidé qu'elle raconterait « Pierrot Blanc ». Son histoire était trop peu connue à son goût alors elle cherchait à la faire connaître chez les futures générations.

« Dans un monde des temps anciens, où vivaient encore les créatures les plus mystiques telles que les dragons, les vampires ou les loups-garous, se trouvait un village. Un village peuplé de mortels qui jouissaient de tout les bienfaits de leur époque.

Les récoltes se faisaient chaque année plus riches. Les enfants avaient appris plus ou moins de connaissances dans une école improvisée par le vieil homme du moulin, un ancien soldat ayant eu la chance d'accéder à l'instruction. Les gardes étaient entraînés contre tout danger et possédaient même parmi eux des chasseurs de vampires.

Car oui, dans ce beau paysage, un conflit persistait entre l'autre race et les mortels. Mais malgré leur vigilance, on retrouvait, parfois, un corps laissé pour mort et vidé de son sang, l'être sanguinaire ne s'étant pas rassasié avec les animaux de la forêt.

Heureusement, pour calmer les peines et soulager la conscience du village, Pierrot Blanc venait. Un personnage vêtu de blanc des pieds à la tête et dont l'identité réelle restait inconnue, par son masque et son silence, s'était un jour rendu dans la ville comme si de rien n'était. Avec ses longs cheveux, les gens se mirent en tête qu'ils avaient affaire à une femme même si « elle » ne le dirait jamais.

Au moins une fois par semaine, « elle » se rendait au village et leur contait une histoire farfelue. Les enfants aimaient cet esprit si créatif qui inventait des objets inconnus comme l'engin permettant de parler à distance instantanément. Les adultes se perdaient dans la voix envoûtante du personnage qui racontait si bien son histoire et vivaient pleinement ce que Pierrot Blanc disait. Ils appréciaient particulièrement qu'il y ait une morale à chaque fois.

Mais ils ne formaient qu'une minorité. La plupart ne l'aimaient pas sauf les enfants. Ils trouvaient ces récits souvent bien trop déplacés et inappropriés pour les plus jeunes. Mais Pierrot Blanc n'en avait que faire. « Elle » partait comme « elle » venait sans demander son reste et sans vouloir apprendre quoi que ce soit sur la ville.

Sa première apparition en avait apeuré plus d'un à cause de son apparence mystérieuse. Aussi bien chez les mortels que chez les vampires.

En effet, la nuit, « elle » se rendait dans un autre village caché au tréfonds de la forêt pour que toute personne non désirée ne puisse y parvenir. Pierrot Blanc était l'exception à la règle.

Ce peuple vampirique vivait de façon plutôt pacifiste et pouvait même cohabiter avec des mortels, culture devenue plus répandue avec l'union d'un monstre et du roi vampire. Ces personnes avaient souvent une plus grande ouverture d'esprit et comprenaient que les immortels ne pouvaient vivre sans boire de sang. Ils réussissaient même à trouver des arrangements entre eux afin de faire durer la paix.

Ils se nourrissaient globalement avec les animaux de la forêt ou bien d'une portion sanguine d'un mortel consentant. Malheureusement, ils se trouvaient parfois obligés de céder à leurs pulsions meurtrières s'ils ne buvaient pas assez de cette substance.

Avec les siècles de vie de chacun, les vampires avaient acquis un grand savoir et une compréhension du monde supérieure à leur époque. L'école était donc des plus enrichissantes bien que non obligatoire car les enfants s'entraînaient la plupart du temps à devenir un grand et fort vampire. Pour pouvoir se défendre contre les mortels, il fallait savoir se battre et utiliser ses pouvoirs. On leur apprenait donc dès leur plus jeune âge.

Pierrot Blanc s'était étonné de l'avancée de ce peuple tout comme eux l'étaient de voir cette personne dans leur village. Ils se méfièrent grandement du personnage et ce pendant des années. Mais Pierrot Blanc ignorait ces regards et jouait avec les enfants, les faisant sourire de toutes leurs dents.

Contrairement au village des mortels, on voyait Pierrot Blanc comme un homme. Certes ce n'était sans doute qu'un surnom mais alors pourquoi utiliser un nom masculin dans ce cas ?

Malheureusement, Pierrot Blanc ne restait jamais bien longtemps. Juste le temps pour « lui » de raconter une ou deux histoires et jouer au « chasseur chassé par le vampire » avant de disparaître.

Finalement, après un peu plus de 20 ans, Pierrot Blanc disparut sans laisser de traces. Du jour au lendemain, « elle » ne vint plus au village des mortels et « il » ne se fit plus voir chez les vampires. Son départ n'engendra que plus de questions à son égard, faisant tout doucement naître le mystère de Pierrot Blanc. »

- Mais du coup Pierrot Blanc, c'est une fille ou un garçon ? demanda un petit garçon plus que perdu avec cette histoire.

- Eh bien tout ça reste un mystère, répondit la bibliothécaire.

Les enfants voulaient tous poser des questions mais l'horloge qui sonna ne leur en laissa pas le temps et ils durent partir, redonnant le calme au bâtiment.

La jeune femme retourna à son tri des archives avant de tomber sur un livre qu'elle s'empressa de feuilleter. Après un rapide coup d'œil, elle décida d'aller derrière son comptoir où se trouvaient déjà des tas de livres et de feuilles.

- On dirait que tu vas pouvoir compléter ma collection, songea-t-elle.

Elle se dirigea vers son comptoir où se trouvait déjà une belle pile de livres tous plus ou moins récents. Le premier ouvrage avait comme titre « Timelines et univers ».

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« Voyageur universel : personne travaillant dans le bon fonctionnement des univers et ayant la capacité d'aller d'une timeline à l'autre.

Je trouvais important de mettre en place cette définition avant de commencer, étant moi-même un voyageur. Je les ai longtemps étudiées et je pense maintenant pouvoir retranscrire ce que je sais.

Beaucoup de choses ont pu être découvertes, surtout grâce à l'arrivée des âmes uniques qui nous ont permis de nombreuses avancées. L'une des plus connues est celle de Thomas Skeleton, l'un des premiers voyageurs, qui a énormément contribué au contact entre les voyageurs universels afin de partager notre savoir entre tous.

Grâce à cela, nous avons pu émettre plusieurs hypothèses sur l'existence des mondes bien qu'il y en ait une qui persiste plus que les autres. Toutes les timelines se ressemblent au moins par un détail et réunies toutes ensemble nous sommes arrivés à une qui semble être l'originel. Nous l'avons nommé Undertale timeline n°1. Si j'en restais là, ce serait extrêmement simple mais je vais essayer de schématiser le reste.

Imaginons, qu'à la base, il n'y ait qu'un univers représenté par un cercle. Mais dans son histoire, il y a un simple détail qui change ce qui devient une nouvelle timeline représentée cette fois-ci par un carré qui va dans le cercle. Il va y avoir de plus en plus de détails changeant qui vont apparaître et les quadrilatères vont se multiplier. Petit à petit, à force que chaque carré ait une différence, il y en a un qui finit par dévier de son histoire de base. Alors, ce petit carré quitte son cercle pour en créer un nouveau et devenir la première timeline de l'univers. Ce phénomène va se répéter à l'infini et ainsi de suite jusqu'à l'apparition de milliers de cercles.

Nous, les voyageurs universels, essayons de différencier ces carrés et de savoir à quel cercle ils appartiennent. Aujourd'hui encore, il nous arrive de les reclasser. Le dernier dossier que j'ai dû traiter parlait de la timeline n°2341 d'Undertale. Son histoire y est tellement différente à l'originel que je pense que ce n'est plus une simple timeline mais un nouveau monde. »

La bibliothécaire se souvenait de cet ouvrage. Elle avait pris un certain temps avant d'en comprendre la totalité mais maintenant elle arrivait beaucoup mieux à assimiler les informations des différents documents. Ça la faisait souvent rire de voir sa timeline énoncée dans le livre.

Elle ouvrit le livret trouvé plus tôt et commença sa lecture. Elle remarqua rapidement que celui-ci contenait toutes les informations qu'elle avait déjà réunies voir plus.

« Pierrot Blanc, ce personnage mystérieux. On pense que ce n'est qu'une légende mais tout voyageur universel sait qu'elle existe. C'est d'ailleurs car ce sont les voyageurs qui la connaissent qu'il y a si peu de livres à son sujet ou bien des contes. On va tout prendre point par point. Nous l'appellerons P.B pour plus de facilité.

1. Pierrot Blanc existe. Dans l'ordre des choses, une légende, un conte se trouve dans tous les mondes car ça n'existe pas. Or, avec nos recherches, nous savons que sa « légende » n'est présente que dans quelques timelines sans rapport en commun.

2. Plus tôt, j'ai pu écrire qu'ELLE existait. Bien qu'on dit souvent ne pas connaître son genre, ce n'est que pour faire perdurer son mystère. Les gens l'ayant personnellement connue affirment avoir eu affaire à une fille et un texte nous le prouve mais nous reviendrons sur tout ça plus tard.

3. Pierrot Blanc serait allée, au maximum, dans 10 timelines de 10 univers différents. Certains ne sont pas encore classés mais seuls quatre d'entre eux nous donnent des informations importantes. Elle voyagerait également à travers le temps, allant d'un futur proche à un passé oublié.

4. P.B est souvent vu comme un personnage jouant et s'amusant tout le temps pourtant certains ont raison de s'en méfier. Nous avons trouvé un journal dans l'univers que nous avons nommé Fellust. Un monde où viols et trafics sont choses communes. Voici l'extrait :

« Je me souviens avoir vu du sang, de la poussière, le lieu détruit de toute part. Certes notre monde n'est pas des plus innocents, on est habitué à voir des cadavres par-ci, par-là mais jamais de cette ampleur juste à cause d'une seule personne. Il devait y avoir une cinquantaine d'humains et peut-être tout autant de monstres, difficile à dire au vu de toute la poussière présente. Si j'ai survécu, c'est parce que je n'ai pas vu son visage. Je m'étais caché dans l'épicerie et je regardais par la vitrine. C'était une femme et ça tout le monde dans notre monde pouvait le savoir. Elle se trouvait dos à moi avec une tenue de ville qui couvrait son corps comme rares on en voyait par ici et ses menottes brisées. Elle s'est baissée pour ramasser quelque chose et quand elle s'est relevée, j'ai senti mon souffle se couper. Elle se retournait, je suis persuadé qu'elle fixait dans ma direction, elle m'avait vu. Elle, avec son masque blanc aux drôles de motifs noirs. Elle a continué de me regarder avant de me tourner le dos et de partir, ne laissant que la mort derrière elle.

Plus tard, j'ai appris que d'autres avaient survécu mais aucun n'avait vu son visage. Parfois, je la vois entre deux rues avec le même accoutrement mais jamais très longtemps. Beaucoup de rumeurs courent sur elle. Nous ne savions pas comment l'appeler. Après tout nous n'allions pas tout le temps dire « celle qui porte un masque et qui a fait un massacre ». Non. Alors des noms ont commencé à circuler mais celui qui est le plus souvent revenu est « Pierrot Blanc ». C'est logique aussi avec ces cheveux et ce masque. Ça fait quinze ans maintenant et depuis quelques jours plus personne ne la voit et je dois dire que tout le monde est rassuré, bien qu'elle n'ait plus rien fait après sa tuerie. Elle inspirait la peur et j'espère vraiment ne jamais recroiser cette personne. »

Ce texte nous prouve que P.B est une femme. Il n'y a aucun doute qu'elle soit à l'origine de ce massacre. On pense d'ailleurs que c'est sa timeline d'origine car elle n'a pas encore la tenue mais seulement le masque. Là encore, rien n'est sûr car elle pourrait très bien avoir été dans d'autres mondes sans cette identité. Elle aurait également utilisé le surnom donné par les civils pour les autres univers. Mais le fait qu'on ne sache pas le lieu du massacre reste un frein pour mieux connaître le personnage.

5. Au fur et à mesure, nous avons pu remarquer son comportement changer d'un univers à l'autre. Un jour, un jeune voyageur, qui n'avait pas encore vraiment compris qu'il ne fallait pas parler aux personnes des timelines, au risque de modifier l'histoire, lui a demandé la raison. Elle aurait seulement répondu que c'était pour s'amuser, sans même être étonnée de la présence de cet être semblant savoir qu'elle allait d'un monde à l'autre. Comme si elle connaissait les voyageurs.

6. Dans chaque timeline, seule une personne, ou plus selon l'environnement, connaît l'existence des voyageurs afin de collaborer pour le bien de leur monde. C'est grâce à ça que nous avons pu en savoir plus sur P.B. C'est dans l'un d'eux, un endroit habité par monstres, humains, vampires et autres créatures mythiques appelé vampirvers, que nous avons su quelque chose d'étonnant. C'est d'ailleurs ce monde qu'on retrouve le plus souvent des contes sur Pierrot Blanc. Le roi des vampires, un grand pacifiste dans l'âme, a accepté de nous révéler que P.B travaillait à son service pendant toute la durée de son séjour. Apparemment, elle lui vouait son entière gratitude mais il a refusé de nous en dire plus, par respect envers P.B.

7. Une timeline de Dreamtale. Très peu de voyageurs universels s'y rendent encore. Ce monde s'est vu plongé dans la négativité par un de ses habitants, un squelette corrompu entièrement fait de mucus noir du nom de Nightmare. Il a ramené d'autres squelettes d'autres mondes afin de faire régner le mal. Un certain Thomas Skeleton s'y serait rendu en infiltration, voici son rapport : »

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Aller vers la passé

Le bruit d'une téléportation retentit dans le centre des voyageurs universels.

- Thomas, tu es revenu ! se réjouit la petite sœur de celui-ci.

Émi était maintenant une belle adolescente attirant les regards et suivait les traces de son frère. Elle effectuait son stage dans le centre et accompagnait toujours le savant mais cette fois-ci, le monde était trop dangereux pour elle. Le voir revenir la soulageait au plus haut point.

Son supérieur l'invita à le rejoindre dans son bureau pour son rapport. Il s'y rendit avec sa sœur.

- Alors, comment se porte la timeline ?

- Elle suit son histoire normalement même avec la présence de Pierrot Blanc.

- Quoi ? s'étonnèrent les deux autres.

Thomas avait dit ça comme si c'était une évidence. Cette réaction était normale pour Émi mais pas le sujet.

- Je veux savoir exactement ce qui s'est passé, ordonna l'homme haut gradé.

- Elle était avec le squelette de l'univers Dustale à regarder le ciel. Ils parlaient d'un peu de tout même si l'autre regardait à certains moments à côté de lui, comme s'il parlait à quelqu'un d'autre.

- Ils parlaient de quoi exactement ? insista-t-il.

- De sujets divers. Les missions qu'ils doivent effectuer, leur vie d'avant, le frère du squelette, sa fille, les combats...

- La fille de qui ? interrompit soudain l'homme une nouvelle fois.

- De Pierrot Blanc. Elle disait espérer la revoir bientôt parce que voyager entre les mondes contre son gré ça va deux minutes. Je sais pas si elle disait ça de façon triste ou blagueuse avec l'expression de son visage.

Il y eut un long silence. Un silence où le supérieur assimilait un à un ces mots.

- Vous... vous voulez dire que vous avez vu son visage ?

Thomas hocha la tête faisant pâlir les deux autres devant cette révélation. Leurs yeux quémandaient une réponse. Qui était Pierrot Blanc ? La description pouvait en dire long. À la place, il laissa paraître un sourire amusé et rempli de nostalgie.

- J'avais une sœur qui adorait le mystère autour de Pierrot Blanc. Et je suis de son avis pour le conserver.

Retour vers le futur

La bibliothécaire s'étira un instant avant de reprendre sa lecture. Elle apprenait plein de choses intéressantes sur le personnage.

« 8. Un dernier détail chez Pierrot Blanc pose des questions. Ses menottes. Là-dessus sont apparues plusieurs théories. Sont-elles en rapport avec ce fameux lieu de Fellust ? Est-ce une ancienne criminelle qui se serait enfuie ? Est-ce une sorte de signe qui signifie qu'elle n'est pas encore libre d'arrêter ses déplacements entre les mondes ? C'est dans le dernier monde où elle serait apparue que cet élément est revenu. Un monde pas encore classé mais qui n'a aucun monstre, seuls des humains modifiés génétiquement qui sont utilisés pour le cirque. On peut dire que P.B avait bien sa place en tant que clown.

D'après ce qu'on y a appris, elle aimait faire peur à ceux profitant de leur privilège tandis qu'elle s'amusait avec les plus malheureux. Cependant, si on touchait ne serait-ce que la chaîne de ses menottes, elle rentrait dans une colère noire et envoyait balader le malheureux. Ensuite elle les lavait entièrement en répétant qu'elles ne devaient pas être souillées. On peut donc penser qu'elles ont une valeur plus précieuse pour elle. Sans doute appartenaient-elles à quelqu'un d'important ?

10. Dans tous les mondes visités où elle se serait rendue, Pierrot Blanc restait environ vingt ans. Sachant qu'elle aurait été dans dix timelines au maximum, comme dit plus tôt, ça lui fait deux-cent ans de voyage. Même chez un monstre, cette longévité est impossible sauf pour les êtres immortels. Donc soit Pierrot Blanc est immortelle soit il s'agit d'un fantôme errant entre l'espace et le temps.

Ce sont les dernières informations que nous ayons pu récolter ensuite elle aurait définitivement disparu après ce monde de cirque. Finalement, Pierrot Blanc garde énormément de mystères qui ne seront sans doute jamais résolus. »

- Émilie ?

L'interpellée quitta sa lecture sur ce personnage légendaire pour se tourner vers une jeune femme aux longs cheveux coiffés en tresses. La prise de sa main gauche sur son poignet droit se fit plus légère. Depuis quand la tenait-elle d'ailleurs ?

- Camille ? s'étonna celle aux yeux vairons.

- Tu travailles, ricana-t-elle en prenant la paperasse présente sur le comptoir.

- Je sais mais il n'y a personne.

- Si. Moi, rétorqua-t-elle avant d'embrasser Émilie.

- En effet, ma cliente la plus dévouée. Il est quelle heure ?

- L'heure de rentrer.

- Déjà ?

- Trop concentrée, hein ? se moqua gentiment son amante.

Elle rougit de gêne avant de se lever et de partir tout en fermant l'établissement. Cependant, elle ne vit pas les papiers qui tombaient de la dernière page du journal lu plus tôt. La jeune femme n'avait pas eu le temps de lire les dernières pages, là où se trouvaient précédemment les écrits, pliés en quatre.

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La dernière page semblait être écrite par quelqu'un d'autre. Elle y expliquait avoir trouvé une lettre sur l'un des lieux où s'était rendue Pierrot Blanc dans le dernier monde.

« Je me souviens qu'Astrid m'avait conseillé d'écrire pour me soulager alors je vais essayer. Traverser les mondes devient une torture. Je rencontre toujours énormément de personnes et je m'attache malgré moi à chacune d'entre elle alors que je sais que je leur dirai adieu après que le temps imparti ne se soit écoulé. C'est un crève-cœur. Et quand j'essaye de m'éloigner c'est eux qui s'approchent. Mais bon. C'est bientôt terminé. Si Reaper / Death (j'adore l'appeler par ses deux noms, il ne supporte pas) dit vrai, dans 5 ans c'est terminé et je pourrais retourner dans son domaine.

Stupides humains. C'est bien à cause d'eux que je suis bloquée. Me séparer de mon incarnation juste pour leur expérience. Les crétins. Je pouvais avoir mon incarnation normalement et vivre ainsi comme tout le monde mais non ! Mais bon, on ne les changera jamais. L'Homme a toujours été égoïste, cherchant encore à découvrir. Il est avide de savoir, de comprendre.

En devenant Pierrot Blanc, je voulais les frustrer, leur laisser un personnage imprécis qu'on ne comprenait pas et en profiter pour qu'enfin chacun accepte les autres, son monde tel qu'il est. Comme cherchait à le faire Astrid. Finalement ce jeu commence à me lasser et puis j'ai bien compris que le bonheur et la compréhension ne sont pas toujours possibles, je l'ai bien vu en visitant chaque monde. Et c'est en rencontrant Nightmare que je l'ai compris.

La colère. Tout le monde est habité par la colère mais tout le monde la traite différemment. On la transforme en rage, mépris, haine, dégoût. Le plus souvent on canalise cette colère sur un seul être afin que tout le monde reste en harmonie. On la canalise sur la différence. Ça a d'abord été sur les vampires avec comme excuse leur soif de sang et quand ils ont disparu, ça a été au tour des autres créatures légendaires de disparaître à cause de leur colère transformée en haine. Et une fois qu'il ne resta que les humains et les monstres, ce fut à leur tour de se faire la guerre. Les perdants transformèrent cette rage en mélancolie, qui compensa, alors que les gagnants cherchèrent une nouvelle source pour rejeter leur colère. Alors ils utilisent n'importe quelle différence. Physique, mentale, religieuse. Toute occasion est bonne. D'autres comprennent que l'harmonie ne s'obtient pas de cette façon mais qu'il suffit de laisser ses sentiments négatifs s'écouler sur le moment et ainsi tout se passe bien. Et ils se fichent des différences.

J'en ris. Dire que si on ne m'avait pas ramenée d'entre les morts pour faire de moi une sorte de fantôme, je ne l'aurais jamais compris.

L'égoïsme de l'Homme apporte du malheur mais finalement ça a peut-être du bon au vu de tout ce que j'ai pu comprendre durant toutes ces décennies.

Oui. Astrid avait raison, ça fait du bien. J'ai hâte de la revoir. Que je puisse la présenter à ma fille. Ma belle cantatrice. Je ne sais pas pourquoi tu faisais partie de ce monde mais j'ai été heureuse de te rencontrer malgré ce qu'il s'est passé. Tu étais un ange. Ces cinq dernières années vont être longues. »

Vous sentez une profonde tristesse émaner de ces dernières lignes.
Savoir que cette personne est enfin en paix,
cela vous emplit de détermination.